Caroline Carpentier: Les femmes au cœur de la plus grande évolution en Arabie saoudite

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Publié le Mardi 08 mars 2022

Caroline Carpentier: Les femmes au cœur de la plus grande évolution en Arabie saoudite

  • Il existe aujourd’hui «une volonté politique, à commencer par celle du roi et du prince héritier, de mettre en avant le rôle des femmes et ce qu'elles peuvent apporter dans toutes les professions et dans différents projets en cours»
  • «Le travail de base avait déjà commencé au début des années 2000 [...] et il s’agissait d’un plan de quinze ans élaboré pour favoriser le tourisme local»

DUBAI: Arrivée en Arabie saoudite pour la première fois il y a plus de vingt ans, Caroline Carpentier, aujourd’hui entrepreneure, consultante et spécialiste en communication ayant vécu et travaillé dans plusieurs pays du Golfe, revient, dans une interview avec Arab News en français, sur son expérience dans la région et dans le Royaume.

«Ce qui m’a le plus marquée, c’est le côté social de la vie en Arabie saoudite et le contact avec la population saoudienne, en comparaison avec d’autres pays du Golfe comme les Émirats ou le Qatar où il y a plus d'expatriés», confie Carpentier. Elle raconte se souvenir comment ceux qui l’entouraient «avaient conscience que pour une femme, venir seule à Riyad n'était peut-être pas évident […]», tout en affirmant avoir été «très agréablement surprise par une vraie hospitalité et un désir d’aider» qui se manifestaient dans son entourage.

Aujourd’hui, et après une longue expérience et tant d’années passées dans les pays du Golfe, la directrice de 4C (Caroline Carpentier Consulting and Communication) constate l’enthousiasme de la jeunesse saoudienne qui s’exprime par une participation active dans la transformation du pays. «Le volume des qualifications en plein essor dans différents domaines d’études et secteurs d’activité prépare les jeunes à entrer dans un vaste marché du travail», poursuit Carpentier qui note toutefois que «l’évolution sociétale la plus marquante dans le Royaume est le rôle renforcé des femmes, et en particulier au cours des dernières années». Les femmes «étaient déjà dans une mouvance de faire énormément d'activités et de contribuer au développement, mais là, il y a eu une vraie accélération», constate Caroline Carpentier.

Cette évolution est selon elle «portée par une volonté politique, à commencer par celle du roi et du prince héritier, de mettre en avant le rôle des femmes et ce qu'elles peuvent apporter dans toutes les professions, et dans différents projets en cours».

Ces grands et rapides changements ne l’ont pas laissée indifférente, et l’ont menée vers une recherche pour mieux découvrir, à travers une série d’interviews, les sources d’inspiration et la vision qu’ont aujourd’hui les femmes de leur rôle. À cet égard, Carpentier ne manque pas de souligner «l’importance du réseau qui se construit entre des femmes impliquées dans l'aide des autres, qu’elles soient jeunes entrepreneures, artistes ou autre».

La série d’interviews qu’elle entreprend constitue la base d’un projet de recherche qui sera rendu public sous la forme d’un livre mettant en évidence l’évolution de l’Arabie saoudite, puisque, selon elle, «dans le monde occidental, nous n’avons pas vraiment idée de ce qui se passe en Arabie saoudite».

Motivées, elles brillent

Dans les institutions et les entreprises, le nombre des femmes est en croissance graduelle depuis le début des années 2000, et des femmes de mieux en mieux formées sont prêtes à occuper plus de postes. Ce sont ces femmes qui intéressent Caroline Carpentier, et pour qui elle consacre une galerie de portraits avec des biographies narratives basées sur des interviews qui racontent leur histoire, leurs défis et les obstacles qu'elles ont eu à surmonter, mais aussi leurs réalisations.

