Privés de voyages, les Israéliens (re)découvrent Nazareth pour Noël

Les gens se rassemblent la nuit autour du sapin de Noël géant à l'extérieur de l'église orthodoxe grecque de l'Annonciation à Nazareth, le 18 décembre 2021. (AFP)
Les gens se rassemblent la nuit autour du sapin de Noël géant à l'extérieur de l'église orthodoxe grecque de l'Annonciation à Nazareth, le 18 décembre 2021. (AFP)
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Publié le Vendredi 24 décembre 2021

Privés de voyages, les Israéliens (re)découvrent Nazareth pour Noël

  • La municipalité et le gouvernement ont surtout investi dans la communication à l'approche de Noël en publiant un guide de plus de 100 pages en hébreu et en lançant un site internet destiné aux juifs israéliens
  • Après être longtemps passée sous les radars des promoteurs touristiques israéliens, la ville de Nazareth, qui compte 78 000 habitants est au coeur d'une campagne de promotion

NAZARETH: Sur le marché de Noël de Nazareth, de nombreux juifs israéliens admirent un immense sapin et les nombreuses décorations lumineuses, petit goût d'exotisme au moment où les voyages à l'étranger sont vivement déconseillés voire interdits pour cause de coronavirus.

Plus grande ville arabe d'Israël et haut lieu de la chrétienté, Nazareth accueille habituellement à l'approche des fêtes de fin d'année des foules de pèlerins qui visitent notamment la basilique de l'Annonciation où, selon la tradition chrétienne, l'archange Gabriel a annoncé à Marie qu'elle donnerait naissance à Jésus.

Mais l'Etat hébreu a promptement refermé ses frontières aux touristes en novembre pour lutter contre la circulation du variant Omicron. Dans le même temps, il a interdit aux citoyens d'aller dans une cinquantaine de pays.

"Nous ne voyageons pas en ce moment à cause du coronavirus", explique Roni Harari, tout en jetant un oeil attendri à ses enfants qui savourent une gaufre belge sur le marché de Noël. "Ici on se sent un peu comme à l'étranger!", poursuit la psychologue venue de Haïfa, une autre grande ville du nord.

Pour Aziz Banna, un guide touristique de Nazareth, "ce n'est pas le Noël espéré".

"Mais l'ambiance est géniale, de nombreux Israéliens juifs viennent", se réjouit-il. "Nous sommes contents, même s'il n'y a pas de tourisme étranger".

Communication 

Après être longtemps passée sous les radars des promoteurs touristiques israéliens, la ville de Nazareth, qui compte 78 000 habitants --une majorité de musulmans et un quart de chrétiens-- est au coeur d'une campagne de promotion, explique Sharon Ben Ari, directeur du tourisme à la mairie.

La municipalité et le gouvernement ont surtout investi dans la communication à l'approche de Noël en publiant un guide de plus de 100 pages en hébreu et en lançant un site internet destiné aux juifs israéliens.

Avec 10 000 visiteurs par jour et des recettes du tourisme estimées à 50 millions de shekels (environ 14 millions d'euros), c'est un Noël "particulièrement réussi", se félicite Sharon Ben Ari, notant toutefois que cela ne permettrait pas de couvrir quasi deux années de pertes dues au coronavirus.

Bassam Hakim, qui a ouvert en 2015 un hôtel de luxe dans la maison que sa famille détient depuis trois générations, relève que les jufs israéliens ont toujours eu un attrait pour les célébrations de Noël mais que cette année est particulière.

Une semaine avant le week-end de Noël, six de ses dix chambres étaient occupées, une bénédiction en temps de pandémie.

Seul bémol: les touristes locaux "ne viennent que le week-end. Nous sommes au chômage les cinq autres jours", regrette l'hôtelier de 36 ans.

Connexion 

A deux pas de la vieille ville, où des graffitis propalestiniens rappellent que la population locale, arabe israélienne, est composée des descendants des Palestiniens restés sur leurs terres à la création d'Israël en 1948, son oncle Bishara Hakim a lui aussi vu affluer les Israéliens.

Gardien de l'église grecque orthodoxe de l'Annonciation, il estime que 90% des visiteurs de décembre étaient juifs et regrette que "la majorité d'entre eux" ne "se sentent pas connectés à l'église". 

"Ils viennent, ils visitent, et ils s'en vont", explique-t-il.

Dans la galerie Baqees, ouverte en 2020 pour "promouvoir et aider les artistes arabes", la peintre Fatima Abou Roumi regrette que tous ces visiteurs ne passent pas la porte de sa boutique, pourtant situé à côté du grand sapin de Noël où se presse la foule.

