Macron au salon de l'agriculture en pleine crise russo-ukrainienne

Le président français Emmanuel Macron rencontre des représentants du monde agricole au Salon international de l'Agriculture, à Paris, le 26 février 2022. (Photo, AFP)
Le président français Emmanuel Macron rencontre des représentants du monde agricole au Salon international de l'Agriculture, à Paris, le 26 février 2022. (Photo, AFP)
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Publié le Samedi 26 février 2022

Macron au salon de l'agriculture en pleine crise russo-ukrainienne

  • Alors que l'armée russe était déjà tout proche d'entrer dans Kiev, l'Elysée avait souligné qu'il était important qu'Emmanuel Macron vienne malgré tout inaugurer l'événement
  • Cette inquiétude fondamentale, qui interroge le modèle agricole français, est rejointe par la menace plus immédiate du conflit en Ukraine

PARIS : Il place ce rendez-vous sous le signe de la "souveraineté alimentaire": mobilisé par l'invasion russe en Ukraine, le président Emmanuel Macron a inauguré samedi le Salon de l'agriculture avec une visite écourtée.

"Cette guerre durera" et "il faut nous y préparer", a prévenu avec gravité le président, les traits tirés, à la fin d'une prise de parole d'une petite demi-heure, juste avant l'ouverture du salon au public, porte de Versailles à Paris.

"Ce que nous sommes en train de vivre ne sera pas sans conséquences sur le monde agricole et les filières qui sont les vôtres", a averti le chef de l'Etat, alors que les professionnels craignent des mesures de rétorsion sur les exportations après les sanctions prises à l'égard de la Russie.

"Ce ne sera pas sans conséquences sur l'augmentation les coûts de l'énergie, ce ne sera pas sans conséquences sur l'alimentation du bétail, son coût, peut-être même la capacité à fournir", a averti le président.

«Résilience» face aux conséquences de la guerre

"Nous sommes en train de bâtir (...) un plan de résilience, d'abord pour sécuriser pour nos filières, nos intrants, ensuite pour essayer au maximum de bâtir des boucliers en termes de coûts aux niveaux national et européen", a-t-il indiqué.

Tout à la joie de cette 58e édition après une année blanche pour cause de pandémie, le monde agricole a donc eu droit à un message empreint de gravité. Arrivé sur place vers 07H30, M. Macron est reparti peu avant 09H00, alors qu'il avait passé pas moins de douze heures dans les travées du salon lors de sa dernière édition en 2020.

Juste avant son intervention, Emmanuel Macron avait reçu un accueil bienveillant des personnes présentes. "Merci pour ce que vous faites", "bon courage", pouvait-on entendre.

Flambée des coûts

Emmanuel Macron a coupé le traditionnel ruban d'inauguration sous le regard de Neige, la vache égérie de l'événement, avant que le Premier ministre Jean Castex ne prenne le relais pour faire le tour du salon, et défendre le bilan du quinquennat à six semaines du scrutin.

M. Castex s'est félicité de venir "célébrer ce grand moment" de réunion du monde agricole. Il a goûté du reblochon produit avec du lait de Neige et commencé à arpenter les allées de la foire où les exposants venus des quatre coins du pays s'activaient dans des odeurs de confit de canard et de charcuterie.

A ses côtés, le ministre de l'Agriculture Julien Denormandie a estimé auprès de journalistes que la crise russo-ukrainienne, si grave soit-elle, n'entraînait pas un risque "de pénurie" alimentaire pour la France, mais plutôt une inquiétude sur les prix de l'énergie (y compris le gaz qui sert à fabriquer les engrais), des céréales et huiles végétales qui nourrissent le bétail.

