Purges en Iran en 1988: verdict en Suède après un procès inédit

Reza Falahi, témoin au procès Hamid Noury, pose pour une photo à Vallingby, près de Stockholm, le 16 novembre 2021 (Photo, AFP).
Reza Falahi, témoin au procès Hamid Noury, pose pour une photo à Vallingby, près de Stockholm, le 16 novembre 2021 (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 14 juillet 2022

Purges en Iran en 1988: verdict en Suède après un procès inédit

  • Entamé en août 2021 par le tribunal de Stockholm, ce dernier a tendu les relations entre la Suède et l'Iran et suscite l'inquiétude de représailles visant les prisonniers occidentaux détenus par le régime islamique
  • Tout au long des audiences étalées sur neuf mois, Hamid Noury, souvent théâtral et souriant, a rejeté les témoignages d'anciens détenus l'accusant d'avoir participé à une série d'exécutions

STOCKHOLM: La justice suédoise rend jeudi son verdict à l'encontre d'Hamid Noury, premier responsable iranien jugé pour sa participation présumée à des exécutions de masse ordonnées par Téhéran en 1988, au terme d'un procès inédit.

Entamé en août 2021 par le tribunal de Stockholm, ce dernier a tendu les relations entre la Suède et l'Iran et suscite l'inquiétude de représailles visant les prisonniers occidentaux détenus par le régime islamique, dont deux citoyens suédo-iraniens se trouvant dans le couloir de la mort.

Jugé pour "crimes contre le droit international", vocable utilisé par la justice suédoise pour les crimes de guerre et contre l'humanité, ainsi que "meurtres", Hamid Noury, 61 ans, était fonctionnaire pénitentiaire au moment des purges de juillet-août 1988.

Celles-ci sont attribuées à un ordre de l'ayatollah Khomeini visant principalement le mouvement rebelle des Moudjahidine du Peuple (MEK, en persan), allié à l'époque à l'ennemi irakien, en représailles d'attentats commis à la fin de la guerre Iran-Irak.

Le parquet a requis la perpétuité contre l'accusé. Le verdict est attendu vers 13H30 (11H30 GMT).

Tout au long des audiences étalées sur neuf mois, Hamid Noury, souvent théâtral et souriant, a rejeté les témoignages d'anciens détenus l'accusant d'avoir participé à une série d'exécutions.

Affichant son patriotisme, il a dénoncé un complot monté par les Moudjahidine du peuple visant selon lui à discréditer le régime de Téhéran.

"J'espère que ces mains seront blanchies (...) avec l'aide de Dieu", avait lancé l'homme à la barbe finement taillée, Coran à la main, lors de la dernière audience le 4 mai.

Selon l'accusation, Noury occupait au moment des faits des fonctions d'assistant auprès du procureur à la prison de Gohardasht, près de Téhéran, un poste de second rang mais d'exécutant.

Parmi les dizaines de parties civiles appelées à la barre, plusieurs témoins ont affirmé l'avoir formellement reconnu.

"Quand j'étais dans le couloir de la mort, j'ai eu plusieurs fois l'occasion de le voir, et j'ai vu qu'à chaque fois que des noms de (prisonniers) étaient lus, il les suivait jusqu'à la salle d'exécution", a affirmé à l'AFP Reza Falahi, un ancien détenu de 61 ans.

"Il revenait 45 minutes plus tard, et la scène se répétait plusieurs fois par jour".

Arrêté à l'aéroport 

Hamid Noury a lui affirmé qu'il était en congés durant la période concernée et qu'il travaillait dans une autre prison.

Son arrestation fin 2019 à l'aéroport de Stockholm faisait suite à des plaintes déposées par des opposants iraniens auprès de la justice suédoise, dotée d'une compétence universelle pour les crimes contre l'humanité.

Un ex-prisonnier de Gohardasht, Iraj Mesdaghi, a expliqué l'avoir attiré sur le sol suédois en l'alléchant avec une croisière.

Le procès a donné lieu à une mobilisation quotidienne d'opposants iraniens proches des Moudjahidine du Peuple, venus manifester sous les fenêtres du tribunal de Stockholm. Un nouveau rassemblement est prévu jeudi.

Le procès a été marqué fin 2021 par une délocalisation en Albanie, où les Moudjahidine du Peuple ont établi une importante communauté d'exilés.

Des groupes de défense des droits humains estiment qu'au moins 5 000 prisonniers ont été exécutés à l'été 1988 lors de sentences prononcées à la chaîne par des "comités de la mort". Les MEK avancent eux un bilan de 30 000 victimes.

