Paris : L'action de l'électricien français EDF chutait de plus de 20% vendredi matin à la Bourse de Paris, après que le gouvernement lui a demandé de vendre plus d'électricité à bas prix et un nouveau problème dans son parc nucléaire.
À 09H45, le titre dégringolait de 21,82% à 8,09 euros, après une suspension mécanique dans les premiers échanges du fait de mouvements trop importants.
Afin de limiter la hausse des prix de l'électricité pour les consommateurs, le gouvernement français a demandé jeudi à EDF d'augmenter de 20% le volume d'électricité nucléaire vendu à prix réduit à ses concurrents cette année, de 100 à 120 térawattheures (TWh). Ce alors que le pouvoir d'achat est l'un des thèmes récurrents de la campagne présidentielle en cours en France.
Le groupe va donc vendre à un prix réduit jusqu'à -40% de sa production électrique en 2022, au lieu de vendre aux prix forts du marché, et perdre des milliards d'euros.
Selon le groupe, l'impact de cette mesure sur son excédent brut d'exploitation pour 2022 serait d'environ 8 milliards d'euros.
Des chiffres "qui peuvent faire peur aux investisseurs", estiment les analystes d'Alphavalue dans une note vendredi.
Mais "la vraie mauvaise nouvelle" concerne la "révision à la baisse de la production" nucléaire pour 2022 à 300/330 TWh, contre 330/360 TWh précédemment, en raison du prolongement de la durée d'arrêt de cinq réacteurs du parc nucléaire français d'EDF, précisent-ils.
Aujourd'hui, 10 des 56 réacteurs sont à l'arrêt pour maintenance ou autre, ce qui représente 20% de la capacité de la production nucléaire française. D'autres fermetures de centrales, en plein hiver quand la consommation électrique est forte, risqueraient de perturber l'alimentation électrique du pays, voire de créer des coupures de courant dans le pire des cas.
Jeudi, l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) a indiqué à l'AFP qu'un réacteur nucléaire de la centrale de Penly (Seine-Maritime) était également concerné par un problème de corrosion sur un système de sécurité déjà détecté ou soupçonné sur quatre autres réacteurs EDF actuellement à l'arrêt.
Cette annonce "ouvre la voie à de potentielles interruptions supplémentaires dans les prochaines semaines et prochains mois (...) et l'impact sur les résultats financiers est difficilement estimable à l'heure actuelle puisqu'il dépendra de la durée des interruptions et de leur nombre", est-il ajouté.
Corrosion: revue du parc nucléaire en cours, trop tôt pour dire si des arrêts seront nécessaires, dit l'ASN
PARIS : EDF passe en revue jusqu'à la fin du mois l'ensemble du parc nucléaire français à la recherche de nouveaux problèmes de corrosion, a indiqué vendredi l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), qui ne sait pas à ce stade si de nouveaux arrêts de réacteurs seront nécessaires en cas de soupçons.
"EDF aujourd'hui a engagé le réexamen de tous les contrôles qui avaient été faits dans le passé et ce pour tous les réacteurs du parc", a déclaré à l'AFP Julien Collet, directeur général adjoint de l'ASN.
Actuellement, sur les 56 réacteurs du parc nucléaire français, cinq sont à l'arrêt à cause de problèmes de corrosion sur un système de sécurité. Des problèmes identifiés pour quatre d'entre eux et soupçonnés sur le cinquième. Ces arrêts non prévus accroissent un peu plus la tension sur la sécurité d'approvisionnement électrique cet hiver en France, alors que la disponibilité du parc est déjà faible.
Le défaut sur ce système de sécurité concernait à l'origine la famille des réacteurs les plus puissants (1.450 MW) et récents d'EDF. Mais il a depuis été vu sur un réacteur moins puissant (1.300 MW), celui de Penly 1 (Seine-Maritime).
Il existe en France 20 réacteurs de 1 300 MW, dont 12 sont exactement de la même génération (ou palier) que celui de Penly.
À ce stade, il s'agit d'un travail documentaire consistant à réexaminer les résultats de contrôles passés à la recherche du problème de corrosion. "C'est un travail qui est en cours et devrait se poursuivre jusqu'à la fin du mois. Sur cette base, EDF va proposer à l'ASN un programme de contrôle des réacteurs du parc", a expliqué M. Collet.
Est-ce qu'il faudra arrêter les réacteurs si un soupçon de corrosion apparaît lors de l'examen documentaire? "Ça dépendra des éléments qui vont sortir de cette revue et également de la compréhension que l'on a des phénomènes", a-t-il répondu.
"Des contrôles pourront être faits, peut-être au fil de l'eau de l'arrêt normal des réacteurs, mais peut-être qu'un certain nombre d'entre eux devront être réalisés de manière anticipée. C'est quelque chose qui reste à déterminer", a-t-il signalé.
"C'est un phénomène qui n'était pas attendu pour ce type d'acier à cet endroit et les causes de ces défauts ne sont pas aujourd'hui bien comprises, donc il y a un travail d'expertise qui est en cours", a-t-il souligné.
En raison de ces arrêts, EDF a dû revoir en baisse jeudi soir son estimation de production nucléaire en 2022, descendant de 330/360 TWh à 300/330.