KABOUL: Deux journalistes afghans travaillant pour une chaîne de télévision locale ont disparu après avoir été arrêtés par les talibans, a annoncé mardi un groupe de défense de la liberté de la presse.
Waris Hasrat et Aslam Hijab, deux journalistes de la chaîne Ariana TV, ont été interpellés lundi par les talibans et "emmenés dans un endroit inconnu", a annoncé l'Association des médias afghans, un groupe nouvellement formé de défense des journalistes.
Un porte-parole taliban a déclaré à l'AFP n'avoir aucune information sur ces disparitions.
Sans faire référence aux talibans, un responsable d'Ariana ayant requis l'anonymat a indiqué à l'AFP que les deux hommes avaient été appréhendés par des hommes armés et masqués devant les bureaux de la chaîne, alors qu'ils sortaient pour aller déjeuner.
Les talibans ont promis à Ariana qu'une "enquête en règle" serait menée, a-t-il ajouté.
La Mission d'assistance des Nations unies en Afghanistan (Manua) a fait part de son inquiétude et demandé sur Twitter "instamment aux talibans d'expliquer publiquement pourquoi ils ont mis en détention les reporters d'ArianaNews et de respecter les droits des Afghans".
Amnesty International a également condamné l'arrestation "injustifiable" des deux journalistes. "Les talibans doivent les relâcher immédiatement et sans conditions", a déclaré sur Twitter le groupe de défense des droits humains.
Depuis qu'ils ont repris le pouvoir en août, après 20 années d'insurrection, les talibans ont réprimé les voix discordantes, en arrêtant des opposants et dispersant de force des manifestations contre leur régime.
Plusieurs journalistes afghans ont été tabassés en couvrant ces manifestations, interdites par les autorités.
En janvier, deux militantes féministes ont été enlevées à leur domicile de Kaboul après avoir participé à une manifestation, selon plusieurs de leurs camarades. Les talibans ont nié être impliqués et promis d'enquêter.
La Haute-commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, Michelle Bachelet, a exprimé mardi son inquiétude sur leur sort et celui de quatre membres de leur famille qui ont disparu avec elles.
Elle s'est dite préoccupée par ce qui semble être un "schéma d'arrestations et de détentions arbitraires, de tortures et de mauvais traitements" des militants de la société civile, journalistes et membres de l'ancien gouvernement et des ex-forces de sécurité.
En début de semaine, un rapport de l'ONU a accusé les talibans et leurs alliés d'avoir tué plus d'une centaine d'anciens membres de la sphère gouvernementale et des forces de sécurité afghanes, ainsi que d'Afghans ayant travaillé avec les troupes étrangères. Le gouvernement taliban en a rejeté les conclusions.
Un universitaire afghan respecté et critique des talibans a aussi été arrêté et détenu pendant quelques jours en janvier, avant d'être libéré sous la pression médiatique.
Les talibans assurent s'être modernisés par rapport à leur précédent règne (1996-2001), lorsqu'ils interdisaient toute contestation et piétinaient largement les droits humains, des femmes notamment.
Mais ils n'ont pas tardé à réprimer à nouveau les libertés fondamentales des femmes, imposant d'importantes restrictions sur leurs droits à travailler, être éduquées et voyager.
Les pays occidentaux conditionnent au respect des droits des femmes le déblocage de milliards de dollars d'aide internationale gelée après la prise de pouvoir des islamistes.
L'Afghanistan est depuis enlisé dans une profonde crise humanitaire, la famine menaçant plus de la moitié de la population, selon l'ONU.