Une dizaine de frappes russes sur l'est de l'Ukraine, «nouvelle phase» de la guerre

Les forces russes concentrent leurs efforts sur la prise de contrôle total de la région du Donbass. (Archive/Reuters)
Les forces russes concentrent leurs efforts sur la prise de contrôle total de la région du Donbass. (Archive/Reuters)
Un homme regarde le cratère d'une explosion à la suite d'une attaque russe tôt le matin, à Kramatorsk, en Ukraine, le lundi 18 avril 2022. (AP Photo/Petros Giannakouris)
Un homme regarde le cratère d'une explosion à la suite d'une attaque russe tôt le matin, à Kramatorsk, en Ukraine, le lundi 18 avril 2022. (AP Photo/Petros Giannakouris)
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Publié le Mardi 19 avril 2022

Une dizaine de frappes russes sur l'est de l'Ukraine, «nouvelle phase» de la guerre

  • Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a affirmé qu'une «nouvelle phase de l'opération» militaire russe avait commencé
  • Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a demandé aux deux parties d'arrêter les combats pour une «pause humanitaire» de quatre jours à l'occasion de la Pâque orthodoxe

KRAMATORSK/ NATIONS UNIES: La Russie a déclaré mardi avoir mené une dizaine de frappes sur l'est de l'Ukraine qu'elle entend "libérer", le chef de la diplomatie russe évoquant le début d'une "nouvelle phase" de la guerre qui dure depuis bientôt deux mois.  

Au lendemain de l'annonce par Kiev d'une nouvelle offensive d'ampleur de Moscou dans l'est de l'Ukraine, les forces armées ukrainiennes ont confirmé que les Russes avait "intensifié leur offensive" tout le long de la ligne de front dans l'est du pays. 

Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a affirmé qu'une "nouvelle phase de l'opération" militaire russe avait commencé. "Je suis convaincu que cela sera un moment très important pour cette opération spéciale", a-t-il déclaré à la presse indienne. 

Le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou a dit suivre le "plan de libération" des "républiques" séparatistes prorusses de Donetsk et Lougansk (est de l'Ukraine), établi par le président russe Vladimir Poutine qui a reconnu leur indépendance. 

Les forces aériennes russes ont tiré des "missiles de haute précision" et neutralisé 13 places fortes de l'armée ukrainienne, a affirmé son ministère, appelant les Ukrainiens à la reddition. 

Les autorités locales ukrainiennes ont appelé les habitants à fuir cet "enfer", malgré l'absence de couloirs humanitaires. 

Ces dernières semaines, après avoir échoué à prendre le contrôle de la région de Kiev, la campagne militaire russe s'est réorientée sur le bassin du Donbass, partiellement contrôlé par les forces prorusses depuis 2014. 

La "bataille pour le Donbass" a commencé, a affirmé lundi le président ukrainien Volodymyr Zelensky. "Une très grande partie de l'ensemble de l'armée russe est désormais consacrée à cette offensive." 

Selon un haut responsable américain du département de la Défense, la Russie a augmenté sa présence militaire dans l'est et le sud de l'Ukraine, portant à 76 le total de bataillons dans le pays. 

 

Guterres dénonce l'offensive russe à l'est et demande 4 jours de «pause humanitaire» pour la Pâque orthodoxe

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a dénoncé mardi l'offensive russe dans l'est de l'Ukraine et demandé aux deux parties d'arrêter les combats pour une "pause humanitaire" de quatre jours à l'occasion de la Pâque orthodoxe. 

"Je demande aujourd'hui une pause humanitaire de quatre jours pour la semaine sainte", de jeudi à dimanche, "pour permettre l'ouverture d'une série de couloirs humanitaires" en Ukraine, a déclaré le chef de l'ONU. 

Cette suspension des combats servirait à l'évacuation des civils "des zones de confrontations actuelles et attendues", avec l'aide de la Croix-Rouge, et à l'acheminement de l'aide humanitaires "dans les zones les plus touchées comme Marioupol, Kherson, Donetsk et Lougansk", avance-t-il. 

"Plus d'un tiers" des 12 millions de personnes qui ont besoin d'aide humanitaire en Ukraine se trouvent dans ces quatre villes, selon lui. 

"Nous prévoyons que ce chiffre va atteindre 15,7 millions -- soit 40% des Ukrainiens qui sont encore dans le pays", a-t-il ajouté. 