L'atmosphère festive de la grande ville de Galilée contraste avec celle d'un autre coeur battant de la chrétienté en Terre sainte, Bethléem, ville palestinienne de Cisjordanie où on s'apprête une nouvelle fois à fêter Noël dans la morosité.

L'Etat hébreu occupe depuis 1967 la Cisjordanie et en contrôle toutes les entrées. En conséquence, les touristes interdits de visite en Israël le sont aussi côté palestinien, et Bethléem, lieu de naissance de Jésus selon la tradition chrétienne, voit ses hôtels et ses commerces désertés.

Et les Israéliens ayant interdiction de se rendre dans ce secteur de la Cisjordanie contrôlé par l'Autorité palestinienne, Bethléem ne peut prétendre au même boom que Nazareth.

Pourtant, l'histoire de Noël "commence à Nazareth et se poursuit à Bethléem", note Aziz Banna.


Le ministre irakien des Affaires étrangères en visite officielle aux États-Unis

 Le ministre irakien des affaires étrangères, Fuad Hussein. (File/AFP)
Le ministre irakien des affaires étrangères, Fuad Hussein. (File/AFP)
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  • La visite s'inscrit dans le cadre de l'engagement diplomatique continu entre les deux pays dans un contexte d'évolution de la dynamique régionale
  • "Nous discuterons des moyens de renforcer la sécurité commune et la coopération dans divers domaines", a déclaré le ministre des affaires étrangères.

DUBAI : Le ministre irakien des Affaires étrangères, Fuad Hussein, s'est envolé jeudi pour les Etats-Unis afin de participer à une série de réunions bilatérales visant à renforcer les liens entre Bagdad et Washington.

Dans une déclaration partagée sur la plateforme X et rapportée par l'Agence de presse irakienne, M. Hussein a déclaré que la visite se concentrera sur le renforcement des relations irako-américaines et la coordination des efforts sur les questions régionales et internationales clés.

"Nous discuterons des moyens de renforcer la sécurité commune et la coopération dans divers domaines", a déclaré le ministre des affaires étrangères.

Cette visite s'inscrit dans le cadre d'un engagement diplomatique continu entre les deux pays, dans un contexte d'évolution de la dynamique régionale.


Gaza: 22 morts dans des bombardements israéliens, selon secouristes et hôpitaux

L'hôpital indonésien à Jabalia dit avoir reçu les corps de neuf victimes après un bombardement israélien sur un commissariat de police de cette ville du nord du territoire palestinien. (AFP)
L'hôpital indonésien à Jabalia dit avoir reçu les corps de neuf victimes après un bombardement israélien sur un commissariat de police de cette ville du nord du territoire palestinien. (AFP)
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  • L'armée israélienne a confirmé dans un communiqué avoir effectué une frappe dans la région de Jabalia, précisant qu'elle ciblait "des terroristes opérant dans un centre de commandement et de contrôle du Hamas et du Jihad islamique"
  • Une autre frappe aérienne sur une maison dans le nord de la ville de Gaza, dans le nord du territoire palestinien, a tué une famille de six personnes, un couple et ses quatre enfants, a indiqué la Défense civile à Gaza

GAZA: Au moins 22 personnes, dont six membres d'une même famille, ont été tuées dans de nouveaux bombardements israéliens sur la bande de Gaza jeudi matin, ont annoncé la Défense civile palestinienne et des sources hospitalières.

L'hôpital indonésien à Jabalia dit avoir reçu les corps de neuf victimes après un bombardement israélien sur un commissariat de police de cette ville du nord du territoire palestinien.

L'armée israélienne a confirmé dans un communiqué avoir effectué une frappe dans la région de Jabalia, précisant qu'elle ciblait "des terroristes opérant dans un centre de commandement et de contrôle du Hamas et du Jihad islamique".

Une autre frappe aérienne sur une maison dans le nord de la ville de Gaza, dans le nord du territoire palestinien, a tué une famille de six personnes, un couple et ses quatre enfants, a indiqué la Défense civile à Gaza.

Cette organisation de secouristes a aussi fait état de deux morts dans une frappe sur une tente de personnes déplacées à Khan Younès, dans le sud.

Toujours à Khan Younès, l'hôpital Nasser annonce avoir reçu les dépouilles de deux victimes après une frappe sur une maison familiale. L'hôpital des martyrs d'al-Aqsa dit, lui, avoir reçu trois corps après une frappe sur une tente de personnes déplacées dans le camp de Nuseirat (centre).