Dans l’Arabie saoudite de nos jours, les statistiques indiquent que 60% des diplômés sont des femmes. Un chiffre qui ne semble pas étonner notre spécialiste qui ramène ce succès à la motivation en expliquant que ces jeunes femmes «sont avant tout motivées ce qui les amène à réussir brillamment leurs parcours scolaires et universitaires, puis à intégrer le marché du travail pour devenir rapidement un capital humain et professionnel pour les entreprises qui les accueillent».

Les femmes saoudiennes ont aujourd'hui la possibilité de travailler dans tous les secteurs, ce qui n'était pas le cas auparavant, en particulier dans certains milieux traditionnellement réservés aux hommes, ce qui explique selon Carpentier le «grand intérêt qu’ont les jeunes étudiantes et diplômées en Arabie saoudite pour les domaines de la science, la technologie, l’ingénierie et les mathématiques».

La mise en avant du rôle des femmes s’intègre d’une manière ou d’une autre dans l’esprit de la Vision 2030 de l’Arabie saoudite, basée sur des piliers, dont l'éducation, la santé, la culture et l'environnement, avec une attention particulière pour des thèmes comme le bien-être de la population.

Vision 2030: Le peuple adhère

Pour Carpentier, une telle vision multidimensionnelle «émane d’une volonté de responsabiliser le peuple, tout en lui fournissant les outils nécessaires pour se lancer dans des projets professionnels et personnels».

Un tel projet et une telle vision ne peuvent que créer «l’adhésion de la population, surtout que depuis quelques années, il y a une vraie classe moyenne qui s'est créée en Arabie saoudite, ce qui provoque un changement de mentalité d’une part, et une nouvelle façon de se structurer la société d’autre part».

L’ouverture multisectorielle dans le cadre de la Vision 2030 s’accompagne d’investissements massifs dans plusieurs domaines dont celui du tourisme. Pour Carpentier, qui a fondé en Arabie saoudite une entreprise touristique il y a plus de vingt ans, «le travail de base avait déjà commencé au début des années 2000 [...] et il s’agissait d’un plan de quinze ans élaboré pour favoriser le tourisme local». L’état des lieux est aujourd’hui d’une autre dimension, avec la création de lieux de culture, de musées, de résidences d'artistes et de grands projets de développement touristique comme AlUla, note Caroline Carpentier. Elle constate «le renforcement des partenariats culturels et commerciaux entre la France et l’Arabie saoudite, ce qui profite au secteur touristique» et permet un meilleur développement. Elle cite à titre d’exemple l’agence française de développement (AFAlula) « qui donne au Royaume la possibilité de s’appuyer sur des expertises externes, notamment celles de pays comme la France», première destination touristique mondiale.


Disney va ouvrir un parc d'attraction aux Emirats arabes unis, à Abou Dhabi

Des acteurs de Disney participent à une parade lors d'une cérémonie marquant le 100e anniversaire de la Walt Disney Company, organisée à Disneyland Paris, à Marne-la-Vallée, à l'est de Paris, le 16 octobre 2023. (AFP)
Des acteurs de Disney participent à une parade lors d'une cérémonie marquant le 100e anniversaire de la Walt Disney Company, organisée à Disneyland Paris, à Marne-la-Vallée, à l'est de Paris, le 16 octobre 2023. (AFP)
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  • Disney prévoit d'ouvrir son septième parc d'attraction, sur l'île de Yas, à Abou Dhabi, via un accord de licence avec le groupe émirati Miral, qui va bâtir et gérer le site
  • Le septième parc Disney, qui en compte déjà deux aux Etats-Unis, deux en Chine, un au Japon et un en France, comprendra lui aussi hôtels, restaurants et boutiques

NEW YORK: Disney prévoit d'ouvrir son septième parc d'attraction, sur l'île de Yas, à Abou Dhabi, via un accord de licence avec le groupe émirati Miral, qui va bâtir et gérer le site, ont indiqué les deux sociétés dans un communiqué publié mercredi.

Le septième parc Disney, qui en compte déjà deux aux Etats-Unis, deux en Chine, un au Japon et un en France, comprendra lui aussi hôtels, restaurants et boutiques.

