L’Arabie saoudite et la Grèce sont constamment en quête de nouvelles possibilités de coopération

L’Arabie saoudite et la Grèce sont constamment en quête de nouvelles possibilités de coopération
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Publié le Mardi 26 juillet 2022

L’Arabie saoudite et la Grèce sont constamment en quête de nouvelles possibilités de coopération

  • Au cours des dernières décennies, les investisseurs des deux pays ont collaboré au sein de plusieurs coentreprises et le commerce bilatéral a joué un rôle de premier plan dans le développement de leurs relations commerciales
  • En mars, l’Arabie saoudite et la Grèce ont signé un protocole d’accord ouvrant la voie à des innovations en matière d’énergies renouvelables, notamment l’hydrogène vert et bleu, et au développement d’un réseau de câbles à fibre optique

RIYAD: Lorsque le prince héritier d’Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, se rendra en Grèce mardi pour des entretiens avec ses homologues grecs, il s’appuiera sur un processus de renforcement des liens d’amitié et de coopération entre les deux pays.

Les relations ne se limitent pas à la sphère politique, mais couvrent plusieurs domaines –économique, commercial, d’investissement, de défense, de sécurité, culturel et touristique, entre autres.

En outre, les deux parties cherchent en permanence à identifier de nouvelles possibilités de coopération dans le but d’ouvrir la voie à divers domaines d’activités économiques, de faciliter les interactions continues entre les secteurs commerciaux saoudien et grec et de favoriser des partenariats commerciaux et d’investissement dans le cadre du plan de réforme Vision 2030 du Royaume.

Vus à travers le prisme de l’Histoire, les liens qui unissent aujourd’hui les deux pays s’inscrivent dans la continuité des relations gréco-arabes qui remontent à plusieurs siècles.

Au cours des dernières décennies, les investisseurs des deux pays ont collaboré au sein de plusieurs coentreprises et le commerce bilatéral a joué un rôle de premier plan dans le développement de leurs relations commerciales.

En 2020, les exportations grecques vers l’Arabie saoudite étaient évaluées à 339,04 millions de dollars (1 dollar = 0,98 euro), tandis que ses importations en provenance du Royaume s’élevaient à 620,57 millions de dollars, selon la base de données Comtrade de l’Organisation des nations unies (ONU) sur le commerce international.

Vus à travers le prisme de l’Histoire, les liens qui unissent aujourd’hui les deux pays s’inscrivent dans la continuité des relations gréco-arabes qui remontent à plusieurs siècles.

Grâce aux liens commerciaux et aux conquêtes de l’Antiquité, les idées hellénistiques se sont mélangées à celles des penseurs arabes et musulmans plus tard, dans tous les domaines, des mathématiques à la médecine, en passant par l’astronomie et la philosophie.

Pour preuve, il suffit de regarder les objets conservés au musée d’Histoire et d’archéologie de Riyad, notamment des pièces de monnaie grecques datant de plus de deux mille ans.

De façon plus générale, les influences universitaires et architecturales de la Grèce antique peuvent être observées à ce jour dans toute la région – de l’Europe, la Méditerranée orientale et le Levant, à la Mésopotamie, l’Iran et même l’Inde.

Grâce aux liens commerciaux et aux conquêtes de l’Antiquité, les idées hellénistiques se sont mélangées à celles des penseurs arabes et musulmans plus tard, dans tous les domaines, des mathématiques à la médecine, en passant par l’astronomie et la philosophie.

L’Arabie saoudite et la Grèce sont toutes deux dotées d’une riche diversité culturelle et les deux pays s’efforcent de la préserver et de la partager avec le monde.

Histoire de la Grèce moderne

La guerre d’indépendance grecque, qui a commencé en 1821, a conduit à la création de l’État grec moderne, reconnu par les Ottomans en 1829 et par la communauté internationale en 1830.

Le territoire de la Grèce s’est agrandi entre 1864 et 1947 et, en 1981, il est devenu membre à part entière de la Communauté européenne, renforçant la stabilité de la démocratie du pays et l’établissant comme un État d’une grande importance dans les Balkans et la Méditerranée orientale.

