PARIS: Un rapport de deux ONG sur le fonctionnement du programme chimique syrien révèle les « stratagèmes » déployés par le pouvoir syrien pour « contourner l'accord de démantèlement de son arsenal chimique » et conserver une « capacité offensive », rapporte mardi le journal français Le Monde qui a eu copie du rapport.
Lundi, « deux ONG à la pointe de la lutte contre l'impunité dans le conflit syrien, Open Society Justice Initiative (OSJI) et Syrian Archive, ont remis à plusieurs organes d'enquête nationaux et internationaux un rapport d'une épaisseur et d'une précision inédites sur le fonctionnement de ce programme » de fabrication d'armes chimiques du régime syrien, « qui a causé la mort de centaines de civils depuis 2011 », indique le Monde.
Le Monde, le Washington Post, le Financial Times et la Süddeutsche Zeitung ont obtenu une copie exclusive de ce rapport de 90 pages, « fruit de trois années de travail » et qui « révèle comment les autorités de Damas se sont jouées de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC), l'organe censé avoir démantelé l'arsenal chimique syrien ».
Le rapport repose « sur l'analyse de sources ouvertes, l'exploitation de données extraites d'un registre des Nations unies » et les « témoignages d'une cinquantaine de fonctionnaires syriens ayant fait défection ces dernières années ».
« La plupart étaient employés du Centre d'études et de recherches scientifiques (CERS), l'organisme d'Etat chargé du développement de l'armement conventionnel et non conventionnel syrien » rapporte Le Monde.
En août 2013, une attaque chimique imputée au régime syrien dans des zones rebelles près de Damas fait plus de 1 400 morts, selon les Etats-Unis.
Une seconde attaque chimique, elle aussi au gaz sarin et imputée au régime syrien, a été perpétrée le 4 avril 2017 à Khan Cheikhoun (80 civils tués), entre Damas et Alep.
« Notre recherche démontre que la Syrie dispose d'un programme d'armes chimiques toujours robuste », explique Steve Kostas, de l'OSJI, cité par Le Monde.
« Les Etats membres de l'OIAC doivent demander des comptes à la Syrie pour ses violations continues de la convention sur les armes chimiques et doivent appeler à un renforcement des efforts pour juger les auteurs de ces crimes », dit-il.
Les sources du rapport « décrivent les stratagèmes déployés par le pouvoir syrien pour égarer les limiers de l'OIAC et conserver une capacité offensive dans le domaine chimique: transfert d'une partie du stock d'armes et de substances létales dans les bases de la Garde républicaine, l'unité d'élite du régime; traque, incarcération et, dans certains cas, élimination des employés jugés +douteux+; et mise en place d'une filière secrète d'importation de produits entrant dans la composition d'agents neurotoxiques, comme le sarin », décrit Le Monde.