TUNIS : Rappel des développements en Tunisie depuis la décision en juillet du président Kais Saied de s'octroyer les pleins pouvoirs jusqu'à l'annonce lundi de la prolongation pour un an de la suspension du Parlement.
Pleins pouvoirs
Le 25 juillet, M. Saied annonce la suspension des travaux du Parlement pour 30 jours et le limogeage du Premier ministre Hichem Mechichi, affirmant vouloir "sauver" le pays, rongé par des mois de blocages politiques et un nouveau pic meurtrier de Covid-19.
Le président, également chef de l'armée, s'octroie le pouvoir exécutif, en annonçant vouloir désigner un nouveau Premier ministre.
La décision, annoncée après une réunion avec des responsables de la sécurité, fait suite à des manifestations organisées le jour même contre le gouvernement, principalement contre sa gestion de la pandémie.
Les milliers de protestataires, exaspérés par l'épreuve de force entre le président du Parlement Rached Ghannouchi, également chef de file du parti d'inspiration islamiste Ennahdha, et M. Saied, ont réclamé "la dissolution du Parlement".
Des explosions de joie ont lieu à Tunis après l'annonce du président.
«Coup d'Etat»
Ennahdha, le parti qui disposait du plus grand nombre de sièges dans le Parlement gelé, fustige "un coup d'Etat".
Le 26, plusieurs centaines de partisans de M. Saied et d'Ennahdha échangent des jets de bouteilles et de pierres devant le Parlement.
L'Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT), influente centrale syndicale, co-lauréate du Prix Nobel de la Paix en 2015, estime que les décisions de Kais Saied sont "conformes" à la Constitution, tout en appelant à la poursuite du processus démocratique.
Campagne anti-corruption
Le 27, Ennahdha se dit prêt à "la tenue d'élections législatives et présidentielle anticipées simultanées".
Le 28, M. Saied lance une offensive anti-corruption, réclamant des comptes à 460 hommes d'affaires accusés de détournement de fonds sous le régime de Zine el Abidine Ben Ali (1987-2011) renversé par la révolution de 2011.
Gel du Parlement prolongé
Le 24 août, le président prolonge "jusqu'à nouvel ordre" le gel du Parlement.
"Les institutions politiques existantes et leur manière de fonctionner représentent un danger persistant pour l'Etat", déclare-t-il.
«Pratiques arbitraires»
Le 26 août, Amnesty International affirme avoir recensé depuis le 25 juillet au moins 50 cas d'interdictions de voyage "illégales et arbitraires" ayant notamment ciblé des juges, fonctionnaires et hommes d'affaires.
Le 3 septembre, l'Organisation mondiale contre la torture appelle M. Saied à mettre fin à une série de "pratiques arbitraires", en particulier des "restrictions de liberté".
Pouvoirs présidentiels renforcés
Le 22, Kais Saied promulgue des dispositions exceptionnelles renforçant ses pouvoirs au détriment du gouvernement et du Parlement, auquel il va de facto se substituer en légiférant par décrets.
Rached Ghannouchi appelle à la "lutte pacifique" contre "le pouvoir absolu d'un seul homme". L'UGTT met en garde "contre le danger d'une accumulation de tous les pouvoirs entre les mains du chef de l'Etat".
Une vingtaine d'organisations de défense des droits humains, tunisiennes et internationales, fustigent "l'accaparement du pouvoir" par le président.
Najla Bouden, Première ministre
Le 10 octobre, au moins 6 000 personnes manifestent à Tunis "contre le coup d'Etat" de Kais Saied, une semaine après une démonstration de force en faveur du président avec plus de 10 000 de ses partisans rassemblés dans le pays, selon des sources policières.
Le 11, la Tunisie se dote d'un nouveau gouvernement dirigé pour la première fois par une femme, l'universitaire Najla Bouden. Mais celle-ci ainsi que son équipe jouiront de prérogatives considérablement réduites après le coup de force présidentiel.
Élections dans un an
Le 6 décembre, Ennahdha dénonce une campagne de "dénigrement" orchestrée par des responsables politiques pour l'exclure de la scène politique.
Le 10, les ambassadeurs des pays membres du G7 et de l'UE appellent à un retour "rapide" aux institutions démocratiques.
Le 13, le président Saied prolonge la suspension du Parlement jusqu'à la tenue de nouvelles législatives en décembre 2022. Il annonce également un référendum pour le 25 juillet 2022 sur des amendements constitutionnels et électoraux.