Ukraine: Washington craint un piège de Moscou, Macron et Erdogan cherchent une médiation

Des troupes américaines se déploient pour l'Europe depuis l'aérodrome de Pope Army à Fort Bragg, en Caroline du Nord, le 3 février 2022. (AFP)
Des troupes américaines se déploient pour l'Europe depuis l'aérodrome de Pope Army à Fort Bragg, en Caroline du Nord, le 3 février 2022. (AFP)
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Publié le Vendredi 04 février 2022

Ukraine: Washington craint un piège de Moscou, Macron et Erdogan cherchent une médiation

  • Le président français Emmanuel Macron s'est entretenu jeudi, tour à tour, avec son homologue russe Vladimir Poutine, puis avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky
  • Les Etats-Unis avaient déjà évoqué la possibilité que la Russie mène une opération dite «sous fausse bannière», où un pays utilise les marques de reconnaissance de l'ennemi pour semer la confusion

KIEV: Les dirigeants turc et français se sont présentés jeudi, chacun de leur côté, en médiateurs de la crise ukrainienne, alors que Washington assurait avoir des preuves que Moscou préparait une vidéo de fausse attaque ukrainienne, prétexte à envahir l'Ukraine.


"Nous pensons que la Russie pourrait produire une vidéo de propagande très violente, qui montrerait des cadavres et des acteurs jouant le rôle de personnes en deuil, ainsi que des images de lieux détruits avec des équipements militaires ukrainiens ou occidentaux", a déclaré le porte-parole du Pentagone, John Kirby.


"Nous avons des informations selon lesquelles les Russes veulent probablement fabriquer un prétexte pour une invasion, ce qui correspond tout à fait à leurs façons de faire", a-t-il ajouté.

Pour Washington, Moscou veut créer un prétexte pour attaquer l'Ukraine

Les Etats-Unis avaient déjà évoqué la possibilité que la Russie mène une opération dite "sous fausse bannière", où un pays utilise les marques de reconnaissance de l'ennemi pour semer la confusion. Mais c'est la première fois qu'ils parlent de vidéos avec autant de précision.


"L'une des options est que le gouvernement russe, nous le pensons, prépare une fausse attaque de soldats ou d'agents de renseignement ukrainiens contre le territoire russe ou des russophones (d'Ukraine)", a déclaré M. Kirby.


Cette fausse attaque donnerait à la Russie, qui a massé plus de 100 000 soldats aux frontières de l'Ukraine, un prétexte pour envahir le pays.


Ni lui ni le porte-parole du département d'Etat, Ned Price, n'ont présenté de preuve de leurs assertions. 


"On a vu ce genre d'activités des Russes dans le passé et nous pensons qu'il est important, quand nous avons ce genre d'informations, de les rendre publiques", a noté M. Kirby.


Il a souligné que ce genre de tactiques est en général "approuvé au plus haut niveau du gouvernement russe".


Selon Ned Price, cette vidéo "est l'une des options que le gouvernement russe est en train de préparer comme prétexte pour lancer et potentiellement justifier une agression militaire contre l'Ukraine".


Les Etats-Unis ne savent pas si Moscou a décidé de mettre ce plan en œuvre, a précisé le porte-parole de la diplomatie américaine.


"La Russie a signalé qu'elle souhaitait poursuivre les échanges diplomatiques pour parvenir à une désescalade, mais des actes comme celui-ci suggèrent le contraire", a-t-il noté.


Questionné avec insistance sur l'absence de preuves à l'appui de ses dires, M. Price a expliqué que ses informations provenaient des services de renseignements, sans plus de détail.


"Je ne vais pas détailler ce qui est en notre possession", a-t-il dit. "Je m'en remets à votre jugement".


Interrogé plus tard sur la possibilité que l'envoi de troupes américaines en Europe de l'Est jette de l'huile sur le feu, John Kirby a assuré que Washington voulait rassurer ses alliés.


"Nous continuons à fournir une assistance en matière de sécurité à l'Ukraine, afin qu'elle puisse mieux se défendre contre cette menace", tout en "rassurant nos alliés envers lesquels nous avons des engagements de sécurité importants" liés à l'OTAN, a-t-il déclaré sur la chaîne de télévision Fox News.


La ministre britannique des Affaires étrangères Liz Truss a pour sa part qualifié les annonces américaines de "preuves claires et choquantes de l'agressivité injustifiée de la Russie et des activités en sous-main (de Moscou) pour déstabiliser l'Ukraine".