L'affaire est particulièrement sensible en Iran, des militants des droits de l'Homme accusant des hauts responsables en poste aujourd'hui d'avoir été des membres de ces comités, dont l'actuel président Ebrahim Raïssi.

Interrogé en 2018 et en 2020 à ce sujet, M. Raïssi avait nié avoir été impliqué, avançant qu'il avait rendu "hommage" à l'"ordre" donné par l'ayatollah Khomeini.

Téhéran a réclamé à de nombreuses reprises la libération d'Hamid Noury au gouvernement suédois, Stockholm répondant que sa justice est "totalement indépendante".

Préoccupée par une récente série d'arrestations d'Européens en Iran "sans raison apparente", la Suède déconseille depuis fin juin à ses ressortissants de se rendre dans le pays.

La principale inquiétude concerne l'universitaire irano-suédois Ahmedreza Djalali, condamné à la peine de mort en Iran en 2017 pour des accusations d'espionnage.

Selon l'ONG Amnesty International, le régime iranien le retient en "otage" pour tenter de l'échanger avec Hamid Noury et un ancien diplomate iranien condamné à 20 ans de prison en Belgique, Assadollah Assadi.

Un texte controversé en cours d'adoption par le Parlement belge vise à permettre l'échange de prisonniers avec l'Iran.


L'Allemagne aux urnes, sous pression de l'extrême droite et de Trump

Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
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  • Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.
  • Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

BERLIN : Alors qu'elle est déstabilisée par les crises, l'Allemagne vote dimanche pour des élections législatives où l'opposition conservatrice part largement favorite après une campagne bousculée par le retour au pouvoir de Donald Trump et l'essor de l'extrême droite.

Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.

« Nous traversons une période très incertaine », constatait Daniel Hofmann, rencontré à la sortie d'un bureau de vote à Berlin.

Selon cet urbaniste de 62 ans, qui se dit préoccupé par la « sécurité européenne » sur fond de guerre en Ukraine, le pays a besoin d'un « changement, une transformation ».

Récession économique, menace de guerre commerciale avec Washington, remise en cause du lien transatlantique et du « parapluie » américain sur lequel comptait Berlin pour assurer sa sécurité : c'est le « destin » de l'Allemagne qui est en jeu, a déclaré samedi le chef de file des conservateurs Friedrich Merz.

Ce dernier semble très bien placé pour devenir le prochain chancelier et donner un coup de barre à droite dans le pays, après l'ère du social-démocrate Olaf Scholz. D'après les derniers sondages, il recueillerait environ 30 % des intentions de vote.

Visiblement détendu, souriant et serrant de nombreuses mains, le conservateur de 69 ans a voté à Arnsberg, dans sa commune du Haut-Sauerland, à l'ouest.

Son rival social-démocrate, visage plus fermé, a lui aussi glissé son bulletin dans l'urne, à Potsdam, à l'est de Berlin.

Les électeurs ont jusqu'à 18 heures (17 heures GMT) pour voter. Les premiers sondages sortie des urnes seront publiés dans la foulée.

Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

Le parti anti-migrant et pro-russe a imposé ses thèmes de campagne, suite à plusieurs attaques et attentats meurtriers perpétrés par des étrangers sur le territoire allemand.

L'AfD a également bénéficié du soutien appuyé de l'entourage de Donald Trump pendant des semaines.

Son conseiller Elon Musk, l'homme le plus riche du monde, n'a cessé de promouvoir la tête de liste du parti allemand, Alice Weidel, sur sa plateforme X.

« AfD ! » a encore posté M. Musk dans la nuit de samedi à dimanche, accompagnant son message de drapeaux allemands.
Les élections législatives anticipées ont lieu la veille du troisième anniversaire de l'invasion russe en Ukraine, un événement particulièrement marquant en Allemagne.

Le conflit a mis fin à l'approvisionnement en gaz russe du pays, qui a accueilli plus d'un million d'Ukrainiens. La perspective d'une paix négociée « dans le dos » de Kiev et des Européens inquiète tout autant.

Interrogé sur ces élections allemandes, le président américain a répondu avec désinvolture qu'il souhaitait « bonne chance » à l'allié historique des États-Unis, qui ont leurs « propres problèmes ».

Le discours de son vice-président JD Vance à Munich, dans lequel il exhortait les partis traditionnels allemands à mettre fin à leur refus de gouverner avec l'extrême droite, a creusé un peu plus le fossé entre Washington et Berlin.

Friedrich Merz souhaite que l'Allemagne puisse « assumer un rôle de leader » en Europe.

