PARIS : D'où venaient les armes utilisées par le commando jihadiste du 13 novembre 2015 ? L'audition lundi, par visioconférence depuis Bruxelles, d'une enquêtrice belge devant la cour d'assises spéciale de Paris n'a pas apporté de lumière sur leur origine.
L'enquête n'a pas permis de "remonter la filière d'approvisionnement" des armes ayant servi aux attentats de Paris et Saint-Denis, a reconnu l'officier de police identifié par le numéro 447437051.
Tout au plus, a indiqué l'enquêtrice, les investigations de la police belge ont permis de mettre en évidence "les démarches entreprises par certains membres de la cellule (jihadiste) pour s'en procurer". Une semaine avant les attentats, Mohamed Bakkali, considéré comme l'un des logisticiens du commando, aurait pris contact avec un certain Mohammed E. pour se procurer six kalachnikovs.
Interpellé et poursuivi en Belgique, Mohammed E. ne fait pas partie des accusés jugés à Paris.
L'enquêtrice évoque des contacts avec des Kurdes et des Tchétchènes dans la région de Liège. Ces contacts ont-ils abouti ? L'enquêtrice ne peut l'affirmer.
Les vérifications tardives de cette piste par la police belge, seulement à partir de 2018, n’ont pas facilité la collecte des éléments de preuve.
Une autre piste mène vers les Pays-Bas. "Une filière hollandaise a bien été utilisée pour acheter des armes", affirme l'enquêtrice.
En octobre 2015, Ali El Haddad Asufi, l'un des accusés du procès, a cherché à se procurer des "Clio" à Rotterdam. Des "Clio" ? De toute évidence, il ne s'agissait pas d'automobiles, souligne l'enquêtrice, mais un nom de code pour désigner du cannabis... ou, plus vraisemblablement, des armes.
L'avocat belge d'Ali El Haddad Asufi, Jonathan De Taye, aimerait savoir pourquoi la police belge pense que ces "Clio" désignent des armes et pas de la drogue.
"On prend aussi des précautions pour acheter des stupéfiants", fait remarquer l'avocat. "Pour des armes aussi on prend des précautions", répond la policière du tac-au-tac. L'avocat insiste: "Vous devez démontrer que ce sont des armes". L'enquêtrice s'énerve: "Vous aussi, vous devez montrer que ce sont des stupéfiants". "Mais non ! Moi je ne dois rien démontrer du tout", s'offusque l'avocat.
En droit, la charge de la preuve revient à l'accusation.
Au total, seules six kalachnikovs ont été retrouvées sur les scènes de crime. "Peut-on en déduire que (les membres du commando) ont eu des difficultés à se fournir ?", demande l'avocat général Nicolas Le Bris. "Oui, il semble qu'il y a eu un petit souci", répond l'enquêtrice.