MADRID: Poussé vers la sortie par son propre parti, le président du Parti populaire (droite) espagnol, Pablo Casado, a décidé mercredi soir de ne pas se présenter à un prochain congrès extraordinaire de sa formation qui choisira son successeur début avril.
A la tête du Parti populaire (PP) depuis 2018, M. Casado, 41 ans, paie le prix de la crise provoquée par sa rivalité avec la présidente du gouvernement de la région de Madrid, Isabel Díaz Ayuso, 43 ans, étoile montante du principal parti d'opposition en Espagne.
"Le président du Parti populaire a transmis aux présidents de régions de la formation sa décision de ne pas se présenter au prochain Congrès national, dont la date sera fixée lors de la prochaine assemblée exécutive du 1er mars", a annoncé le parti conservateur dans un communiqué dans la nuit de mercredi à jeudi, à la suite d'une réunion d'urgence de plusieurs heures au siège du parti à Madrid.
"Il a été demandé que le président national (M. Casado) conserve son poste jusqu'au congrès extraordinaire, et que soit proposé à l'assemblée exécutive qu'il se tienne le 2 et 3 avril", ajoute le communiqué.
Quelques heures plus tôt, Pablo Casado avait livré mercredi au Parlement un discours aux allures d'adieu.
"Je conçois la politique comme la défense des principes et des valeurs les plus nobles, comme le respect des adversaires et comme le dévouement envers ses collègues", a déclaré M. Casado sur un ton amer lors d'une brève intervention devant les députés.
«Je vous souhaite le meilleur»
"Malgré nos différences et nos divergences politiques (...), je vous souhaite personnellement le meilleur", a ainsi répondu le chef du gouvernement, M. Casado quittant immédiatement l'hémicycle sous les applaudissements des députés de son parti, ceux-là même qui veulent son départ.
La scène a confirmé que M. Casado, 41 ans, vivait sans doute ses derniers jours à la tête du PP, malgré ses efforts pour s'accrocher à son poste.
M. Casado a ensuite rencontré mercredi soir les dirigeants régionaux du PP. Ces "barons" sont unanimes à réclamer un changement de direction, afin de mettre fin au climat de quasi "guerre civile" dans lequel est plongé le parti.
La crise a éclaté jeudi dernier, lorsque Mme Díaz Ayuso a accusé M. Casado de manoeuvrer pour la "détruire", après des informations de presse selon lesquelles certains de ses proches l'auraient espionnée.
Mme Diaz Ayuso était soupçonnée par l'entourage de M. Casado de trafic d'influence dans le cadre d'un contrat d'achat de masques de près de 300 000 euros signé en avril 2020 par la région de Madrid, pour lequel son frère Tomas, représentant d'une entreprise vendant du matériel sanitaire, aurait touché une commission de 55 000 euros.
«Dévoré»
Mme Díaz Ayuso a admis l'existence de ce contrat, mais a assuré qu'il était légal et qu'elle n'était pas intervenue dans son attribution. Saisie par plusieurs partis de gauche, le parquet anticorruption a annoncé mardi avoir ouvert une enquête.
Etalée sur la place publique, l'affaire s'est vite retournée contre M. Casado, Mme Díaz Ayuso, triomphalement réélue à la tête de la région de Madrid en mai dernier, étant la personnalité la plus populaire du parti.
Au lieu de soutenir le leader du parti, les "barons" du PP ont immédiatement pris leurs distances avec lui. L'homme de confiance de M. Casado, Teodoro García Egea, secrétaire général du PP, qui contrôlait l'appareil, a ainsi été contraint de démissionner mardi, comme plusieurs proches.
M. Casado a été "dévoré par sa guerre interne brutale contre Isabel Díaz Ayuso. Personne ne doute plus au sein du PP que sa fin est très proche", résumait mercredi le quotidien El País (centre-gauche).
La réunion de mercredi soir sera suivie, mardi prochain, de la réunion du Comité directeur du parti, dont la tâche sera de fixer la date d'un congrès extraordinaire qui élira le nouveau président du parti.
L'homme qui tient la corde pour succéder à M. Casado est l'un des "barons", Alberto Nuñez Feijóo, 60 ans, président du gouvernement régional de Galice (nord-ouest), considéré comme un modéré.