Le président français Emmanuel Macron prononce un discours devant des représentants du monde agricole lors de sa visite au Salon international de l'agriculture au parc des expositions de la porte de Versailles, à Paris, le 26 février 2022. (Photo, AFP)
Le président français Emmanuel Macron prononce un discours devant des représentants du monde agricole lors de sa visite au Salon international de l'agriculture au parc des expositions de la porte de Versailles, à Paris, le 26 février 2022. (Photo, AFP)

Les coûts de production des agriculteurs, surtout les éleveurs, avaient déjà flambé en 2021. Ce qui rendait déjà difficiles les négociations commerciales en cours entre les supermarchés et leurs fournisseurs de l'agroalimentaire, qui déterminent le prix des produits mis en rayon pendant l'année et, in fine, le revenu des agriculteurs.

Emmanuel Macron a appelé les acteurs de l'alimentation "à la responsabilité" pour que ces négociations, qui s'achèvent mardi, aboutissent à une "juste rémunération" du travail des agriculteurs. "La pression continuera à être mise sur les transformateurs et les distributeurs, et jusqu'à la dernière minute nous ne lâcherons rien", a-t-il martelé.

Plusieurs prétendants à l'Elysée doivent se plier à la tradition de la visite du salon ouvert jusqu'au dimanche 6 mars, dont le communiste Fabien Roussel, la LR Valérie Pécresse, la socialiste Anne Hidalgo, la candidate RN Marine Le Pen et son rival d'extrême droite Eric Zemmour.

"C'est un salon particulier parce qu'il y a les élections présidentielles" et "parce qu'on est en crise de vocation": "On perd en gros 100 000 agriculteurs tous les dix ans et il est bien qu'il y ait un débat sur la vision du métier", a souligné le président du salon Jean-Luc Poulain.

En début de matinée, les visiteurs se pressaient déjà devant les guichets, pass vaccinal à la main et masque sur le nez. Ils étaient 630 000 en 2019, dernière édition avant la crise sanitaire.

Le président français Emmanuel Macron et le ministre français de l'Agriculture Julien Denormandie arrivent pour visiter le Salon international de l'agriculture au parc des expositions de la porte de Versailles, à Paris, le 26 février 2022. (Photo, AFP)
Le président français Emmanuel Macron et le ministre français de l'Agriculture Julien Denormandie arrivent pour visiter le Salon international de l'agriculture au parc des expositions de la porte de Versailles, à Paris, le 26 février 2022. (Photo, AFP)

Négociations commerciales: Macron appelle les acteurs de l'alimentation «à la responsablité»

Le président Emmanuel Macron a appelé samedi matin les acteurs de l'alimentation "à la responsabilité" pour que les négociations commerciales annuelles entre les industriels et les distributeurs aboutissent à une "juste rémunération" du travail des agriculteurs.

"Les négociations doivent aller à leur terme dans les meilleures conditions et j'appelle tout le monde à la responsabilité", a déclaré le chef de l'Etat lors d'une visite inaugurale express au premier jour du Salon de l'agriculture.

"La pression continuera à être mise sur les transformateurs et les distributeurs, et jusqu'à la dernière minute nous ne lâcherons rien", a aussi affirmé Emmanuel Macron devant les responsables agricoles.

Le salon coïncide avec la clôture, le 1er mars, des négociations commerciales entre les supermarchés et leurs fournisseurs qui déterminent le prix des produits mis en rayon pendant l'année et, in fine, le revenu des agriculteurs.

Ces derniers, comme les industriels, se battent pour répercuter sur les consommateurs l'inflation qu'ils subissent, notamment sur l'alimentation des animaux.

"Ce combat de la juste rémunération, nous n'avons pas fini de le mener", a insisté M. Macron.

Depuis le début du quinquennat, via les lois Egalim puis Egalim 2, récemment promulguée, le gouvernement s'efforce de rééquilibrer le rapport de forces entre les acteurs de la chaîne alimentaire pour que les agriculteurs n'en soient pas réduits à vendre à perte.

En 2019, 16% d'entre eux n'ont eu aucun revenu voire ont été déficitaires, selon les chiffres les plus récents de l'Insee.