"La région est suffisamment distante des autres parcs pour que nous craignions pas de cannibaliser les sites existants", a expliqué mercredi, depuis Abou Dhabi, le patron de Disney, Bob Iger, lors d'une conférence téléphonique de présentation des résultats, sans donner de date prévue pour l'ouverture du parc.

Bob Iger a justifié l'implantation d'un parc à Abu Dhabi par le développement touristique déjà entamé par les Emirats arabes unis depuis plusieurs années. Il a mentionné l'antenne du Louvre, inaugurée en 2017, et celle du Guggenheim, qui devrait ouvrir ses portes début 2026.

Yas Island est située à une centaine de kilomètres au sud de Dubaï, autre place commerciale et financière des Emirats, et premier aéroport au monde pour les passagers internationaux. Sur cette île, Miral opère déjà, par ailleurs, plusieurs attractions, parmi lesquelles le Warner Bros World et Ferrari World.

Troisième ville des Emirats arabes unis, Abou Dhabi ambitionne d'accueillir environ 39 millions de touristes en 2030.

L'accord passé avec Miral permet à Disney de n'engager aucun investissement dans le projet, qui va être intégralement financé par le groupe émirati. Le géant américain du divertissement supervisera les plans du site et fournira à son partenaire une "expertise opérationnelle".

En échange de son soutien et de l'utilisation de l'univers Disney, Miral lui versera des royalties et des commissions. Le site d'"Abou Dhabi aura à la fois l'authenticité de Disney et le caractère distinctif émirati", a décrit Bob Iger.

L'annonce intervient avant la visite officielle au Moyen-Orient de Donald Trump, qui doit notamment se rendre aux Emirats arabes unis.

Le projet va "mélanger les histoires et les personnages formidables de Disney avec la culture et le goût de ce pays et de cette région", a poursuivi Bob Inger.

L'ajout de ce nouveau parc au portefeuille du groupe "nous permet de toucher la population mondiale plus efficacement qu'auparavant", a-t-il déclaré.

Interrogé sur la possibilité d'un huitième parc, le patron du groupe de Burbank (Californie) a répondu que rien n'était à l'étude pour l'instant.


Le Louvre: une exposition inédite met en lumière la grandeur des Mamlouks

Quelque 260 chefs-d’œuvre, répartis sur cinq sections thématiques dans le Hall Napoléon, retracent deux siècles du règne de cette dynastie, engagée dans le mécénat de l’art, la littérature et les sciences.  (AFP)
Quelque 260 chefs-d’œuvre, répartis sur cinq sections thématiques dans le Hall Napoléon, retracent deux siècles du règne de cette dynastie, engagée dans le mécénat de l’art, la littérature et les sciences. (AFP)
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  • Ce sultanat embrasse un vaste territoire qui comprend l’Égypte, le Bilad al-Sham (Syrie, Liban, Israël/Palestine, Jordanie), une partie de l’est de l’Anatolie et le hijjaz en Arabie où sont situées La Mecque et Médine
  • Mais son histoire ne saurait se limiter à ses conquêtes et faits d’armes, car sa culture tout aussi complexe et sa société participent d’une époque médiévale méconnue et singulièrement mouvante

PARIS: Du 30 avril au 28 juillet, le musée du Louvre lève pour la première fois le voile sur une dynastie méconnue en France à travers une exposition inédite consacrée aux Mamelouks.

Quelque 260 chefs-d’œuvre, répartis sur cinq sections thématiques dans le Hall Napoléon, retracent deux siècles du règne de cette dynastie, engagée dans le mécénat de l’art, la littérature et les sciences.

Esclaves militaires d’origine majoritairement turque puis caucasienne, les Mamelouks ont construit leur légende sur leur puissance guerrière. 

De 1250 à 1517, le sultanat mamelouk a vaincu les derniers bastions des croisés, combattu et repoussé la menace des Mongols, survécu aux invasions de Tamerlan et maintenu à distance ses menaçants voisins turkmènes et ottomans avant de succomber à l’expansionnisme de ces derniers.

