Présidentielle: candidate en puissance, Taubira affine sa stratégie

Mi-décembre, la Guyanaise a annoncé «envisager» sa candidature à l'élection présidentielle d'avril 2022. (Photo, AFP)
Mi-décembre, la Guyanaise a annoncé «envisager» sa candidature à l'élection présidentielle d'avril 2022. (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 31 décembre 2021

Présidentielle: candidate en puissance, Taubira affine sa stratégie

  • L'ancienne garde des Sceaux sous François Hollande a une obsession: «Convaincre la gauche que l'élection n'est pas perdue»
  • Parmi ses confidents, on la décrit «hyper motivée et déterminée»

PARIS : Candidate pas encore déclarée, mais c'est tout comme: Christiane Taubira a affiné ces derniers jours sa stratégie avant un mois de janvier "décisif", entourée de fidèles collaborateurs, pour "dessiner le chemin de la victoire" à l'Elysée autour d'une gauche qu'elle veut réunie.

Depuis quelques semaines, l'ancienne garde des Sceaux sous François Hollande a une obsession: "Convaincre la gauche que l'élection n'est pas perdue" et "mener la bataille de l'union", résume Christian Paul, actuel maire de Lormes (Nièvre), qui fait campagne à ses côtés. 

Mi-décembre, la Guyanaise a annoncé "envisager" sa candidature à l'élection présidentielle d'avril 2022, une formule qui ne laisse en réalité que peu de doute sur ses intentions.

"Il n'y avait aucune trace d'indécision, mais le souci de construire sans violence à l'égard des autres candidats de gauche une union des forces", explique M. Paul, ex-frondeur lors du quinquennat de M. Hollande.

Parmi ses confidents, on la décrit "hyper motivée et déterminée" après que "sa réflexion a mûri" face à "la montée de l'extrême droite" et "la panne stratégique" à gauche.

Depuis, elle se prépare. Ces derniers jours, elle a largement consulté depuis Cayenne où elle passe les fêtes en famille.

Autour d'elle, un noyau dur de quelques fidèles s'est rapidement constitué.

Son ancien directeur de cabinet et son ancienne conseillère presse au ministère de la Justice l'aident au quotidien dans l'élaboration de la campagne, tout comme Axel Urgin, un énarque aujourd'hui élu à la mairie de Créteil... et ancien directeur de cabinet de Christian Paul lorsque celui-ci était secrétaire d'État à l'Outre-mer dans le gouvernement Jospin entre 2000 et 2002.

M. Paul fait aussi partie de cette garde rapprochée, où apparaissent également Guillaume Lacroix, président du Parti radical de gauche, et Clara Paul-Zamour, chargée de la communication.

Au total, une équipe de 40 personnes aux profils "très variés" entoure Mme Taubira, sans compter les quelque 200 contributeurs thématiques -- haut fonctionnaires, chercheurs, élus locaux, représentants associatifs... -- qui lui font remonter des notes pour élaborer "une vision audible de gauche" détaillant "où elle veut mener le pays".

"Elle souhaite dessiner le chemin pour gagner en avril 2022", lance une source proche au fait des velléités de Mme Taubira.

Plusieurs pôles - organisation du planning de campagne et production d'idées surtout - sont aujourd'hui en ordre de marche. L'équipe compte aussi s'appuyer sur les plus de 80 comités du collectif de citoyens "Taubira pour 2022", dans le but de mobiliser localement et sur les réseaux sociaux.

«Prête»

Début janvier, Christiane Taubira devrait égrainer quelques mesures fortes lors de déplacements et d'interventions médiatiques savamment choisies.

"Pas question de faire 600 propositions", répète-t-on toutefois parmi ses proches. "L'effet de catalogue est quasiment nul lors d'une présidentielle", veut croire Christian Paul. 

Parmi les thématiques phares: la transition écologique, le pouvoir d'achat, la santé publique, l'éducation ou encore l'engagement citoyen.

Avant une primaire pour départager un candidat unique à gauche? "Il faut que les conditions soient réunies", assure-t-on dans l'entourage de l'ancienne députée.

Comprendre: la participation de l'écologiste Yannick Jadot, en plus de celle de la socialiste Anne Hidalgo, pourrait, entre autres, "faire bouger les choses".

