BRUXELLES: L'interdiction de diffusion dans l'Union européenne des médias russes RT et Sputnik, considérés comme des instruments de « désinformation » de Moscou dans sa guerre contre l'Ukraine, est entrée en vigueur mercredi, et chaque Etat membre est désormais chargé de la faire respecter.
Les contenus de Sputnik et des chaînes de RT (ex-Russia Today) en anglais, allemand, français et espagnol ne pourront plus être diffusés sur les réseaux de télévision et sur internet, selon cette décision publiée à la mi-journée au Journal officiel de l'UE.
RT et Sputnik sont les « canaux » des « actions de propagande » et « de déformation des faits » de la Russie, qui « menacent directement et gravement l'ordre et la sécurité publics de l'Union », écrivent les Vingt-sept.
« Ces médias jouent un rôle essentiel et déterminant pour faire avancer et soutenir l'agression contre l'Ukraine et pour déstabiliser les pays voisins », jugent les Vingt-sept.
Ces mesures d'interdiction « devraient être maintenues jusqu'à ce que l'agression contre l'Ukraine prenne fin et jusqu'à ce que la Fédération de Russie et ses médias associés cessent de mener des actions de propagande contre l'Union et ses Etats membres ».
Recours?
Chaque Etat membre, via son autorité de régulation des médias et ses opérateurs télécoms, est chargé de faire respecter cette interdiction. Elle devrait toutefois faire l'objet de recours devant la justice.
« Nous nous appuyons sur de solides bases juridiques (...) et nous défendrons notre décision devant les tribunaux » européens, a assuré mardi une source européenne tout en admettant que des représailles contre des médias européens en Russie étaient « une possibilité ».
Le principe de l'interdiction avait été annoncé dimanche par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.
Avant même son entrée en vigueur officielle, des géants de l'internet avaient pris les devants: Facebook et Instagram (groupe Meta) avaient annoncé lundi qu'ils bloquaient dans les pays de l'UE les contenus publiés par RT et Sputnik, suivis mardi par YouTube.
Mardi, le régulateur russe des médias, Roskomnadzor, a protesté contre ces mesures, estimant qu'elles « violent les principes fondamentaux de la libre circulation de l'information et son accès sans entrave ».
Si l'éviction de RT et Sputnik de certains réseaux sociaux est déjà effective, il n'en est pas de même pour l'interdiction de la diffusion télévisée de RT.
Mercredi peu avant 14h00, une heure environ après l'officialisation de l'interdiction par l'UE, RT France était ainsi toujours visible à la télévision.
Spécificité française
La situation française est spécifique, car la France est le seul Etat membre de l'UE à accueillir sur son sol une filiale de RT (son siège est à Boulogne-Billancourt, près de Paris) et à lui avoir accordé une licence de diffusion.
Le cas de figure est différent pour les autres Etats membres: les chaînes RT anglaise ou espagnole qui y sont diffusées sont basées à Moscou et par conséquent soumises au régulateur russe s'agissant de leurs contenus.
En Allemagne, RT en allemand a été suspendue fin 2021: cette chaîne s'appuyait sur une licence serbe pour sa diffusion, ce que le régulateur allemand des médias a contesté.
Selon le texte publié au Journal officiel de l'UE, « toute licence ou autorisation de diffusion et tout accord de transmission et de distribution » conclu avec RT et Sputnik sont suspendus.
Cela concerne tous les moyens de diffusion, que ce soit « le câble, le satellite, la télévision sur IP, les fournisseurs de services internet, les plateformes ou applications, nouvelles ou préexistantes, de partage de vidéos sur l'internet ».
Le texte précise que « ces mesures n'empêchent pas ces médias et leur personnel d'exercer dans l'Union d'autres activités que la diffusion, telles que des enquêtes et des entretiens ».
Mardi, lors d'une assemblée générale où était présente une centaine de salariés, Xenia Fedorova, la présidente de RT France, a affirmé que la chaîne continuerait à travailler jusqu'à ce qu'elle ne puisse plus le faire, a confié une élue du syndicat SNJ.