"Sans Egalim 2", qui prévoit une forme de sanctuarisation de la part revenant aux agriculteurs, la situation aurait été "terrible" pour eux cette année, a estimé le président de la République.

En concurrence, les enseignes de supermarchés cherchent à obtenir les prix les plus bas possibles et mettent en avant la défense du pouvoir d'achat des consommateurs, un sujet sensible à l'approche de l'élection présidentielle sur fond de renchérissement du coût de la vie.

"La réponse à la précarité alimentaire, ça n'est pas la baisse des coûts, ce n'est pas vrai", a affirmé Emmanuel Macron.

"Il ne peut pas y avoir de juste rémunération si le marché est le +far west+ et si, en quelque sorte, on impose des règles à nos agriculteurs mais qu'on laisse importer de la viande ou d'autres produits agricoles qui ne respectent pas les mêmes" normes, a par ailleurs souligné le chef de l'Etat.

Dans le cadre de la présidence française du Conseil de l'Union européenne, le gouvernement milite pour que les produits agricoles importés soient soumis à des normes sanitaires et environnementales aussi exigeantes que celles qui s'imposent aux producteurs européens.

Emmanuel Macron a axé son intervention sur l'importance de la "souveraineté alimentaire et agricole" - "ce rôle essentiel de nourrir la nation" - et évoqué les grands défis de l'agriculture: le "renouvellement des générations", "la transition agricole climatique".

"Le monde agricole mène sa révolution" pour "réussir à réduire progressivement les intrants", a-t-il souligné, en référence aux pesticides et engrais de synthèse mais aussi au soja sud-américain, mis en cause pour son concours à la déforestation.  


Agriculteurs: la Coordination rurale bloque toujours le port de Bordeaux

 La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
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  • La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place
  • Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine

BORDEAUX: La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais.

La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place.

Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine et auquel les agriculteurs comme la classe politique française s'opposent.

Il s'agit de la première visite de la ministre sur le terrain depuis le retour des paysans dans la rue, une mobilisation surtout marquée en fin de semaine par les actions des bonnets jaunes de la Coordination rurale.

A Bordeaux, ils bloquent ainsi les accès au port et au dépôt pétrolier DPA: des pneus, des câbles et un tracteur entravent l'entrée du site.

Sous une pluie battante, les agriculteurs s'abritent autour d'un feu et de deux barnums tanguant avec le vent. Une file de camions bloqués dont des camions citernes s'allonge aux abords.

Les manifestants ont tenté dans la matinée de joindre Annie Genevard, sans succès.

"On bloque tant que Mme Genevard et M. Barnier [Michel Barnier, Premier ministre] ne mettent pas en place des solutions pour la profession. Des choses structurelles, (...), on ne veut pas un peu d'argent aujourd'hui pour rentrer dans nos fermes, on veut des réformes pour vivre, avoir un salaire décent", a déclaré à l'AFP Aurélie Armand, directrice de la CR du Lot-et-Garonne.

"Le temps est avec nous parce que quand il pleut on ne peut pas travailler dans les fermes, donc c'est très bien", a-t-elle lancé, alors qu'une pluie battante balaye la Gironde avec le passage de la tempête Caetano.

Plus au sud, dans les Landes, des agriculteurs de la CR40 occupent toujours une centrale d'achat Leclerc à Mont-de-Marsan mais les autorités leur ont donné jusqu'à vendredi inclus pour libérer les lieux, a-t-on appris auprès de la préfecture.

Tassement du mouvement, avant une reprise 

La préfète du département a par ailleurs condamné "les dégradations commises par des membres de la Coordination rurale" mercredi soir sur des sites de la Mutualité sociale agricole (MSA), visée par des dépôts sauvages, et de la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), ciblée par un incendie "volontairement déclenché" dans son enceinte.

Sur Europe1/Cnews, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a redit que les agriculteurs avaient "parfaitement le droit de manifester", mais qu'il y avait "des lignes rouges" à ne pas dépasser: "pas d'enkystement", "pas de blocage".

