DAVOS : Trois mois après l'invasion de l'Ukraine par la Russie, la guerre et les risques qu'elle fait peser sur la reprise de l'économie mondiale seront au coeur d'une réunion des élites de la planète, qui se retrouvent à partir de lundi à Davos.
Le Forum économique mondial (WEF) fait son retour dans la station de ski suisse après deux ans de parenthèse pour cause de pandémie de Covid-19. En 2021, il avait dû tenir sa traditionnelle réunion annuelle en ligne. Et le variant Omicron a encore obligé cette année à le reporter de janvier à mai.
"Nos premières pensées vont à la guerre en Ukraine", a assuré le fondateur du WEF, Klaus Schwab, en présentant le programme de cette réunion intervenant dans ce qu'il a qualifié de "circonstances politiques, économiques et sociales (...) sans précédent".
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky sera le premier chef d'Etat à intervenir. Il devrait profiter de cette nouvelle tribune pour exhorter le monde à fournir davantage d'aides, tant financières que militaires, et peut-être renouveler la demande de Kiev pour adhérer à l'UE.
Son discours, à 09H15 GMT, se tiendra en visioconférence. Mais nombre de responsables politiques ukrainiens ont prévu de faire le voyage en personne, parmi lesquels le ministre des Affaires étrangères Dmytro Kouleba ou le maire de Kiev Vitali Klitschko.
"Notre principale demande au monde ici, c'est: n'arrêtez pas de soutenir l'Ukraine", a résumé dimanche soir devant la presse Ivanna Klympush, une des parlementaires ukrainiennes qui ont fait le voyage à Davos, appelant à s'assurer que la Russie "ne puisse pas conduire de nouvelle guerre contre qui que ce soit dans la région".
"Nous avons besoin d'armes plus que de n'importe quoi d'autre", a aussi dit Anastasia Radina, une autre parlementaire. "Des armes comme celles de l'Otan, c'est ce qui nous aide à gagner la guerre (...) et garantir que les vies des civils sont sauves pour les générations à venir".
Dans le sillage des sanctions occidentales contre la Russie, le WEF a en revanche exclu cette année les Russes, qui représentent habituellement un gros contingent de participants.
Et la "maison russe" des éditions précédentes va céder la place à une "maison des crimes de guerres russes", où seront organisés divers événements de soutien avec des personnalités ukrainiennes.
«Tempête de crises»
La guerre en Ukraine ébranle aussi l'économie mondiale qui commençait à peine à se remettre du choc de la pandémie. Elle alimente en particulier la flambée des prix de l'énergie et de l'alimentation, sur fond de craintes pour les approvisionnements, et crée une véritable crise du coût de la vie.
Dans un rapport publié lundi juste avant l'ouverture du Forum de Davos, Oxfam dit s'attendre à ce que 263 millions de personnes tombent dans l'extrême pauvreté cette année, soit un million toutes les 33 heures. Un rythme que l'ONG met en regard avec la création d'un nouveau milliardaire toutes les 30 heures pendant la pandémie.
"Les milliardaires arrivent à Davos pour célébrer une incroyable poussée de leurs fortunes", dénonce Gabriela Bucher, une responsable d'Oxfam, dans un communiqué. "Dans le même temps, on est en train de revenir sur des décennies de progrès concernant l'extrême pauvreté, avec des millions de personnes confrontées à l'augmentation impossible du coût pour simplement rester en vie".
"Des parts toujours plus grandes de la population mondiale sont confrontées à des choix existentiels, ou même tombent dans l'extrême pauvreté", a lui-même reconnu Klaus Schwab. "Nous devons faire face à ces questions à Davos, et la crise alimentaire mondiale nécessite notre attention immédiate", a-t-il affirmé.
La réunion de Davos se tient au milieu d'une véritable "tempête de crises pour les droits de l'homme", a aussi rappelé la secrétaire générale d'Amnesty International, Agnès Callamard, évoquant "les crimes de guerre de la Russie en Ukraine, le retour terrifiant sur le droit à l'avortement aux Etats-Unis, l'urgence climatique toujours négligée, l'échec à assurer un accès universel au vaccin".
Et d'en appeler au "devoir moral" des invités du Forum, qui "doivent utiliser leur vaste richesse et influence pour mettre fin au statu quo".