La guerre en Ukraine: situation sur le terrain au sixième jour

Le bâtiment de l'administration régionale de Kharkiv détruit par des bombardements, le 3 mars 2022. (Photo, AFP)
Le bâtiment de l'administration régionale de Kharkiv détruit par des bombardements, le 3 mars 2022. (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 01 mars 2022

La guerre en Ukraine: situation sur le terrain au sixième jour

Le bâtiment de l'administration régionale de Kharkiv détruit par des bombardements, le 3 mars 2022. (Photo, AFP)
  • Kiev: l'intensité des combats devrait s'accroître très vite dans la capitale, alors que l'armée ukrainienne a placé un important nombre de ses camions et tanks à l'ouest et au nord de la ville
  • Jean Castex a dénoncé mardi un «acte de guerre» russe contre l'Ukraine et une «agression cynique et préméditée»

PARIS/ MOSCOU: Au sixième jour de la guerre en Ukraine, d'impressionnants convois militaires russes se dirigent vers Kiev, indice d'un assaut massif à venir, et Kharkiv, la deuxième ville ukrainienne, a été à nouveau bombardée, un « crime de guerre » selon le président ukrainien. 

Voici un point de la situation, bâti essentiellement à partir des déclarations ukrainiennes et d'analystes, la Russie communiquant très peu sur son offensive. 

- Convoi russe: Des photos satellites diffusées dans la nuit par la société américaine d'imagerie satellitaire Maxar montraient un convoi russe s'étirant sur des dizaines de kilomètres et se dirigeant vers la capitale ukrainienne depuis le nord-ouest. 

« L'armée russe réorganise ses efforts militaires pour tenter de remédier à une mauvaise planification et exécution » de son assaut du fait d'une analyse « erronée » de « la volonté et la capacité de résistance des Ukrainiens », explique l'ISW, l'Institut d'étude de la guerre. 

Les troupes de Moscou, bien que « beaucoup plus importantes et plus capables » que leurs adversaire, ont ainsi connu « d'importants échecs » sur Kiev et de Kharkiv face à des forces ukrainiennes »remarquablement efficaces », poursuit ce centre de recherche américain. 

Castex dénonce un «acte de guerre» russe «cynique et prémédité»

Le Premier ministre Jean Castex a dénoncé mardi un « acte de guerre » russe contre l'Ukraine et une « agression cynique et préméditée » que « La France condamne de la manière la plus absolue », dans un discours devant le Parlement. 

« Nous faisons face à une situation de guerre mais également à un tournant dans l'histoire de l'Europe et de notre pays », a estimé le chef du gouvernement, en réaffirmant le soutien de la France « au peuple ukrainien qui vit des moments terribles ». 

- Kiev: l'intensité des combats devrait s'accroître très vite dans la capitale, alors que l'armée ukrainienne a placé un important nombre de ses camions et tanks à l'ouest et au nord de la ville. 

Les renforts russes trouveront face à eux une ville de Kiev vidée d'une partie de sa population, mais dont de nombreux habitants restants ont bâti des tranchées et barricades de fortune et se sont armés, fabricant notamment des cocktails Molotov, pour se défendre. 

- Kharkiv: une caméra de vidéosurveillance a enregistré l'explosion d'un obus russe à précisément 8H01 et 51 sec ce matin sur la préfecture régionale de la deuxième ville du pays avec 1,4 million d'habitants. 

Quelques heures après l'immense gerbe de feu, la place centrale, où l'imposant bâtiment se trouvait, est désormais jonchée de gravats. 

Au moins dix personnes sont mortes et vingt ont été blessées dans le bombardement du centre-ville de Kharkiv, selon les secouristes ukrainiens, qui ont diffusé des images de victimes sorties des gravats du siège de l'administration locale. 

Au moins onze personnes avaient déjà été tuées lundi dans cette ville. 

« Incapable de capturer les centres de Kharkiv et Chernihiv, les occupants ont tiré des roquettes sur les quartiers résidentiels de ces villes », a dénoncé l'armée ukrainienne dans un communiqué publié sur Facebook. 

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Localisation des explosions ou bombardements depuis le 24 février dans le centre de Kharkiv, deuxième plus grande ville d'Ukraine. (Graphique, AFP)

- Okhtyrka: Des combats ont également eu lieu lundi à Okhtyrka, à une centaine de kilomètres au nord-ouest de Kharkiv, qui auraient tué « environ 70 combattants ukrainiens » mais aussi de nombreux Russes, selon les autorités locales. Interrogée, l'armée ukrainienne n'a pas confirmé ce bilan.   

