STRASBOURG: Victimes, familles et élus ont commémoré samedi à Strasbourg, en présence du Premier ministre Jean Castex, l'attentat du marché de Noël qui avait fait 5 morts le 11 décembre 2018 et de nombreux blessés.
"Trois années ont passé, il nous faut beaucoup de force et de courage après l'attentat pour dépasser le traumatisme", a déclaré Martine Winterberger, blessée dans l'attentat, lisant un texte écrit collectivement par les victimes et leurs familles, en introduction de cette cérémonie fermée au public.
"A l'opposé de la haine, nous avons choisi la vie, la paix, l'espoir, la fraternité et le partage. Il nous reste à trouver le chemin de la résilience afin de pouvoir un jour refermer" le traumatisme, a-t-elle ajouté.
Le Premier ministre Jean Castex et la maire écologiste de Strasbourg, Jeanne Barseghian, ont ensuite déposé des roses blanches autour de la stèle commémorative érigée après l'attentat.
Ils ont été imités par la ministre alsacienne Brigitte Klinkert et la préfète du Bas-Rhin Josiane Chevalier, ainsi que par les victimes blessées lors de l'attentat, présentes en nombre, et les membres de leurs familles.
La cérémonie s'est conclue par une minute de silence, sans prise de parole des élus ni du Premier ministre. Ce dernier a ensuite rapidement quitté les lieux de la cérémonie pour aller inaugurer la nouvelle autoroute de contournement de Strasbourg.
Jean Castex inaugure l'autoroute de contournement de Strasbourg
Le Premier ministre Jean Castex a inauguré samedi l'A355, autoroute de contournement ouest de Strasbourg, construite par Arcos, filiale de Vinci, épilogue d'un projet débattu depuis plus de 40 ans et qui a fait l'objet de nombreuses contestations.
Cette inauguration "marque l'achèvement d'un projet ancien, dont les origines remontent à 1973", soutenu "sans faille, tout au long de ces années" par l'Etat, a déclaré le Premier ministre devant un parterre d'élus et de représentants du groupe Vinci, dont Xavier Huillard, PDG, et Pierre Coppey, président de Vinci Autoroutes, mais en l'absence des dirigeants écologistes de la métropole.
Ce tronçon d'autoroute de 24 kilomètres représente un investissement de 553 millions d'euros et fait l'objet d'une concession de 54 ans signée entre l'Etat et Vinci. Les organisations écologistes avaient multiplié les recours pour empêcher sa réalisation et une ZAD avait été évacuée en septembre 2018.
Présenté par Pierre Coppey comme le "plus grand projet autoroutier de ces dernières années en France", l'ouvrage doit permettre de récupérer une partie du transit routier traversant l'Alsace du Nord au Sud, et de soulager l'autoroute A35, qui dessert la capitale alsacienne.
"Cette route est congestionnée, et de ce fait parfois dangereuse", a complété M.Castex. "Elle accueille plus de 160.000 véhicules légers et 19.000 poids lourds par jour, alors qu'elle était conçue pour en accueillir au maximum 80.000".
Selon le Premier ministre, le contournement doit permettre de déporter "17.000 voitures et 7.000 poids lourds" quotidiennement.
Pierre Coppey a lui salué la construction de cette "autoroute bas-carbone", de "haute protection environnementale", rendue possible par un "dispositif inédit de protection de la biodiversité et de compensation" de l'impact écologique.
"Les bénéfices écologiques et environnementaux de la mise en service vont permettre une amélioration très nette de la qualité de l'air sur l'ensemble de l'agglomération strasbourgeoise", a complété Jean Castex. "Je revendique et j'assume pleinement cette réalisation."
Dans le même temps, un rassemblement d'opposants à cette autoroute s'est tenu près d'une autre portion, rassemblant "une centaine" de personnes selon les organisateurs, dont plusieurs maires des communes alentours.
La maire écologiste de Strasbourg, Jeanne Barseghian, a boycotté, comme d'autres élus métropolitains, la cérémonie d'inauguration, qualifiant le projet d'"inutile" et de "catastrophe écologique", dans des déclarations au quotidien Dernières Nouvelles d'Alsace.
En juillet, le tribunal administratif de Strasbourg, saisi par l'association Alsace Nature, avait reconnu des "insuffisances" dans le dossier de demande d'autorisation du chantier, notamment sur les effets de l'A355 "sur la santé humaine", la "qualité de l'air" ou l'impact "sur les sols et sous-sols".
Le juge avait imposé la suspension de la mise en service, mais l'Etat avait formulé un recours, et la Cour d'appel avait annulé cette suspension, sans se prononcer sur les insuffisances.
L'autoroute A355 entrera en service le 17 décembre.
"Il était important qu'il y ait cette cérémonie, en présence du Premier ministre, car l'attentat de Strasbourg n'a pas fait l'objet d'un hommage national, contrairement à ceux de Paris ou de Nice", a déclaré Mostafa Salhane, président de l'Association Victimes Attentats (AVA), qui avait été pris en otage par le terroriste.
Au total, 78 personnes sont considérées comme victimes de l'attentat de Strasbourg, incluant les proches des cinq personnes décédées, les victimes blessées et celles choquées.
Le 11 décembre 2018, peu avant 20H00, Chérif Chekatt, délinquant multirécidiviste de 29 ans et fiché S pour radicalisation islamiste, avait pénétré, armé d'un vieux revolver et d'un couteau, dans le centre historique de Strasbourg, où se tenait le traditionnel marché de Noël.
Il avait tué au hasard cinq hommes en déambulant dans les rues et blessé dix autres personnes.
Parvenant à s'échapper en taxi, après avoir été blessé par des militaires, il avait été tué par la police 48 heures plus tard dans un quartier du sud de Strasbourg où il avait grandi. Une vidéo d'allégeance au groupe Etat islamique avait ensuite été retrouvée sur une clé USB qui lui appartenait.
Sur le plan pénal, cinq personnes sont mises en examen, soupçonnées d'être liées à la fourniture de différentes armes en possession du tueur. Un procès pourrait avoir lieu en 2023, selon l'AVA.