Procès des attentats du 13 novembre 2015 en France : ce qu'on a appris, ce qui reste en suspens

Salah Abdeslam a nié être informé du projet d'attentat des membres du commando en provenance de Syrie qu'il est allé chercher en Allemagne et en Hongrie, en août et octobre 2015. (Photo, AFP)
Salah Abdeslam a nié être informé du projet d'attentat des membres du commando en provenance de Syrie qu'il est allé chercher en Allemagne et en Hongrie, en août et octobre 2015. (Photo, AFP)
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Publié le Lundi 06 juin 2022

Procès des attentats du 13 novembre 2015 en France : ce qu'on a appris, ce qui reste en suspens

Salah Abdeslam a nié être informé du projet d'attentat des membres du commando en provenance de Syrie qu'il est allé chercher en Allemagne et en Hongrie, en août et octobre 2015. (Photo, AFP)
  • Après avoir déposé les kamikazes du Stade de France, à Saint-Denis, près de Paris, il a raconté être retourné dans la capitale pour y accomplir sa mission
  • «Tac-tac-tac-tac»... Les rescapés des attaques du Bataclan ou des terrasses ont rappelé à la barre le son sec des armes utilisées par les assaillants du 13-Novembre

PARIS: Quelques « révélations » mais encore beaucoup de zones d'ombre : après neuf mois d'audience, le procès des attentats du 13 novembre 2015 à Paris et dans une de ses banlieues approche de son dénouement avec toujours autant de questions sans réponse. 

Les « aveux » incomplets d'Abdeslam 

Le seul membre encore en vie des commandos du 13-Novembre, Salah Abdeslam, a parlé. Muet pendant l'instruction, il est bravache au début du procès, qui a commencé dans la capitale française début septembre 2021 et où les réquisitions de l'accusation commenceront mercredi : « je suis un combattant de l'Etat islamique ». 

Au gré de ses interrogatoires, il a finalement expliqué à la cour qu'il avait eu pour mission de se faire exploser dans un bar du XVIIIe arrondissement de Paris mais qu'il avait volontairement renoncé à le faire « par humanité ». 

Celui que l'on a vu pleurer à l'audience a même fini par demander pardon aux victimes. 

Mais a-t-il tout dit ? Assurément non. 

Salah Abdeslam a ainsi nié être informé du projet d'attentat des membres du commando en provenance de Syrie qu'il est allé chercher en Allemagne et en Hongrie, en août et octobre 2015. C'était des « rapatriements humanitaires », a-t-il dit, osant une comparaison hasardeuse avec la guerre en Ukraine. 

Il est également resté vague sur la cible qui lui a été attribuée le 13 novembre 2015. « Je ne me souviens pas ». 

Selon lui, ce n'est que deux jours avant les attentats qu'Abdelhamid Abaaoud, le chef opérationnel des commandos, lui a demandé de porter une ceinture explosive. 

Après avoir déposé les kamikazes du Stade de France, à Saint-Denis, près de Paris, il a raconté être retourné dans la capitale pour y accomplir sa mission. 

« Je rentre dans le café, un bar pas très grand, avec beaucoup de monde. Je m'installe, je commande une boisson. Je regarde les gens autour de moi et je me dis que je vais pas le faire (...) J'ai renoncé par humanité, pas par peur. Je ne voulais pas les tuer ». 

Ensuite, poursuit-il, il repart avec sa voiture, qui tombe en panne. Il achète un téléphone et appelle un ami à qui il demande de venir le chercher. 

Il prend un taxi pour le sud de Paris, où il abandonne sa ceinture (défectueuse, a révélé l'enquête). Il se cache dans un hall d'immeuble avant que deux amis arrivés de Bruxelles ne le récupèrent et ne le ramènent en Belgique, où il se réfugie dans une planque louée par la cellule jihadiste... 

Pourquoi être allé au sud de Paris alors que ses amis venaient de Belgique ? A-t-il vraiment pris un taxi (jamais retrouvé) ou un métro où il aurait pu se faire exploser ? Dans un ordinateur, les enquêteurs ont déniché un organigramme avec un dossier intitulé « groupe métro ». 

Savait-il que sa ceinture était défectueuse ou a-t-il inventé un scénario en le découvrant ? 

Autre question sans réponse, pourquoi Salah Abdeslam aurait-il agi seul alors que les commandos de la salle de spectacle parisienne du Bataclan, des terrasses de cafés et de restaurants ainsi que du Stade de France étaient composés de trois personnes ? 

« Moi, j'ai pas tué », a souligné Salah Abdeslam. « Je mérite ce qui m'arrive, mais je ne vais pas payer pour ceux qui ont tué au Bataclan, aux terrasses, au Stade de France ». 

L'origine inconnue des kalachnikovs 

« Tac-tac-tac-tac »... Les rescapés des attaques du Bataclan ou des terrasses ont rappelé à la barre le son sec des armes utilisées par les assaillants du 13-Novembre. 

Mais d'où provenaient ces kalachnikovs ? Neuf mois de procès n'ont pas permis de le savoir. 

