PARIS : La perte de contrats avec l'opérateur Orange fait courir le risque d'environ 1 800 licenciements chez l'équipementier Scopelec, a annoncé mercredi à l'AFP le président du conseil de surveillance de cette coopérative spécialisée dans le déploiement des équipements télécoms.
"Aujourd'hui, c'est l'entreprise toute entière qui est menacée de mort" et son modèle de société coopérative, s'est inquiété Alain Tomas. Il en appelle désormais aux pouvoirs publics, afin de "se mettre autour d'une table pour trouver des solutions".
Interpellé sur le sujet, Bercy a indiqué mercredi soir à l'AFP que le Ciri (Comité interministériel de restructuration industrielle) avait été saisi et que son principal rôle serait d'essayer de "transférer le maximum de salariés de Scopelec vers les nouveaux attributaires des contrats perdus par le groupe".
La perte de contrats de sous-traitance avec Orange, son partenaire historique et son principal client, est en effet à l'origine de la crise puisque le groupe a perdu au passage 40% de son chiffre d'affaires, estimé à 475 millions d'euros en 2021.
"L'autre sujet à traiter est de voir si Scopelec peut trouver un modèle rentable avec moins d'activité et moins de salariés, d'ici la fin février", date du transfert effectif des lots perdus aux nouveaux attributaires, souligne-t-on à Bercy.
Implanté sur plus de 90 sites en France, Scopelec, qui compte quelque 3 600 salariés, reste l'un des six partenaires "majeurs" retenus par Orange malgré la perte de ces contrats, à l'issue d'un appel d'offres lancé début 2021.
"Après plusieurs avertissements ces dernières années, la qualité des prestations proposées par certains prestataires actuels, dont Scopelec qui a reçu plusieurs dizaines de mises en demeure en raison de manquements sur certains territoires, a conduit Orange à revoir l'attribution des zones confiées à chacun", avait expliqué en décembre l'ex-France Télécom, dont l'État est le premier actionnaire.
"La remise en cause d'un prestataire sur un territoire n'impacte en rien l'emploi local", avait ajouté le groupe, qui comptabilise environ 14 000 personnes employées au total sur ces activités de sous-traitance.
Les contrats perdus par Scopelec sont allés aux sociétés Solution 30 en Occitanie, Spie dans les Pays de la Loire, Sade en Bourgogne-Franche-Comté, ainsi que Vinci et Constructel.
De son côté, Sogetrel, spécialisé dans la fibre et les réseaux très haut débit, a perdu fin 2021 le marché d'Orange dans le Nord et les Pays de la Loire, et gagné des marchés notamment dans le Sud et le Sud-Ouest à compter de fin mars.
Ses salariés de l'équipementier ont entamé une grève lundi, pour protester contre les mutations imposées à 600 employés dans le Nord, en Haute-Marne, en Champagne-Ardennes, en Normandie et dans les Pays de la Loire, selon Teddy Stevance, représentant syndical au CSE.
La direction souhaite envoyer nombre de ces salariés vers l'Occitanie ou l'Aquitaine, menaçant de licenciement les réfractaires, selon ce syndicaliste CGT.
"Le problème, c'est que la clause de mobilité est la même du cadre jusqu'à l'ouvrier", a expliqué M. Stevance. "On n'a pas les mêmes revenus, pas le même salaire. Un ouvrier qui touche 1 200 ou 1 300 euros, quand on voit les prix des loyers dans le sud, ce n'est pas possible."
La direction a indiqué mercredi à l'AFP avoir "instauré un dialogue social" dès novembre, et proposé des formations, une soixantaine de postes locaux, et plusieurs centaines de postes dans d'autres régions, sur lesquels "une centaine de collaborateurs se sont positionnés".
Le président de la Communauté d'agglomération Hénin-Carvin, Christophe Pilch, a évoqué la possibilité de transférer certains postes au concurrent de Sogetrel ayant remporté l'appel d'offres d'Orange.
Il a appelé la direction à la "discussion" sur la mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi, pour mieux accompagner les salariés qui devront être licenciés.