"Cette année, la semaine sainte orthodoxe est observée à l'ombre d'une guerre qui représente la négation totale du message de la Pâque", "une saison pour le renouveau, la résurrection et l'espoir", a regretté Antonio Guterres, appelant encore au dialogue entre Russes et Ukrainiens. 

"Cette Pâque coïncide avec une offensive russe dans l'est de l'Ukraine. L'intense concentration des forces et de la puissance de feu rend cette bataille inévitablement plus violente, sanglante et destructrice", a encore dit le secrétaire général. 

« L'enfer » 

L'AFP a vu des bus transportant des militaires ukrainiens se diriger vers Kramatorsk, la capitale du Donbass, tandis que les autorités locales appelaient la population civile à évacuer. 

"C'est l'enfer", s'est ému lundi soir sur Facebook le gouverneur ukrainien de la région de Lougansk, Serguiï Gaïdaï. Les combats "sont incessants" dans plusieurs villes. 

"Partez!", a-t-il ordonné mardi à ses concitoyens. "Des milliers d'habitants de Kreminna n'ont pas eu le temps de partir et maintenant, ils sont otages des Russes." 

Kreminna, qui comptait environ 18 000 habitants avant la guerre et est située à une cinquantaine de kilomètres au nord-est de Kramatorsk, est tombée aux mains des Russes, selon lui.  

Des combats ont lieu également à Roubijné (15 km à l'est de Kreminna) et à Popasna (75 km au sud), selon M. Gaïdaï, qui a évoqué un bilan de 200 morts. 

L'armée russe "concentre ses efforts" pour s'emparer de Marioupol (sud-est), Popasna, Roubijné, Severodonetsk --tout près de Lyssytchansk, dont le maire Oleksandr Zaïka a qualifié sur Telegram la situation de "très, très tendue". 

"Je vous en supplie: partez tant qu'il existe cette possibilité", a-t-il lancé. 

Dans la région voisine de Donetsk, celle de Lougansk, les Russes bombardent "en direction de Mariïnka, Otcheretyne et Avdiïvka", a signalé mardi son gouverneur, Pavlo Kyrylenko, sur Telegram. 

Lundi, huit civils sont morts dans ces régions - dont une famille voulant fuir Kreminna - et une personne au moins mardi, selon les autorités locales. 

Faute d'accord avec les Russes, aucun couloir d'évacuation de civils n'a pu être organisé mardi dans le pays, et ce pour la troisième journée consécutive, avait indiqué mardi matin la vice-Première ministre ukrainienne Iryna Verechtchouk. 

La Russie a cependant annoncé peu après avoir ouvert un couloir censé permettre aux forces ukrainiennes ayant décidé de se rendre de sortir de Marioupol, port stratégique sur la mer d'Azov, assiégé depuis début mars par les troupes russes. 

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Une image diffusée par le conseil municipal de Marioupol montrent des nuages de fumée s'élevant au-dessus de l'aciérie Azovstal et l'entrée détruite du chantier naval d'Azov, le 18 avril 2022. (Photo, AFP)

Nouvel ultimatum 

Dans cette ville où les autorités craignent la mort de 20 000 à 22 000 civils, les combats se concentrent autour du complexe métallurgique d'Azovstal. 

Des combattants ukrainiens y sont retranchés, mais aussi "au moins 1 000 civils, la plupart des femmes, des enfants et des personnes âgées, dans les abris souterrains" de l'usine, a affirmé mardi le conseil municipal de Marioupol sur Telegram. 

"Il y a des combats en cours, des combats de rue (...) mais aussi des combats de chars", a affirmé M. Kyrylenko sur la chaîne américaine CNN, assurant que les forces ukrainiennes résistaient toujours. 

La Russie, qui a appelé mardi les défenseurs de Marioupol à cesser "leur résistance insensée" après un premier ultimatum dimanche, est déterminée à s'emparer de ce port. 

Sa prise lui permettrait de consolider ses gains territoriaux le long des côtes de la mer d'Azov, en reliant le Donbass à la Crimée, et de libérer des troupes pour d'autres opérations. 

