Présidentielle: à Klang, réseau aléatoire, pas de tout-à-l'égout et un sentiment d'oubli

Cette photo prise le 7 mars 2022 montre un panneau à l'entrée de Klang, dans l'est de la France. (AFP)
Cette photo prise le 7 mars 2022 montre un panneau à l'entrée de Klang, dans l'est de la France. (AFP)
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Publié le Mardi 15 mars 2022

Présidentielle: à Klang, réseau aléatoire, pas de tout-à-l'égout et un sentiment d'oubli

  • Klang n'est desservi par aucun transport en commun: il faut une voiture pour le moindre déplacement
  • Seul obstacle: trouver des subventions pour financer les quelque 1,5 million d'euros nécessaires à ce chantier, un coût important pour un village de cette taille.

KLANG: Un réseau de téléphone portable très aléatoire, pas de tout-à-l'égout et encore moins de transports en commun: à Klang, petit village de Moselle, les 248 habitants se sentent complètement "oubliés" des politiques, à l'approche de la présidentielle.

Un "perchoir aux oiseaux": c'est comme ça que le maire, André Pierrat, désigne le pylône de 53 mètres de haut installé à la sortie du village, à côté du cimetière. Construit en octobre 2020, il vient tout juste d'être raccordé à un opérateur de téléphonie mobile, après des années d'attente. Mais les portables passent encore très mal, voire pas du tout dans cette commune isolée.

Klang n'est desservi par aucun transport en commun: il faut une voiture pour le moindre déplacement.

Et le village n'a pas non plus le tout-à-l'égout, pourtant réclamé depuis... 2005. Le maire espère voir le village raccordé d'ici deux ans, et une quatrième étude pour évaluer les coûts des travaux vient d'ailleurs d'être lancée par le Syndicat des eaux de l'Est thionvillois (Sideet), dont dépend Klang.

Seul obstacle: trouver des subventions pour financer les quelque 1,5 million d'euros nécessaires à ce chantier, un coût important pour un village de cette taille.

Pour André Pierrat, tout cela représente évidemment "un frein à l'attractivité du village".

"On est oublié, nous, petite commune rurale. Aucun élu ne vient essayer de nous défendre", se désole le maire, qui n'a "rien vu" dans les programmes des différents candidats à l’Élysée pour "effacer les zones blanches".

Présidentielle: les villes et les campagnes en cinq chiffres

Voici cinq chiffres illustrant la situation des villes et des campagnes en France, une ligne de fracture au cœur de la campagne présidentielle.

1 Français sur 3 en zone rurale 

Un tiers (33%) de la population française vit dans des communes rurales, selon une étude de l'Insee publiée en 2021. Une minorité seulement - 14% de la population française - habite dans des zones rurales dites "autonomes", c'est-à-dire situées à distance d'un pôle d'emploi.


Les deux tiers de Français (67%) habitent dans des communes urbaines et près de la moitié (47%) vivent dans des unités urbaines de plus de 100.000 habitants.

7 Franciliens sur 10 veulent «vivre ailleurs»

Plus de la moitié des Français (55%) souhaiteraient "vivre ailleurs", selon une enquête de l'Observatoire société et consommation (Obsoco) publiée en octobre. Cette proportion monte à 62% des habitants des villes qui sont au centre d'une métropole et même à 71% des habitants d'Ile-de-France.


Selon l'observatoire, la crise sanitaire liée à la Covid-19 a été un "accélérateur", puisque 60% des personnes qui ont mal vécu le confinement ont des envies d'ailleurs, contre seulement 49% de ceux qui l'ont bien vécu.


La plupart des personnes souhaitant vivre ailleurs rêvent "d'une petite ville ou d'un village se situant dans la périphérie d'une grande ville" (28%). Arrivent ensuite les "villes de taille moyenne" (19%) et les "petites villes ou villages éloignés des grands pôles urbains" (19%). Seuls 9% se voient déménager "dans le centre d'une grande ville".

32% des ruraux privés d'un «bon haut débit»

Bien que connectés au réseau 4G, près d'un tiers (32%) des consommateurs en zones rurales sont privés d'un "bon haut débit", dont le seuil minimum est fixé par le gouvernement à 8 Mégabits par seconde, selon une étude de l'UFC-Que Choisir publiée en janvier.

