Face au délitement de la gauche française, qui pèse pour un quart des intentions de vote à l'élection présidentielle, l'ancienne ministre de la Justice Christiane Taubira "envisage" de se présenter, au risque de diviser davantage sa famille politique.
L'ancienne garde des Sceaux du président socialiste François Hollande de 2012 à 2016 donne rendez-vous à ses partisans "à la mi-janvier", dans une vidéo diffusée vendredi sur les réseaux sociaux.
"Je ne serai pas une candidate de plus", promet-elle néanmoins, assurant vouloir "mettre toutes (ses) forces dans les dernières chances de l'union" d'une gauche déjà divisée entre sept prétendants déclarés, en comptant les deux représentants de l'extrême gauche.
La candidate socialiste et maire de Paris Anne Hidalgo, qui a appelé la semaine dernière à une primaire de la gauche dans le cadre de la Primaire populaire, un mouvement citoyen, a proposé dans la foulée de la déclaration de Mme Taubira un débat télévisé pour "exprimer ce que la gauche, ses différentes composantes, porte aujourd'hui".
L'écologiste Yannick Jadot a réagi en affirmant qu'il y aurait cette fois, contrairement à 2017, une "candidature écologiste" et jugé la démarche choisie par Mme Taubira "pas totalement à la hauteur" des enjeux.
L'ancienne députée de Guyane, la région d'outre-mer où elle est née il y a 69 ans, s'est illustrée pour l'électorat de gauche par son combat pour la loi reconnaissant la traite et l'esclavage comme un crime contre l'humanité et surtout pour avoir porté en tant que ministre la loi ouvrant le mariage et l'adoption aux couples homosexuels, adoptée en 2013.
Selon une étude Odoxa pour l'hebdomadaire L'Obs publiée le 10 décembre, elle apparaît comme la figure de gauche jugée "la plus compétente", "convaincante" et "proche des préoccupations des Français", devant Anne Hidalgo et Yannick Jadot.
Les organisateurs de la Primaire populaire ont salué la position de Christiane Taubira, l'appelant à participer à cette primaire qui doit se dérouler fin janvier et pour laquelle la date limite de candidatures est justement fixée au 15 janvier.
Les deux candidats de gauche les mieux placés dans les sondages, le député La France insoumise (LFI, gauche radicale) Jean-Luc Mélenchon et Yannick Jadot ont déjà récusé cette primaire.
"Le plus probable est que nous assistions là à un épisode de plus dans le délitement de la gauche", assène Stéphane Rozès, politologue et président du Cap (Conseils, analyses et perspectives) au sujet d'une éventuelle candidature supplémentaire à gauche.
"Une bonne image ne se transforme pas en capital électoral dans un contexte où le débat est déplacé hors de tout ce qui fait sa popularité", souligne Stéphane Rozès.
"Sans compter ses divisions, la gauche fait face à un débat centré sur la sécurité et l'immigration, des thèmes où elle est absente", ajoute-t-il.
La candidature de Christiane Taubira, qui avait recueilli 2,32 % des voix à la présidentielle de 2002, est créditée de seulement 2% d'intentions de vote au premier tour, selon un sondage OpinionWay - Mieux voter publié mercredi.
Selon un sondage Présitrack d'OpinionWay pour Les Échos, Radio Classique et CNEWS publié vendredi, aucun candidat de gauche ne dépasse les 10% d'intentions de vote et la gauche, toutes tendances confondues, ne récolterait que 28% des voix, soit autant que les deux représentants de l'extrême droite combinés, Marine Le Pen et Éric Zemmour.