MARINKA, Ukraine : «C'est trop calme. Troublant, comme avant une tempête», dit un soldat ukrainien répondant au nom de guerre de Botsman déployé tout près de Donetsk, le bastion des séparatistes prorusses parrainés par Moscou.
Sur le front de l'Est ukrainien, les tirs ennemis sont moins nourris qu'à l'automne, un paradoxe à l'heure où les Occidentaux, en particulier les États-Unis, tirent la sonnette d'alarme face au risque d'une vaste offensive russe.
Dans la ville de Marinka, cachées au milieu de maisonnettes et de jardins ravagés par des bombardements, les positions de l'unité de Botsman, 49 ans, sont certes visées par des tirs de mortiers et de lance-grenades, mais l'intensité de ces attaques n'est pas comparable aux mois précédents.
«Avant ils nous empêchaient de dormir, nous gâchaient nos repas et maintenant c'est calme», poursuit Botsman, gilet pare-balle kaki et treillis blanc, observant à l'aide d'un périscope les positions séparatistes enneigées distantes de moins d'un kilomètre.
- Des familles inquiètes -
L'Est de l'Ukraine est déchiré depuis 2014 par une guerre avec les séparatistes qui a fait plus de 13.000 morts.
La Russie, qui venait alors d'annexer la Crimée ukrainienne, est largement considérée, malgré ses dénégations, comme l'instigatrice de ce conflit et, si elle devait lancer une nouvelle offensive sur l'Ukraine, il y a fort à parier que les séparatistes y joueront leur rôle.
Avec désormais plus de cent mille soldats russes campant aux frontières ukrainiennes, les nerfs des soldats et de leurs proches sont donc mis à l'épreuve.
«C'est dur pour le moral», dit Botsman, «les appels de la famille sont très inquiétants. Je dois les rassurer», explique-t-il.
Pour faire face à la tension, un autre militaire, répondant au nom de guerre de Sytch, s'entraîne avec des haltères et un équipement rudimentaire dans une salle de sport improvisée dans une grange endommagée par des bombardements.
«Nous devons mettre fin à cette guerre - avec l'aide d'alliés ou seuls, par tous les moyens disponibles», dit cet homme de 39 ans, depuis sa tranchée.
En cas d'invasion russe, l'armée fera face, estime-il, relevant que les forces ukrainiennes sont beaucoup plus aguerrie qu'en 2014.
- Aide militaire -
«Peut-être que Poutine, comme un vieux maboul, pense qu'ils peuvent atteindre Kiev en deux jours. Qu'il essaie!», lance Sytch.
«Nous avons pu les arrêter en 2014 alors que nous ne portions que des tongs et que chacun devait se trouver sa propre arme. Maintenant, nous sommes une armée très forte», poursuit le soldat.
L'Ukraine a déclaré lundi avoir reçu ces derniers mois des Occidentaux plus de 1.000 tonnes d'armement et équipement militaire pour environ 1,5 milliard de dollars.
Pour Botsman, il en faut plus encore, notamment des armes antichars et de missiles guidés, alors que la Russie présente ces livraisons d'armements par les Occidentaux comme une menace à ses frontières.
«L'aide doit arriver sous toutes ses formes - morale et matérielle, militaire et politique», poursuit le militaire.
Le scénario qu'il veut éviter est celui de 2008 et l'écrasante victoire de Moscou contre la Géorgie, une autre ex-république soviétique aux ambitions pro-occidentales.
«Si, comme avec la Géorgie, l'Occident ne fait part que de sa +préoccupation+, alors ça se finira par des larmes».