"Ce rassemblement a besoin de temps, mais ça va forcément se décanter", prophétise une autre source proche, qui assure que "les équipes se parlent". "Si ça ne se décante pas par l'unité, ça se décantera par la dynamique" dans un mois de janvier "décisif", juge cette même source à un peu plus de trois mois du premier tour. 

Un sondage Viavoice publié jeudi par le journal Libération indique que 65% des électeurs de gauche estiment qu'une primaire ouverte est "une bonne idée". Et 39% se disent prêt à voter pour Mme Taubira le 10 avril, plus que pour tous ses concurrents dont Jean-Luc Mélenchon de LFI (38%).

"Elle est prête", assure Fabien Bazin, président PS du conseil départemental de la Nièvre. 

En attendant, Mme Taubira a donné rendez-vous "à la mi-janvier" à ses sympathisants. Son équipe: "Ce ne sera qu'une étape. Elle se prépare à une campagne courte et intense".


JO-2024: dans les transports parisiens, la fracture sociale se fera aussi sentir

Des navetteurs attendent sur un quai de la station de métro Saint-Lazare à Paris le 10 novembre 2022, lors d'une grève. (AFP)
Des navetteurs attendent sur un quai de la station de métro Saint-Lazare à Paris le 10 novembre 2022, lors d'une grève. (AFP)
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  • Pour les usagers du quotidien, les situations sont cependant très contrastées dans la région capitale
  • De nombreuses lignes seront surchargées, voire carrément déconseillées certains jours, au risque de devoir attendre plus de 15 minutes sur des quais bondés avant de monter dans la rame

PARIS: Prendre son vélo, marcher, télétravailler ou carrément partir de Paris: les habitants de la région parisienne sont prévenus, il faudra adapter ses usages pour soulager les transports pendant les Jeux olympiques. Ces injonctions ne s'adressent pourtant qu'aux plus privilégiés, nombre d'usagers n'ayant pas le luxe de ces options.

"Il ne faut pas avoir peur de faire un peu de marche, c'est bon pour la santé". La phrase de Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France, a soulevé quelques sourcils lundi lors de la présentation du plan de transport détaillé des Jeux olympiques.

A gauche, des élus de la région ont pointé du doigt une forme de déconnexion par rapport aux habitants de la lointaine banlieue, obligés de venir travailler à Paris.

Du côté Mme Pécresse, on défend une parole de bon sens, puisque "un tiers des visiteurs des Jeux auront entre 25 et 35 ans, donc on espère qu'entre 25 et 35 ans, on peut de temps en temps prolonger le trajet à pied".

Pour les usagers du quotidien, les situations sont cependant très contrastées dans la région capitale. De nombreuses lignes seront surchargées, voire carrément déconseillées certains jours, au risque de devoir attendre plus de 15 minutes sur des quais bondés avant de monter dans la rame.

Capharnaüm

La ligne 10 du métro, qui traverse les beaux quartiers parisiens et achève sa course dans ceux chics de Boulogne-Billancourt, est de celle-là. Avec la 9, elle n'est pas dimensionnée pour desservir Roland-Garros et le Parc des Princes simultanément, où se dérouleront des épreuves de tennis, boxe et football.

"J'appréhende beaucoup parce que ça va être un cirque indescriptible", anticipe Arthur Poly, enseignant-chercheur de 36 ans en attente de son métro à la station Motte-Picquet-Grenelle, dans le 15e arrondissement de Paris.

Il sera contraint de travailler pendant la période de compétition (26 juillet au 11 août). Sa solution pour éviter le "capharnaüm" annoncé? "Plutôt la marche, je peux avoir des horaires que je décide, donc je peux me permettre de prendre du temps et marcher, ce qui me fera du bien", concède cet habitant du 5e arrondissement.

Marie-Claude, retraitée de 73 ans et usagère régulière de la 10, se rendra dans sa maison de vacances. Quant à Coline, qui travaille dans la cyber-sécurité, "c'est le télétravail qui nous est recommandé", assure-t-elle. "Il faudra peut-être en faire un peu plus que d'habitude", mais elle se réserve la possibilité d'aller travailler en dehors de Paris, "si j'en ai marre d'être chez moi".

Supporter et subir

Plus au nord, l'ambiance change radicalement sur la 13, éternelle ligne malade et surchargée du réseau. Elle dessert des quartiers populaires de Seine-Saint-Denis, au nord de Paris, et surtout, le Stade de France, qui se remplira et se videra jusqu'à trois fois par jour pendant les JO. Là aussi les travailleurs du quotidien sont invités à éviter de l'emprunter.