Un pétrolier russe saisi en Grèce

Un pétrolier russe a été saisi en Grèce en vertu des sanctions européennes liées à la guerre en Ukraine, a-t-on appris mardi auprès des gardes-côtes grecs.
Le Pegas, qui devait se rendre au port turc de Marmara, se trouve actuellement ancré à Karystos, dans le sud de l'île grecque d'Eubée, selon le site internet de circulation maritime internationale Marine Traffic.
"Le pétrolier a été saisi le 15 avril en vertu des sanctions européennes, avec 19 Russes à bord", a déclaré une porte-parole des gardes-côtes grecs.
Elle a précisé que la saisie du bâtiment ne portait pas sur sa cargaison, qui devrait être transvasée sur un autre pétrolier, sans donner plus de détails sur la date de l'opération.
Selon des médias grecs, le tanker russe a rencontré des problèmes de moteur et était escorté par un remorqueur vers la péninsule du Péloponnèse, dans l'ouest de la Grèce, quand il a été contraint de mouiller à Karystos en raison des mauvaises conditions météorologiques.

Combats sur tous les fronts 

Dans l'est toujours, des divisions de missiles antiaériens Tor ont été transférées dans la région de Kharkiv et des systèmes antiaériens S-400 et S-300 ont été déployés dans la région russe de Belgorod près de la frontière avec l'Ukraine, selon l'état-major ukrainien. 

A Kharkiv même, deuxième ville d'Ukraine, de nouveaux bombardements ont fait mardi trois morts et 16 blessés. 

La Russie a aussi fait état de dizaines d'autres frappes de missiles dans le sud de l'Ukraine, autre ligne de front. 

Moscou, qui occupe déjà la ville de Kherson, "concentre ses forces" pour avancer vers la région de Mykolaïv, plus à l'ouest, où les bombardements se sont intensifiés, a indiqué mardi Natalia Goumeniouk, porte-parole du commandement sud des forces armées ukrainiennes. "La situation est tendue." 

"Tout le monde s'attendait à une offensive comme le 24 février avec une grande force terrible", a cependant souligné mardi le conseiller de la présidence ukrainienne, Oleksiy Arestovytch à la télévision ukrainienne. "Or, elle se déroule prudemment. Ce sont des unités russes qui tentent d'avancer. Dans le sud, ils tentent de nous encercler, cela a commencé avant-hier." 

La ville occidentale de Lviv, proche de la frontière polonaise et longtemps épargnée, a aussi subi de "puissantes" frappes lundi qui ont fait sept morts, d'après les autorités locales. 

Non loin de Lviv, un important dépôt d'"armements étrangers", provenant des Etats-Unis et de l'Union européenne, a été détruit, selon Moscou. 

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Derniers développements de la guerre en Ukraine lancée par la Russie, avec photos. (Graphique, AFP)

Prisonniers libérés, diplomates expulsés 

Soixante-seize Ukrainiens ont été libérés dans un nouvel échange de prisonniers avec la Russie, a annoncé Kiev mardi, sans révéler le nombre de Russes libérés. Moscou n'a pas confirmé cet échange.  

La Russie a en revanche indiqué avoir expulsé 36 diplomates belges et néerlandais, en représailles à une mesure similaire prise par Bruxelles et La Haye.  

Alors que les Etats-Unis ont annoncé lundi l'arrivée aux frontières ukrainiennes des premières cargaisons de leur nouvelle tranche d'aide militaire (d'un montant de 741 millions d'euros), le ministre russe Choïgou a accusé les Etats-Unis et les Occidentaux de "tout faire pour faire durer au maximum" la guerre, poussant Kiev à "se battre jusqu'au dernier des Ukrainiens".  

Le président américain Joe Biden devait participer mardi à une réunion virtuelle consacrée à l'Ukraine avec ses "alliés et partenaires", dont la liste n'a pas été dévoilée, selon un responsable de la Maison Blanche. 

« Ondes sismiques » économiques  

La guerre en Ukraine, qui a poussé près de cinq millions d'Ukrainiens à fuir leur pays, a déclenché des "ondes sismiques" pour l'économie mondiale, a prévenu Pierre-Olivier Gourinchas, chef économiste du Fonds monétaire international (FMI). 

La croissance de l'UE devrait notamment ralentir à 2,8% cette année, celle des Etats-Unis à 3,7% (-0,3 point). L'économie russe, soumise à des sanctions occidentales inédites, devrait elle se contracter de 8,5%, et le PIB ukrainien chuter de 35%. 

Le président ukrainien espère néanmoins obtenir pour son pays "dans les semaines à venir" le statut de candidat à l'adhésion à l'UE. 

Après les ambassades italienne et française qui se sont réinstallées à Kiev ces derniers jours, l'Espagne devrait bientôt les rejoindre et son Premier ministre, Pedro Sánchez, se rendra "bientôt" en Ukraine, ont indiqué des sources gouvernementales espagnoles. 