Un cinquième des ruraux (20%) n'atteignent même pas la qualité minimale de 3 Mbit/s.
L'association met en évidence "une inégalité territoriale extrêmement marquée" vis-à-vis de la 4G avec un débit moyen de 33,3 Mbit/s à la campagne contre 55,3 Mbit/s en ville.

222 villes moyennes aidées par l'Etat 

Arras, Colmar, Briançon, Bastia, Bayonne, Limoges ou encore Quimper... Les centres-villes de 222 communes moyennes (20.000 à 100.000 habitants) sont soutenues par le plan "Action cœur de ville" lancé fin 2017. Un budget de cinq milliards d'euros sur cinq ans a été débloqué pour financer leurs projets.


Selon les chiffres du ministère de la Cohésion des territoires, les villes moyennes, qui concentrent près d'un quart (23%) de la population française, sont en moyenne moins bien loties que le reste du territoire: elles comptent 36% de jeunes diplômés de l'enseignement supérieur (contre 43% au niveau national), leur taux de pauvreté s'élève à 17,8% (contre 14,5%), 8,2% des logements y sont vacants (contre 6,6%) et 82% de ces villes ont un taux de chômage supérieur à la moyenne.

Le réseau ferré a rétréci de 13% en 20 ans 

Entre 1999 et 2019, la longueur totale des lignes exploitées en France est passée de 31.735 à 27.483 kilomètres, soit une baisse de 13% en 20 ans, selon les données de SNCF Réseau.


Ce rétrécissement s'est fait principalement au détriment des petites lignes à voie unique qui ont perdu un tiers de leur réseau (-32%). Elles ne représentent plus que 40% des voies exploitées, contre la moitié en 1999.


A l'inverse, 867 kilomètres de nouvelles lignes à grande vitesse, qui relient les grandes métropoles, ont été mis en service sur la période, soit une hausse de 67%.

En France métropolitaine, selon le secrétariat d’État chargé de la transition numérique et des communications, 4% du territoire est en zone blanche, où la population vit sans réseau.

Le secrétariat d’État a annoncé en février qu'au total, "3 594 sites" allaient bénéficier "d'une amélioration de la couverture mobile" d'ici deux ans, dans le cadre du "New deal mobile" lancé par le gouvernement en 2018.

«Grande lassitude»

Mais en attendant que leur pylône flambant neuf leur apporte un réseau moins hasardeux, les Klangeois s'en remettent à la fibre et aux lignes fixes pour être reliés au monde extérieur.

Ce qui ne va pas sans poser quelques problèmes en cas d'urgence. Un incendie s'est par exemple déclaré dans une grange il y a quelques jours: or le village s'était retrouvé sans électricité un peu avant l'incident. Plus d'électricité, donc plus de téléphone du tout, raconte le maire.

"Quelqu'un a dû aller à l'extérieur du village pour appeler les secours: ça devient dangereux", déplore-t-il.

De leur côté, les habitants font part à André Pierrat de leur "grande lassitude" face à cette situation: lui-même se dit parfois "résigné", même s'il refuse de baisser les bras.

Jennifer Schlosser, professeure de français de 31 ans, s'est installée à Klang il y a un an et demi, dans une maison qu'elle a fait construire avec son mari en face de la mairie. Ils font partie des rares nouveaux foyers à avoir élu domicile dans le village ces dernières années, attirés par le "calme" et le prix attractif du terrain qu'ils ont acquis.

Elle utilise internet pour téléphoner via la messagerie Whatsapp et sa maison dispose d'une micro-station pour les eaux usées, qui une fois traitées, s'écoulent directement dans le ruisseau traversant Klang.

Présidentielle: cinq propositions pour les villes et les campagnes

Les candidats à l'Elysée multiplient les propositions pour soutenir la mobilité et pour revitaliser les petites localités, après un quinquennat marqué par le lancement par Emmanuel Macron de programmes comme "action coeur de ville" ou "petites villes de demain".

Voici cinq d'entre elles.