"La seule issue pour Moscou est la désescalade, le retrait et l'engagement à trouver une voie diplomatique", a-t-elle tweeté.

Même si Kiev se montre plus mesurée concernant une telle invasion - le ministre de la Défense, Oleksiï Reznikov, a jugé "faible" jeudi le risque d'une "escalade significative" -, les initiatives diplomatiques se multiplient pour tenter d'éviter un conflit armé entre les deux pays.


Le président français Emmanuel Macron s'est entretenu jeudi, tour à tour, avec son homologue russe Vladimir Poutine, puis avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky.


MM. Poutine et Macron ont notamment discuté des "garanties de sécurité" exigées par Moscou, lors de leur troisième conversation téléphonique de la semaine sur ce sujet, a indiqué le Kremlin en évoquant "un dialogue constructif".


M. Zelensky a lui indiqué avoir discuté avec M. Macron d'une "accélération du processus de paix dans le cadre du format Normandie", réunissant Russie et Ukraine avec médiation de Paris et Berlin.


Alors que l'UE a semblé bien peu compter lors des premières discussions russo-américaines sur l'Ukraine, le président français tente de remettre dans le jeu l'Europe, dont il prône depuis des années et non sans mal "l'autonomie stratégique".


Autre acteur régional voulant se faire une place, le président turc Recep Tayyip Erdogan a renouvelé jeudi à Kiev son offre d'accueillir un sommet réunissant Ukraine et Russie. 


"La Turquie est prête à prendre sa part pour résoudre la crise entre deux pays amis, qui sont ses voisins en Mer Noire", a déclaré M. Erdogan, après avoir été reçu par M. Zelensky.


"Peu importe où nous pouvons mettre un terme à la guerre, ce qui compte c'est que tout le monde y soit sincèrement prêt", a réagi le président ukrainien.


Le dirigeant turc fait valoir son appartenance à l'Otan et ses bonnes relations avec Kiev, avec qui il a signé un accord de libre-échange jeudi, pour se poser en entremetteur. Il avait réitéré auparavant son invitation à Vladimir Poutine, suggérant que ce dernier pourrait faire étape en Turquie en rentrant de la cérémonie d'ouverture des JO vendredi à Pékin.


MM. Erdogan et Poutine ont développé une relation étroite ces dernières années, mais l'Ukraine est un dossier sensible entre eux: Ankara soutient l'adhésion de Kiev à l'Otan et s'est vivement opposé à l'annexion de la Crimée par la Russie en 2014, au nom de la protection de sa minorité tatare turcophone.


Le maître du Kremlin reproche pour sa part à son homologue turc d'avoir fourni à Kiev des drones armés, utilisés contre les séparatistes pro-russes de l'Est de l'Ukraine. Les dirigeants turc et ukrainien ont signé jeudi un accord pour augmenter la production de ces appareils en Ukraine.


Les Occidentaux accusent Moscou depuis fin 2021 d'avoir massé des dizaines de milliers de soldats aux frontières de l'Ukraine en vue d'une potentielle invasion, ce qui a entraîné l'une des pires crises russo-occidentales depuis la guerre froide.


La Russie dément toute velléité agressive, mais conditionne une désescalade à la fin de la politique d'élargissement de l'Otan, notamment à l'Ukraine, et un retrait d'Europe de l'Est de ses capacités militaires.


Washington a rejeté ces exigences, proposant en échange que les rivaux s'engagent à ne pas déployer de moyens militaires offensifs en Ukraine, que Moscou inspecte certaines infrastructures militaires qui l'inquiètent en Europe, et que les deux pays s'accordent sur des mesures de contrôle des armements.


Faute d'un retrait militaire russe, Washington a annoncé renforcer le flanc oriental de l'Otan en redéployant un millier des soldats d'Allemagne vers la Roumanie, et en envoyant 2 000 soldats américains supplémentaires en Pologne et en Allemagne.


"Nous appelons constamment nos partenaires américains à cesser de nourrir les tensions", a dit jeudi le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov. Selon lui, "l'inquiétude de la Russie est claire et parfaitement justifiée", étant donné que ce sont "des Américains qu'on envoie dans des pays européens".


Le Parlement ukrainien déserté par crainte de frappes russes

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  • L'Otan et l'Ukraine doivent se retrouver mardi à Bruxelles pour évoquer la situation, selon des sources diplomatiques interrogées par l'AFP
  • La tension ne retombait pas en Ukraine, où le Parlement, la Rada, a "annulé" sa séance en raison de "signaux sur un risque accru d'attaques contre le quartier gouvernemental dans les jours à venir", ont expliqué plusieurs députés à l'AFP

KIEV: Le Parlement ukrainien a annulé vendredi sa séance par crainte de frappes russes en plein coeur de Kiev, au lendemain du tir par la Russie d'un nouveau missile balistique et de menaces de Vladimir Poutine à l'adresse de l'Occident.

