PARIS: Une pause voulue leur a permis de se "remettre en place": les frères rappeurs Bigflo & Oli reviennent avec un album "apaisé et en liberté", qui n'exclut pas les hits en puissance.
Non, contrairement à ce que certains pensaient, ils n'ont pas arrêté. "C'était une pause médiatique et dans le planning, mais on n'a jamais autant écrit", expose à l'AFP Oli, rencontré à Paris aux côtés de son frangin.
Saisis par un besoin de faire le point après le succès boule de neige de leurs trois précédents albums (concert devant 40.000 personnes à Paris La Défense Arena en octobre 2019), le tandem avait disparu des radars à partir d'octobre 2020. Laissant notamment en jachère leurs réseaux sociaux. Un documentaire diffusé à l'époque sur Netflix, "Presque trop", laissait apparaître la pression pesant sur les épaules, notamment celles de Bigflo.
Comment gérer "les sollicitations" venues avec le vedettariat ne fut pas le seul travail à faire sur soi dans cette parenthèse. "Le succès, ce tumulte, abîme une relation à deux, notre relation à Oli et moi", confie ainsi Bigflo.
"On avait des choses à remettre en place", poursuit-il. "On a pris des rendez-vous chez le psy à deux" complète Oli. "Avant on voulait cacher nos différences, on disait qu'on était ensemble tout le temps et d'accord sur tout, mais entre ce discours et la réalité il y avait trop de différences", détaille Bigflo.
«Jouer avec notre image»
Aujourd'hui les singularités ne sont plus gommées au sein de la paire. "Les autres c'est nous", nouvel album qui sort vendredi, laisse la porte ouverte sur cette thérapie de "vieux couple", comme le dit Bigflo amusé par l'image.
"Ca nous a permis d'être plus franc, d'aller un peu plus profond dans l'auto-critique", ajoute Oli. Mais l'ensemble copieux des 22 titres n'a rien de larmoyant. Leur premier morceau sorti, "Sacré bordel", déclaration d'amour à une France multiculturelle prouvait déjà que l'écriture
n'était pas émoussée chez ces artistes désormais plus proches de la trentaine, nés d'un père argentin et d'une mère franco-algérienne.
Le disque contient même plusieurs "bangers", ces titres qui vont déchaîner les foules en concert et festival. Le titre d'introduction "La vie d'après" atteste des batteries rechargées. Sur "Ca va beaucoup trop vite" le duo né à Villeneuve-sur-Lot et grandi à Toulouse fait valoir un débit supersonique. Et "Booba" a tout pour être repris à tue-tête.
Evoquer dans ce dernier titre le "Duc de Boulogne", figure d'un rap bling-bling, est "une manière de jouer avec notre image, on est des grands fans de Booba, depuis la première heure", souligne Bigflo.
De Vald à Cabrel
"On nous met en opposition avec lui, mais des fois moi aussi j'ai envie d'être Booba et de prendre un 4x4 avec des potes et de mettre du gros son", lance-t-il. Les deux frères du Sud- Ouest arrachent d'ailleurs l'étiquette qu'on leur colle à plusieurs reprises. Comme dans "Bons élèves", où l'un des deux confesse son penchant pour casinos et sexe.
Des textes sensibles irriguent aussi des titres comme "Super-héros", dédiés aux soignants beaucoup applaudis durant la crise sanitaire mais un peu oubliés depuis, ou encore "José et Amar" sur leurs grand-pères argentin et algérien.
Bigflo et Oli, qui naviguent avec aisance entre les styles, de la pure production rap aux ambiances funk ou latino détendues, occupent aujourd'hui une place à part. En témoignent leurs invités sur "Les autres c'est nous": Vald, voix d'un rap qui claque, MC Solaar, père du rap conscient, ou encore des stars grand-public comme Julien Doré ou Francis Cabrel.
Et Bigflo de raconter: "Cabrel c'est énorme, on a croisé Jul à la fin de son concert au Vélodrome et il nous a dit +ah les bâtards, vous avez Cabrel, c'est le rêve de ma vie de l'avoir sur un de mes disques !".