Ce sultanat embrasse un vaste territoire qui comprend l’Égypte, le Bilad al-Sham (Syrie, Liban, Israël/Palestine, Jordanie), une partie de l’est de l’Anatolie et le hijjaz en Arabie où sont situées La Mecque et Médine.

Mais son histoire ne saurait se limiter à ses conquêtes et faits d’armes, car sa culture tout aussi complexe et sa société participent d’une époque médiévale méconnue et singulièrement mouvante.

 Une société plurielle où les femmes comme les minorités chrétiennes et juives ont une place, une sorte d’épicentre où convergent l’Europe, l’Afrique et l’Asie et au sein duquel les personnes et les idées circulent au même titre que les marchandises et les répertoires artistiques.

C’est cette diversité et cette richesse que retrace le parcours de l’exposition, répartie en cinq sections, elle plonge le visiteur dans plusieurs espaces d’immersion, détaille l’identité mamelouk, leurs cultures, ainsi que leur ouverture et leurs échanges avec le monde environnant.

La première section met en lumière le tempérament des sultanats Mamelouks, bâtisseurs et mécènes, engagés entre eux dans une compétition de chantiers de construction, dont les vestiges ont marqué la ville du Caire, haut lieu de leur pouvoir.

Cette section propose un dispositif immersif réalisé à partir de photographies du complexe funéraire du sultan Qalawun, dont le règne est considéré comme l’âge d’or du règne Mamelouks.

Elle se compose, d’un hôpital, d’une « madrasa » et du mausolée du souverain, lequel est considéré comme l’un des édifices les plus somptueux du Caire médiéval, avec des murs couverts de panneaux de mosaïque et un sol incrusté de marbre.

 Une grande place est consacrée aux Mamelouks en tant que protecteurs des lieux saints, un prestige qui leur permet de se présenter comme les défenseurs de la foi, et leur confère la charge d’assurer le bon déroulement du pèlerinage.

 Ainsi, ils en profitent pour réaliser des travaux d’embellissement de la Mecque, et Médine, les deux villes saintes.

Une des pièces phare de cette section est une clé de la Ka’aba gravée au nom du sultan Farah destinée à ouvrir l’unique porte du lieu saint.

Cette clé, conservée par le Louvre, est recouverte de transcriptions coraniques en langues arabes, elle constitue un objet hautement symbolique qui désigne les Mamelouks comme les plus légitimes souverains musulmans de l’époque.

La société Mamelouks diverse, arabophone et largement islamisée est également mise en valeur par la présentation de vestiges, de l’importante communauté chrétienne ainsi que des petites communautés juives.

Leur culture, militaire et religieuse entièrement tournée au service de l’empire est éclairée dans l’une des sections, à travers des armures militaires finement tissées et incrustées d’inscriptions d’or, de lampes en verre soufflé émaillées et dorées, de pupitres marquetés d’ivoire et un Coran monumental de la moitié du 14ème siècle manuscrit en encre, pigments et or.

Les Mamelouks sont par ailleurs au cœur des échanges entre orient et occident, la position stratégique de leur sultanat dans le commerce des épices et leur domination sur les lieux saints du Hijaz et de la Palestine leur permet de jouer un rôle de pivot au croisement de nombreux itinéraires marchands, diplomatiques et spirituels.

C’est ainsi que dès la fin du 13ème les Mamelouks et les Européens signent des accords de commerce, instaurant des échanges fructueux et durables révélés dans la quatrième section de l’exposition.

La grande vitalité du sultanat, sa frénésie constructrice et l’intensité de ses échanges contribuent à l’essor d’un art florissant est luxueux dévoilé dans la dernière section, où se côtoient des boiseries sculptées égyptiennes, des objets en métal cuivré et argenté de Syrie, des pièces d’artisanat du Mossoul en Irak, sans oublier les manuscrits et les textiles finement brodés.