Elle a par contre fait état de « l'encerclement » par les Russes d'Okhtyrka, ainsi que des villes de Sumy et Lebedyn, proches de la frontière russe. 

- Front Sud: la présidence ukrainienne a également pointé un regroupement de « blindés, missiles et artillerie » autour de Kherson et Marioupol. Dans cette dernière, une ville portuaire, l'électricité était coupée mardi matin après une attaque russe, selon le gouverneur de la région de Donetsk dont elle fait partie. 

Mardi, le ministère russe de la Défense a affirmé que ses troupes qui progressaient le long de la côte depuis la Crimée et celles venues du territoire séparatiste prorusse de Donetsk (Sud-Est) avaient réussi à faire leur jonction.  

Peu de temps auparavant, l'armée ukrainienne avait toutefois affirmé avoir fait échouer cette tentative, indiquant que l'armée russe avait tenté « en vain » de prendre Marioupol. 

Le chef de la diplomatie chinoise appelle son homologue ukrainien, «regrette profondément» le conflit

Le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi s'est entretenu mardi avec son homologue ukrainien Dmytro Kouleba et lui a exprimé « le profond regret » de la Chine face au conflit russo-ukrainien, ont annoncé les médias d'État chinois. 

Alors que Pékin s'est refusé à condamner Moscou pour l'invasion de l'Ukraine, Wang Yi a assuré que la Chine « regrettait profondément que le conflit ait éclaté entre l'Ukraine et la Russie et accordait une extrême attention aux préjudices subis par les civils », appelant également les deux pays à « trouver un moyen de résoudre le problème par la négociation », a rapporté la chaîne de télévision publique CCTV. 

- Espace aérien: Contrairement aux allégations de Moscou, « la Russie n'a pas réussi à prendre le contrôle de l'espace aérien au-dessus de l'Ukraine, ce qui a incité à passer aux opérations de nuit pour tenter de réduire leurs pertes », affirme le ministère de la Défense britannique sur Twitter. 

Lundi, la Russie revendiquait la « suprématie aérienne » sur toute l'Ukraine après la destruction des systèmes ukrainiens Buk M-1, S-300 et de cinq avions de combat. 

- Pertes militaires: lundi soir, le président ukrainien Volodymir Zelensky affirmait que 5 300 soldats russes avaient été tués depuis le début de l'offensive. Moscou a reconnu pour la première fois dimanche enregistrer des pertes humaines au cours de l'invasion, mais sans donner de chiffres. 

- Pertes civiles: depuis le début de l'offensive, plus de 350 civils ukrainiens ont été tués, dont 14 enfants, selon Kiev. 

Le président du Conseil européen, Charles Michel a accusé mardi la Russie de « terrorisme géopolitique » pour son invasion de l'Ukraine. 

Plus de 660 000 civils ont fui le pays pour se réfugier dans des pays limitrophes, selon l'ONU. 

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Des photos satellites diffusées dans la nuit par la société américaine d'imagerie satellitaire Maxar montraient un convoi russe s'étirant sur des dizaines de kilomètres et se dirigeant vers la capitale ukrainienne depuis le nord-ouest. (Photo, AFP)

 

L'armée russe appelle les civils de Kiev proches de ses cibles à évacuer

L'armée russe va frapper des infrastructures des services de sécurité ukrainiens à Kiev et a appelé mardi en conséquence les civils vivant à proximité à fuir.  

« Afin d'arrêter les attaques informatiques contre la Russie, des frappes avec des armes de haute précision vont être menées contre des infrastructures technologiques du SBU (service ukrainien de sécurité) et du centre principal de l'Unité des opérations psychologiques à Kiev », a dit le porte-parole du ministère russe de la Défense, Igor Konachenkov.  

« Nous appelons (...) les habitants de Kiev vivant à proximité des centres de retransmission à quitter leur domicile », a-t-il ajouté. 