Selon une source ukrainienne , Zelensky ne serait pas prêt à signer un accord sur les minerais avec Washington

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo AFP )
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo AFP )
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Le président ukrainien Volodymyr Zelensky n'est « pas prêt » à signer un accord avec les États-Unis qui leur offrirait un accès préférentiel aux minerais du pays, a affirmé samedi à l'AFP une source ukrainienne proche du dossier, alors que les deux pays sont en pleines tensions.

Donald Trump réclame depuis plusieurs semaines l'équivalent de 500 milliards de dollars de terres rares, en guise de dédommagement, selon lui, du soutien américain à Kiev face à l'invasion russe, une condition qu'Ukraine ne peut accepter pour l'instant.

« Le président ukrainien n'est pas prêt à accepter le projet dans sa forme actuelle. Nous essayons toujours de faire des changements de manière constructive », a expliqué cette source ukrainienne qui a requis l'anonymat.

« Ils veulent nous soutirer 500 milliards de dollars », a-t-elle accusé.

« Quel genre de partenariat est-ce là ? (...) Et pourquoi devons-nous donner 500 milliards, il n'y a pas de réponse », a-t-elle encore dit, affirmant que Kiev avait « proposé des amendements. Ils ont été soumis ».

Depuis l'appel entre Donald Trump et Vladimir Poutine le 12 février, Moscou et Washington ont exprimé leur volonté de repartir sur de nouvelles bases, et le président américain a complètement renversé la position de son pays concernant la guerre en Ukraine, en reprenant la rhétorique du Kremlin sur la responsabilité de Kiev.

Le 24 février 2022, l'Ukraine a été envahie par la Russie, le Kremlin affirmant agir pour protéger le pays contre la menace de l'OTAN et empêcher un élargissement de l'organisation.

Donald Trump souhaite négocier un accord avec l'Ukraine afin d'obtenir un accès à 50 % de ses minerais stratégiques, en guise de compensation pour l'aide militaire et économique déjà fournie à Kiev.

Le conseiller à la sécurité nationale de M. Trump, Mike Waltz, s'est montré très pressant vendredi.

« Le président Zelensky va signer cet accord, et vous le verrez à très court terme, et c'est bon pour l'Ukraine », a-t-il insisté lors d'un rassemblement de conservateurs près de Washington.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a rejeté avec vigueur la première proposition américaine d'accord, arguant qu'il ne pouvait « pas vendre » son pays.

Il a toutefois laissé la porte ouverte à des « investissements » américains en échange de telles garanties.

De son côté, Donald Trump affirme que les États-Unis ont dépensé 350 milliards de dollars pour s'engager dans une guerre qui ne pouvait pas être gagnée. Or, selon l'institut économique IfW Kiel, l'aide américaine globale à l'Ukraine, financière, humanitaire et militaire, a atteint 114,2 milliards d'euros (près de 120 milliards de dollars au cours actuel) entre début 2022 et fin 2024, dont 64 milliards d'euros en assistance militaire.

Le 1er février, M. Zelensky a assuré que l'Ukraine n'avait reçu à ce stade que 75 des 177 milliards de dollars d'aide votée par le Congrès américain.


Les États-Unis proposent à l'ONU une résolution pour « une fin rapide » du conflit en Ukraine

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (G) accueille l'envoyé américain Keith Kellogg dans ses bureaux à Kiev le 20 février 2025, dans le contexte de l'invasion russe de l'Ukraine.  (Photo par Sergei SUPINSKY / AFP)
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (G) accueille l'envoyé américain Keith Kellogg dans ses bureaux à Kiev le 20 février 2025, dans le contexte de l'invasion russe de l'Ukraine. (Photo par Sergei SUPINSKY / AFP)
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  • Les États-Unis ont proposé un projet de résolution à l'Assemblée générale de l'ONU qui ne mentionne pas le respect de l'intégrité territoriale de l'Ukraine.
  • Le texte proposé par les États-Unis ne condamne pas l'agression russe ni ne fait référence explicite à l'intégrité territoriale de l'Ukraine, ce qui ressemble à une trahison de la part de Kiev et à un coup bas contre l'UE.

NATIONS-UNIES : Les États-Unis ont proposé un projet de résolution à l'Assemblée générale de l'ONU qui ne mentionne pas le respect de l'intégrité territoriale du pays, après une nouvelle attaque du président américain Donald Trump contre son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky.

