PARIS: Marine Le Pen a policé son discours mais son programme reste aussi radical, affirme une étude de la Fondation Jean-Jaurès parue lundi.
La candidate d'extrême droite à la présidentielle s'est efforcée, depuis son arrivée en 2011 à la tête du Front national (devenu Rassemblement national), "d'adopter une communication beaucoup plus lisse" mais son positionnement est "tout aussi radical" notamment sur les enjeux culturels et migratoires, écrit ce centre de réflexion classé à gauche.
"Si la dédiabolisation n'est pas programmatique, elle est clairement discursive", dit cette étude.
Sur la forme, cette "dédiabolisation" a été favorisée par la "rhétorique plus dure" de son rival, Éric Zemmour, et une "ligne plus stricte" de la droite dite modérée de LR, ainsi que par le parti présidentiel LREM, dans un contexte de "transformation du paysage médiatique" favorisant une "normalisation des idées de droite radicale".
Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin avait ainsi accusé Marine Le Pen d'être "un peu molle" lors d'un débat télévisé en février 2021, tandis que le député LR Éric Ciotti plaidait pour un "Guantanamo à la française" et que Valérie Pécresse, future candidate, établissait un "lien" entre le terrorisme et "l'immigration la plus récente".
Si sur le plan économique, le FN est passé, dans les années 2000, du néolibéralisme au "social-populisme", du parti antitaxes à un "impôt sur la fortune financière" et aux mesures en faveur du pouvoir d'achat, il est "toujours radical" sur les questions culturelles, souligne la Fondation.
Marine Le Pen propose toujours "des mesures fortes pour promouvoir la loi et l'ordre". Elle promettait ainsi à Brest en février de mettre un terme "au règne de la terreur des mafias de la drogue, dont les crimes n'ont d'égal que l'idéologie islamisante à laquelle ils sont si souvent associés", et d'instaurer une légitime défense pour les forces de l'ordre.
Elle rejette régulièrement "le multiculturalisme", considérant que "l'immigration massive empêche l'assimilation". "Ne venez pas comme vous êtes mais devenez comme nous sommes", dit son lieutenant Jordan Bardella.
Sur le plan migratoire, son programme s'est "durci" depuis 2010, selon la Fondation. Elle prévoit pour 2022 d'inscrire dans la Constitution la "priorité nationale" qui privera les étrangers de plusieurs prestations. Elle veut aussi, comme Éric Zemmour, expulser les clandestins, les criminels et délinquants étrangers, et les fichés S étrangers, ainsi que les étrangers sans emploi depuis plus d'un an.
Sur le plan de son image, elle suscite toujours l'inquiétude d'une majorité de Français, (51%, contre 53% en 2017) mais désormais 39% des Français (contre 21%) considèrent qu'elle a l'étoffe d'une présidente de la République, et 46% qu'elle "comprend bien les problèmes des gens comme nous" (contre 22%).
Vêtue de couleurs claires, souriant en permanence, la candidate a choisi de se présenter comme la "présidente de la paix civile", de "l'unité nationale". Elle quitte sa posture contestataire pour rire à gorge déployée sur les plateaux, met en avant son amour des chats, comme pour "mieux endormir le front républicain", ou parle confortablement installée dans des sofas, un "univers du moelleux" qui permet de "faire oublier la dureté de son programme", estime la Fondation.