Un forfait «mobilités durables» (Jadot)

S'il est élu président le 10 avril, l'écologiste Yannick Jadot entend renforcer le "forfait mobilités durables" qui serait obligatoire et octroyé par les entreprises pour les trajets entre travail et domicile à vélo, en covoiturage ou en transports en commun. Son plafond serait élevé à 1.000 euros, contre 500 actuellement. Afin de redéployer les crédits vers les trains du quotidien, il entend arrêter des grands projets comme la ligne Lyon-Turin, la LGV Rhin-Rhône ou les LGV Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax-frontière espagnole.

Un taux de TVA réduit (Hidalgo)

La socialiste Anne Hidalgo veut investir massivement dans le ferroviaire en lien avec les régions pour financer le retour des petites lignes, des trains de nuit et du fret ferroviaire. Elle entend appliquer un taux de TVA réduit pour les déplacements en train et, à l'inverse, imposer une taxe empreinte carbone sur le billet d’avion lorsqu’une alternative ferroviaire comparable existe.

Reconstruire le maillage (Mélenchon)

L'Insoumis Jean-Luc Mélenchon entend défendre et reconstruire le maillage de transports en commun et de services publics, notamment dans les départements ruraux, les quartiers populaires et l'Outre-mer. Il souhaite ainsi garantir une distance maximale (de quinze à trente minutes, en voiture ou en transport collectif) entre tout lieu d’habitation et les services publics essentiels (école, gare, hôpital, bureau de poste).

La fibre pour tous (Pécresse)

La candidate LR Valérie Pécresse a fait de la revitalisation des territoires l'une des priorités de son programme. Pour le monde rural, elle prévoit notamment d'installer la fibre pour tout le monde d'ici à 2024. Cette mesure permettrait le télétravail mais aussi l'implantation d'entreprises.

Une "démétropolisation" (Le Pen)

Marine Le Pen défend la "démétropolisation" qui vise à valoriser les territoires périphériques, entendus comme les petites villes et les campagnes. Elle a pour objectif d'y lancer une politique d’infrastructures. Cette démarche entre dans son concept très identitaire de "localisme", qui valorise "l’enracinement" dans un territoire et oppose ceux qui sont "de nulle part" à ceux qui sont "de quelque part". "C'est la vision de la ville qui sépare fondamentalement les nationaux des mondialistes: d'un côté, les partisans de l'enracinement et de la proximité, de l'autre la vision hors-sol de populations interchangeables", soutient-elle.

Et aussi... un chèque et des aides fiscalesLe polémiste d'extrême droite Eric Zemmour prévoit de donner un chèque de 10 000 euros pour toute naissance dans une commune rurale. L'iconoclaste Jean Lassalle promet de supprimer la taxe foncière et les impôts sur les sociétés pour toute activité professionnelle dont le siège est installé dans des localités de moins de 15 000 habitants.

«Essayer autre chose»

Même si Jennifer s'accommode de la situation, pour elle, trouver encore des villages en zone blanche en 2022 est tout simplement édifiant.

"On a vraiment l'impression d'être oubliés", raconte-t-elle dans sa cuisine, sa fille de deux ans à ses côtés. Les candidats ne parlent "pas du tout" des petites communes et des zones blanches, "d'où ce sentiment d'oubli", explique l'enseignante qui a quand même regardé les programmes des candidats "par rapport à (son) métier".

Et si elle ira voter le 10 avril, elle ne sait pas encore pour qui.

Le maire, lui, a déjà arrêté son choix: il veut du "changement" et "essayer autre chose" en politique. Il s'apprête ainsi à voter pour Éric Zemmour, à qui il a d'ailleurs donné son parrainage.

"On a tout essayé, la gauche, le centre, Macron...", explique l'élu, qui se dit aussi séduit par le discours sur "l'indépendance de la France", que porte selon lui le candidat d'extrême-droite.


Macron présidera lundi un Conseil des ministres sur la « refondation » de l'archipel depuis Mayotte

(Photo AFP)
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  • Emmanuel Macron présentera un projet de loi programme très attendu sur la « refondation » de l'archipel, quatre mois après le passage dévastateur du cyclone Chido, a annoncé dimanche l'Élysée.
  • Ce texte, qui comprend un volet important de lutte contre l'immigration clandestine depuis les Comores, y sera présenté en vue d'une adoption par le Parlement d'ici l'été, a-t-on précisé.