"Quitter Paris pendant les JO? Mais pour aller où?", s'étonne Christian Boukassa lorsqu'on lui pose la question sur le quai de la station La Fourche. Cet ouvrier du bâtiment de 43 ans habite en lointaine banlieue, et met 45 minutes tous les jours pour se rendre sur son chantier, à Saint-Denis.

Ni télétravail, ni marche à pied ou vélo ne sont envisageables, sans parler d'une hypothétique résidence secondaire. Pour éviter les désagréments, "je vais taper sur mon GPS et changer d'itinéraire", suppose-t-il.

"Déjà sans les JO, la ligne 13 est bondée", se résigne Nafi Olouchy, 62 ans et infirmière à l'hôpital. Elle non plus n'a d'autre choix que de travailler pendant les Jeux, car les fonctionnaires de l'hôpital publics sont fortement incités à ne pas poser leurs congés sur cette période. "Je vais devoir supporter et subir le trafic pendant la période des JO, et tous mes collègues aussi d'ailleurs", précise-t-elle.

Yaya Fofana, préparateur de colis habitant Saint-Ouen, est résigné: "ça va être compliqué", glisse-t-il. Pour autant, ce sera "une grande fête", veut-il retenir. "Moi j'adore les Jeux olympiques", lance-t-il avant de s'insérer difficilement avec son fils en poussette dans une rame bondée.


Voile à l'école: plainte et vague d'indignation après le départ d'un proviseur menacé de mort

Les élèves arrivent au lycée Maurice Ravel à Paris, le 1er septembre 2015, pour la rentrée. PHOTO AFP / KENZO TRIBOUILLARD (Photo par KENZO TRIBOUILLARD / AFP)
Les élèves arrivent au lycée Maurice Ravel à Paris, le 1er septembre 2015, pour la rentrée. PHOTO AFP / KENZO TRIBOUILLARD (Photo par KENZO TRIBOUILLARD / AFP)
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  • Le proviseur «a tout simplement fait son travail» en demandant «à une jeune femme d'appliquer la loi, c'est-à-dire de retirer son voile dans l'établissement scolaire», a souligné Attal
  • Un jeune homme de 26 ans, originaire des Hauts-de-Seine, a été arrêté et doit être jugé le 23 avril à Paris pour avoir menacé de mort le chef d'établissement sur internet

PARIS: L'annonce du départ du proviseur du lycée parisien Maurice-Ravel, menacé de mort après une altercation avec une élève pour qu'elle enlève son voile, a suscité une vague d'indignation, jusqu'au Premier ministre qui a annoncé mercredi une plainte pour "dénonciation calomnieuse" contre la jeune femme.

"L'Etat, l'institution, sera toujours aux côtés de ses agents, de ceux qui sont en première ligne face à ces atteintes à la laïcité, face à ces tentatives d'entrisme islamiste dans nos établissements scolaires", a affirmé Gabriel Attal sur TF1, après avoir reçu dans l'après-midi le proviseur avec sa ministre de l'Education Nicole Belloubet.

"J'ai décidé que l'Etat allait porter plainte contre cette jeune femme pour dénonciation calomnieuse", a-t-il déclaré. "Il ne faut rien laisser passer", selon le Premier ministre qui a rappelé les morts de Dominique Bernard et Samuel Paty, deux enseignants tués dans des attentats islamistes.

Le proviseur "a tout simplement fait son travail" en demandant "à une jeune femme d'appliquer la loi, c'est-à-dire de retirer son voile dans l'établissement scolaire", a encore souligné Gabriel Attal, en vertu de la loi interdisant le port de signes religieux ostentatoires à l'école de 2004.


Retour de mission en mer Rouge: des missiles en moins, «  la fierté » en plus

Pendant la mission de la frégate, l'alerte pouvait survenir à n'importe quelle heure du jour ou de la nuit: un long klaxon pour appeler au poste de combat. (AFP).
Pendant la mission de la frégate, l'alerte pouvait survenir à n'importe quelle heure du jour ou de la nuit: un long klaxon pour appeler au poste de combat. (AFP).
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  • Dans le central opérations, cerveau du navire d'où les opérations sont dirigées depuis des dizaines d'écrans de contrôle, le quartier-maître Robin dit qu'il se souviendra de sa quatrième mission
  • "C'était la première fois où on pouvait mettre du concret sur ce pour quoi on s'entraîne, on se dit qu'on ne fait pas ça pour rien, on se sent utile", relate l'opérateur radar de surface de 22 ans

TOULON: Les couvercles des silos de missiles ont été noircis par les tirs contre les drones lancés par les rebelles Houthis: à bord de la frégate française Languedoc, de retour à Toulon après une mission en mer Rouge, l'équipage se dit fier d'avoir fait face à l'épreuve du feu.

