WASHINGTON : L'économie mondiale est prise dans une tempête de chocs et d'incertitudes, alors qu'elle tentait de se relever de la Covid-19, selon le FMI, qui a révisé mardi en baisse ses prévisions de croissance et alerte sur les nombreux risques en vue.
"L'économie mondiale, encore sous le choc de la pandémie et de l'invasion russe de l'Ukraine, fait face à des perspectives de plus en plus sombres et incertaines", observe l'économiste en chef du Fonds monétaire international, Pierre-Olivier Gourinchas, dans une note de blog.
"De nombreux risques" évoqués par le FMI dans ses dernières prévisions, en avril, "ont commencé à se concrétiser", alerte-t-il, et "le monde pourrait bientôt se trouver au bord d'une récession mondiale, deux ans seulement après la dernière".
Par conséquent, la croissance mondiale n'est désormais plus attendue qu'à 3,2% en 2022, soit 0,4 point de moins que ce qui était anticipé en avril.
"Cela reflète le ralentissement de la croissance dans les trois plus grandes économies du monde – les Etats-Unis, la Chine et la zone euro – avec des conséquences importantes pour les perspectives mondiales", observe Pierre-Olivier Gourinchas.
La prévision de croissance des Etats-Unis pour cette année est abaissée de 1,4 point par rapport à avril, à 2,3%, en raison d'"une croissance plus faible en début d'année", et des conséquences de la forte inflation.
La Chine a enregistré "un ralentissement pire que prévu", avec 3,3% de croissance prévue (-1,1 point) à cause des fermetures liées à la Covid-19, et de "l'aggravation de la crise immobilière".
La prévision de croissance pour la zone euro est abaissée de 0,2 point seulement, à 2,6%, plombée par l'Allemagne, la France et l'Espagne, en conséquence, entre autres, de la guerre en Ukraine.
«Chocs»
La Russie en revanche, qui fait face à une vague de sanctions internationales en répercussions à cette attaque, devrait voir son économie plonger un peu moins qu'attendu en 2022, de 6%, et non de 8,5% comme anticipé il y a trois mois.
Guerre en Ukraine, inflation, fort ralentissement économique en Chine: "Plusieurs chocs ont frappé une économie mondiale déjà fragilisée par la pandémie", relève le FMI.
Les prix ne cessent de grimper, partout dans le monde. L'inflation devrait atteindre 8,3% cette année à l'échelle mondiale (+0,9 point par rapport aux prévisions d'avril). La guerre en Ukraine a fait flamber les prix de l'alimentation et de l'énergie, pesant particulièrement lourd sur les populations les plus pauvres.
Face à cela, les banques centrales, dont la Fed aux Etats-Unis et la BCE en Europe, ont commencé à refermer le robinet des liquidités pour restreindre la consommation et desserrer la pression sur les prix.
Mais cela ne se fera pas sans mal, avertit le FMI: "Une politique monétaire plus stricte aura inévitablement des coûts économiques, mais tout retard ne fera que les exacerber".
Pour protéger les populations les plus vulnérables, "un soutien budgétaire ciblé (de la part des gouvernements) peut aider à amortir l'impact", sans toutefois alourdir les dettes publiques, car les taux d'intérêts ont augmenté, avertit encore l'institution de Bretton Woods.
Risques nombreux
Pour 2023, la prévision mondiale est encore plus dégradée, perdant 0,7 points, pour tomber à 2,9%, à cause notamment des conséquences de la lutte contre l'inflation.
Et la réalité pourrait ainsi s'avérer encore pire, tant les risques pesant sur l'économie sont nombreux.
La guerre en Ukraine pourrait faire croître plus avant les prix de l'énergie, et "un arrêt complet des exportations de gaz russe vers les économies européennes en 2022 ferait largement augmenter l'inflation dans le monde à cause de prix de l'énergie plus élevés".
La lutte contre l'inflation pourrait elle, se révéler "plus coûteuse qu'attendu", souligne encore le FMI, relevant que "le risque de récession est particulièrement important en 2023".
Et le resserrement des conditions financières, en faisant grimper les taux d'intérêt, pourrait provoquer des situations de surendettement dans les pays émergents et en développement.
La croissance mondiale, qui avait reculé de 3,1% en 2020 sous l'effet de la Covid-19, a rebondi de 6,1% en 2021.