LJUBLJANA, Slovénie: Il dirigeait jusqu'à peu la principale compagnie d'électricité slovène. Robert Golob, 55 ans, s'apprête désormais à prendre les rênes de la Slovénie, à qui il a promis de rendre la "liberté" après le houleux mandat du conservateur Janez Jansa.
Étrange fin de campagne pour le vainqueur des législatives de dimanche, exclu des festivités pour cause de contamination à la Covid-19.
"Les gens veulent des changements et nous ont fait confiance", s'est-il félicité dans un discours délivré depuis son domicile, loin de l'ambiance survoltée de son QG.
Étrange parcours aussi pour cet homme d'affaires, expert en énergie solaire, entré dans la bataille il y a quelques mois à peine dans ce pays alpin de 2 millions d'habitants.
Né le 23 janvier 1967, cet ingénieur de formation, qui a étudié aux Etats-Unis dans le cadre du prestigieux programme de bourses Fulbright, avait certes déjà fait des incursions en politique.
Il avait été notamment secrétaire d'Etat chargé de l'Energie au tournant des années 2000, mais il avait rapidement changé de cap et fondé en 2002 sa propre entreprise dans l'énergie.
Chevelure argentée
Nommé par la suite à la tête du fournisseur d'électricité GEN-I, passé sous la coupe de l'Etat au fil de restructurations, Robert Golob est évincé l'an dernier.
Ce père de trois enfants, reconnaissable à sa chevelure mi-long argentée, fustige alors une décision politique et décide de défier le Premier ministre Jansa.
Pour éviter de lourdes démarches administratives, il reprend en main un petit parti écologiste qu'il rebaptise Mouvement de la liberté.
Ce coup de maître lui a permis de s'arroger dimanche plus de 34% des voix, contre 23,5% pour le Parti démocratique slovène (SDS) de son adversaire.
"Une surprise", de l'aveu même de son collaborateur Urska Klakocar Zupancic. Les sondages avaient pour la plupart prédit une course serrée.
Le charismatique candidat a sillonné le pays à bord de son bus, avec un enthousiasme de gamin. Et en toile de fond, la colère de nombreux Slovènes devant l'action du gouvernement et ses atteintes supposées à la démocratie.
Apprécié pour son ton mesuré contrastant avec la personnalité clivante de son rival, il a évité Twitter pour mieux se démarquer, préférant Facebook ou Instagram.
"Ce sera un petit pas pour la démocratie, mais un grand pas pour la Slovénie", avait-il dit pour expliquer sa décision.
Au cours de la campagne, il a essuyé des critiques pour son salaire élevé - 196.000 euros par an, soit plus de dix fois le salaire moyen slovène -, sans qu'elles n'entament sa popularité.
«Capable d'apprendre»
Selon l'analyste Valdo Miheljak, Robert Golob a montré qu'il était "capable d'apprendre" de ses erreurs.
"Au début, je l'ai pris pour un candidat néo-libéral, mais il a fortement infléchi ses positions", par exemple dans les domaines de la santé et de l'éducation, souligne ce professeur de l'université de Ljubljana.
Il a également "prouvé ses talents oratoires", ajoute-t-il, d'autres experts pointant toutefois son inexpérience.
"Nous sommes prudemment optimistes, nous espérons qu'il saura tenir ses engagements", a commenté de son côté Jansa Jenull, un des chefs de file du mouvement de contestation.
"Il a promis une meilleure communication avec la société civile", salue-t-il.
Robert Golob avait fait de ce vote du 24 avril "un référendum sur la démocratie en Slovénie". Il a été entendu, alors que la mobilisation s'est élevée à près de 70%, au plus haut depuis 2000.
Le candidat a aussi promis de restaurer la confiance avec la Commission européenne, passablement mise à mal par le Premier ministre Jansa qui a préféré cultiver ses relations avec le dirigeant nationaliste hongrois Viktor Orban.
"Ce pays a toujours été tourné vers l'Europe de l'Ouest et je suis convaincue que nous retournerons dans notre famille", avait confié M. Golob à l'AFP pendant la campagne.