Sur le sujet, il faudra se contenter des explications parcellaires et pas toujours convaincantes des enquêteurs belges qui ont témoigné par visioconférence de Bruxelles. 

Ils ont dit qu'une semaine avant les attentats, l'un des accusés, Mohamed Bakkali, avait pris contact avec un certain Mohammed E. pour se procurer six kalachnikovs. 

Interpellé et poursuivi en Belgique, Mohammed E. n'est pas jugé à Paris. Une enquêtrice belge a évoqué des contacts avec des Kurdes et des Tchétchènes dans la région de Liège. 

Ces contacts ont-ils abouti ? Les vérifications tardives de cette piste, à partir de 2018, ne l'ont pas confirmé. 

Une autre piste mène à Rotterdam, aux Pays-Bas, et à Ali El Haddad Asufi, un autre des accusés du procès. 

L'enquête a démontré qu'en octobre 2015, il cherchait à se procurer des « Clio » auprès d'un de ses cousins. Des « Clio » ? De toute évidence, il ne s'agissait pas d'automobiles. 

Interrogé par la police néerlandaise, son cousin a parlé d'un nom de code désignant du cannabis. Mais pour les enquêteurs, il est plus vraisemblable que le nom « Clio » cachait en fait un achat de kalachnikovs. Mais il n'en ont pas la preuve. 

Six de ces armes ont été retrouvées sur les scènes de crime. 

Roissy et Schiphol visés ? 

Les aéroports de Roissy à Paris et de Schiphol à Amsterdam étaient-ils également visés le 13-Novembre ? 

L'enquête a démontré que, tandis que les dix membres des commandos et Mohamed Abrini se rendaient en région parisienne le 12 novembre, d'autres membres de la cellule jihadiste sont restés à Bruxelles pour coordonner leurs attaques. 

Parmi eux, le Suédois Osama Krayem et le Tunisien Sofien Ayari ont fait un aller-retour à Amsterdam le 13, quelques heures avant les attaques à Paris et à Saint-Denis. 

Pourquoi ? Un attentat était-il prévu à Schiphol le 13-Novembre ou ultérieurement ? A l'audience, Osama Krayem et Sofien Ayari ont opté pour le silence. 

Dans un ordinateur récupéré à l'intérieur d'une poubelle à Bruxelles en mars 2016, les enquêteurs ont retrouvé un dossier « 13-Novembre », créé six jours avant les attaques, avec cinq sous-dossiers dont un baptisé « Groupe Schiphol ». 

On ne saura pas non plus pourquoi le 13 novembre dans l'après-midi, la voiture qu'allait utiliser Salah Abdeslam pour déposer les kamikazes du Stade de France a fait une halte près du terminal 2 de l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle. 

S'agissait-il de récupérer ou de déposer quelqu'un ? De faire un repérage ? Pour les enquêteurs, le commando des terrasses, dont Abdelhamid Abaaoud, aurait pu ensuite s'en prendre à Roissy mais s'est égaré aux portes de Paris. Leur voiture a été retrouvée à Montreuil, en banlieue parisienne. 

Selon « Sonia », le témoin qui a permis de localiser Abdelhamid Abaaoud, abattu par la police à Saint-Denis le 18 novembre, le djihadiste envisageait de nouveaux attentats dans le quartier de La Défense, à proximité de Paris, le 19 novembre. 


Un influenceur franco-iranien jugé en juillet pour apologie du terrorisme

La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels. (AFP)
La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels. (AFP)
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  • La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels
  • Se présentant comme journaliste indépendant sur TikTok, où il est suivi par 330.000 abonnés, le mis en cause, qui s'est fait connaître avec une association d'aide aux plus démunis, y partage de nombreux contenus sur l'actualité du Moyen-Orient

BOBIGNY: Un influenceur franco-iranien sera jugé début juillet devant le tribunal de Bobigny (Seine-Saint-Denis) pour apologie du terrorisme, ont indiqué jeudi à l'AFP le parquet et ses avocats.

Shahin Hazamy, 29 ans, s'est vu "délivrer une convocation à une audience du 3 juillet pour apologie du terrorisme par un moyen de communication en ligne en public", a déclaré le parquet, confirmant son arrestation mardi révélée par le magazine Le Point.

La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels.

Se présentant comme journaliste indépendant sur TikTok, où il est suivi par 330.000 abonnés, le mis en cause, qui s'est fait connaître avec une association d'aide aux plus démunis, y partage de nombreux contenus sur l'actualité du Moyen-Orient.

"En s'en prenant à un journaliste la justice envoie un très mauvais signal à la liberté de la presse. Notre client Shahin Hazamy a subi un traitement inadmissible, avec une perquisition devant ses enfants en bas âge alors que les faits reprochés ont bientôt deux ans", ont déclaré à l'AFP ses avocats Nabil Boudi et Antoine Pastor.

Ces poursuites font suite à l'arrestation fin février d'une autre Iranienne en France, Mahdieh Esfandiari, actuellement écrouée pour apologie du terrorisme dans le cadre d'une information judiciaire confiée au Pôle national de lutte contre la haine en ligne (PNLH).