Dans le central opérations, cerveau du navire d'où les opérations sont dirigées depuis des dizaines d'écrans de contrôle, le quartier-maître Robin dit qu'il se souviendra de sa quatrième mission.

"C'était la première fois où on pouvait mettre du concret sur ce pour quoi on s'entraîne, on se dit qu'on ne fait pas ça pour rien, on se sent utile", relate l'opérateur radar de surface de 22 ans.

Du 5 décembre au 25 février, la frégate multi-missions (Fremm) a été déployée en mer Rouge et dans le golfe d'Aden, voie maritime stratégique où des navires commerciaux font régulièrement l'objet d'attaques depuis le Yémen de la part des rebelles Houthis.

A quatre reprises, la frégate a dû ouvrir le feu avec ses missiles Aster 15 contre des drones lancés par les Houthis contre elle ou les navires qu'elle escortait.

"Il y en a qui passent 20 ans dans la Marine sans avoir vécu ça", estime le quartier-maître, qui, avec les 136 membres d'équipage, confie, à l'occasion d'une visite du ministre des Armées Sébastien Lecornu, s'être senti "très fier".

Si l'amiral Pierre Vandier, alors chef d'état-major de la Marine, avait prévenu en 2020 les futurs officiers de l'Ecole navale qu'ils entraient "dans une marine qui va probablement connaître le feu" et qu'ils devaient "s'y préparer", les ouvertures du feu en situation de combat restent rares.

La dernière remontait au 14 avril 2018 avec le tirs de trois missiles de croisière naval (MdCN), déjà depuis la Languedoc, lors de l'opération Hamilton contre des sites liés au programme d'armement chimique syrien.

Au poste de combat

- "Quand est-ce que le bateau avait tiré un missile Aster pour la dernière fois ?", s'enquiert le ministre auprès du commandant, le capitaine de vaisseau Laurent Saunois.

- "Il n'y en avait jamais eu".

- "Oui... On a changé d'époque", constate le ministre qui note une "accumulation des menaces".

Depuis le déploiement de la Fremm Languedoc, renforcée puis remplacée sur zone par l'Alsace et maintenant par la Lorraine, 22 missiles Aster ont été tirés par la Marine française contre des drones et missiles balistiques houthis.

Les rebelles yéménites, soutenus par l'Iran, sont à l'origine d'au moins 50 attaques de navires depuis l'automne, selon le Pentagone.

Pendant la mission de la frégate, l'alerte pouvait survenir à n'importe quelle heure du jour ou de la nuit: un long klaxon pour appeler au poste de combat.

Le 20 février, il est minuit passé et le quartier-maître Robin passe en quelques minutes de sa couchette à son poste quand il n'est pas de service sur le radar: pompier en combinaison ignifugée paré à intervenir si le navire était touché.

"Avant le tir, on entend +Engagement Aster+ puis on le sent partir, ça fait trembler le navire", relate-t-il, confiant que l'entraînement paie: "C'est répété et répété et quand ça arrive vraiment on passe en mode automatique et on le fait".

Les automatismes développés à l'entraînement sont primordiaux pour faire vite et bien, abonde le pacha: une fois le drone détecté, le navire a dix minutes avant qu'il n'arrive au navire mais "pour un missile balistique, comme l'Alsace a eu en traiter, c'est dix secondes", explique-t-il au ministre.

Pour l'amiral Christophe Cluzel, patron de la Force d'action navale regroupant tous les navires de surface français, "c'est rassurant pour un commandant de force, ça montre que l'entraînement est adapté au réel".

Cela montre aussi les besoins: pendant que la Languedoc était déployée, des systèmes optroniques d'identification et de conduite de tir Paseo - sortes d'énormes jumelles permettant de vérifier visuellement ce qui n'est au départ qu'un écho radar - ont été montés en urgence sur les frégates Alsace et Lorraine avant leur mission en mer Rouge.