Après ce tir, le président russe s'était adressé à la nation jeudi soir en faisant porter la responsabilité de l'escalade du conflit sur les Occidentaux. Il a estimé que la guerre en Ukraine avait pris désormais un "caractère mondial" et menacé de frapper les pays alliés de Kiev.

Le Kremlin s'est dit confiant vendredi sur le fait que les Etats-Unis avaient "compris" le message de Vladimir Poutine.

L'Otan et l'Ukraine doivent se retrouver mardi à Bruxelles pour évoquer la situation, selon des sources diplomatiques interrogées par l'AFP.

La tension ne retombait pas en Ukraine, où le Parlement, la Rada, a "annulé" sa séance en raison de "signaux sur un risque accru d'attaques contre le quartier gouvernemental dans les jours à venir", ont expliqué plusieurs députés à l'AFP.

En plein coeur de Kiev, ce quartier où se situent également la présidence, le siège du gouvernement et la Banque centrale, a jusqu'à présent été épargné par les bombardements. L'accès y est strictement contrôlé par l'armée.

Le porte-parole du président Volodymyr Zelensky a de son côté assuré que l'administration présidentielle "travaillait comme d'habitude en respectant les normes de sécurité habituelles".

"Compris" le message 

S'adressant aux Russes à la télévision jeudi soir, Vladimir Poutine a annoncé que ses forces avaient frappé l'Ukraine avec un nouveau type de missile balistique hypersonique à portée intermédiaire (jusqu'à 5.500 km), baptisé "Orechnik", qui était dans sa "configuration dénucléarisée".

Cette frappe, qui a visé une usine militaire à Dnipro, dans le centre de l'Ukraine, est une réponse, selon M. Poutine, à deux frappes menées cette semaine par Kiev sur le sol russe avec des missiles américains ATACMS et britanniques Storm Shadow, d'une portée d'environ 300 kilomètres.

M. Poutine a ainsi estimé que la guerre en Ukraine avait pris un "caractère mondial" et annoncé que Moscou se réservait le droit de frapper les pays occidentaux car ils autorisent Kiev à utiliser leurs armes contre le sol russe.

"Le message principal est que les décisions et les actions imprudentes des pays occidentaux qui produisent des missiles, les fournissent à l'Ukraine et participent ensuite à des frappes sur le territoire russe ne peuvent pas rester sans réaction de la part de la Russie", a insisté vendredi le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

Il s'est dit persuadé que Washington avait "compris" ce message.

La veille, les Etats-Unis, qui avaient été informés 30 minutes à l'avance du tir russe, avaient accusé Moscou de "provoquer l'escalade". L'ONU a évoqué un "développement inquiétant" et le chancelier allemand Olaf Scholz a regretté une "terrible escalade".

La Chine, important partenaire de la Russie accusé de participer à son effort de guerre, a appelé à la "retenue". Le Kazakhstan, allié de Moscou, a renforcé ses mesures de sécurité en raison de cette "escalade en Ukraine".

Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky a lui appelé la communauté internationale à "réagir", dénonçant un "voisin fou" qui utilise l'Ukraine comme un "terrain d'essai".

"Cobayes" de Poutine 

Au-delà du tir de jeudi, la Russie a modifié récemment sa doctrine nucléaire, élargissant la possibilité de recours à l'arme atomique. Un acte "irresponsable", selon les Occidentaux.

Interrogés jeudi par l'AFP sur le tir de missile russe, des habitants de Kiev étaient inquiets.

"Cela fait peur. J'espère que nos militaires seront en mesure de repousser ces attaques", a déclaré Ilia Djejela, étudiant de 20 ans, tandis qu'Oksana, qui travaille dans le marketing, a appelé les Européens à "agir" et "ne pas rester silencieux".

M. Poutine "teste (ses armes) sur nous. Nous sommes ses cobayes", a affirmé Pavlo Andriouchtchenko cuisinier de 38 ans.

Sur le terrain en Ukraine, les frappes de la Russie, qui a envahi le pays il y a bientôt trois ans, se poursuivent.

A Soumy, dans le nord-est du pays, une attaque de drones a fait deux morts et 12 blessés, a indiqué le Parquet ukrainien.