A l'autre bout de la France, à Strasbourg, des membres de la CR se sont installés dans le centre avec une dizaine de tracteurs pour y distribuer 600 kilos de pommes aux passants.

"Nous, on propose un pacte avec le consommateur, c'est-à-dire lui fournir une alimentation de qualité en quantité suffisante et en contrepartie, le consommateur nous paye un prix correct", a souligné le président de la CR départementale, Paul Fritsch.

Les autorités constatent une "légère baisse" de la mobilisation à l'échelle du pays par rapport au début de la semaine, quand les syndicats majoritaires FNSEA et JA étaient aussi sur le terrain.

Ce nouvel épisode de manifestations agricoles intervient à quelques semaines d'élections professionnelles. La CR, qui préside aujourd'hui trois chambres d'agriculture, espère à cette occasion briser l'hégémonie de l'alliance FNSEA-JA et ravir "15 à 20 chambres" supplémentaires.

Le président de la FNSEA Arnaud Rousseau a annoncé mercredi que les prochaines manifestations emmenées par ses membres auraient lieu la semaine prochaine, "mardi, mercredi et jeudi", "pour dénoncer les entraves à l'agriculture".

FNSEA et JA avaient prévenu qu'ils se mobiliseraient jusqu'à la mi-décembre contre l'accord le Mercosur, contre les normes selon eux excessives et pour un meilleur revenu.

Troisième syndicat représentatif, la Confédération paysanne organise aussi des actions ponctuelles, contre les traités de libre-échange ou les installations énergétiques sur les terres agricoles.


Les députés approuvent en commission l'abrogation de la réforme des retraites

L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
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  • La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.
  • La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation.

PARIS : La gauche a remporté mercredi une première victoire dans son offensive pour abroger la très décriée réforme des retraites : sa proposition de ramener l'âge de départ de 64 à 62 ans a été adoptée en commission des Affaires sociales, avant son arrivée dans l'hémicycle le 28 novembre.

Le texte, présenté par le groupe LFI dans le cadre de sa niche parlementaire, a été approuvé par 35 voix (celles de la gauche et du Rassemblement national), contre 16 (venues des rangs du centre et de la droite).

La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.

Le Rassemblement national, qui avait présenté une proposition similaire fin octobre, mais que la gauche n'avait pas soutenue, a voté pour le texte de La France insoumise. « C'est le même que le nôtre et nous, nous ne sommes pas sectaires », a argumenté le député Thomas Ménagé.

La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation : celle-ci est ramenée de 43 à 42 annuités, ce qui revient à abroger également la réforme portée en 2013 par la ministre socialiste Marisol Touraine pendant le quinquennat de François Hollande.

Un amendement, présenté par les centristes du groupe Liot pour préserver la réforme Touraine, a été rejeté. Les socialistes, qui auraient préféré conserver cette réforme de 2013, ont décidé d'approuver le texte global malgré tout.

La gauche affirme qu'elle est en mesure de porter sa proposition d'abrogation jusqu'au bout : après l'examen du texte dans l'hémicycle la semaine prochaine, elle a déjà prévu de l'inscrire à l'ordre du jour du Sénat le 23 janvier, à l'occasion d'une niche communiste, puis en deuxième lecture à l'Assemblée nationale le 6 février, cette fois dans un créneau dédié aux écologistes.

Les représentants de la coalition gouvernementale ont mis en garde contre un texte « pas sérieux » ou « irresponsable ».

« Il faut être honnête vis-à-vis des Français : si cette réforme des retraites est abrogée, certes ils pourront partir à 60 ans, mais avec une retraite beaucoup plus basse », a ainsi argumenté la députée macroniste Stéphanie Rist.