PARIS : Emmanuel Macron présidera lundi un Conseil des ministres en visioconférence depuis Mayotte afin de présenter un projet de loi programme très attendu sur la « refondation » de l'archipel, quatre mois après le passage dévastateur du cyclone Chido, a annoncé dimanche l'Élysée.

Ce texte, qui comprend un volet important de lutte contre l'immigration clandestine depuis les Comores, y sera présenté en vue d'une adoption par le Parlement d'ici l'été, a-t-on précisé.

Une loi d'urgence, destinée à faciliter la reconstruction de Mayotte via des assouplissements des règles d'urbanisme et de commande publique, a déjà été adoptée en février.

La loi de refondation, beaucoup plus large, comprend des « mesures plus structurelles permettant le développement économique et social du territoire sur de nouvelles bases », selon le ministre des Outre-mer Manuel Valls.

Mayotte, le département le plus pauvre de France, est confronté à plusieurs défis majeurs : une forte pression migratoire, un habitat précaire avec de nombreux toits de tôle et bidonvilles, ainsi que des difficultés économiques et sociales.

Ce texte, attendu depuis plusieurs années par les élus mahorais, prévoit notamment un durcissement des conditions d'obtention du titre de séjour dans l'archipel, une aide au retour volontaire et la facilitation des évacuations d'habitats insalubres et illégaux.  


Emmanuel Macron entame lundi à Mayotte une tournée dans l'océan Indien

Le président français Emmanuel Macron réagit lors d'une réunion diplomatique avec le chef du bureau présidentiel ukrainien, le conseiller à la sécurité nationale du Royaume-Uni, l'envoyé spécial américain, le secrétaire d'État américain et le conseiller à la sécurité nationale de l'Allemagne au palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 17 avril 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron réagit lors d'une réunion diplomatique avec le chef du bureau présidentiel ukrainien, le conseiller à la sécurité nationale du Royaume-Uni, l'envoyé spécial américain, le secrétaire d'État américain et le conseiller à la sécurité nationale de l'Allemagne au palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 17 avril 2025. (AFP)
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  • Emmanuel Macron entame lundi à Mayotte une tournée de cinq jours dans l'océan Indien afin d'accélérer la reconstruction de l'archipel français
  • Le président français, venu constater l'ampleur des dégâts le 18 décembre, avait alors promis aux Mahorais de revenir pour "lancer le temps de la reconstruction"

PARIS: Emmanuel Macron entame lundi à Mayotte une tournée de cinq jours dans l'océan Indien afin d'accélérer la reconstruction de l'archipel français, dévasté par le cyclone Chido, et de renforcer la place de la France dans cette région stratégique très convoitée.

Le président français, venu constater l'ampleur des dégâts le 18 décembre, avait alors promis aux Mahorais de revenir pour "lancer le temps de la reconstruction", a rappelé la présidence.

Quatre mois après le passage du cyclone, qui a fait 40 morts et causé quelque 3,5 milliards d'euros de dommages, les habitants du département le plus pauvre de France, déjà fragilisé par une forte pression migratoire venue des Comores, peinent à entrevoir le bout du tunnel, au-delà des travaux d'urgence pour rétablir l'eau, l'électricité et les télécommunications.

Le chef de l'Etat, déjà confronté à l'impatience et la colère des Mahorais en décembre, risque de se heurter au même climat lors de ses échanges avec la population et les élus.

"On voit encore des montagnes de déchets, des fils électriques par terre, des toits à l'air libre", déplore le maire de Mamoudzou, Ambdilwahedou Soumaïla.

Emmanuel Macron s'est engagé à rebâtir l'habitat et les infrastructures de Mayotte sur le modèle de la cathédrale Notre-Dame de Paris, dont la restauration s'est achevée cinq ans et demi après un incendie dévastateur, avec des règles spéciales et des délais raccourcis.

"Mayotte doit être plus belle demain qu'elle n'a été même avant le cyclone parce qu'il y avait déjà un territoire qui était en pleine fragilité", assure l'Elysée.