Dans un communiqué, le secrétaire d'État américain, Marco Rubio, a exhorté les pays membres de l'ONU à approuver cette nouvelle résolution « simple » et « historique », et « tous les États membres à la soutenir, afin de tracer un chemin vers la paix ».

« Cette résolution est une bonne idée », a rapidement commenté l'ambassadeur russe à l'ONU, Vassili Nebenzia, déplorant toutefois l'absence de référence « aux racines » du conflit.

Les Européens, désarçonnés par l'ouverture du dialogue américano-russe sur l'Ukraine, n'avaient pas réagi samedi matin à la proposition américaine.

« Nous n'avons pas de commentaire pour l'instant », a simplement indiqué l'ambassadeur français à l'ONU Nicolas de Rivière, alors que l'Assemblée générale doit se réunir lundi.

Le texte proposé par les États-Unis ne condamne pas l'agression russe ni ne fait référence explicite à l'intégrité territoriale de l'Ukraine, ce qui ressemble à une trahison de la part de Kiev et à un coup bas contre l'UE, mais aussi à un mépris pour les principes fondamentaux du droit international », a déclaré à l'AFP Richard Gowan, de l'International Crisis Group.

L'Assemblée générale de l'ONU se réunit lundi pour marquer le troisième anniversaire de l'invasion russe de l'Ukraine.

À cette occasion, l'Ukraine et les Européens ont préparé un projet de résolution qui souligne la nécessité de « redoubler » d'efforts diplomatiques pour mettre fin à la guerre « cette année », et prend note des initiatives de plusieurs États membres ayant présenté « leur vision pour un accord de paix complet et durable ».

Le texte réitère également les précédentes demandes de l'Assemblée générale, appelant à un retrait immédiat et inconditionnel des troupes russes d'Ukraine ainsi qu'à la cessation des attaques de la Russie contre l'Ukraine.

Ces précédents votes avaient rassemblé plus de 140 voix sur les 193 États membres.

Les nouvelles salves de M. Trump contre M. Zelensky interviennent alors que la visite de l'émissaire du président américain, Keith Kellogg, semblait avoir apaisé la situation. Ces nouvelles attaques de M. Trump contre M. Zelensky font suite à des premières invectives virulentes plus tôt dans la semaine, qui avaient suscité une vive réaction de la part de Kiev et la stupéfaction de ses alliés européens.

M. Zelensky avait déclaré avoir eu des échanges « productifs » avec M. Kellogg, et ce dernier l'avait qualifié de « dirigeant courageux et assiégé d'une nation en guerre ».

Vendredi, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a réaffirmé que le président Vladimir Poutine était « ouvert » à des pourparlers de paix.

La Russie exige notamment que l'Ukraine lui cède quatre régions ukrainiennes, en plus de la Crimée qu'elle a annexée en 2014, et qu'elle n'adhère jamais à l'Otan. Des conditions jugées inacceptables par les autorités ukrainiennes qui demandent à leurs alliés des garanties de sécurité solides.

M. Trump et ses collaborateurs ont jugé « irréaliste » l'adhésion de l'Ukraine à l'Otan et son ambition de reprendre ses territoires perdus à la Russie.

Sur le terrain, la situation reste difficile pour les troupes ukrainiennes. L'armée russe a revendiqué vendredi la prise de deux localités dans l'est de l'Ukraine.


60 ans après, l'assassinat de Malcolm X continue de secouer l'Amérique

L'avocat Ben Crump (à droite) et la fille de Malcolm X, Ilyasah Shabazz, s'adressent à la presse pour demander la déclassification des documents du pasteur musulman afro-américain et militant des droits de l'homme Malcolm X, à l'occasion du 60e anniversaire de son assassinat, à Harlem, dans l'État de New York, le 21 février 2025. La conférence de presse s'est tenue au Malcolm X and Dr Betty Shabazz Memorial and Educational Center, dans la salle de bal où Malcolm X a été assassiné le 21 février 1965. (Photo de CHARLY TRIBALLEAU / AFP)
L'avocat Ben Crump (à droite) et la fille de Malcolm X, Ilyasah Shabazz, s'adressent à la presse pour demander la déclassification des documents du pasteur musulman afro-américain et militant des droits de l'homme Malcolm X, à l'occasion du 60e anniversaire de son assassinat, à Harlem, dans l'État de New York, le 21 février 2025. La conférence de presse s'est tenue au Malcolm X and Dr Betty Shabazz Memorial and Educational Center, dans la salle de bal où Malcolm X a été assassiné le 21 février 1965. (Photo de CHARLY TRIBALLEAU / AFP)
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  • Six décennies jour pour jour après sa mort, un hommage est rendu vendredi à la figure de proue du mouvement « Black Power », notamment pour son héritage en matière de « justice sociale ».
  • « Nous espérons que la vérité tant attendue éclatera, après 60 ans d'attente, et que ce qui s'est passé sera documenté », explique à l'AFP Ilyasah Shabazz, la fille de Malcolm X.