À peine deux siècles après la guerre d’indépendance, la Grèce est considérée comme un pilier de stabilité et de prospérité pour la région élargie du sud de l’Europe et de la Méditerranée orientale et un État membre de l’Union européenne (UE).

Ces dernières années, la Grèce a établi des mises à niveau infrastructurelles essentielles, notamment la transformation numérique et le nouveau cadre de travail, devenant ainsi une destination d’investissement très compétitive.

Néanmoins, la Grèce a eu son lot de crises internes et externes.

Pendant la majeure partie de son Histoire moderne, elle a été profondément polarisée, financièrement dépendante et endettée envers des créanciers étrangers, en plus d’être confrontée à des menaces extérieures.

En raison de la crise de la dette de 2009, le pays a failli sortir de la zone euro. La Grèce était en train de retrouver progressivement sa croissance après des années d’austérité lorsque la pandémie de Covid-19 a frappé au début de l’année 2020.

Cette situation coïncide avec une autre période de turbulence dans les relations gréco-turques. Les deux États ont une histoire longue et mouvementée. En effet, la Turquie moderne a été établie à la suite d’une victoire contre les forces grecques au lendemain de la Première Guerre mondiale.

La participation des deux États à l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (Otan) depuis 1952 n’a pas apaisé les relations, car ils connaissent, chacun, des problèmes non résolus concernant la mer Égée et Chypre.

Les deux sont en désaccord sur les limites de leurs eaux territoriales et l’étendue de leurs zones économiques exclusives

Le projet Vision 2030 est basé sur une nouvelle philosophie visant à faire revivre le patrimoine arabe et islamique de la péninsule Arabique et à renforcer la contribution de l’Arabie saoudite à la culture, aux arts et à la civilisation mondiale.

Désormais, l’exportation la plus importante du Royaume vers la Grèce est le pétrole brut, tandis que cette dernière est un fournisseur de longue date de graines de coton, de métaux, de produits pharmaceutiques et de produits alimentaires comme la margarine, les produits finis, les noix et les fruits.

Dans les années 1970, la ville de Riyad, alors en plein essor, avait besoin des compétences d’un urbaniste. Les autorités ont fait appel à Constantinos Doxiadis, un architecte et urbaniste.

Un autre domaine qui unit les deux économies est la construction. Dans les années 1970, la ville de Riyad, alors en plein essor, avait besoin des compétences d’un urbaniste. Les autorités ont fait appel à Constantinos Doxiadis, un architecte et urbaniste qui avait travaillé sur plusieurs projets dans sa Grèce natale.

Alors que Riyad connaissait une croissance économique et démographique alimentée par le pétrole, M. Doxiadis a expérimenté l’idée d’un système de réseau de style américain, toujours en évidence dans le quartier Al-Olaya de la ville.

Cependant, la relation saoudo-grecque va bien au-delà des briques et du mortier. En avril 2021, la Grèce a signé un accord pour prêter au Royaume une batterie de défense aérienne Patriot, livrée en septembre de la même année.

Cependant, la relation saoudo-grecque va bien au-delà des briques et du mortier. En avril 2021, la Grèce a signé un accord pour prêter au Royaume une batterie de défense aérienne Patriot, livrée en septembre de la même année, ce qui représente un progrès considérable dans la coopération en matière de défense.

Le même mois, l’aide fournie aux autorités grecques par l’Agence saoudienne de lutte contre la drogue a conduit à la découverte d’une énorme cargaison de cannabis dans le principal port grec du Pirée.

Selon certaines estimations, les stupéfiants saisis avaient une valeur marchande potentielle de 33 millions d’euros. Ce partage de renseignements a marqué un nouveau chapitre dans l’expansion de la coopération bilatérale.

Le mois suivant, le ministre saoudien de la Culture, le prince Badr ben Abdallah ben Farhane, a atterri à Athènes pour une visite officielle de deux jours afin de discuter des aspects de la coopération culturelle.

En septembre 2021, le Conseil des chambres saoudiennes a signé un protocole d’accord pour établir un conseil commercial saoudo-grec afin de renforcer le commerce et les investissements bilatéraux.

En octobre de la même année, le prince héritier, Mohammed ben Salmane, a rencontré le Premier ministre grec, Kyriakos Mitsotakis, à Riyad, pour discuter des moyens de renforcer les relations bilatérales.