Par leur énergie, les Mamelouks, des esclaves étrangers à la terre d’Égypte, arrachés à leurs familles et formés dans les casernes, ont façonné l’un des âges d’or les plus brillants de l’histoire islamique.

Dans leur société singulière, diversité et mobilité étaient érigés en véritables règles de vie. 

 


Le matcha pour tous : un thé vert devenu tendance en Arabie saoudite

Autrefois cantonné au thé de cérémonie au Japon, le matcha gagne aujourd'hui en popularité en Arabie saoudite. (AN Photo Waad Hussain)
Autrefois cantonné au thé de cérémonie au Japon, le matcha gagne aujourd'hui en popularité en Arabie saoudite. (AN Photo Waad Hussain)
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  • L'essor du thé japonais dans le Royaume est un changement culturel, une tasse verte à la fois

RIYAD — Longtemps réservé aux cérémonies traditionnelles au Japon, le matcha trouve aujourd’hui sa place dans le quotidien des Saoudiens. Cette popularité croissante s’explique par l’intérêt grandissant pour les tendances bien-être, l’évolution des tendances gustatives et l’essor d’un mode de vie plus conscient.

Les données confirment cette tendance. Selon un récent rapport d'IMARC Group, le marché saoudien du thé vert, qui comprend le matcha, était évalué à 140,14 millions de dollars et devrait atteindre 229,24 millions de dollars d'ici à 2033.

Les importations de thé vert conditionné ont presque doublé en valeur entre 2020 et 2023, ce qui suggère un appétit croissant pour les boissons haut de gamme axées sur la santé.

Cette demande croissante se reflète dans les menus des cafés et sur les réseaux sociaux du Royaume. Les Matcha lattes, autrefois réservés aux cafés spécialisés, sont désormais présents dans les cafés branchés et dans les cuisines des particuliers.

Qu'il soit servi glacé dans des tasses en verre élégantes ou fouetté à la maison avec du lait d'avoine, le matcha est plus qu'une boisson. C'est un état d'esprit, une déclaration personnelle et, pour beaucoup, une façon plus saine de commencer la journée.

À Dammam, Sara Anas, 19 ans, se souvient de sa première dégustation de matcha en 2019. "Mon père aime découvrir de nouvelles saveurs. Le goût n'était pas très bon au début, mais lorsque le matcha est devenu populaire en 2021, j'ai eu envie de le goûter à nouveau dans les cafés locaux," a-t-elle lancé.

Aujourd'hui, elle en boit presque tous les jours. "Cela peut paraître bizarre, mais je n'ai pas l'impression que c'est lourd pour mon corps comme le café. Je me sens plus à l’aise et j'ai plus d'énergie."

Anas fait partie d'un groupe démographique en pleine expansion. À Riyad, Amal Al-Mutairi, 26 ans, commence son jour par un matcha. "Je le préfère glacé avec du lait vanillé pour que le goût soit plus doux et plus léger", a-t-elle affirmé.

Pour elle, l'attrait du matcha a commencé par la lecture de ses bienfaits. "Le matcha me donne de l'énergie calme sans la nervosité ou l'effondrement que je ressens habituellement après avoir bu du café. Il m'aide également à me concentrer plus longtemps."

Cette énergie calme et concentrée - souvent décrite comme une expérience de caféine "plus propre" - a rendu le matcha particulièrement populaire auprès des étudiants et des professionnels.

Pour Anas, il s'agit d'un élément essentiel du campus. "C'est indispensable avant les cours ! Il me donne l'énergie nécessaire pour continuer ma journée à l'université", a-t-elle déclaré.

Mais le matcha est plus que fonctionnel. Il est devenu un mode de vie, adopté à la fois pour ses vertus de bien-être et pour son charme visuel.

À l'échelle mondiale, l'essor du matcha s'inscrit dans le cadre d'un boom plus large du bien-être. La production japonaise de matcha a augmenté de 185% entre 2010 et 2023, et la demande est aujourd'hui si forte que les fournisseurs annoncent des pénuries. Les principaux producteurs japonais ont commencé à limiter les exportations pour répondre aux besoins nationaux.