Rompant une trêve de près de deux mois dans la guerre déclenchée il y a plus d'un an et demi, Israël a repris le 18 mars son offensive aérienne puis terrestre dans la bande de Gaza, où au moins 1.928 Palestiniens ont été tués depuis selon le ministère de la Santé du Hamas.

Ce bilan porte à 51.305 le nombre de morts dans la bande de Gaza, selon la même source, depuis le début de l'offensive israélienne lancée en représailles à l'attaque du Hamas en Israël le 7 octobre 2023.

L'attaque sans précédent du Hamas a entraîné la mort de 1.218 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

Sur les 251 personnes enlevées le 7-Octobre, 58 sont toujours otages à Gaza dont 34 sont mortes, selon l'armée israélienne.

 


1982 – Le massacre de Sabra et Chatila

Les corps des victimes du massacre de Sabra et Shatila sont transportés par le personnel de la Croix-Rouge pour être enterrés à Beyrouth. (Getty Images)
Les corps des victimes du massacre de Sabra et Shatila sont transportés par le personnel de la Croix-Rouge pour être enterrés à Beyrouth. (Getty Images)
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  • Le massacre, qui s'est déroulé au plus fort de la guerre civile libanaise, et les raisons qui l'ont motivé mettent en lumière les dimensions régionales complexes qui ont entouré le conflit
  • Arab News a publié des images saisissantes du massacre, qualifié de crime commis «avec la connivence des envahisseurs israéliens»

LONDRES: Le massacre de Sabra et Chatila, survenu en 1982, reste l’un des épisodes les plus tragiques et emblématiques de l’histoire politique mouvementée du Liban.

Des membres d’une milice chrétienne libanaise de droite ont pénétré dans le quartier de Sabra, au sud de Beyrouth, ainsi que dans le camp de réfugiés palestiniens de Chatila, tout proche. Ils y ont massacré des centaines de personnes. Certaines estimations font état de plus de 3 000 victimes, majoritairement des civils palestiniens et des Libanais musulmans.

Au moment où les atrocités ont eu lieu, le quartier, où résidaient de nombreux dirigeants palestiniens, ainsi que le camp, étaient sous le contrôle des forces d'occupation israéliennes à la suite de leur invasion du Liban-Sud trois mois plus tôt.

Selon certaines sources, les meurtres de masse ont été commis au vu et au su des forces israéliennes, de 18 heures environ le 16 septembre à 8 heures du matin le 18 septembre. Certains ont même affirmé que les milices chrétiennes avaient reçu l'ordre des Israéliens de «chasser» les combattants de l'Organisation de libération de la Palestine de Sabra et Chatila, dans le cadre de l'avancée israélienne dans la partie ouest de Beyrouth, majoritairement musulmane. Des rapports ultérieurs ont suggéré que les Israéliens avaient reçu des rapports sur les atrocités, mais qu'ils n'avaient pris aucune mesure pour les prévenir ou les arrêter.

Le massacre, qui s'est déroulé au plus fort de la guerre civile libanaise, et les raisons qui l'ont motivé mettent en lumière les dimensions régionales complexes qui ont entouré le conflit.

Comment nous l'avons écrit

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Arab News a publié des images saisissantes du massacre, qualifié de crime commis «avec la connivence des envahisseurs israéliens», provoquant une onde de choc et des réactions d’horreur à travers le monde.

Au Liban, le sectarisme a presque toujours été un facteur central des conflits qui ont façonné les équilibres politiques et redessiné les cartes du pouvoir. Bien avant la chute de l’Empire ottoman à la fin de la Première Guerre mondiale, dont le territoire libanais faisait alors partie, la région du Mont-Liban avait déjà été le théâtre de violences confessionnelles. Ces tensions ont débuté en 1840 et ont atteint leur paroxysme en 1860, avec des massacres d'une telle ampleur qu'ils ont entraîné une intervention militaire française. L’Empire ottoman avait alors réagi avec fermeté, cherchant à contenir l’avancée française, dans un contexte de pressions diplomatiques exercées par les grandes puissances européennes.

Le bouleversement politique majeur consécutif aux massacres de 1860 fut la création, en 1861, du district autonome du Mont-Liban, gouverné par un fonctionnaire ottoman chrétien dont la nomination devait être validée par les puissances européennes.

Mais après la défaite de l’Empire ottoman à l’issue de la Première Guerre mondiale, la Conférence de paix de Paris en 1920 annexa plusieurs régions au Mont-Liban – notamment Beyrouth – et plaça le nouvel État élargi du Liban sous mandat français.