À la suite de la réunion, les deux parties ont publié une déclaration commune s’engageant à discuter de la création d’un fonds d’investissement commun et à renforcer la coopération dans un certain nombre de secteurs phares.

Quant à la coopération en matière de défense et de sécurité, les deux parties se sont mises d’accord concernant l’organisation d’exercices militaires conjoints, en plus de la coordination et de l’échange d’expertise. Elles ont également décidé de coopérer sur la localisation de la technologie et des industries militaires.

Cette réunion a été suivie, en décembre, par la signature d’un accord de coopération dans le domaine du transport maritime, de l’augmentation de l’activité des navires commerciaux et du renforcement du commerce.

En janvier de cette année, le prince Faisal ben Farhane, ministre saoudien des Affaires étrangères, a rencontré son homologue grec, Nikos Dendias, à Athènes pour discuter du respect de la loi sur le droit de la mer et du principe de libre navigation.

Les deux pays ont également réaffirmé leur attachement aux efforts visant à empêcher l’Iran de se doter de l’arme nucléaire.

En mars, l’Arabie saoudite et la Grèce ont signé un protocole d’accord ouvrant la voie à des innovations en matière d’énergies renouvelables, notamment l’hydrogène vert et bleu, et au développement d’un réseau de câbles à fibre optique qui reliera les données de l’Asie du Sud-Est à l’Europe centrale.

Entre le 12 et le 14 mars, une délégation ministérielle et commerciale grecque a visité l’Arabie saoudite, tout en faisant une escale à AlUla, le site le plus célèbre du patrimoine mondial de l’Organisation des nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) au sein du Royaume qui fait actuellement l’objet d’un développement touristique inédit.

Le forum saoudo-grec sur l’investissement, qui s’est tenu le 13 mars, a présenté des possibilités d’investissement dans les deux pays et il a donné lieu à des centaines de réunions d’affaires bilatérales.

Le même mois, le ministre saoudien de l’Investissement, Khalid al-Falih, a dirigé une délégation commerciale en Grèce pour élargir le partenariat stratégique et renforcer les investissements et le commerce entre les deux pays.

«Notre visite en Grèce s’inscrit dans le cadre des directives du prince héritier visant à renforcer et à approfondir le partenariat saoudo-grec et à exploiter les potentiels et possibilités des deux côtés dans les domaines économique, d’investissement, commercial, culturel et touristique, entre autres», déclarait M. Al-Falih à l’époque.

D’autres investissements et partenariats stratégiques devraient être annoncés lors de la visite du prince héritier à Athènes.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le Parlement libanais approuve un projet de loi sur le secret bancaire

Le Parlement a adopté des amendements à "la loi relative au secret bancaire" et à la législation monétaire, selon le bureau de son président, Nabih Berri. (AFP)
Le Parlement a adopté des amendements à "la loi relative au secret bancaire" et à la législation monétaire, selon le bureau de son président, Nabih Berri. (AFP)
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  • La communauté internationale exige depuis longtemps d'importantes réformes pour débloquer des milliards de dollars afin d'aider à la relance de l'économie libanaise, plongée depuis 2019 dans une profonde crise
  • Selon le groupe de défense des droits libanais Legal Agenda, les amendements autorisent "les organes de contrôle et de régulation bancaire (...) à demander l'accès à toutes les informations" sans fournir de raison particulière

BEYROUTH: Le Parlement libanais a approuvé jeudi un projet de loi sur la levée du secret bancaire, une réforme clé réclamée par le Fonds monétaire international (FMI), au moment où des responsables libanais rencontrent à Washington des représentants des institutions financières mondiales.

Le Parlement a adopté des amendements à "la loi relative au secret bancaire" et à la législation monétaire, selon le bureau de son président, Nabih Berri.

La communauté internationale exige depuis longtemps d'importantes réformes pour débloquer des milliards de dollars afin d'aider à la relance de l'économie libanaise, plongée depuis 2019 dans une profonde crise imputée à la mauvaise gestion et à la corruption.

La récente guerre entre Israël et le Hezbollah a aggravé la situation et le pays, à court d'argent, a désormais besoin de fonds pour la reconstruction.