- "Intérêts partagés" -

Emmanuel Macron s'entretiendra aussi avec les responsables de la lutte contre l'immigration clandestine qui reste un défi majeur, alors que le Parlement vient d'adopter un texte très contesté durcissant les restrictions au droit du sol à Mayotte.

Dans la foulée, il rejoindra l'autre département français de la région, La Réunion, également frappé par de violents aléas climatiques et une épidémie de chikungunya, une maladie infectieuse transmise par le moustique tigre.

Le cyclone Garance y a fait cinq morts le 28 février et généré près de 250 millions d'euros de dégâts, dont 150 pour le seul secteur agricole, selon de premiers bilans.

Le président, qui restera mardi et mercredi matin à la Réunion, abordera aussi les enjeux sanitaires liés au chikungunya qui a fait six morts sur l'île depuis le début de l'année.

Il va aussi réaffirmer le "rôle stratégique de La Réunion dans la zone indo-pacifique" où la France entend s'imposer comme un acteur majeur grâce à ses multiples territoires et son immense espace maritime, le deuxième du monde derrière les Etats-Unis.

La Réunion abrite une base navale dans une zone stratégique pour le passage du commerce international, qui renferme aussi de nombreuses richesses en hydrocarbures et halieutiques et attise les rivalités entre grandes puissances.

Dans ce contexte, les visites que le président effectuera ensuite à Madagascar et à l'île Maurice visent à "valoriser nos intérêts partagés", résume l'Elysée.

- Iles Eparses, le sujet qui fâche -

Emmanuel Macron entend renforcer coopérations et alliances dans la région en temporisant sur les multiples points de friction hérités de la décolonisation.

A Madagascar, où la dernière visite bilatérale d'un président français remonte à 2005 avec Jacques Chirac, l'accent sera mis mercredi sur le renforcement des échanges commerciaux et des investissements.

Parmi les sujets qui fâchent, les Iles Eparses, territoire français revendiqué par Madagascar, seront "évoquées" par le président français et son homologue Andry Rajoelina, avec l'idée de relancer la Commission mixte sur l'avenir de l'archipel initiée en 2019, pointe sobrement l'Elysée.

La question de l'intégration de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), instance de coopération intergouvernementale qui réunit Madagascar, l'île Maurice, l'Union des Comores, les Seychelles et La Réunion pour la France, sera l'autre sujet délicat.

Les Comores ne reconnaissent pas la souveraineté de la France sur Mayotte et s'opposent à son entrée dans la COI, réclamée par les Mahorais.

Emmanuel Macron évoquera le sujet de façon "pragmatique" au cinquième sommet de la COI jeudi à Madagascar, "l'enjeu étant d'arriver à progresser sur l'inclusion de Mayotte dans les programmes" de coopération de l'organisation, a tout aussi sobrement esquissé l'Elysée.

A Madagascar puis l'île Maurice vendredi, la sécurité maritime sera au cœur des discussions, tout comme la protection des océans face au changement climatique et à la pollution plastique.


Tensions diplomatiques: Paris réplique à Alger, sans fermer la voie de la négociation

Le président français Emmanuel Macron (G) s'entretient avec le président algérien Abdelmadjid Tebboune alors qu'ils posent pour une photo de famille avec les chefs d'État du G7 et les chefs de délégation des pays d'outre-mer au Borgo Egnazia, lors du sommet du G7 organisé par l'Italie, à Savelletri, le 14 juin 2024. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron (G) s'entretient avec le président algérien Abdelmadjid Tebboune alors qu'ils posent pour une photo de famille avec les chefs d'État du G7 et les chefs de délégation des pays d'outre-mer au Borgo Egnazia, lors du sommet du G7 organisé par l'Italie, à Savelletri, le 14 juin 2024. (AFP)
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  • L’esprit de dialogue qui a prévalu pendant quelques jours s’est soudain émoussé, à la faveur du rapport de force diplomatique
  • L’Algérie a expulsé douze agents diplomatiques servant auprès de l’ambassade de France à Alger, en riposte à la mise en examen et au placement en détention à Paris de trois ressortissants algériens

PARIS: Entre Paris et Alger, l’ambiance est à nouveau à l’orage, après un semblant d’embellie de très courte durée.

