LE CAIRE: Le prince héritier saoudien, Mohammed ben Salmane, effectue une tournée du Moyen-Orient. Il se rendra en Égypte, puis en Jordanie et en Turquie. Son voyage en Égypte a suscité de nombreuses spéculations sur les sujets de discussion potentiels entre les parties saoudienne et égyptienne, notamment dans les domaines de l’économie, du tourisme et des investissements bilatéraux.
Arab News s’est entretenu longuement avec la ministre égyptienne de la Coopération internationale, Rania al-Mashat, qui a qualifié les relations entre les deux pays de «très stratégiques». «C’est une relation de longue date. Chaque fois qu’il y a un sommet, il y a toujours un peu d’optimisme et d’espoir, et un certain alignement lorsqu’il s’agit de débattre de l’avenir», indique-t-elle, ajoutant que cette visite est «extrêmement importante».
«Par ailleurs, cette rencontre intervient à un moment où la situation internationale est très compliquée. C’est un véritable défi. Il y a des gagnants et il y a des perdants. Tout le monde est préoccupé par certaines questions comme la croissance économique mondiale, l’emploi et l’inflation dans le monde. Ce sommet est donc un sommet qui, je pense, implique beaucoup d’anticipation. Mais, comme cela s’est produit lors de visites précédentes, les résultats sont toujours très favorables pour les deux nations», explique Mme Al-Mashat.
L’Égypte préside et accueille la conférence des Nations unies sur les changements climatiques, la COP 27, qui se tiendra en novembre. Mme Al-Mashat affirme que l’Égypte, en tant qu’hôte, poursuivra les objectifs fixés lors de la COP 26, qui s’est tenue l’année dernière en Écosse. «Nous voulons que cette COP soit celle de la mise en œuvre d’actions concrètes. De nombreuses promesses ont été faites à Glasgow», dit-elle.
Elle précise que trois points essentiels figurent à l’ordre du jour: «Tout d’abord, bien sûr, l’Égypte en tant que présidente adopte une position impartiale, mais l’adaptation et la résilience demeurent extrêmement importantes. Cela est d’autant plus vrai avec ce qui se passe au niveau mondial, en particulier en matière de sécurité alimentaire, dans la mesure où l’alimentation est liée à d’autres formes de vulnérabilité, notamment les problèmes d’eau. L’Égypte se situant en Afrique, l’adaptation et la résilience pour le continent sont assez importantes. C’est donc une occasion à saisir.»
Le fait que la COP 27 soit présidée par un pays africain revêt également une grande importance pour Mme Al-Mashat. «La voix des pays du Sud est plus influente au sein du G20, de même que celle de l’Indonésie, un autre pays du Sud. Entre le G20 et la COP 27, deux grandes nations, deux voix, s’exprimeront au nom des pays à revenu intermédiaire, au nom des économies en développement», assure-t-elle.
Mme Al-Mashat ajoute que l’objectif de la prochaine conférence sera de mettre en œuvre les promesses et non plus seulement de les formuler. «Il s’agit de comprendre comment tous les engagements pris pourront être financés, et se transformer en projets dans lesquels il est possible d’investir dans les pays à revenu intermédiaire et ceux à faible revenu», explique-t-elle. «En particulier dans des pays qui ne se concentrent pas sur l’atténuation des effets du changement climatique, mais qui doivent s’adapter, en raison des risques climatiques liés à la pénurie d’eau et à la désertification, qui représentent de grands problèmes pour les pays.»
Concernant les comités mixtes bilatéraux du Golfe, Mme Al-Mashat constate que «les discussions portent toujours sur différents types d’investissements stratégiques. Ce que nous avons observé en mars et avril, ce sont des orientations conformes à ce que l’Égypte veut faire pour ouvrir davantage le secteur privé aux investissements étrangers».
Les investissements du Golfe en Égypte sont un signe évident de confiance, poursuit la ministre égyptienne de la Coopération internationale, ajoutant que la priorité accordée par le Golfe à la diversification de l’économie, au pouvoir d’achat et à la technologie est une bonne nouvelle pour le développement continu des investissements étrangers en Égypte. «Les investissements du Golfe sont toujours à la recherche de bonnes opportunités, et cela ouvre également la porte à d’autres investisseurs. Il s’agit donc d’une avancée très favorable», note-t-elle.
Les touristes arabes, notamment ceux d’Arabie saoudite et d’autres pays du Golfe, pourraient également jouer un rôle essentiel dans l’économie égyptienne. Le nombre de touristes russes et ukrainiens – qui représentent 40% des vacanciers de plage en Égypte, selon le ministère du Tourisme – a diminué depuis le début de la guerre en Ukraine. Toutefois, Mme Al-Mashat précise que l’«afflux de touristes en provenance d’Europe, à l’exception de la Russie et de l’Ukraine, a été extrêmement favorable et positif».
Alors que la planète se remet lentement des effets de la pandémie de Covid-19, «tout le monde veut voyager», ajoute-t-elle. «Plusieurs pays ont connu un afflux de touristes par rapport à avant, évidemment. Sur ce plan, l’impact du conflit entre l’Ukraine et la Russie a été quelque peu atténué», note-t-elle, ajoutant que les marchés autres que l’Ukraine et la Russie ont contribué à atténuer la chute du nombre de touristes.
Bien que le nombre de touristes européens ait été particulièrement élevé, les touristes arabes en Égypte jouent toujours un rôle important, «notamment ceux venant d’Arabie saoudite et du Golfe, ce qui, espérons-le, se poursuivra», souligne Mme Al-Mashat. Avant la pandémie, l'Arabie saoudite occupait la cinquième place en termes de nombre de touristes visitant l’Égypte.
Être une femme ministre dans le monde arabe n’est pas une tâche facile. Cependant, Mme Al-Mashat a gracieusement gravi les échelons en occupant des postes de direction dans d’éminentes institutions économiques, après avoir obtenu un master et un doctorat en économie à l’université du Maryland, à College Park.
Elle a travaillé comme conseillère de l’économiste en chef du FMI de 2016 à 2018, puis est devenue la première femme ministre du Tourisme en Égypte en janvier 2018. Son parcours pour devenir l’une des femmes les plus influentes de l’économie égyptienne ne s'est pas arrêté là, puisqu’elle a été nommée ministre de la Coopération internationale en décembre 2019.
La ministre évoque aussi son avenir. «Je ne sais pas quelle sera la prochaine étape. Mais je sais que nous essayons de relever tous les défis et de résoudre tous les problèmes afin de toujours avancer de manière positive et tenter de réaliser cet objectif pour les hommes comme pour les femmes.»
«Gardez espoir et restez positif et optimiste autant que possible, car chacun d’entre nous a de nombreux admirateurs qui essaient de trouver de la force dans ce que nous faisons. Nous ne devrions donc pas faiblir ou nous sentir abattus, même si notre monde semble être un lieu très dangereux en ce moment», ajoute-t-elle.
Mme Al-Mashat croit «au pouvoir de la collaboration et de la coopération, et à celui d’essayer de travailler ensemble pour pouvoir surmonter tous les risques auxquels nous pouvons être confrontés aujourd’hui».
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com