NEW-YORK : Six décennies jour pour jour après sa mort, un hommage est rendu vendredi à la figure de proue du mouvement « Black Power », notamment pour son héritage en matière de « justice sociale ». C'est ce que rappelle le Shabazz Center, le mémorial et centre éducatif installé dans l'ancienne salle de bal de Harlem où il a été abattu à 39 ans, au faîte de son influence, et ce quelques mois seulement après l'abolition de la ségrégation raciale.

Qui a commandité le meurtre ? Comment le drame a-t-il pu survenir en pleine réunion publique, alors que les menaces pesant sur le militant, porte-voix de la « Nation of Islam » puis de l'abolition des discriminations, étaient connues des autorités ?

Pour obtenir des réponses, sa famille a engagé en novembre 2024 des poursuites au civil spectaculaires, réclamant 100 millions de dollars aux forces de l'ordre et aux agences fédérales qu'elle accuse, selon elle, d'avoir joué un rôle à divers degrés dans son assassinat.

Dans ce dossier qui doit entrer dans le vif du sujet début mars devant un tribunal de Manhattan, la famille assure disposer d'éléments nouveaux lui permettant d'assigner en justice la police de New York (NYPD), le FBI ou encore la CIA.

« Nous espérons que la vérité tant attendue éclatera, après 60 ans d'attente, et que ce qui s'est passé sera documenté », explique à l'AFP Ilyasah Shabazz, la fille de Malcolm X.

- « Qui a donné l'ordre ? » -

Selon l'assignation en justice, la famille du leader afro-américain, également connu sous le nom d'El-Hajj Malik El-Shabazz, estime que les forces de l'ordre et les services de renseignement américains ont sciemment désengagé les policiers dont la mission était de le protéger la nuit du drame.

Des agents en civil ne sont pas non plus intervenus au moment des faits et, depuis sa mort, les agences de renseignement s'emploieraient à dissimuler leurs agissements, selon la plainte.

Contactée par l'AFP, la police de New York n'a pas souhaité s'exprimer pour l'instant.

« Cette dissimulation a duré des décennies, privant la famille Shabazz de la vérité et de leur droit à obtenir justice », estime auprès de l'AFP Me Ben Crump, qui défend le dossier pour les filles de Malcolm X.

« Nous écrivons l'histoire en nous dressant ici face à ces torts et en demandant des comptes devant les tribunaux », se félicite le conseil, qui a demandé vendredi la « déclassification de documents » liés à ce dossier.

L'affaire avait déjà rebondi en 2021, lorsque deux des trois anciens hommes reconnus coupables de l'assassinat et ayant passé plus de vingt ans derrière les barreaux ont finalement été innocentés, ce qui constitue l'une des plus grandes erreurs judiciaires des États-Unis. En réparation, les deux Afro-Américains ont touché 36 millions de dollars de la part de la ville et de l'État de New York.

« On sait déjà assez précisément comment l'assassinat de Malcolm X s'est déroulé. On sait qui en est responsable : cinq membres de la Nation of Islam. La seule chose qu'on ignore, c'est qui a donné l'ordre », observe Abdur-Rahman Muhammad, historien et spécialiste reconnu du dossier, dont les travaux pendant des décennies ont contribué à disculper les deux accusés à tort.

Selon lui, les éléments mis en avant aujourd'hui par la famille de Malcolm X sont « peu crédibles ».

Il concède toutefois que « si la plainte permet de déterminer qui a donné l'ordre final, alors elle aura de la valeur ».

Cet énième rebondissement aura au moins permis de remettre en avant « l'héritage » de Malcolm X, plus important que jamais sous le second mandat de Donald Trump, « ennemi implacable » de la communauté noire, affirme l'historien.

« Cela va inciter les Afro-Américains à se serrer les coudes », anticipe Abdur-Rahman Muhammad. « En résumé, la communauté noire doit revenir au message de Malcolm : lutter. »