L'attrait du matcha pour la santé n'est pas qu'un effet d'annonce. Riche en antioxydants - en particulier un composé appelé EGCG - des études suggèrent qu'il peut réduire l'inflammation, soutenir la santé cardiovasculaire et aider les fonctions cognitives.

Une récente étude saoudienne a également révélé que plus de la moitié des participants pensaient que le matcha pouvait contribuer à la gestion du poids et à l'équilibre de la glycémie.

Les experts soulignent toutefois que la modération est de mise. Une consommation excessive de matcha peut interférer avec l'absorption du fer et n'est pas recommandée pour tout le monde.

Le rituel de la préparation du matcha, en particulier pour ceux qui le fabriquent eux-mêmes, fait désormais partie d'une évolution plus large vers un mode de vie lent et intentionnel, auquel de nombreux jeunes Saoudiens adhèrent.

Ce rituel est profondément personnel pour Leen al-Zamil, 27 ans, qui a fait du matcha une curiosité et un plaisir quotidien. "J'étais curieuse au début et honnêtement, je détestais ça, mais je pense que c'est parce que c'était chaud. Je l'ai préféré froid avec du sirop de vanille et du lait d'avoine. Je ne peux certainement pas le boire seul", a-t-elle révélé. 

Aujourd'hui, elle ne peut pas passer une journée sans en boire. "Parfois, elle en boit deux fois ou plus. "J'aime sa couleur... J'apprécie chaque étape de sa préparation et son goût est si bon. Il me rend de bonne humeur."

Mme al-Zamil n'est pas la seule à considérer le matcha comme plus qu'une simple boisson.

Pour Mona Abdullah, 28 ans, le matcha est bien plus qu’une boisson : c’est un remède. "En tant que personne atteinte du syndrome du côlon irritable, le café me cause souvent des inconforts prolongés. Le matcha, lui, m’apporte une énergie stable sans effets secondaires. J’ai arrêté le café depuis trois mois, et je suis convaincue que le matcha est une meilleure source de caféine que le café noir", a-t-elle confié.

Le syndrome du côlon irritable est une affection digestive courante. De nombreuses personnes atteintes du syndrome de l'intestin irritable trouvent que le café, avec son acidité et sa forte teneur en caféine, peut déclencher des malaises, ce qui fait que des alternatives plus douces comme le matcha sont préférées.

Mme Abdullah en consomme deux fois par jour, glacé et sans arômes ajoutés. "C’est ma santé, dit-elle, qui m’a poussée à changer."

Mais l'attrait du matcha ne se limite pas à la santé : il s'agit aussi d'une question d'esthétique et de culture. "Je pense que c'est un mélange de tout", dit al-Mutairi. "Les bienfaits pour la santé, le goût et, oui, l'esthétique".

Anas a fait écho à cette idée, notant que les motivations varient d'une personne à l'autre. "Pour moi, c'est pour ses bienfaits sur la santé et pour son goût. En général, on n'obtient pas une boisson saine avec un bon goût. Mais je pense qu'il y a beaucoup de gens qui le boivent juste pour l'esthétique. On les voit ajouter des centaines de sirops juste pour dire qu'ils boivent du matcha", a-t-elle expliqué. 

Ce mélange de bien-être et d'image - une santé sérieuse associée à une image de marque ludique - a alimenté la montée en puissance du matcha sur les médias sociaux. Avec sa teinte vert vif, son emballage minimaliste et ses fréquentes apparitions dans les selfies de cafés, le matcha est devenu la boisson du mouvement "soft life", qui privilégie la paix, l'équilibre et le plaisir.

"C'est sans aucun doute l'ambiance et le goût", a indiqué al-Zamil.

Dans un pays où la culture du café est profondément enracinée, le matcha ne vient pas remplacer la tradition, mais proposer une alternative : un mélange de saveur, de style de vie et de sens personnel, une tasse vert vif à la fois.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com