PARIS: Le gouvernement a présenté mercredi son "plan de résilience" pour permettre aux entreprises de faire face aux conséquences du conflit en Ukraine, en allégeant à court terme leur facture énergétique, tout en annonçant des mesures destinées à rendre l'économie française moins dépendante de la Russie.
Toutes les entreprises dont les dépenses d'électricité et de gaz représentent "au moins 3% de leur chiffre d’affaires, et qui pourraient faire des pertes sur 2022" bénéficieront de "la prise en charge de la moitié du surplus de leurs dépenses énergétiques", a détaillé lors d'une conférence de presse le Premier ministre Jean Castex.
Les dépenses énergétiques représentent des coûts importants pour les entreprises sidérurgiques, chimiques ou encore certaines activités agricoles.
Cette mesure coûtera jusqu'à trois milliards d'euros, auxquels s'ajouteront des mesures sectorielles comme celles destinées aux pêcheurs, dont le coût devrait être compris entre 500 millions et un milliard d'euros, ainsi qu'une augmentation de l'aide pour le remplacement de chaudières à énergie fossile par des solutions de chauffage renouvelable.
La prise en charge par l’État de 15 centimes sur l'essence et le gazole, annoncée samedi, a d'autre part été élargie aux carburants GNV et GPL pour environ 800 millions supplémentaires.
Toutes ces nouvelles mesures représentent un coût estimé à environ 6,8 milliards d'euros, en partie financé grâce à des reports de crédits budgétaires de 2021 et juste en dessous du seuil pour lequel le gouvernement aurait dû retourner devant le Parlement pour valider ces dépenses.
Ces nouveaux dispositifs viennent compléter le bouclier tarifaire mis en place depuis l'automne par le gouvernement pour limiter l'impact de la hausse des prix du gaz et de l'électricité sur les ménages et les entreprises, d'un coût approchant déjà les 20 milliards d'euros.
Pour le gouvernement, les mesures de ce "plan de résilience" sont ciblées et n'annoncent pas le retour du "quoi qu'il en coûte", même si le coût final de ces aides est impossible à chiffrer aujourd'hui.
Mesures Covid réactivées
Au-delà des mesures budgétaires, "des outils qui ont fait leurs preuves pendant la crise sanitaire seront de nouveau mobilisés, et adaptés aux spécificités de cette crise", a en outre indiqué le Premier ministre.
Des prêts garantis par l’État (PGE), dispositif qui a soutenu la trésorerie de plus de 700.000 entreprises, pourront être souscrits pour un montant maximum relevé à 35% du chiffre d'affaires des entreprises, contre 25% auparavant. Un nouveau PGE dont le montant est fixé à 10% du chiffre d'affaires devrait en outre être lancé à partir du 1er juillet.
Les entreprises pourront aussi bénéficier de reports de paiement de cotisations fiscales et sociales et le dispositif d'activité partielle de longue durée (APLD) sera prolongé de 12 mois.
Face à une "crise qui va s'installer dans la durée", le Premier ministre a insisté sur la nécessaire "souveraineté technologique, industrielle et alimentaire" de la France.
Approvisionnements perturbés
Le gouvernement va subventionner jusqu'à la fin de l'année les entreprises pour les aider à moins dépendre de certaines matières premières critiques venant de Russie, comme le titane, le palladium ou le néon, "à hauteur de 15% pour les grands groupes et 35 % pour les petites entreprises", a détaillé de son côté le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire.
"C'est un plan conjoncturel qui appelle à une prise de conscience structurelle", a réagi dans un tweet le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux.
Son homologue de la Confédération des PME François Asselin, s'est montré plus inquiet, notamment sur la capacité des entreprises à rembourser un PGE plus important. "Ce plan vise les bons objectifs, mais certaines mesures restent perfectibles et nécessiteront des adaptations", a-t-il déclaré à l'AFP, tout en saluant "la mise en place de l'APLD", ainsi que "le décalage des charges sociales et fiscales".
Le directeur du Comité national des pêches, Jean-Luc Hall, a lui qualifié de "bouffée d'oxygène" l'annonce d'une aide de 35 centimes par litre de gazole de pêche, alors que des pêcheurs participent depuis mardi à des blocages de dépôts pétroliers pour protester contre la hausse des prix des carburants.
Depuis l'annonce de ce "plan de résilience" le 2 mars par le président Emmanuel Macron, le gouvernement avait multiplié les consultations de nombreux secteurs économiques.
Outre la hausse des prix des carburants, le déclenchement du conflit en Ukraine et la mise en place des sanctions occidentales contre le régime russe ont totalement perturbé de nombreuses chaînes d'approvisionnement, ainsi que les débouchés de certains exportateurs.
C'est notamment le cas en agriculture, où les producteurs français craignent de manquer d'engrais et d'alimentation pour le bétail, la Russie et l'Ukraine étant d'importants fournisseurs.