AMMAN: La colère de l’opinion publique jordanienne face à une série de meurtres qualifiés d’«atroce» a entraîné des appels croissants à l’application de la peine de mort.
Deux cent dix-neuf personnes, dont vingt-deux femmes, sont condamnées à mort en Jordanie.
En février 2019, les députés jordaniens ont adopté une loi d’amnistie, la troisième du genre depuis l’entrée en fonction du roi Abdallah II, en 1999.
En vertu de cette loi, environ 8 000 prisonniers ont été graciés, y compris des personnes reconnues coupables de délits comme la diffamation, les abus, les cybercrimes ou l’évasion fiscale.
Les meurtres, les faits d’espionnage et la création d’organismes illégaux n’étaient pas inclus dans la loi.
En réponse à une enquête menée par Saleh Armouti, un député chevronné, le ministre jordanien de l’Intérieur, Mazen al-Faraya, a déclaré que le plus ancien condamné à mort avait été reconnu coupable de meurtre en juin 1976.
Il ajoute que si une plainte contre un détenu reconnu coupable de meurtre est retirée, sa peine est réduite à quinze ans d’emprisonnement.
Sa déclaration intervient quelques jours après que l’étudiante jordanienne Imane Ersheid, 18 ans, a été abattue sur le campus de l’université. Ce crime a profondément ébranlé la société jordanienne.
CONTEXTE
• L’étudiante jordanienne, Imane Ersheid, 18 ans, a été abattue sur le campus de l’université. Ce crime a profondément ébranlé la société jordanienne.
• Après le meurtre d’Imane Ersheid, jeudi dernier, de nombreux Jordaniens se sont servis des réseaux sociaux pour exiger que le meurtrier de la jeune étudiante écope de la peine maximale.
De nombreux Jordaniens se sont servis des réseaux sociaux pour exiger que le meurtrier de la jeune étudiante écope de la peine maximale.
Cependant, le tueur, que l’on a identifié – il s’agit d’Oday Khaled Abdallah Hassan –, s’est suicidé après avoir été encerclé par la police.
Avant que la mort du tueur ne soit annoncée, certains avaient exigé qu’il soit pendu en public.
Dans son enquête, M. Armouti accuse le gouvernement d’ingérence dans le système judiciaire dans la mesure où il n’exécute pas les décisions de condamnation à mort.
Le député, qui est également un avocat reconnu et l’ancien président de l’Association du barreau jordanien, affirme que les familles et les proches des victimes de meurtre ont «le droit de voir la justice pleinement rendue et les criminels punis pour leurs crimes odieux».
Il ajoute que la Jordanie ne devrait pas écouter les requêtes destinées à mettre fin à la peine capitale, mais devrait plutôt «agir en toute souveraineté pour protéger la sécurité».
M. Armouti poursuit en ces termes: «Mettre fin à la peine de mort est un crime qui a de graves conséquences sur la sécurité nationale.»
Depuis mars 2017, la Jordanie n’a procédé à aucune exécution, mais elle continue de prononcer des verdicts de condamnation à mort. En 2017, les autorités ont pendu quinze condamnés pour des accusations liées à des meurtres et au terrorisme.
La Jordanie avait précédemment imposé un moratoire de huit ans sur la peine capitale en 2008. Mais la politique a pris fin en 2015 lorsque onze condamnés ont été exécutés pour meurtre.
Mohammed Eliyyan, professeur de charia, fait écho aux propos de M. Armouti sur les dangers de la fin de la peine capitale.
Il affirme: «Une telle punition n’est pas une fin, mais elle sert de leçon et d’avertissement aux gens. Si l’on savait que la mort est le châtiment inévitable, on réfléchirait à deux fois avant de commettre un meurtre.»
Khaled Qudah, journaliste et militant des droits de l’homme, déclare qu’il soutient «l’abolition progressive de la peine de mort».
«Je pense que la peine capitale doit être abolie, mais progressivement. D’ici à ce qu’elle soit définitivement supprimée, nous devons adopter le contentieux stratégique qui examine les raisons des crimes et non les moyens punitifs», soutient-il.
«Personne ne naît criminel. Un humain est bon de nature, mais les circonstances peuvent faire de lui un criminel.»
M. Qudah avertit qu’une abolition brutale de la peine capitale conduirait à «des crimes odieux contre des innocents».
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com