PARIS : L'Ukraine est restée au coeur de la campagne présidentielle samedi avec les manifestations contre la guerre menée par la Russie auxquelles ont participé à Paris les candidats écologiste Yannick Jadot et socialiste Anne Hidalgo qui, comme les autres prétendants, critiquent le désormais candidat Emmanuel Macron.
C'est le candidat EELV qui a été le plus incisif en dénonçant une "complicité inacceptable" du géant français TotalEnergies avec Moscou et en fustigeant le fait que l'entreprise "reste la dernière multinationale du pétrole et du gaz présente en Russie" après l'invasion de l'Ukraine.
"Si j'étais à la place d'Emmanuel Macron, j'imposerais à Total la fin de sa complicité avec Vladimir Poutine et ce qui se passe en Ukraine. J'imposerais à Total de quitter la Russie", a-t-il déclaré à CNews.
TotalEnergies, qui réalise en Russie 3 à 5% de ses revenus totaux, a indiqué qu'il n'apporterait "plus de capital à de nouveaux projets" dans le pays, sans toutefois évoquer un retrait ou une suspension d'activité, comme son concurrent BP.
En meeting au Havre, le candidat communiste Fabien Roussel s'en est pris à "ces multinationales françaises, inscrites au CAC 40, les Total, les BNP, les LVMH et tant d'autres, qui pourraient encore en 2022 s'enrichir pendant cette guerre comme ils l'ont fait pendant la pandémie".
« Profiteurs de guerre »
"Il est hors de question que nous acceptions de voir aujourd'hui nos factures s'envoler en même temps que leur bénéfices et leur dividendes. Il y a des profiteurs de pandémie, il y a des profiteurs de guerre", a-t-il lancé.
Anne Hidalgo, sur la ligne européenne et de l'exécutif sur ce dossier, préconise une aide économique à Kiev et des sanctions contre Moscou. Il faut aussi "une mobilisation de la communauté internationale et des opinions publiques" et "livrer des armes, notamment à l'Ukraine, pour que les Ukrainiens puissent se battre", a-t-elle rappelé sur BFMTV.
Le patron du parti présidentiel LREM Stanislas Guérini avait pour sa part appelé sur LCI à participer à la manifestation à Paris pour "montrer notre solidarité totale avec le peuple ukrainien", ajoutant que la France continuerait à accueillir des réfugiés et à "livrer des armes" à l'Ukraine.
Interrogée lors d'un déplacement au Grau-du-Roi (Gard), Marine Le Pen a de son côté réitéré son opposition à la livraison d'armes car "c'est rajouter des armes à la guerre".
"C'est sur la diplomatie qu'il faut tout miser" et "réfléchir à des sanctions mais dont je dis qu'elles ne doivent pas avoir comme conséquence l'effondrement économique de notre propre pays", a-t-elle affirmé sans autre précision.
Sur un plan plus politique, la candidate RN a jugé "choquant" le "mélange des genres entre le président de la République et le candidat" après la diffusion vendredi d'une vidéo de campagne d'Emmanuel Macron tournée dans son bureau à l'Elysée.
Plus tard, dans un meeting à Aigues-Mortes, Marine Le Pen a estimé que tout était "fait pour endormir l'opinion".
La situation en Ukraine, "ne justifie absolument pas la tentation d'Emmanuel Macron d'échapper aux exigences d'une campagne électorale et aux exigences de la démocratie: celle de rendre compte de son bilan, celle d'accepter le débat d'idées", a-t-elle clamé.
A l'unisson, la candidate LR Valérie Pécresse réclame que le candidat Macron vienne "dans l'arène pour débattre", estimant qu'un débat télévisé est "absolument nécessaire" avant le premier tour. Yannick Jadot juge que cela serait "aberrant qu'il (Macron) n'y participe pas".
« Waterloo sécuritaire »
Réponse du camp présidentiel: "Cela fait cinq ans que le président débat avec les Français", a souligné le ministre des Comptes publics Olivier Dussopt sur FranceInfo. "Je ne suis pas sûr qu'un débat à 12 autour d'une table, avec parfois des choses un peu étonnantes dans les propositions des uns et des autres, soit l'exercice le plus utile", a-t-il ajouté.
Porté par sa gestion de la crise en Ukraine, Emmanuel Macron continue à progresser dans les derniers sondages. Il est même crédité de 30,5% des intentions de vote, en hausse de 4 points en une semaine, selon une étude Ipsos-Sopra-Steria publiée samedi, et battrait au second tour sa rivale la plus proche Marine Le Pen (59% contre 41%).
La primaire populaire, initiative citoyenne qui avait soutenu Christiane Taubira à la présidentielle avant que celle-ci ne jette l'éponge faute de parrainages, a par ailleurs annoncé "soutenir et faire campagne" pour "l'Union populaire" de Jean-Luc Mélenchon.
Et à droite, Valérie Pécresse en meeting à Metz après avoir jugé ses rivaux d'extrême droite "discrédités" par leur "allégeance à Poutine par le passé", a concentré ses saillies contre Emmanuel Macron.
Selon elle, le bilan d'Emmanuel Macron "a des allures de dépôt de bilan", a-t-elle chargé, pointant le "Waterloo sécuritaire" du chef de l'Etat ou encore le "drame français" de la "dépendance aux importations" et le déficit de la balance commerciale.