Tesla continue de flancher en Allemagne, mais les voitures électriques séduisent

Des policiers se tiennent devant un centre de service Tesla dans le quartier de Reinickendorf à Berlin, alors que des manifestants ont donné le coup d'envoi des "Semaines de protestation" contre l'entreprise automobile américaine Tesla, le 29 mars 2025. (AFP)
Des policiers se tiennent devant un centre de service Tesla dans le quartier de Reinickendorf à Berlin, alors que des manifestants ont donné le coup d'envoi des "Semaines de protestation" contre l'entreprise automobile américaine Tesla, le 29 mars 2025. (AFP)
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  • Les ventes du constructeur automobile américain Tesla ont continué de s'effondrer en Allemagne en avril, tandis que celles du segment électrique ont atteint leur plus haut niveau depuis fin 2023

BERLIN: Les ventes du constructeur automobile américain Tesla ont continué de s'effondrer en Allemagne en avril, tandis que celles du segment électrique ont atteint leur plus haut niveau depuis fin 2023, dans un marché automobile stagnant à un faible niveau, selon des chiffres officiels publiés mardi.

D'après un communiqué de l'agence fédérale pour l'automobile (KBA), 885 voitures Tesla ont été immatriculées en avril en Allemagne, soit une chute de 46% sur un an. Sur quatre mois, de janvier à avril, le recul sur un an est même de 60%.

Le désamour envers le pionnier des voitures électriques s'est accéléré avec les polémiques entourant son patron Elon Musk, proche conseiller du président américain Donald Trump, et le vieillissement de la gamme de véhicules de tesla.

Selon le cabinet EY, les chiffres de ventes de Tesla ont aussi chuté de 50% en avril dans 13 autres pays d'Europe de l'Ouest.

Comme les mois précédents, Tesla ne profite pas du rebond du segment électrique en Allemagne, où les immatriculations de véhicules 100% électriques ont bondi en avril de 53,5% à 45.535 unités.

Cette embellie bénéficie notamment aux constructeurs chinois, avec une accélération fulgurante du leader BYD qui a multiplié ses immatriculations par sept sur un an, avec 1.566 nouvelles unités mises en circulation le mois dernier, près du double de celles de Tesla.

C'est le niveau le plus haut enregistré depuis décembre 2023, quand le gouvernement d'Olaf Scholz avait abandonné ses subventions publiques à l'achat de voitures électriques.

Après une année 2024 marquée par une rude concurrence chinoise et une baisse de la demande, la part de marché des voitures électriques est remontée à 18,8% en avril, se rapprochant ainsi de son niveau de 2023.

Selon Constantin Gall, expert chez EY, "la taxation très avantageuse des voitures de service électriques" est une "incitation considérable" pour les entreprises, mais ce rebond de l'électrique n'est qu'un rattrapage.

En parallèle, les véhicules à moteur thermique sont toujours moins plébiscités, essence (-26% en avril) comme diesel (-19%).

Sur le marché automobile global, 242.728 véhicules neufs ont été immatriculés en Allemagne en avril, soit 0,2% de moins qu'un an plus tôt, après une chute de 3,9% en mars.

C'est 22% de moins que le niveau d'avant crise, en avril 2019, d'après le cabinet EY.

"Les prix élevés [...], une faible évolution de la conjoncture et l'énorme volatilité politique et économique" sont un "poison pour le marché des voitures neuves", a expliqué Constantin Gall.

En plus d'un virage vers l'électrique complexe, les constructeurs automobiles allemands en crise doivent faire face à des surtaxes américaines de 25% imposées par Donald Trump.

Malgré des exemptions adoptées pour les constructeurs fabriquant des véhicules aux Etats-Unis avec des pièces importées, l'incertitude pèse sur le secteur.


Vivre sans l'énergie russe : l'UE cherche la formule magique

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  • l'Union européenne dévoilera mardi son plan pour tenter de se passer d'énergie russe.
  • Depuis l'invasion russe en Ukraine, l'Union européenne a instauré un embargo sur le pétrole russe et s'est efforcée de tarir ses approvisionnements en gaz par gazoducs.

BRUXELLES : Après plusieurs reports, l'Union européenne dévoilera mardi son plan pour tenter de se passer d'énergie russe, un défi redoutablement difficile étant donné que l'Europe importe actuellement du gaz naturel liquéfié (GNL) depuis la Russie.

En marge d'une session des eurodéputés à Strasbourg, le commissaire européen Dan Jorgensen présentera cette feuille de route très attendue, qui fait suite à plusieurs mois de flottement.

