ZAPORIJJIA: Moscou a annoncé vendredi viser le contrôle total du sud de l'Ukraine et de la région du Donbass près de deux mois après le début de l'invasion de ce pays par l'armée russe, accusée par l'ONU d'actions "pouvant relever de crimes de guerre".
"L'un des objectifs de l'armée russe est d'établir un contrôle total sur le Donbass et le sud de l'Ukraine", a déclaré un haut responsable militaire russe parlant d'une "deuxième phase de l'opération spéciale" visant, entre autres, à "assurer un couloir terrestre vers la Crimée".
Moscou a revu ses plans à la baisse et retiré fin mars ses troupes de la région de Kiev et du nord et l'Ukraine, qui a obtenu ces derniers jours une aide en armements plus substantielle des Occidentaux, continue d'assurer qu'elle peut repousser l'armée russe hors de son sol.
"Ils ne peuvent que retarder l'inévitable - le moment où les envahisseurs devront quitter notre territoire, en particulier Marioupol", a dit jeudi soir le président ukrainien Volodymyr Zelensky.
Sur le terrain, les forces ukrainiennes continuent selon lui "de contenir les attaques des envahisseurs russes" dans l'Est et le Sud. Selon lui, le "défi numéro un" est actuellement "de fournir à nos militaires toutes les armes nécessaires".
Le port stratégique de Marioupol, que Moscou a assuré jeudi avoir "libéré", résiste encore aux forces russes, selon Kiev, qui a affirmé vendredi que les combattants ukrainiens "tiennent bon" dans l'immense complexe métallurgique Azovstal où sont également retranchés des civils.
"Le succès de l'offensive russe dans le sud dépend du sort de Marioupol", a pour sa part estimé vendredi à l'AFP le gouverneur régional, Pavlo Kyrylenko, jugeant cette ville "stratégique" pour les Ukrainiens dans leur défense de la région, et pour les Russes dans leur volonté d'assurer une liaison terrestre complète vers la Crimée annexée.
"L'ennemi concentre tous ses efforts sur Marioupol", a ajouté M. Kyrylenko, alors que les derniers combattants ukrainiens sont retranchés dans Azovstal, avec "jusqu'à 300 civils".
Exécutions sommaires
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a affirmé mercredi qu'il y avait encore quelque "1.000 civils, femmes et enfants" et des "centaines de blessés" dans l'aciérie.
Le président du Conseil européen Charles Michel, qui représente les Etats membres de l'UE, a demandé vendredi à Vladimir Poutine, au cours d'un entretien téléphonique, de garantir la mise en place de couloirs humanitaires à Marioupol à l'occasion de la Pâque orthodoxe, célébrée dimanche.
Le Kremlin a lui affirmé à l'issue de cet entretien que Kiev refusait la reddition des derniers soldats ukrainiens présents dans la zone industrielle, tandis que l'armée russe se disait prête à observer "à tout moment" une trêve "sur tout ou partie" de ce site pour permettre l'évacuation de civils et la reddition de combattants.
Les autorités ukrainiennes accusent régulièrement les forces russes de cibler des voies utilisées par des personnes fuyant les combats.
"Dans les territoires provisoirement occupés, des unités de l'ennemi continuent de bloquer les mouvements de la population locale", ainsi que "la livraison de chargements d'aide humanitaires à partir de l'Ukraine", assure vendredi le ministère ukrainien de la Défense. Pour lui, "Il y a des cas de civils et de volontaires fusillés".
L'ONU a répertorié vendredi une série d'actions des militaires russes pouvant relever, selon elle, de crimes de guerre.
"Les forces armées russes ont bombardé et pilonné de manière aveugle des zones peuplées, tuant des civils et détruisant des hôpitaux, des écoles et d'autres infrastructures civiles, autant d'actions pouvant relever des crimes de guerre", a jugé une porte-parole du Haut commissariat des droits de l'homme à Genève.
L'Organisation des Nations unies dit avoir documenté le "meurtre, y compris certains par exécution sommaire" de 50 civils dans la ville de Boutcha en banlieue de Kiev.
Le chef de l'ONU se rendra en Russie et en Ukraine la semaine prochaine
"Le mardi 26 avril, le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres arrivera à Moscou pour des discussions avec le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov. Il sera également reçu par le président Vladimir Poutine", a déclaré vendredi le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.
L'ONU a par la suite confirmé cette visite qui signera la première rencontre entre M. Guterres et M. Poutine depuis le début de l'offensive russe en Ukraine.
Le chef de l'ONU visitera ensuite l'Ukraine où il "aura un rendez-vous avec le ministre des affaires étrangères Dmytro Kuleba et sera reçu par le président Volodymyr Zelensky le 28 avril", a annoncé l'organisation dans un communiqué.
Guterres à Moscou
L'Ukraine et les pays occidentaux ont accusé les troupes russes de "massacre" et de "crimes de guerre" après la découverte de dizaines de cadavres dans cette petite ville au nord-ouest de la capitale qui a été reprise le 31 mars par les soldats ukrainiens.
Des journalistes de l'AFP qui ont pu s'y rendre dès le 2 avril ont vu les corps de vingt hommes habillés en civil éparpillés sur plusieurs centaines de mètres dans une rue de cette localité. L'un était couché sur son vélo, d'autres avaient à côté d'eux des sacs de provisions. Un autre avait les mains liées dans le dos.
La police britannique a de son côté dit vendredi avoir reçu une cinquantaine de signalements de possibles crimes de guerre dans le cadre d'un appel à témoins lancé pour alimenter l'enquête de la Cour pénale internationale (CPI) et s'attendre à en obtenir plus avec l'arrivée au Royaume-Uni d'un nombre croissant de personnes ayant fui l'Ukraine.
Jeudi, le président de Etats-Unis Joe Biden a annoncé une nouvelle aide militaire de 800 millions de dollars à l'Ukraine.
Paris, qui jusqu'à présent s'était gardé de préciser les types d'armements livrés à Kiev, a dit avoir fourni des missiles antichars Milan ainsi que des canons automoteurs Caesar à l'Ukraine pour l'aider à faire face à l'invasion russe.
Naufrage du croiseur Moskva la Russie donne un bilan d'un mort et 27 disparus
"Un militaire a été tué et 27 autres membres d'équipage sont portés disparus", a déclaré le ministère, cité par les agences de presse russes, affirmant que les autres personnes se trouvant à bord, au nombre de 396, avaient été évacuées.
"Le ministère de la Défense apporte tout le soutien et l'assistance nécessaires aux familles et amis du défunt et des disparus", a-t-il ajouté.
Le Moskva, navire amiral de la flotte russe en mer Noire pouvant officiellement compter jusqu'à 680 membres d'équipage, a coulé le 14 avril.
Le naufrage du Moskva est largement considéré comme une humiliation pour la Russie et sa flotte, et même des commentateurs pro-Kremlin ont réclamé des explications aux autorités.
Les négociations entre Moscou et Kiev visant à régler le conflit "patinent", a déclaré vendredi le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov, affirmant qu'une proposition russe "remise aux négociateurs ukrainiens il y a cinq jours" et "formulée en prenant en compte leurs commentaires reste sans réponse".
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, qui avait envoyé mardi des lettres au président Poutine et à son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, pour leur demander d'être reçu à Moscou et à Kiev, sera reçu à Moscou par Vladimir Poutine et Sergueï Lavrov, a annoncé vendredi le Kremlin.