Selon le groupe de défense des droits libanais Legal Agenda, les amendements autorisent "les organes de contrôle et de régulation bancaire (...) à demander l'accès à toutes les informations" sans fournir de raison particulière.

Ces organismes pourront avoir accès à des informations telles que les noms des clients et les détails de leurs dépôts, et enquêter sur d'éventuelles activités suspectes, selon Legal Agenda.

Le Liban applique depuis longtemps des règles strictes en matière de confidentialité des comptes bancaires, ce qui, selon les critiques, rend le pays vulnérable au blanchiment d'argent.

En adoptant ce texte, le gouvernement avait précisé qu'il s'appliquerait de manière rétroactive pendant 10 ans. Il couvrira donc le début de la crise économique, lorsque les banquiers ont été accusés d'aider certaines personnalités à transférer d'importantes sommes à l'étranger.

Le feu vert du Parlement coïncide avec une visite à Washington des ministres des Finances, Yassine Jaber, et de l'Economie, Amer Bisat, ainsi que du nouveau gouverneur de la Banque centrale, Karim Souaid, pour des réunions avec la Banque mondiale et le FMI.

M. Jaber a estimé cette semaine que l'adoption des amendements donnerait un "coup de pouce" à la délégation libanaise.

En avril 2022, le Liban et le FMI ont conclu un accord sous conditions pour un programme de prêt sur 46 mois de trois milliards de dollars, mais les réformes alors exigées n'ont pour la plupart pas été entreprises.

En février, le FMI s'est dit ouvert à un nouvel accord avec Beyrouth après des discussions avec M. Jaber. Le nouveau gouvernement libanais s'est engagé à mettre en oeuvre d'autres réformes et a également approuvé le 12 avril un projet de loi pour restructurer le secteur bancaire.


Syrie: Londres lève ses sanctions contre les ministères de la Défense et de l'Intérieur

Abdallah Al Dardari, chef régional pour les Etats arabes au Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), lors d'une interview avec l'AFP à Damas le 19 avril 2025. (AFP)
Abdallah Al Dardari, chef régional pour les Etats arabes au Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), lors d'une interview avec l'AFP à Damas le 19 avril 2025. (AFP)
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  • "Les entités suivantes ont été retirées de la liste et ne sont plus soumises à un gel des avoirs: ministère de l'Intérieur, ministère de la Défense", indique notamment le communiqué du département du Trésor
  • Des agences de renseignement sont également retirées de la liste. La totalité d'entre elles ont été dissoutes par les nouvelles autorités en janvier

LONDRES: Le Royaume-Uni a annoncé jeudi avoir levé ses sanctions contre les ministères syriens de l'Intérieur et de la Défense ainsi que contre des agences de renseignement, qui avaient été imposées sous le régime de Bachar al-Assad.

"Les entités suivantes ont été retirées de la liste et ne sont plus soumises à un gel des avoirs: ministère de l'Intérieur, ministère de la Défense", indique notamment le communiqué du département du Trésor.

Des agences de renseignement sont également retirées de la liste. La totalité d'entre elles ont été dissoutes par les nouvelles autorités en janvier.

Ces autorités, issues de groupes rebelles islamistes, ont pris le pouvoir le 8 décembre.

Le Royaume-Uni avait début mars déjà levé des sanctions à l'égard de 24 entités syriennes ou liées à la Syrie, dont la Banque centrale.

Plus de trois cents individus restent toutefois soumis à des gels d'avoirs dans ce cadre, ainsi qu'une quarantaine d'entités, selon le communiqué du Trésor.

Les nouvelles autorités syriennes appellent depuis la chute d'Assad en décembre dernier à une levée totale des sanctions pour relancer l'économie et reconstruire le pays, ravagé après 14 années de guerre civile.


1983 – L'attaque contre les Marines américains à Beyrouth

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  • Les dégâts sont énormes au quartier général des Marines
  • Quatre couches de ciment s'étaient effondrées pour former des tas de décombres, des incendies brûlaient et l'on entendait beaucoup de cris au milieu du sang

BEYROUTH: Le 23 octobre 1983, aux alentours de 6h25, une violente déflagration secoue Beyrouth et sa banlieue, jusque dans les hauteurs montagneuses. Le souffle, sourd et diffus, fait d’abord penser à un tremblement de terre.