Depuis l'invasion russe en Ukraine, l'Union européenne a instauré un embargo sur le pétrole russe et s'est efforcée de tarir ses approvisionnements en gaz par gazoducs.

Mais l'UE s'est en partie tournée vers le gaz naturel liquéfié (GNL), transporté par navire, déchargé dans des ports, regazéifié puis injecté dans le réseau européen de gaz.

Et derrière les États-Unis (45,3 %), la Russie occupe une grande place avec près de 20 % des importations de GNL de l'UE en 2024 (17,5 % d'après Eurostat et 19 % d'après l'IEEFA, un centre de réflexion spécialisé).

Pour tenter de se passer de l'énergie russe, « le principe directeur est la diversification des approvisionnements », a indiqué il y a quelques jours Paula Pinho, une porte-parole de la Commission.

Il y a plusieurs mois, l'UE avait évoqué la possibilité d'augmenter encore ses importations de GNL américain. Mais les tensions commerciales avec Donald Trump ont brouillé les cartes.

« Nous sommes tous d'accord pour dire que nous devons nous débarrasser du gaz de Poutine », mais le plan européen pour se passer de l'énergie russe « a été retardé en raison de la situation géopolitique », avait déploré l'eurodéputée centriste danoise Sigrid Friis (Renew).

Il a fallu attendre le 1^(er) mai pour que le commissaire européen chargé du commerce, Maros Sefcovic, suggère de nouveau dans une interview au Financial Times de « résoudre très rapidement » le différend avec l'administration Trump grâce à des achats de GNL américain ou de produits agricoles comme le soja. 

Dans les couloirs de la Commission, on reconnaît que les discussions ont été particulièrement houleuses sur le sujet. En effet, certains États membres, comme la Hongrie, ne cachent pas leur proximité avec la Russie.

Certains pays sont d'ailleurs plus dépendants que d'autres au GNL de Moscou.

La France est par exemple en première ligne avec ses cinq terminaux de regazéification, dont celui de Dunkerque. Selon l'IEEFA, elle a augmenté de 81 % ses importations de GNL russe entre 2023 et 2024 et a versé 2,68 milliards d'euros à la Russie.

Rien n'a filtré pour l'instant du plan qui doit être présenté mardi. Y aura-t-il une proposition d'embargo contre le gaz liquéfié russe à plus ou moins long terme ? 

« Cette option pourrait être très difficile à mettre en œuvre, car elle nécessite l'unanimité des 27 », expose Simone Tagliapietra, spécialiste des questions européennes au centre de réflexion Bruegel.

Compte tenu de cette contrainte, une hausse significative des droits de douane sur toutes les importations de gaz russe (gazoducs et GNL) « pourrait être l'option la plus viable pour l'UE », estime-t-il.

Au-delà de la question sensible du gaz liquéfié, la Commission européenne ne cesse de souligner tous les efforts entrepris pour réduire la dépendance aux énergies fossiles russes depuis l'invasion de l'Ukraine.

En quelques années, nous sommes ainsi passés de 45 % à 18 % d'importations de gaz (gazoducs et GNL) en provenance de Russie. Nous sommes ainsi passés d'un baril de pétrole sur cinq à un baril sur cinquante », a insisté Ursula von der Leyen fin avril à Londres.

Mais, a-t-elle ajouté, « nous savons tous qu'il reste encore beaucoup à faire », car « nous ne voulons plus dépendre d'une puissance hostile pour notre approvisionnement en énergie ». 


Une journaliste russe critique de l'invasion de l'Ukraine se réfugie en France

Sur cette photo de famille diffusée par l'agence d'État russe Sputnik, le président russe Vladimir Poutine s'adresse aux journalistes à Moscou, le 21 avril 2025. (AFP)
Sur cette photo de famille diffusée par l'agence d'État russe Sputnik, le président russe Vladimir Poutine s'adresse aux journalistes à Moscou, le 21 avril 2025. (AFP)
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  • Elle s'est évadée en pensant au chanteur Brassens et à l'acteur Pierre Richard: la critique de cinéma russe Ekaterina Barabach, qui risquait jusqu'à dix ans de prison dans son pays pour avoir dénoncé la guerre en Ukraine, a fui pour la France
  • Le service pénitentiaire fédéral russe avait annoncé le 21 avril qu'elle était placée sur la liste des personnes recherchées

PARIS: Elle s'est évadée en pensant au chanteur Brassens et à l'acteur Pierre Richard: la critique de cinéma russe Ekaterina Barabach, qui risquait jusqu'à dix ans de prison dans son pays pour avoir dénoncé la guerre en Ukraine, a fui pour la France grâce à l'aide de Reporters sans frontières (RSF).