Annonçant cette nouvelle arrestation en France d'un de ses ressortissants, la télévision d'Etat iranienne a fustigé mercredi une "violation flagrante de la liberté d'expression dans un pays qui prétend être une démocratie".


Macron appelle à intégrer Mayotte dans la Commission de l'océan Indien

Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores. (AFP)
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  • "Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo
  • Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale

ANTANANARIVO: Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores.

"Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo.

La COI réunit les États insulaires (Madagascar, Comores, Maurice, Seychelles et La Réunion pour la France) dans le sud-ouest de l'océan Indien.

Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale.

"L'implication de nos populations, l'intégration de toutes nos îles dans les efforts de la COI pour la prospérité et la sécurité, dans la pluralité de ses dimensions maritime, alimentaire et pour la santé sont dans l'intérêt de nos peuples et de la région", a insisté M. Macron.

Il a suggéré toutefois d'"avancer de manière pragmatique vers cet objectif", sans réclamer l'intégration pleine et entière immédiate de l'archipel.

"La France est le premier bailleur de la COI", a-t-il aussi souligné, en précisant que l'Agence française du développement (AFD) gérait un "portefeuille de 125 millions d'euros de projets" de l'organisation.

"La COI est un modèle de coopération (...) Aucune de nos îles ne peut relever seule le défi", a-t-il ajouté, évoquant un "océan Indien profondément bousculé" par les défis planétaires actuels.

"Ensemble, en conjuguant nos atouts (..) nous pouvons tracer une voie nouvelle singulière", a-t-il assuré.

L'Union des Comores s'oppose à l'intégration de Mayotte dans la COI car elle conteste la souveraineté de la France sur Mayotte, restée française lorsque l'archipel des Comores est devenu indépendant en 1975.

Mayotte, tout comme les îles Éparses, autre territoire français hérité de la colonisation et revendiqué par Madagascar, sont au cœur du canal du Mozambique, voie majeure de transport maritime qui renferme d'importantes réserves en hydrocarbures.


Narcobanditisme à Marseille: le ministre de l'Intérieur annonce 21 arrestations dans «le haut du spectre»

Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) s'entretient avec la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence Martine Vassal et le président du Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier lors d'une visite d'inspection des mesures de sécurité publique à Marseille. (AFP)
Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) s'entretient avec la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence Martine Vassal et le président du Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier lors d'une visite d'inspection des mesures de sécurité publique à Marseille. (AFP)
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  • Les personnes arrêtées sont de "hauts responsables qui tiennent un réseau à la Castellane", "pas du menu fretin", a-t-il insisté: ce "ne sont pas des petites mains, des charbonneurs, mais des responsables de haut niveau du narcobantitisme"
  • Toutes ces interpellations jeudi matin n'ont cependant pas eu lieu à Marseille, pour ce réseau qui présente des "ramifications nationales mais avec des racines marseillaises", a ajouté le ministre sans plus de détail

MARSEILLE: Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a annoncé jeudi un coup de filet avec 21 interpellations de trafiquants appartenant au "haut du spectre" du narcobanditisme marseillais, lors d'un déplacement à Marseille.

Une opération "a eu lieu très tôt ce matin avec 21 interpellations liées au narcobanditisme, dans le haut de spectre, qui doit nous permettre de démanteler un réseau important sur Marseille", qui tenait la cité de la Castellane, dans les quartiers populaires du nord de la ville, a déclaré Bruno Retailleau lors d'une conférence de presse.

Les personnes arrêtées sont de "hauts responsables qui tiennent un réseau à la Castellane", "pas du menu fretin", a-t-il insisté: ce "ne sont pas des petites mains, des charbonneurs, mais des responsables de haut niveau du narcobantitisme", a insisté M. Retailleau.

Selon une source policière, cette enquête portait notamment sur du blanchiment.

Toutes ces interpellations jeudi matin n'ont cependant pas eu lieu à Marseille, pour ce réseau qui présente des "ramifications nationales mais avec des racines marseillaises", a ajouté le ministre sans plus de détail.

Au total, 170 enquêteurs ont été mobilisés pour ce coup de filet qui est, selon le ministre, "un coup dur", "sinon mortel", porté à ce réseau.

La cité de la Castellane, vaste ensemble d'immeubles blancs en bordure d'autoroute, est connue pour être un haut lieu marseillais de ces trafics de stupéfiants qui empoisonnent le quotidien des habitants. En mars 2024, Emmanuel Macron s'y était rendu pour lancer des opérations "place nette XXL" contre les trafiquants et depuis la présence policière y était quasi constante, mais si le trafic était moins visible il se poursuivait notamment via les livraisons.

Ce coup de filet n'a a priori "pas de lien" avec les récents faits visant des prisons en France, a également précisé le ministre.

Le ministre était à Marseille pour dresser un premier bilan des plans départementaux de restauration de la sécurité du quotidien, lancés en février, avec par exemple mercredi 1.000 fonctionnaires mobilisés dans les Bouches-du-Rhône qui ont procédé à 10.000 contrôles d'identité.

Au total, 106 personnes ont été interpellées, dont une trentaine d'étrangers en situation irrégulière, dans le cadre d'une opération "massive" et "visible".