En France, l'extrême droite caresse l'espoir de consolider son ancrage

Eric Zemmour a été éliminé au premier tour des législatives du 12 juin 2022 dans le Var, après être arrivé troisième, avec 23,19% des suffrages exprimés. (AFP).
Eric Zemmour a été éliminé au premier tour des législatives du 12 juin 2022 dans le Var, après être arrivé troisième, avec 23,19% des suffrages exprimés. (AFP).
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Publié le Mardi 14 juin 2022

En France, l'extrême droite caresse l'espoir de consolider son ancrage

  • La partie était pourtant mal engagée pour le RN, contraint pendant une campagne électorale atone de jouer les seconds rôles derrière les têtes d'affiche incarnées par la coalition Ensemble!
  • Mais son bataillon au sein de la nouvelle assemblée devrait être plus important qu'en 2017 - le parti d'extrême droite avait obtenu aux dernières législatives huit sièges

PARIS: Ce serait une première en France en plus de 35 ans: au vu des résultats du premier tour des législatives, l'extrême droite peut caresser l'espoir d'obtenir un groupe à l'Assemblée nationale et de peser davantage dans l'arène politique après des décennies passées dans le rôle de vote contestataire.

Cette percée, qui devra encore être confirmée dimanche prochain au moment du second tour, intervient après dix ans de stratégie de "normalisation" et de "dédiabolisation" de l'image du Rassemblement national (RN) - mais pas de son programme - menée par Marine Le Pen.

"Nous sommes là, nous sommes bien là, nous sommes en dynamique forte depuis 2017", date des dernières législatives, s'est réjouie la députée sortante lundi depuis Rouvroy, dans son fief du Pas-de-Calais (nord), où elle est en ballotage favorable.

La partie était pourtant mal engagée pour le RN, contraint pendant une campagne électorale atone de jouer les seconds rôles derrière les têtes d'affiche incarnées par la coalition Ensemble! emmenée par le parti centriste libéral du président Emmanuel Macron et par l'alliance de la gauche (Nupes).

Certes, avec 18,68% au premier tour du scrutin dimanche, les candidats RN n'ont pas réussi à capitaliser sur la dynamique de Marine Le Pen qui avait engrangé à la présidentielle 23% des voix au premier tour et plus de 41% au second.

Le RN est également devancé par la Nupes et Ensemble! qui pourraient remporter respectivement entre 150 à 210 et 255 à 295 sièges, selon les projections, sur les 577 que compte l'Assemblée nationale.

Mais son bataillon au sein de la nouvelle assemblée devrait être plus important qu'en 2017 - le parti d'extrême droite avait obtenu aux dernières législatives huit sièges - et Marine Le Pen devrait de nouveau y siéger.

S'il parvient à former un groupe à l'Assemblée nationale - il lui faut pour cela obtenir 15 sièges -, le RN pourra peser davantage dans les débats.

Les présidents de groupe peuvent en effet demander la création d'une commission spéciale, ou y faire opposition, réclamer une suspension de séance ou encore bénéficier d'un temps de parole plus important pour les questions au gouvernement.

Selon un décompte de l'AFP, le RN est par ailleurs arrivé en tête dans environ 11.300 communes sur près de 35.000, devant Ensemble! (plus de 9.000), la Nupes (près de 7.500) et le parti de droite Les Républicains (environ 4.900).

"C'est une très bonne performance par rapport à ce qui se passe traditionnellement où entre une présidentielle et une législative, le score de Le Pen, qu'il s'appelle Jean-Marie (nom du fondateur du parti et père de Marine Le Pen, NDLR) ou qu'elle s'appelle Marine baisse très fortement voire s'effondre", a souligné Frédéric Dabi, de l'institut de sondage Ifop, sur la chaîne LCI.

"Là le RN tient plutôt le choc" dans ce scrutin majoritaire qui lui est traditionnellement défavorable.

A titre de comparaison, en 2017 Marine Le Pen avait obtenu 21,5% au premier tour de la présidentielle. Quelques semaines plus tard le RN avait recueilli 13,2% lors des législatives, toujours au premier tour.

Pour Brice Teinturier, directeur général délégué d'Ipsos France, "le seul gagnant par rapport à 2017 de ce premier tour c'est le RN, qui progresse" et "va augmenter ses sièges".

