BAGDAD: Bagdad a arrêté lundi à Mossoul l'ancien gouverneur de la grande ville du Nord, en fuite depuis un an et demi et qui devra désormais répondre du détournement de plus de 54 millions d'euros, notamment des aides aux déplacés de guerre.
Nawfel Akoub, limogé avec pertes et fracas par Bagdad après le naufrage en mars 2019 d'un bateau sur le Tigre ayant fait quelque 150 morts un jour de fête des mères, a été appréhendé à Mossoul lundi, a indiqué à l'AFP une source au sein de la Commission pour la transparence, l'organe gouvernemental anticorruption.
L'homme également visé par des sanctions américaines s'était rendu au tribunal pour «payer une caution dans une autre affaire» et, «parce qu'un mandat d'arrêt avait été émis pour d'autres faits de corruption, il a été arrêté sur place», a détaillé cette source.
M. Akoub avait d'abord passé un temps au Kurdistan irakien, à quelques dizaines de kilomètres de là, une région autonome où de nombreux responsables recherchés par la justice trouvent refuge, sans être inquiétés par les forces fédérales dans ces frontières.
L'ancien responsable est accusé par la Commission d'avoir détourné des fonds publics avec la complicité de fonctionnaires au sein du gouvernorat de Ninive,dont le budget s'élève à 679 millions d'euros.
Il lui est notamment reproché d'avoir détourné près de dix millions d'euros d'aide aux déplacés ayant fui le groupe jihadiste Etat islamique (EI), en recourant à «des factures établies par des promoteurs au Kurdistan irakien» sans qu'«aucun reçu n'ait été trouvé» pour des projets fantômes d'hôpitaux par exemple, selon la Commission.
Les sommes débitées, officiellement allouées aux centaines de milliers de déplacés qui n'ont toutefois pas vu leurs conditions de vie s'améliorer, ont été transférées au Kurdistan, et l'Etat doit encore remettre la main dessus.
L'Irak, 16e pays le plus corrompu au monde selon Transparency International, a déjà perdu plus de 400 milliards d'euros d'argent public depuis 2003, soit plus de trois fois le budget de l'Etat et deux fois le PIB du pays, deuxième producteur de pétrole de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep).
Et surtout, dénoncent les militants anticorruption, même après les rares coups de filet, les responsables arrêtés ne sont obligés que de rendre l'argent détourné, et non les profits générés avec ces deniers, pourtant bien plus importants et qui n'auraient jamais existé sans la corruption.