Le ministre russe de la Défense, Andreï Belooussov, s'est lui rendu sur un poste de commandement de l'armée dans la région de Koursk, où les forces ukrainiennes occupent, depuis début août, des centaines de kilomètres carrés.

Il s'est félicité d'avoir "pratiquement fait échouer" la campagne militaire ukrainienne pour l'année 2025 en "détruisant les meilleures unités" de Kiev et notant que les avancées russes sur le terrain se sont "accélérées".

Cette poussée intervient alors que Kiev craint que Donald Trump, de retour à la Maison Blanche à partir de janvier prochain, ne réduise ou stoppe l'aide militaire américaine, vital pour l'armée ukrainienne.


Record de 281 travailleurs humanitaires tués dans le monde en 2024, selon l'ONU

L'année 2024 est devenue "la plus meurtrière jamais enregistrée pour le personnel humanitaire", a affirmé l'ONU dans un communiqué, citant des données du Aid Worker Security Database. (AFP)
L'année 2024 est devenue "la plus meurtrière jamais enregistrée pour le personnel humanitaire", a affirmé l'ONU dans un communiqué, citant des données du Aid Worker Security Database. (AFP)
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  • L'année 2024 est devenue "la plus meurtrière jamais enregistrée pour le personnel humanitaire", a affirmé l'ONU dans un communiqué, citant des données du Aid Worker Security Database
  • "Les travailleurs humanitaires sont tués à un rythme sans précédent, leur courage et leur humanité se heurtant aux balles et aux bombes", a déclaré le nouveau secrétaire général adjoint de l'ONU aux affaires humanitaires

GENEVE: Un nombre record de 281 travailleurs humanitaires ont été tués dans le monde cette année, ont alerté les Nations unies vendredi, qui demandent que les responsables soient poursuivis.

L'année 2024 est devenue "la plus meurtrière jamais enregistrée pour le personnel humanitaire", a affirmé l'ONU dans un communiqué, citant des données du Aid Worker Security Database.

"Les travailleurs humanitaires sont tués à un rythme sans précédent, leur courage et leur humanité se heurtant aux balles et aux bombes", a déclaré le nouveau secrétaire général adjoint de l'ONU aux affaires humanitaires et coordinateur des situations d'urgence, Tom Fletcher, dans le communiqué.

Le Britannique souligne que "cette violence est inadmissible et dévastatrice pour les opérations d'aide".

"Les États et les parties au conflit doivent protéger les humanitaires, faire respecter le droit international, poursuivre les responsables et mettre un terme à cette ère d'impunité".

L'année 2023 avait déjà connu un nombre record, avec 280 travailleurs humanitaires tués dans 33 pays.

L'ONU souligne que la guerre à Gaza "fait grimper les chiffres". Il y a eu "au moins 333 travailleurs humanitaires qui ont été tués rien que dans la bande de Gaza" depuis le début de la guerre en octobre 2023, a indiqué le porte-parole de l'agence de coordination humanitaire de l'ONU (Ocha), Jens Laerke, lors d'un point de presse à Genève.

Nombre d'entre eux ont été tués dans l'exercice de leurs fonctions alors qu'ils fournissaient de l'aide humanitaire. La plupart travaillaient pour l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa), dont 243 employés ont été tués depuis la guerre à Gaza, a indiqué M. Laerke.

Parmi les autres travailleurs humanitaires tués depuis le début de la guerre à Gaza figure notamment du personnel du Croissant-Rouge palestinien, a-t-il relevé.

Mais les menaces qui pèsent sur les travailleurs humanitaires ne se limitent pas à Gaza, indique l'ONU, soulignant que des "niveaux élevés" de violence, d'enlèvements, de harcèlement et de détention arbitraire ont été signalés, entre autres, en Afghanistan, en République démocratique du Congo, au Soudan du Sud, au Soudan, en Ukraine et au Yémen.

La majorité du personnel humanitaire tué sont des employés locaux travaillant avec des ONG, des agences de l'ONU et le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.

L'ONU explique que la violence à l'encontre du personnel humanitaire s'inscrit dans "une tendance plus large d'atteintes aux civils dans les zones de conflit", avec l'an dernier "plus de 33.000 civils morts enregistrés dans 14 conflits armés, soit une augmentation de 72% par rapport à 2022".