Prudence

La constitution d'un groupe à l'Assemblée serait une première pour une formation d'extrême droite depuis 1986, quand le RN, alors Front national, avait obtenu, à l'issue des législatives, 35 sièges grâce à l'instauration d'une dose de proportionnelle jusqu'en 1988. Et donc un groupe.

Trente-cinq ans plus tard, la formation d'extrême droite est créditée de 5 à 25 sièges par l'Ifop, de 23 à 45 sièges par l'institut Harris et de 25 à 35 sièges par Elabe.

Prudente, Marine Le Pen a évoqué dimanche soir "la possibilité d'envoyer un groupe très important" à l'Assemblée sans donner plus de détails sur l'objectif chiffré visé.

Autre motif de satisfaction dans le camp Le Pen, l'explosion de la bulle Eric Zemmour dont la candidature surprise à l'élection présidentielle d'avril avait fait grincer des dents dans les rangs du RN.

Au lendemain de l'élimination de l'ancien polémiste au premier tour des législatives dans le Var, Mme Le Pen a tendu la main à ses électeurs, exprimant le souhait qu'ils votent pour son mouvement dimanche prochain au second tour.

Point non négligeable enfin pour un parti endetté à plus de 20 millions d'euros: chaque voix gagnée donnant droit à 1,64 euro par an, le RN pourra compter, avec ses 4.248.626 voix, sur au moins 6,9 millions d'euros d'argent public chaque année.


Présidentielle: Le Pen «annoncera sa décision» après son procès en appel, sans attendre la cassation

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  • Le Rassemblement national sera fixé sur le nom de sa candidate (ou de son candidat) avant les prochaines vacances d'été
  • Tel est en tout cas l'agenda fixé par Mme Le Pen dans un entretien au mensuel conservateur Causeur, publié jeudi

PARIS: Candidate déclarée à la prochaine présidentielle malgré son inéligibilité, Marine Le Pen affirme qu'elle ne se présentera "évidemment pas" si sa peine est confirmée en appel et qu'elle "annoncera donc (sa) décision" dans la foulée, sans attendre une éventuelle cassation.

Le Rassemblement national sera fixé sur le nom de sa candidate (ou de son candidat) avant les prochaines vacances d'été. Tel est en tout cas l'agenda fixé par Mme Le Pen dans un entretien au mensuel conservateur Causeur, publié jeudi.

Condamnée en première instance - dans l'affaire des assistants parlementaires européens - à une peine d'inéligibilité de cinq ans avec application immédiate, la triple candidate à l'élection présidentielle admet qu'elle ne pourra "évidemment pas" se représenter une quatrième fois si cette peine devait être confirmée en appel.

"Je prendrai ma décision de me présenter ou non lors du rendu de l'arrêt de la cour d'appel", ajoute-t-elle, évacuant l'hypothèse d'un suspense prolongé en cas de pourvoi en cassation. "On ne sait pas quand une telle décision serait rendue et on ne peut pas se lancer dans une campagne présidentielle au dernier moment", explique-t-elle.

Son second procès étant programmé du 13 janvier au 12 février 2026, avec un délibéré attendu quatre mois plus tard, "j'annoncerai donc ma décision cet été", précise celle qui s'était hissée au second tour en 2017 et en 2022 face à Emmanuel Macron.

Un calendrier choisi aussi "pour ne pas hypothéquer la candidature de Jordan Bardella dans le cas où il devrait y aller", souligne-t-elle, confirmant ainsi le statut de dauphin du jeune président du parti à la flamme.


Macron au Brésil, pour évoquer une "relation transatlantique réimaginée"

Le président français Emmanuel Macron s'exprime lors de l'ouverture du festival « Notre avenir – Brésil-France, dialogues avec l'Afrique » à Salvador, dans l'État de Bahia, au Brésil, le 5 novembre 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron s'exprime lors de l'ouverture du festival « Notre avenir – Brésil-France, dialogues avec l'Afrique » à Salvador, dans l'État de Bahia, au Brésil, le 5 novembre 2025. (AFP)
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  • Emmanuel Macron est arrivé à Salvador de Bahia pour promouvoir une « relation transatlantique réimaginée » entre l’Amérique du Sud, l’Afrique et la France, à travers la culture, la mémoire et la jeunesse
  • Cette visite s’inscrit dans une refondation des liens franco-africains, marquée par la reconnaissance de l’esclavage, la restitution d’objets coloniaux et la préparation du sommet Afrique–France à Nairobi en 2026

SALVADOR: Emmanuel Macron est arrivé mercredi à Salvador de Bahia, au Brésil, pour plaider en faveur d'une "relation transatlantique réimaginée" associant Amérique du Sud et Afrique, avant de participer à un sommet climat à Belem, a indiqué l'Elysée.