L’esprit de dialogue qui a prévalu pendant quelques jours s’est soudain émoussé, à la faveur du rapport de force diplomatique.

Ce changement brutal survient après l’expulsion par l’Algérie de douze agents diplomatiques servant auprès de l’ambassade de France à Alger, en riposte à la mise en examen et au placement en détention à Paris de trois ressortissants algériens, dont un agent consulaire.

Les trois Algériens sont accusés d’avoir participé à la séquestration de l’opposant algérien Amir Boukhors, influenceur surnommé Amir DZ.

De son côté, Alger estime que cette mise en accusation est l’œuvre du ministre français de l’Intérieur Bruno Retailleau, accusé de vouloir rabaisser l’Algérie.

C’est d’ailleurs ce qui a dicté aux autorités algériennes le choix des agents français expulsés, qui sont tous en charge de la sécurité et, par conséquent, rattachés au ministère de l’Intérieur.

Se disant «consterné» par la décision algérienne, le palais de l’Élysée a fait savoir dans un communiqué que la France «procédera symétriquement» à l’expulsion de douze agents diplomatiques algériens servant sur son territoire.

Sur un ton sec et direct, le communiqué soutient que la décision d’Alger «méconnaît les règles élémentaires de nos procédures judiciaires» et qu’elle est «injustifiée et incompréhensible».

Il indique, par ailleurs, que Paris a également décidé de rappeler son ambassadeur en Algérie, Stéphane Romatet, pour consultation.

Tout au long de la journée d’hier (mardi), les spéculations allaient bon train sur une possible rupture des relations diplomatiques entre les deux pays.

Le rapprochement esquissé récemment, à la suite d’un échange téléphonique entre les deux présidents – français Emmanuel Macron et algérien Abdelmadjid Tebboune – ne fait pas l’unanimité au sein de la classe politique française, y compris dans les rangs de la majorité.

Mais tel n’a pas été le choix du président français, qui continue à vouloir maintenir une porte de sortie honorable, et éviter les désagréments d’une rupture nette au niveau des intérêts des deux pays et de leurs peuples.

En effet, dès l’annonce des expulsions par l’Algérie, Macron avait exprimé la nécessité de tout mettre en œuvre, dans les 48 heures imparties, pour obtenir des autorités algériennes un retour sur cette décision.

Paris indique cependant que, malgré les échanges entre le ministre des Affaires étrangères français Jean-Noël Barrot et son homologue algérien Ahmed Attaf, aucune évolution de position n’a été constatée.

Les autorités françaises regrettent profondément cette situation, d’autant plus qu’elle intervient à un moment où les deux chefs d’État avaient exprimé leur volonté commune de relancer un dialogue exigeant et constructif.

Cependant, Paris constate que les autorités algériennes ont fait le choix d’instrumentaliser une décision judiciaire française, prise de manière totalement indépendante, prenant ainsi la responsabilité d’une dégradation brutale des relations bilatérales.

Face à cette situation, la France fera tout pour défendre ses intérêts, notamment en matière de sécurité et de coopération migratoire, tout en rappelant à l’Algérie ses engagements internationaux, en particulier ceux qui découlent de conventions bilatérales entre les deux pays.

Néanmoins, côté français on laisse la porte ouverte en soulignant que le président de la République appelle les autorités algériennes à faire preuve de responsabilité et à revenir au dialogue qu’il avait lui-même initié avec son homologue algérien le 31 mars dernier.

Commentant cette dégradation, une source diplomatique française estime que les autorités algériennes ne peuvent pas continuer à saborder les efforts et la volonté d’aller de l’avant affichée par le président français depuis son arrivée au pouvoir en 2017.

Cette même source rappelle que si le rapprochement avec l’Algérie ne fait pas l’unanimité en France, les Algériens aussi sont appelés à accorder leurs violons, d’autant plus qu’une large frange de l’institution militaire algérienne reste elle aussi farouchement hostile à l’harmonisation.

En attendant des jours meilleurs, Paris écarte des répercussions économiques négatives et assure que la procédure reste circonscrite à la sphère diplomatique.

La visite prévue à Alger par le garde des Sceaux Gérald Darmanin est donc suspendue, de même que le sort de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, détenu en Algérie.