KABOUL: Les talibans ont ordonné aux compagnies aériennes en Afghanistan de refuser d'embarquer des femmes si elles ne sont pas accompagnées d'un homme de leur famille pour voyager, a-t-on appris auprès de compagnies aériennes afghanes.
Deux responsables des compagnies Ariana Afghan Airlines et Kam Air ont indiqué dimanche soir à l'AFP avoir reçu l'ordre des talibans de ne plus délivrer de billets aux femmes qui ne seraient pas accompagnées d'un homme de leur famille pour leur voyage.
La décision a été prise à l'issue d'une réunion en milieu de semaine entre des représentants des talibans, de ces deux compagnies aériennes et des autorités de l'immigration de l'aéroport de Kaboul.
Une lettre envoyée par un haut responsable d'Ariana Afghan Airlines au personnel de la compagnie aérienne, et dont l'AFP a obtenu copie, confirme ces nouvelles instructions qui s'appliquent à tous les vols.
"Aucune femme n'est autorisée à voler sur des vols intérieurs ou internationaux sans un parent masculin", indique la lettre.
Afghanistan: empêchée d'émettre, la BBC demande aux talibans le retour de ses bulletins TV
La BBC a demandé dimanche aux talibans de revenir immédiatement sur ce qu'elle a décrit comme un retrait des diffuseurs internationaux des ondes afghanes, qui empêche selon le groupe audiovisuel public britannique la diffusion de ses bulletins télévisés en Afghanistan.
"Les bulletins d'information télévisés de la BBC en pachtoun, persan et ouzbek ont été retirés de l'antenne en Afghanistan, après que les talibans ont ordonné à nos partenaires télévisuels de retirer les diffuseurs internationaux de leurs ondes", a déclaré dans un communiqué Tarik Kafala, responsable des langues de BBC World service.
"Nous demandons aux talibans de revenir sur leur décision et de permettre à nos partenaires télévisuels de diffuser immédiatement les bulletins d'information de la BBC sur leurs ondes", a-t-il poursuivi, dénonçant un "développement inquiétant en cette période d'incertitude et de turbulences pour le peuple afghan".
Plus de six millions d'Afghan visionnent chaque semaine les programmes de la BBC, a précisé Tarik Kafala, "il est crucial qu'ils n'en soient pas privés à l'avenir".
"Un autre développement qui fait froid dans le dos. Les talibans ordonnent aux médias afghans de suspendre toute transmission des émissions des médias internationaux. Une autre mesure répressive contre le peuple afghan", a dénoncé sur Twitter la mission d'assistance des Nations unies en Afghanistan.
Deux agents de voyage contactés par l'AFP ont également confirmé avoir cessé de délivrer des billets aux femmes voulant voyager seules.
"Certaines femmes qui voyageaient sans un parent de sexe masculin n'ont pas été autorisées à embarquer sur un vol Kam Air de Kaboul à Islamabad vendredi", a déclaré à l'AFP une passagère qui se trouvait sur ce vol.
Une femme afghane disposant d'un passeport américain n'a pas non plus été autorisée à embarquer sur un vol pour Dubaï vendredi, a indiqué une autre source.
Fin décembre, les fondamentalistes talibans avaient déjà interdit aux femmes afghanes d'effectuer des voyages de plus de 72 kilomètres dans le pays si elles n'étaient pas accompagnées par un membre proche de la famille.
Cette nouvelle restriction imposée aux Afghanes intervient quelques jours après la décision des talibans de fermer les écoles secondaires pour filles, juste après leur réouverture qui avait pourtant été annoncée de longue date.
Dimanche, le ministère de la Promotion de la vertu et de la prévention du vice a par ailleurs ordonné la séparation des femmes et des hommes dans les parcs publics de Kaboul, en instaurant des jours de visites pour chaque sexe.
Les mercredis, jeudis, vendredis et samedis sont désormais réservés aux hommes et les dimanches, lundis et mardis aux femmes, a-t-il précisé.
Depuis leur arrivée au pouvoir il y a sept mois, les talibans ne cessent d'imposer des restrictions aux femmes. Elles sont exclues de nombreux emplois publics, contrôlées sur la façon de s'habiller et interdites de voyager seules en dehors de leur ville et désormais pour prendre l'avion.
Ils ont aussi arrêté et détenu des militantes -certaines pendant plusieurs semaines- qui avaient manifesté pour les droits des femmes.