Dans ce Grand Liban, la population chrétienne, auparavant majoritaire dans la région montagneuse du Mont-Liban, vit son poids démographique réduit par l’intégration de grandes villes et districts à majorité sunnite et chiite. Néanmoins, les chrétiens comptaient sur le soutien du mandat français pour préserver leur domination politique. Une illusion qui s’estompa rapidement, surtout après l’indépendance du Liban en 1943.

À cette date, selon de nombreuses estimations, les musulmans – sunnites, chiites et druzes – formaient déjà une majorité démographique. Parallèlement, l’émergence du nationalisme arabe, alimenté par la Nakba palestinienne de 1948, radicalisa la scène politique régionale. L’afflux de réfugiés palestiniens au Liban, comme en Jordanie, accentua les tensions et contribua à fragiliser davantage l’équilibre confessionnel libanais.

Le processus de radicalisation a été encore accéléré par la défaite arabe lors de la guerre israélo-arabe de juin 1967, qui a donné naissance, ainsi qu'une énorme crédibilité, au mouvement de résistance palestinien (les «fedayins»).

À l'automne 1970, à la suite de batailles entre les fedayins et l'armée jordanienne, les mouvements de résistance palestiniens ont transféré leur quartier général d'Amman à Beyrouth.

Les musulmans libanais, les nationalistes arabes et les dirigeants de gauche se rangent aux côtés des Palestiniens et font cause commune avec eux. De l'autre côté, l'élite politique chrétienne et les masses chrétiennes au Liban craignaient que cette alliance naissante ne constitue une menace mortelle pour leur position dominante dans le pays et, par conséquent, pour son régime, son identité et sa souveraineté.

J'ai vécu cette époque et je m'en souviens très bien. En 1973, l'armée libanaise, dirigée par les chrétiens, a tenté de contenir le pouvoir des fedayins dans les camps de réfugiés, mais le tollé soulevé par la gauche musulmane contre les actions de l'armée a ouvert la voie à une guerre civile imminente. Très vite, les milices chrétiennes ont été ouvertement armées et entraînées par des officiers de l'armée, tandis que les milices gauchistes et arabisantes ont également obtenu des armes et un entraînement par l'intermédiaire des Palestiniens et de certains régimes arabes.

La guerre a éclaté en 1975 et s'est poursuivie, en plusieurs phases, jusqu'en 1990. L'invasion israélienne de juin 1982 avait pour but d'achever l'infrastructure militaire et politique palestinienne et d'établir un régime «ami» à Beyrouth. Israël a tenté d'y parvenir en utilisant sa puissance militaire pour forcer les mouvements de résistance palestiniens à quitter le Liban, puis en confiant la présidence libanaise à Bachir Gemayel, chef des Forces libanaises, la milice chrétienne la plus puissante, en août 1982.

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Des familles pleurent les victimes du massacre dans le quartier de Sabra à Beyrouth et dans le camp de réfugiés adjacent de Chatila, où vivent des milliers de réfugiés palestiniens. (Images Getty) 

Cependant, Gemayel a été assassiné le 14 septembre 1982, avant même d'avoir pu prêter serment. Son assassinat, dans une explosion massive à Beyrouth, a choqué les chrétiens et rendu furieuses leurs milices, qui ont riposté en attaquant Sabra et Chatila deux jours plus tard.

À cette époque, le monde arabe est affaibli et profondément divisé à la suite de la reconnaissance d'Israël par l'Égypte dans les accords de Camp David de 1979, qui a entraîné la suspension de l'adhésion du pays à la Ligue arabe.

Les Israéliens ont donc pu participer au massacre de Sabra et Chatila sans craindre d'importantes représailles de la part des Arabes. En fait, c'est le tollé général suscité par ce massacre qui a conduit à la création d'une commission d'enquête présidée par Sean MacBride, assistant du secrétaire général des Nations unies et président de l'Assemblée générale des Nations unies à l'époque.

Le rapport de la commission, publié en 1983, concluait qu'Israël, en tant que puissance occupante, portait la responsabilité des violences et que le massacre constituait une forme de génocide.

La réaction de choc au massacre a été forte même en Israël, où les autorités ont créé leur propre commission Kahan pour enquêter sur l'incident. Son rapport, également publié en 1983, conclut que, bien que consciente de l'existence d'un massacre, l'armée israélienne n'a pris aucune mesure sérieuse pour y mettre un terme.

La commission a déclaré qu'Israël était indirectement responsable «d'avoir ignoré le danger d'effusion de sang et de vengeance» et que le ministre de la Défense, Ariel Sharon, en portait personnellement la responsabilité, ce qui l'a contraint à démissionner.

Eyad Abu Shakra est le rédacteur en chef d'Asharq Al-Awsat.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com