"J'ai laissé ma mère de 96 ans en me disant que je ne la verrai plus jamais. Mais il était préférable de ne plus la voir en étant en liberté plutôt que ne plus la voir à cause de la prison", a déclaré la journaliste de 64 ans, lundi lors d'une conférence de presse au siège de RSF à Paris.

"L'aventure" de son évasion a duré deux semaines et demie mais Mme Barabach, qui s'exprimait en anglais, n'a pas dévoilé les détails de son périple, pour des raisons de sécurité.

"Maintenant, je suis ici et ce ne sera pas facile de commencer une nouvelle vie", a poursuivi la journaliste, en remerciant tous ceux qui l'ont aidée dans sa fuite, dont RSF et des Russes en exil. Elle demande désormais l'asile politique en France.

Le service pénitentiaire fédéral russe avait annoncé le 21 avril qu'elle était placée sur la liste des personnes recherchées.

Mme Barabach avait disparu de son domicile le 13 avril, alors qu'elle était assignée à résidence dans le cadre d'une enquête pour diffusion de "fausses informations" sur l'armée russe. Cette mesure avait été ordonnée par un tribunal de Moscou après son arrestation fin février.

"Pire que la mort" 

Selon elle, les autorités russes lui reprochent quatre anciennes publications sur les réseaux sociaux, dans lesquelles elle critiquait avec virulence l'offensive menée en Ukraine depuis février 2022.

"Alors, bande de salauds, vous avez bombardé (l'Ukraine), rasé des villes entières, tué une centaine d'enfants, abattu des gens pacifiques, maintenu Marioupol sous blocus, privé des millions de personnes d'une vie normale, forcées de partir à l'étranger?", avait-elle écrit dans une publication citée par le média indépendant Meduza.

"Cette guerre est particulièrement horrible pour moi car mon fils et sa famille vivent en Ukraine, à Kiev, et j'imagine les missiles s'abattre sur leur maison", a expliqué la journaliste née à Kharkiv sous l'URSS (en Ukraine actuelle).

Selon elle, sa "chance" est d'avoir été assignée à résidence après son arrestation, plutôt qu'emprisonnée: "C'est pourquoi j'ai décidé de m'échapper". "La prison en Russie, c'est pire que la mort", a-t-elle ajouté, en assurant avoir pensé au suicide.

Selon RSF, Mme Barabach a arraché son bracelet électronique pour s'échapper et a parcouru plus de 2.800 kilomètres.

Son voyage a été "long et éreintant", a précisé le directeur général de l'ONG, Thibaut Bruttin.

"Plusieurs fois, on a pu croire qu'elle avait été arrêtée ou risquait de l'être; plusieurs fois, le plan a changé. Une fois, on l'a cru morte", a-t-il renchéri, en louant "sa détermination morale" et son "courage physique".

"Censure" 

"Elle a fait le choix de la France avec gaieté et joie: tout au long de son évasion, elle a chanté Georges Brassens et elle rêvait de Pierre Richard lors de sa première nuit de liberté", a souri le responsable, en espérant que Mme Barabach puisse assister au festival de Cannes, qui commence le 13 mai.

Journaliste pour le service en langue russe de Radio France Internationale (RFI) jusqu'en 2022, Ekaterina Barabach collaborait depuis avec le média indépendant Republic.

En octobre 2022, RSF avait déjà participé à l'évasion d'une autre journaliste russe, Marina Ovsiannikova, qui encourait dix ans de prison après avoir brandi une pancarte anti-guerre à la télévision d'Etat.

"Depuis l'évasion de Marina Ovsiannikova, les possibilités de s'échapper se sont réduites. C'est pour ça que nous sommes soulagés aujourd'hui, car cela prouve que c'est possible", même si "c'est très dangereux", a commenté M. Bruttin.

Dans le dernier classement annuel de RSF sur la liberté de la presse, publié vendredi, la Russie est 171e sur 180.

"Il n'y a plus de journalisme en Russie" à cause de "la censure", a déploré Mme Barabach, qui espère pouvoir continuer son métier en France.