Le président français doit participer à l'ouverture du festival "Notre futur – Brésil-France, dialogues avec l'Afrique", qui réunit "les jeunesses et les nouvelles voix des sociétés civiles brésiliennes, africaines et françaises", a expliqué la présidence.

Il s'agit d'un "temps fort de la saison culturelle France-Brésil" qui a scandé l'année 2025.

La capitale de l'Etat de Bahia, dans le nord-est du pays, fut l'un des points d'arrivée majeurs des esclaves africains déportés. Elle est aujourd'hui le foyer vibrant de la culture afro-brésilienne.

Cette étape vise donc "à célébrer et à travailler avec Brasilia à une relation transatlantique réimaginée", associant les "partenaires africains", selon la présidence française.

Emmanuel Macron doit aussi visiter une galerie dédiée au photographe et anthropologue français Pierre Fatumbi Verger (1902-1996), et la Maison du Bénin, où il découvrira l'exposition "Je suis un fleuve noir".

Pour Paris, "cette visite à Bahia s'inscrit dans la politique de refondation et de renouvellement de notre relation avec l'Afrique", au moment où les relations entre la France et ses anciennes colonies africaines sont souvent distendues, voire glaciales comme au Sahel.

La culture est un point fort de cette "refondation", fait-on valoir dans l'entourage du président français, qui a enclenché une démarche de restitution des "objets volés pendant l'époque coloniale".

Autre volet: "la reconnaissance de l'esclavage", qui sera aussi mise en avant à Salvador, point de débarquement "d'un très grand nombre d'esclaves, qui venaient notamment de tout le golfe du Bénin et notamment du port de Cotonou", a fait valoir une conseillère présidentielle.

"Bahia, c'est un point d'étape. On se donne rendez-vous également à Nairobi en mai, pour le nouveau sommet Afrique-France qu'on organise pour la première fois dans un pays anglophone", a souligné l'Elysée.

Jeudi, Emmanuel Macron se rendra à Belem, en Amazonie brésilienne, pour prononcer un discours au sommet des chefs d'Etat et de gouvernement réunis par le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva avant le début de la COP30, conférence de l'ONU sur le climat.

Il terminera sa tournée vendredi à Mexico où il sera accueilli par la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum, un an après sa prise de fonctions.


Premières heures de semi-liberté pour Kohler et Paris à l'ambassade de France à Téhéran

Cécile Kohler et Jacques Paris, les deux Français sortis de prison en Iran vivent mercredi leurs premières heures de semi-liberté à l'ambassade de France, attendant de pouvoir quitter le pays à une date inconnue, que l'Iran semble vouloir lier au sort d'une Iranienne poursuivie en France. (AFP)
Cécile Kohler et Jacques Paris, les deux Français sortis de prison en Iran vivent mercredi leurs premières heures de semi-liberté à l'ambassade de France, attendant de pouvoir quitter le pays à une date inconnue, que l'Iran semble vouloir lier au sort d'une Iranienne poursuivie en France. (AFP)
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  • Le président français Emmanuel Macron s'est entretenu avec eux par visioconférence. "Ils l'ont remercié pour son engagement" afin d'obtenir leur libération, a aussi déclaré Pierre Cochard sur la radio RTL
  • Emanuel Macron a aussi parlé à son homologue iranien Massoud Pezeshkian, demandant la "libération pleine et entière", "le plus rapidement possible", de Cécile Kohler et Jacques Paris

PARIS: Cécile Kohler et Jacques Paris, les deux Français sortis de prison en Iran vivent mercredi leurs premières heures de semi-liberté à l'ambassade de France, attendant de pouvoir quitter le pays à une date inconnue, que l'Iran semble vouloir lier au sort d'une Iranienne poursuivie en France.

"Je les ai trouvés très heureux, très soulagés tous les deux par cette libération", a raconté mercredi matin sur la radio France Inter l'ambassadeur de France à Téhéran Pierre Cochard, qui est allé les chercher mardi à la sortie de la prison d'Evine, de sinistre réputation.

