WASHINGTON : La Banque centrale américaine devrait annoncer mercredi le retrait accéléré de son soutien à l'économie, avec l'objectif de remonter les taux d'intérêt dans la foulée pour tenter d'endiguer la montée effrénée de l'inflation.
La hausse généralisée des prix à la consommation pénalise durement les ménages aux Etats-Unis. C'est aussi désormais un obstacle majeur sur la route du président Joe Biden.
Mercredi, les yeux seront rivés sur la Réserve fédérale (Fed) qui achève sa dernière réunion de politique monétaire de l'année et planche sur la question: comment enrayer la spirale inflationniste?
A l'issue de la réunion du comité monétaire (FOMC), la Fed publiera à 19H00 GMT un communiqué dévoilant ses décisions et incluant ses nouvelles prévisions économiques. Puis, son président Jerome Powell tiendra une conférence de presse, la première depuis qu'il a été reconduit dans ses fonctions par Joe Biden.
L'institution, qui avait porté secours à l'économie en un temps record au printemps 2020 quand la pandémie s'est propagée aux Etats-Unis, annoncera l'accélération de la réduction d'achat d'actifs ("tapering" en anglais).
Lancé en novembre, la fin de ce programme devait initialement être achevée en juin prochain. Mais M. Powell a d'ores et déjà indiqué qu'il fallait avancer la fin du programme de "quelques mois" pour entamer une hausse des taux.
Car l'inflation a atteint 6,8% en novembre en glissement annuel. Du jamais vu depuis juin 1982. C'est aussi très supérieur à la cible de la Fed -- de l'ordre de 2% -- considérée comme saine pour l'économie.
La tâche s'avère délicate pour l'institution qui poursuit un double mandat: la stabilité des prix et le plein emploi.
Or, d'une part, le marché du travail n'est pas encore complètement remis de la crise provoquée par la pandémie et d'autre part, une remontée brutale des taux d'intérêt pourrait compromettre la croissance déjà ralentie par les variants du Covid-19.
Pas immédiat
De plus, si la hausse du taux directeur est sans doute l'outil le plus puissant pour faire reculer l'inflation, car elle ralentirait la demande en augmentant les coûts d'emprunt, son effet n'est pas immédiat.
Généralement, l'impact est tangible 6 à 12 mois plus tard.
"La raison principale est que le taux d'intérêt directeur met un certain temps à se refléter dans les taux d'emprunt à court terme et à moyen terme", explique Gregory Daco, chef économiste chez Oxford Economics. Il faut donc patienter avant que la consommation et les investissements ne ralentissent et tempèrent, in fine, l'inflation.
Et la question est de savoir dans quelle proportion les taux d'intérêt, actuellement compris dans la fourchette de 0% à 0,25%, seront relevés.
En septembre, lors de la publication de ses dernières prévisions, la banque centrale prévoyait une seule hausse des taux directeurs en 2022.
Elle avait alors abaissé sa prévision de croissance 2021 à 5,9%, contre 7% en juin tandis que la projection d'inflation avait, elle, été relevée à 4,2% contre 3,4%.
Certains économistes misent à présent sur trois relèvements en 2022 et trois supplémentaires en 2023.
Trop d'argent dans l'économie ?
Outre les mesures annoncées, les commentaires de Jerome Powell, seront décortiqués dans leurs moindres détails.
Celui-ci a souligné récemment devant le Congrès que l'institution devait faire preuve d'adaptabilité compte tenu de la situation économique délicate. "Vous constatez que nous ajustons notre politique et vous verrez que nous continuerons à le faire", a-t-il assuré, mettant aussi en avant l'incertitude liée à la pandémie.
La propagation rapide du variant Omicron, qui a poussé certains pays à réimposer des restrictions, complique ainsi encore sa tâche.
Sans compter la pression politique ambiante. Joe Biden, qui n'a plus la cote dans l'opinion, est accusé par l'opposition républicaine et jusque dans son camp démocrate, d'alimenter l'inflation en injectant trop de liquidités dans l'économie.
En mars dernier, il avait promulgué un plan d'urgence de 1 900 milliards de dollars après plus de 3 600 milliards injectés en 2020.
Mi-novembre, il a signé un plan d'infrastructures de 1 200 milliards. Il pousse désormais pour un plan de réformes sociales et environnementales de quelque 1 800 milliards.
C'est trop, disent les républicains. Ces derniers plans s'étalent sur une décennie, se défend l'administration Biden, qui les qualifie même d'anti-inflationnistes.