Mais sept minutes plus tard, une seconde explosion, bien plus puissante, déchire la ville et ses environs, dissipant toute confusion: Beyrouth venait de vivre l’un des attentats les plus meurtriers de son histoire.

Je travaillais alors pour le journal libanais As-Safir en tant que correspondant de guerre. Beyrouth était assiégée, dans sa banlieue sud, dans les montagnes et dans la région du Kharoub, par des affrontements entre le Parti socialiste progressiste et ses alliés d'une part, et les Forces libanaises d'autre part, dans ce que l'on appelait la «guerre des montagnes».

Le sud du pays a également été le théâtre de la résistance armée des combattants libanais contre l'occupation israélienne. Ces combattants étaient liés à des partis de gauche et, auparavant, à des factions palestiniennes.

Des forces multinationales, notamment américaines, françaises et italiennes, avaient été stationnées à Beyrouth après le retrait des dirigeants et des forces de l'Organisation de libération de la Palestine, à la suite de l'agression israélienne contre le Liban et de l'occupation de Beyrouth en 1982.

Quelques minutes après les explosions, la réalité s’impose avec brutalité: le quartier général des Marines américains, situé sur la route de l’aéroport de Beyrouth, ainsi que la base du contingent français dans le quartier de Jnah, ont été ciblés par deux attaques-suicides coordonnées.

Les assaillants, non identifiés, ont lancé des camions piégés – chargés de plusieurs tonnes d’explosifs – contre les deux sites pourtant fortement sécurisés, provoquant un carnage sans précédent.

Comment nous l'avons écrit

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Au lendemain des attentats, Arab News faisait état de 120 morts parmi les Marines et de 20 morts parmi les Français, un chiffre nettement inférieur au décompte final.

L'attaque de la base américaine a tué 241 militaires américains – 220 Marines, 18 marins et trois soldats – et en a blessé des dizaines. Le bombardement du site militaire français a tué 58 parachutistes français et plus de 25 Libanais.

Ces attentats étaient les deuxièmes du genre à Beyrouth; un kamikaze avait pris pour cible l'ambassade des États-Unis à Aïn el-Mreisseh six mois plus tôt, le 18 avril, tuant 63 personnes, dont 17 Américains et 35 Libanais.

Les dégâts sont énormes au quartier général des Marines. Quatre couches de ciment s'étaient effondrées pour former des tas de décombres, des incendies brûlaient et l'on entendait beaucoup de cris au milieu du sang, des morceaux de corps et de la confusion. Voici ce que nous, journalistes, avons pu voir au milieu du chaos qui régnait immédiatement après la catastrophe, et ce qui reste gravé dans ma mémoire plus de 40 ans plus tard.

La nuit précédente, un samedi, les Marines avaient fait la fête, divertis par un groupe de musique qui avait fait le voyage depuis les États-Unis pour se produire devant eux. La plupart dormaient encore lorsque la bombe a explosé.

Aucun groupe n'a revendiqué les attentats ce jour-là, mais quelques jours plus tard, As-Safir a publié une déclaration qu'il avait reçue et dans laquelle le «Mouvement de la révolution islamique» déclare en être responsable.

Environ 48 heures après l’attentat, les autorités américaines pointent du doigt le mouvement Amal, ainsi qu’une faction dissidente dirigée par Hussein al-Moussawi, connue sous le nom d’Amal islamique, comme étant à l’origine de l’attaque.

Selon la presse locale de l’époque, la planification de l’attentat aurait eu lieu à Baalbeck, dans la région de la Békaa, tandis que le camion utilisé aurait été aperçu garé devant l’un des bureaux du mouvement Amal.

Le vice-président américain, George H.W. Bush, s'est rendu au Liban le lendemain de l'attentat et a déclaré: «Nous ne permettrons pas au terrorisme de dicter ou de modifier notre politique étrangère.»

La Syrie, l'Iran et le mouvement Amal ont nié toute implication dans les deux attentats.

En riposte à l’attaque visant leurs soldats, les autorités françaises ont lancé une opération militaire d’envergure: huit avions de chasse ont bombardé la caserne Cheikh Abdallah à Baalbeck, que Paris considérait comme un bastion de présences iraniennes.