 


Mandats d'arrêt de la CPI : réaction outrées en Israël, un nouveau «procès Dreyfus» dit Netanyahu

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  • "La décision antisémite de la Cour pénale internationale est comparable à un procès Dreyfus d'aujourd'hui qui se terminera de la même façon", a déclaré le chef du gouvernement dans un communiqué diffusé par son bureau
  • "Israël rejette avec dégoût les actions absurdes et les accusations mensongères qui le visent de la part de la [CPI]", dont les juges "sont animés par une haine antisémite à l'égard d'Israël", ajoute M. Netanyahu

JERUSALEM: L'annonce par la Cour pénale internationale (CPI) de mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son ex-ministre de la Défense Yoav Gallant a suscité des réactions outrées en Israël, M. Netanyahu comparant la décision de la Cour à un nouveau "procès Dreyfus".

"La décision antisémite de la Cour pénale internationale est comparable à un procès Dreyfus d'aujourd'hui qui se terminera de la même façon", a déclaré le chef du gouvernement dans un communiqué diffusé par son bureau.

Condamné pour espionnage, dégradé et envoyé au bagne à la fin du XIXe siècle en France, le capitaine français de confession juive Alfred Dreyfus avait été innocenté et réhabilité quelques années plus tard. L'affaire Dreyfus a profondément divisé la société française et révélé l'antisémitisme d'une grande partie de la population.

"Israël rejette avec dégoût les actions absurdes et les accusations mensongères qui le visent de la part de la [CPI]", dont les juges "sont animés par une haine antisémite à l'égard d'Israël", ajoute M. Netanyahu.

La CPI "a perdu toute légitimité à exister et à agir" en se comportant "comme un jouet politique au service des éléments les plus extrêmes oeuvrant à saper la sécurité et la stabilité au Moyen-Orient", a réagi son ministre des Affaires étrangères, Gideon Saar, sur X.

La CPI a émis jeudi des mandats d'arrêt contre MM. Netanyahu et Gallant "pour crimes contre l'humanité et crimes de guerre commis au moins à partir du 8 octobre 2023 jusqu'au 20 mai 2024", et contre Mohammed Deif, chef de la branche armée du Hamas "pour crimes contre l'humanité et crimes de guerre présumés commis sur le territoire de l'Etat d'Israël et de l'Etat de Palestine depuis au moins le 7 octobre 2023", date de l'attaque sans précédent du mouvement palestinien contre Israël à partir de Gaza ayant déclenché la guerre en cours.

"Jour noir" 

"C'est un jour noir pour la justice. Un jour noir pour l'humanité", a écrit sur X le président israélien, Isaac Herzog, pour qui la "décision honteuse de la CPI [...] se moque du sacrifice de tous ceux qui se sont battus pour la justice depuis la victoire des Alliés sur le nazisme [en 1945] jusqu'à aujourd'hui".

La décision de la CPI "ne tient pas compte du fait qu'Israël a été attaqué de façon barbare et qu'il a le devoir et le droit de défendre son peuple", a ajouté M. Herzog, jugeant que les mandats d'arrêt étaient "une attaque contre le droit d'Israël à se défendre" et visent "le pays le plus attaqué et le plus menacé au monde".

Itamar Ben Gvir, ministre de la Sécurité nationale, et chantre de l'extrême droite a appelé à réagir à la décision de la CPI en annexant toute la Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967, et en y étendant la colonisation juive.

"Israël défend les vies de ses citoyens contre des organisations terroristes qui ont attaqué notre peuple, tué et violé. Ces mandats d'arrêt sont une prime au terrorisme", a déclaré le chef de l'opposition, Yaïr Lapid, dans un communiqué.

"Pas surprenant" 

Rare voix discordante, l'organisation israélienne des défense des droits de l'Homme B'Tselem a estimé que la décision de la CPI montre qu'Israël a atteint "l'un des points les plus bas de son histoire".

"Malheureusement, avec tout ce que nous savons sur la conduite de la guerre qu'Israël mène dans la bande de Gaza depuis un an [...] il n'est pas surprenant que les preuves indiquent que [MM. Netanyahu et Gallant] sont responsables de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité", écrit l'ONG dans un communiqué.

Elle appelle par ailleurs "tous les Etats parties [au traité de Rome ayant institué la CPI] à respecter les décisions de la [Cour] et à exécuter ces mandats".

L'attaque sans précédent du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023 a entraîné la mort de 1.206 personnes, majoritairement des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur les données officielles, incluant les otages tués ou morts en captivité à Gaza.

La campagne de représailles militaires israéliennes sur la bande de Gaza a fait au moins 44.056 morts, en majorité des civils, selon les données du ministère de la Santé du Hamas pour Gaza, jugées fiables par l'ONU.