SPÉZET: Emmanuel Macron a demandé mardi "la clarté complète" sur la mort d'un jeune homme de confession juive percuté par un tramway mi-février à la suite de violences, un drame qui ne doit pas donner lieu selon lui à des "manipulations politiques".
"On a tous été bouleversés par les scènes qui ont été rendues publiques et je veux dire ma solidarité et mon soutien à la famille de Jeremy Cohen", a déclaré le président-candidat devant la presse, lors d'un déplacement à Spézet, dans le Finistère.
"La justice doit passer, la clarté complète doit être faite", a-t-il poursuivi, soulignant qu'"une instruction a été ouverte" et que "la justice mène de manière indépendante son travail".
Il a souhaité "que l'investigation soit la plus rapide possible pour apporter des réponses" à la famille du jeune homme.
Le cabinet d'Emmanuel Macron avait appelé dès lundi, à sa demande, les parents de Jeremy Cohen. Il "a demandé au garde des Sceaux de suivre de près et de tenir le président personnellement informé", a précisé l’Élysée.
Agression, enquêtes, soupçons d'antisémitisme: Ce que l'on sait de la mort de Jeremy Cohen
Comment est mort Jeremy Cohen ?
Mercredi 16 février, peu après 20H00, le jeune homme se trouve dans le centre de Bobigny.
Sur une vidéo abondamment partagée sur les réseaux sociaux lundi, on le voit recevoir de violents coups de poing, encerclé par une dizaine de personnes. Il tombe à terre, se relève puis traverse en courant la chaussée, l'air désorienté, avant d'être percuté par le tramway.
En arrêt cardio-respiratoire et victime d'un traumatisme crânien il est décédé à l'hôpital peu après minuit.
Selon l'avocat de la famille Franck Serfati, Jeremy Cohen "avait un handicap physique et mental".
"Il a vraiment un bon cœur, il donne tout ce qu'il a, c'est quelqu'un de très sensible et très doux", avait confié le 31 mars son père Gérald Cohen au micro de Radio Shalom.
Selon la famille, une kippa a été trouvée près du corps du défunt.
Quelles enquêtes ont été ouvertes ?
A la suite de ce drame, une première enquête a été ouverte pour ce qui s'apparentait alors à un accident mortel de la circulation.
Mais la famille s’interroge, tracte dans le quartier du drame et recueille des témoignages et une vidéo.
"Toutes les preuves ont été remises aux autorités nécessaires, aussi bien la police que le parquet", a affirmé Gérald Cohen sur Radio Shalom, indiquant que la première enquête avait été classée.
Une vidéo, reçue le 10 mars par les enquêteurs, accrédite l'hypothèse d'une altercation, selon une source policière.
Une seconde enquête pour "violences volontaires en réunion" a été ouverte, a indiqué lundi le procureur de Bobigny Eric Mathais dans un communiqué, car "rapidement les éléments recueillis permettaient de comprendre que quelques instants avant l'accident, la victime avait subi des violences".
Ces procédures ont conduit à l'ouverture d'une information judiciaire le 29 mars pour "violences volontaires en réunion ayant entraîné la mort sans intention de la donner", la "qualification la plus haute envisageable à ce stade des investigations", a précisé le procureur dans son communiqué. Les investigations sont désormais confiées à un juge d'instruction et la police judiciaire du département.
Quelles répercussions sur la campagne présidentielle ?
Le candidat d'extrême droite Eric Zemmour (Reconquête!) est le premier à avoir médiatisé l'affaire à la demande de la famille de la victime dont il a reçu le père mardi matin.
"Est-il mort pour fuir les racailles? Est-il mort parce que juif? Pourquoi cette affaire est-elle étouffée?", a-t-il écrit lundi sur Twitter. Sa rivale Marine Le Pen (RN) a évoqué un "acte criminel" qui "pourrait être un meurtre antisémite".
"Toute la lumière doit être faite", sur le drame, ont de leur côté demandé trois autres candidats à la présidentielle, Jean-Luc Mélenchon (LFI), Yannick Jadot (EELV) et Valérie Pécresse (LR) qui a dénoncé un "lynchage ignoble qui pourrait être de nature antisémite".
Nathalie Arthaud (LO) a elle dénoncé "une instrumentalisation" par Eric Zemmour.
"Je trouve regrettable que ces mots de soutien soient outrancièrement médiatisés", a critiqué mardi matin Franck Serfati, avocat de la famille, sur France 2.
Le cabinet d'Emmanuel Macron s'est entretenu au téléphone avec les parents de Jeremy Cohen "pour leur transmettre un message de compassion et leur faire savoir que (...) tous les moyens d'enquête seront mis en œuvre", a indiqué l'Elysée mardi.
Y a-t-il un mobile antisémite ?
"La famille Cohen ne vient pas crier à l'antisémitisme", a déclaré lundi soir sur BFMTV Me Serfati. "Ce serait dénaturer les faits et préjuger. Mais il ne faut pas exclure à l'heure qu'il est l'élément aggravant d'antisémitisme".
Un éventuel mobile antisémite n'a pour l'heure pas été évoqué par le parquet.
Une déclaration à la presse du procureur de Bobigny est prévue mardi après-midi au tribunal judiciaire de Bobigny.