Le président français Emmanuel Macron s'est entretenu avec eux par visioconférence. "Ils l'ont remercié pour son engagement" afin d'obtenir leur libération, a aussi déclaré Pierre Cochard sur la radio RTL.

Emanuel Macron a aussi parlé à son homologue iranien Massoud Pezeshkian, demandant la "libération pleine et entière", "le plus rapidement possible", de Cécile Kohler et Jacques Paris.

A Soultz (Haut-Rhin, est de la France) où a grandi Cécile Kohler, dont le portrait orne la façade de la mairie, les habitants racontaient leur soulagement. "On est impatients qu'elle revienne, on espère que l'Iran ne va pas la retenir", confiait l'un d'eux, Mathieu Taquard.

Mardi soir, les parents ont pu parler par téléphone à leur fille: "Elle disait qu'elle était en forme, et qu'elle avait hâte de revenir", a résumé à l'AFP le maire de Soultz, Marcello Rotolo.

L'ambassadeur a donné quelques éléments sur le déroulé de leur libération.

"On s'est rendus à la prison d'Evine, qui est au nord de Téhéran. L'ambassade se trouve plutôt au centre, donc il y a un trajet important. On s'est présentés, il y avait plusieurs portes à franchir, une barrière. Cela a pris un peu de temps, en coordination avec les autorités iraniennes", a-t-il expliqué. "Les grands portes de la prison d'Evine se sont ouvertes, et on a pu croiser le regard de Cécile et Jacques", qui "avaient été informés à la dernière minute" de leur sortie.

"C'est évidemment un moment qu'on n'oublie pas", a-t-il dit. "Les premiers mots, c'étaient des larmes, des sourires mêlés de larmes. On est restés quelques instants ensemble et puis ensuite on est montés dans la voiture" pour gagner l'abri de l'ambassade, où ils sont protégés par la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques, en espérant pouvoir quitter rapidement l'Iran.

Iranienne à l'ambassade 

Les autorités iraniennes, qui les accusent d'espionnage, considèrent qu'ils sont en "libération conditionnelle", "libérés sous caution" et "placés sous surveillance jusqu'à la prochaine étape judiciaire".

"Nous n'allons ménager aucun effort pour obtenir leur retour en France dans les meilleurs délais", a promis le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot.

Professeure de lettres de 41 ans, et enseignant retraité de 72 ans, Cécile Kohler et Jacques Paris ont été arrêtés le 7 mai 2022, au dernier jour d'un voyage touristique en Iran.

Considérés comme des "otages d'Etat" par la France, qui à l'instar d'autres pays occidentaux accuse Téhéran de capturer des étrangers sur son sol pour négocier ensuite leur libération, ils étaient les deux derniers Français détenus sur le sol iranien.

Lourdement sanctionné par de nombreux membres de la communauté internationale, notamment pour ses activités nucléaires, l'Iran détiendrait selon des sources diplomatiques au moins une vingtaine d'Occidentaux qu'il pourrait utiliser comme levier pour obtenir la libération de certains de ses ressortissants à l'étranger ou obtenir des gages politiques.

Dans le cas de Cécile Kohler et Jacques Paris, Téhéran avait rendu publique en septembre la possibilité d'un accord de libération en échange de Mahdieh Esfandiari, une Iranienne arrêtée en France en février, accusée d'avoir fait la promotion du terrorisme sur les réseaux sociaux.

Téhéran semble afficher sa volonté de mettre en parallèle les deux dossiers, le chef de la diplomatie iranienne Abbas Araghchi annonçant mercredi matin que Mme Esfandiari, sous contrôle judiciaire depuis octobre dans l'attente de son procès en janvier, se trouvait désormais à l'ambassade d'Iran et "nous espérons qu'elle rentrera quand son procès sera achevé".

Les autorités françaises n'ont pas commenté cette annonce qui pourrait avoir des conséquences sur la date à laquelle les deux Français pourront quitter l'Iran.

L'élargissement de Cécile Kohler et Jacques Paris pourrait ouvrir la voie à un apaisement des relations entre l'Iran et la France. "Lorsqu'ils seront sur le territoire français, effectivement, cela ouvrira une possibilité de renouer des relations normales avec ce pays", a estimé M. Cochard.