À l’époque, les autorités françaises ont affirmé que les frappes avaient fait environ 200 morts.

Un responsable de l'Amal islamique a nié que l'Iran disposait d'un complexe dans la région de Baalbeck. Toutefois, il a reconnu le lien idéologique fort unissant son groupe à Téhéran, déclarant: «L’association de notre mouvement avec la révolution islamique en Iran est celle d’un peuple avec son guide. Et nous nous défendons.»

Le 23 novembre, le cabinet libanais a décidé de rompre les relations avec l'Iran et la Libye. Le ministre libanais des Affaires étrangères, Elie Salem, a déclaré que la décision «a été prise après que l'Iran et la Libye ont admis qu'ils avaient des forces dans la Békaa».

Un rapport d'As-Safir cite une source diplomatique: «Les relations avec l'Iran se sont détériorées en raison des interventions, pratiques et activités illégales qu'il a menées sur la scène libanaise, malgré de nombreux avertissements.»

Les attentats du 23 octobre étaient jusqu'alors le signe le plus évident de l'évolution de l'équilibre des forces régionales et internationales au Liban et de l'émergence d'un rôle iranien de plus en plus important dans la guerre civile.

Le chercheur Walid Noueihed m'a expliqué qu'avant 1982, Beyrouth avait accueilli toutes les formes d'opposition, y compris l'élite éduquée, appelée «opposition de velours», et l'opposition armée, dont les membres étaient formés dans des camps ou des centres d'entraînement palestiniens dans la vallée de la Békaa et au Liban-Sud.

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Vue aérienne de l'ambassade américaine à Beyrouth après l'explosion qui a fait 63 morts, dont 46 Libanais et 17 Américains. (AFP)

Il a indiqué que l'opposition iranienne au chah était présente parmi ces groupes et a décrit Beyrouth comme une oasis pour les mouvements d'opposition jusqu'en 1982. Toutefois, cette dynamique a changé lorsqu'Israël a envahi le Liban et assiégé Beyrouth, ce qui a entraîné le départ de l'OLP en vertu d'un accord international qui exigeait en échange qu'Israël s'abstienne de pénétrer dans Beyrouth.

Si les factions palestiniennes ont quitté le Liban, ce n'est pas le cas des combattants libanais associés à l'OLP, pour la plupart des chiites qui constituaient la base des partis de gauche libanais.

Les attaques contre les bases militaires américaines et françaises ont entraîné le retrait des forces internationales du Liban, explique M. Noueihed, laissant une fois de plus Beyrouth sans protection. Les opérations de résistance se sont multipliées, influencées par des idéologies distinctes de celles de la gauche traditionnelle, des groupes comme l'Amal islamique affichant ouvertement des slogans prônant la confrontation avec Israël.

En 1985, le Hezbollah est officiellement créé en tant qu'«organisation djihadiste menant une révolution pour une république islamique». Il s'est attiré le soutien des partis de gauche libanais et palestiniens, en particulier après l'effondrement de l'Union soviétique.

Selon M. Noueihed, l'émergence du Hezbollah a coïncidé avec le déclin des symboles existants de la résistance nationale, ce qui semble indiquer une intention d'exclure toutes les autres forces du pays du mouvement de résistance, laissant le Hezbollah comme parti dominant.

L'influence iranienne au Liban est devenue évidente lors des violents affrontements entre le Hezbollah et Amal, qui ont fait des dizaines de victimes et se sont terminés par la consolidation du contrôle du Hezbollah au milieu de la présence des forces militaires syriennes.

Beyrouth se vide peu à peu de son élite intellectuelle, a souligné M. Noueihed. Des centaines d’écrivains, d’intellectuels, de chercheurs et de professionnels des médias ont fui vers l’Europe, redoutant pour leur sécurité, laissant derrière eux une ville désertée par ceux qui faisaient autrefois vibrer sa vie culturelle et académique.

Najia Houssari est rédactrice pour Arab News, basée à Beyrouth. Elle était correspondante de guerre pour le journal libanais As-Safir au moment du bombardement de la caserne des Marines américains.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com