Dans le système parlementaire allemand, il pourrait s'écouler des semaines, voire des mois, avant qu'un nouveau gouvernement ne soit constitué.

Pour former une coalition, le bloc mené par les conservateurs CDU/CSU devrait se tourner vers le parti social-démocrate (SPD), excluant ainsi toute alliance avec l'AfD, avec laquelle il a entretenu des relations tendues durant la campagne, notamment sur les questions d'immigration.

Les sondages lui attribuent 15 % des voix. Ce score serait son pire résultat depuis l'après-guerre et signerait probablement la fin de la carrière politique d'Olaf Scholz. Mais auparavant, le chancelier devra assurer la transition.

« J'espère que la formation du gouvernement sera achevée d'ici Pâques », soit le 20 avril, veut croire Friedrich Merz.

Un objectif difficile à atteindre si les deux partis qui ont dominé la politique allemande depuis 1945 sont contraints, faute de majorité de députés à eux deux, de devoir trouver un troisième partenaire.

La fragmentation au Parlement dépendra notamment des résultats de petits partis et de leur capacité ou non à franchir le seuil minimum de 5 % des suffrages pour entrer au Bundestag.


Sécurité européenne, Ukraine : réunion des ministres européens de la Défense lundi

Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
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  • Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien
  • Cette réunion des ministres de la Défense s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

PARIS : Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien et de renforcer la sécurité du Vieux continent, a-t-on appris dimanche auprès du ministère français des Armées.

Cette réunion, qui se tiendra dans l'après-midi à l'initiative de l'Estonie et de la France, rassemblera également les ministres de la Défense de Lituanie, de Lettonie, de Norvège, de Finlande, de Suède, du Danemark, des Pays-Bas, d'Allemagne, d'Italie, de Pologne et du Royaume-Uni, selon cette source.

À cette occasion, le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, se rendra à Tallinn aux côtés de son homologue estonien Hanno Pevkur, après avoir participé aux célébrations de la fête nationale estonienne.

La France déploie environ 350 militaires en Estonie dans le cadre d'un bataillon multinational de l'OTAN.

Cette réunion des ministres de la Défense, trois ans jour pour jour après l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie, s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

La semaine passée, plusieurs chefs de gouvernement européens avaient été conviés à Paris par le président Emmanuel Macron. D'après un résumé obtenu de sources parlementaires, ils se seraient accordés sur la nécessité d'un « accord de paix durable s'appuyant sur des garanties de sécurité » pour Kiev, et auraient exprimé leur « disponibilité » à « augmenter leurs investissements » dans la défense.

Plusieurs pays membres avaient en revanche exprimé des réticences quant à l'envoi de troupes européennes en Ukraine, dans l'hypothèse d'un accord mettant fin aux hostilités.


Le ministre russe des Affaires étrangères effectue une visite en Turquie lundi

Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
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  • La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.
  • Le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

ISTAMBUL : Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, est attendu en Turquie lundi, jour du troisième anniversaire du déclenchement de l'invasion russe de l'Ukraine, ont annoncé dimanche des sources diplomatiques turques.

M. Lavrov doit s'entretenir à Ankara avec son homologue turc Hakan Fidan, ont indiqué ces mêmes sources, précisant que les deux hommes discuteraient notamment d'une solution au conflit ukrainien.

Dimanche, la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a confirmé à l'agence Tass qu'une délégation menée par Sergueï Lavrov devait se rendre prochainement en Turquie pour y discuter d'« un large éventail de sujets ».

La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.

Mardi, en recevant son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

Toutefois, ces dernières semaines, Moscou et Washington ont entamé un dialogue direct, alors que les relations se réchauffent entre Donald Trump et Vladimir Poutine.

Mardi, Russes et Américains se sont rencontrés en Arabie saoudite pour entamer le rétablissement de leurs relations, une réunion dénoncée par Volodymyr Zelensky qui redoute un accord sur l'Ukraine à leur insu.

M. Lavrov, dont la dernière visite en Turquie remonte à octobre, doit se rendre dans la foulée en Iran, un allié de la Russie.

La Turquie, qui est parvenue à maintenir ses liens avec Moscou et Kiev, fournit des drones de combat aux Ukrainiens mais n'a pas participé aux sanctions occidentales contre la Russie.

Ankara défend parallèlement l'intégrité territoriale de l'Ukraine et réclame la restitution de la Crimée du Sud, occupée par la Russie depuis 2014, au nom de la protection de la minorité tatare turcophone de cette péninsule.