Censure du gouvernement : Le Pen fait monter la pression avant sa rencontre avec Barnier

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
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  • "Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure"
  • Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget

PARIS: Marine Le Pen fait monter la pression sur Michel Barnier, avant leur rencontre lundi à Matignon : elle assure que son parti n'hésitera pas à censurer le gouvernement à la veille de Noël si "le pouvoir d'achat des Français est amputé" dans le projet de budget 2025.

"Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure", a affirmé mercredi la cheffe de file des députés du Rassemblement national sur RTL.

Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget de l'Etat.

Si le RN et la gauche votaient conjointement cette motion alors la coalition Barnier, fragile attelage entre LR et la macronie, serait renversée et le projet de budget rejeté.

Si elle n'a pas détaillé la liste précise de ses revendications, Marine Le Pen a en particulier jugé "inadmissible" la hausse envisagée par le gouvernement pour dégager trois milliards d'euros des taxes sur l'électricité, une mesure toutefois supprimée par l'Assemblée nationale en première lecture.

"Taper sur les retraités, c'est inadmissible", a-t-elle aussi affirmé, insatisfaite du compromis annoncé par le LR Laurent Wauquiez. Celui-ci prévoit d'augmenter les retraites de la moitié de l'inflation au 1er janvier, puis d'une deuxième moitié au 1er juillet pour les seules pensions sous le Smic.

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. Si elles étaient suivies, celles-ci pourraient empêcher Mme Le Pen de participer à une quatrième élection présidentielle.

Face à cette menace de censure, Michel Barnier va recevoir en début de semaine prochaine, un par un, l'ensemble des présidents de groupes parlementaires, à commencer par Marine Le Pen dès lundi matin.

Ce premier tête à tête, depuis son entrée à Matignon, suffira-t-il ?

"Et-ce que M. Barnier va respecter l’engagement qu’il a pris, que les groupes d’opposition puissent reconnaître dans son budget des éléments qui leur paraissent essentiels ?", s'est interrogée la cheffe de file des députés RN.

Les demandes de notre parti étaient "de ne pas alourdir la fiscalité sur les particuliers, de ne pas alourdir sur les entrepreneurs, de ne pas faire payer les retraités, de faire des économies structurelles sur les dépenses de fonctionnement de l'Etat", a-t-elle récapitulé. "Or nous n'avons pas été entendus, nous n'avons même pas été écoutés".

Poker menteur 

Alors qu'il a déjà lâché du lest sur les économies demandées aux collectivités locales, aux retraités et aux entreprises face aux critiques de sa propre majorité, le Premier ministre, confronté à la colère sociale des agriculteurs, des fonctionnaires ou des cheminots, a très peu de marge de manoeuvres.

"L'objectif est d'arriver à un équilibre entre les ambitions des groupes parlementaires et les impératifs de rigueur" budgétaire, répète Matignon, alors que le déficit public est attendu à 6,1% du PIB fin 2024 contre 4,4% prévu initialement.

L'exécutif agite, à destination du RN mais aussi des socialistes, la menace du chaos.

"Celui ou celle qui renversera le gouvernement privera le pays d'un budget et le précipitera dans le désordre et la chienlit", a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, sur CNews.

"Le pire pour le pouvoir d'achat des Français, ce serait une crise financière", a alerté de son côté sur LCI sa collègue Astrid Panosyan-Bouvet (Travail).

Une question demeure: le RN bluffe-t-il ?

"Si le gouvernement tombe, il faudra attendre juin pour qu'il y ait des élections législatives parce qu'il ne peut pas y avoir de dissolution pour le moment!", a semblé nuancer le porte-parole du RN Julien Audoul.

Dans tous les cas, ce jeu de poker menteur risque de durer jusque la veille de Noël, lorsque l'Assemblée nationale aura à se prononcer définitivement sur le projet de budget 2025 de l'Etat.

Le RN n'entend, en effet, pas déposer ou voter de motion de censure sur les deux autres textes (fin de gestion de 2024 et projet de budget de la Sécurité sociale) qui pourraient être adoptés par 49.3 avant.