Face aux promesses de neutralité carbone, l'inquiétude des scientifiques

De jeunes militants pour le climat brandissent des lettres lumineuses épelant « End Climate Betrayal » à Glasgow, en Écosse, le 2 novembre 2021, lors de la Conférence des Nations Unies sur le changement climatique COP26 Les dirigeants mondiaux se réunissent au sommet sur le climat COP26. (AFP)
De jeunes militants pour le climat brandissent des lettres lumineuses épelant « End Climate Betrayal » à Glasgow, en Écosse, le 2 novembre 2021, lors de la Conférence des Nations Unies sur le changement climatique COP26 Les dirigeants mondiaux se réunissent au sommet sur le climat COP26. (AFP)
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Publié le Jeudi 09 décembre 2021

Face aux promesses de neutralité carbone, l'inquiétude des scientifiques

  • Confrontés aux canicules de plus en plus meurtrières, à la montée des océans ou aux récoltes en berne, pays, villes et entreprises affichent des objectifs de neutralité carbone
  • Les scientifiques jugent que ces promesses de compensation des émissions de gaz à effet de serre peu étayées et estiment indispensable avant tout de réduire ces émissions.

PARIS : Confrontés aux canicules de plus en plus meurtrières, à la montée des océans ou aux récoltes en berne, pays, villes et entreprises affichent des objectifs de neutralité carbone mais les  scientifiques jugent ces promesses de compensation des émissions de gaz à effet de serre peu étayées et estiment indispensable avant tout de réduire ces émissions.

Le concept de cette neutralité est simple: s'assurer que d'ici une date fixée (le plus souvent 2050), une entité absorbe autant de carbone qu'elle n'en émet, parvenant ainsi à zéro émission nette.

Mais les scientifiques et les ONG s'inquiètent de plus en plus du déferlement de promesses vagues de neutralité carbone qui privilégient les compensations et d'hypothétiques avancées technologiques pour absorber le carbone, à la place de la réduction des émissions de CO2.

Les projets de neutralité carbone "ne sont pas adaptés, aucun d'entre eux", estime Myles Allen, directeur du projet "Oxford Net Zero" à l'université du même nom.

"Vous ne pouvez pas compenser pendant très longtemps l'utilisation continue des énergies fossiles en plantant des arbres. Personne n'admet cela dans ses plans de neutralité carbone, même les pays les plus ambitieux", explique-t-il à l'AFP.

Lors de la conférence climat COP26 à Glasgow en novembre, l'Inde, un des principaux émetteurs, s'est engagée pour la première fois sur la voie de cette neutralité, rejoignant ainsi les Etats-Unis, la Chine ou l'UE.

Selon le Net Zero Tracker, outil créé par plusieurs groupes de recherche, 90% des émissions mondiales sont désormais couvertes par des objectifs de neutralité carbone, mais la majorité d'entre eux sont flous.

Par exemple, 91% des plans des Etats et 48% de ceux des entreprises publiques ne mentionnent même pas la question de la compensation des émissions.

Quelles émissions?

Et moins d'un tiers des objectifs des entreprises couvrent les émissions dites de "scope 3" qui incluent notamment celles issues de l'utilisation du produit (par exemple, l'essence utilisée dans les voitures pour une industrie pétrolière).

"D'un point de vue climatique, c'est important, les entreprises entraînent des émissions non seulement dans leurs opérations mais aussi par l'intermédiaire de ce qu'elles achètent et vendent", insiste Alberto Carillo Pineda, co-fondateur de l'initiative Science Based Targets qui conseille les entreprises en la matière. 

Ne pas inclure le scope 3 "n'a aucun sens": "une entreprise n'existerait pas sans ses produits, donc ses produits doivent être pris en compte dans les émissions", dit-il à l'AFP. 

Selon la dernière évaluation de l'ONU-Climat qui prend en compte l'ensemble des engagements des Etats, les émissions devraient augmenter de 13,7% d'ici 2030, alors qu'elles devraient être réduites de moitié pour limiter le réchauffement à +1,5°C par rapport à l'ère pré-industrielle.

Pour Stuart Parkinson, de l'organisme Scientists for Global Responsibility (SGR), les gouvernements utilisent désormais les promesses de neutralité carbone pour reporter l'action nécessaire: "de notre point de vue, c'est complètement irresponsable".

"Cela revient juste à repousser le problème et à s'en remettre à des progrès technologiques théoriques, alors que nous savons que nous pouvons changer de comportements maintenant pour réduire les émissions". 

« Stupide  »

De nombreux pays et entreprises comptent déployer une reforestation massive pour atteindre la neutralité carbone. C'est un problème au moins pour deux raisons, selon les experts. 

D'abord, le sol et les plantes absorbent déjà d'énormes quantités de CO2 et ces puits de carbone naturels donnent des signes de saturation, risquant de se transformer en sources d'émissions.

"Compter sur la biosphère pour stocker du carbone est vraiment stupide alors qu'on pourrait bien avoir besoin de toutes les solutions basées sur la nature rien que pour stabiliser le volume de carbone dans la biosphère", commente Myles Allen. 

Mais l'idée est également risquée en terme de droits de l'Homme et de justice dans un monde qui a besoin de nourrir la population.

"La compétition pour les terres, avec la plantation d'arbres et la production de bioénergie va avoir un impact sur les communautés à bas revenus, celles qui sont les moins responsables du problème", souligne Teresa Anderson, de l'ONG ActionAid International.

Alors que les experts climat de l'ONU (Giec) estiment que le seuil de +1,5°C pourrait être atteint autour de 2030, le temps presse.

Malgré tout, sur des centaines d'entreprises ayant pris des engagements de neutralité carbone, "très peu" ont des plans à long terme pour décarboner leur activité, regrette Alberto Carillo Pineda.

"Nous nous devons d'être très sceptiques face à tout engagement qui n'a pas de jalons clairs en termes de réduction des émissions pour 2030", souligne-t-il. "En gros, un objectif de neutralité carbone sans cette étape en 2030 n'est pas crédible".


Armes à Israël: les républicains tentent de forcer la main à Biden

Des Palestiniens déplacés marchent autour d'une flaque d'eau devant des bâtiments et des tentes détruits à Khan Yunis, dans le sud de la bande de Gaza, le 16 mai 2024, au milieu du conflit en cours entre Israël et le groupe militant Hamas. (Photo par AFP)
Des Palestiniens déplacés marchent autour d'une flaque d'eau devant des bâtiments et des tentes détruits à Khan Yunis, dans le sud de la bande de Gaza, le 16 mai 2024, au milieu du conflit en cours entre Israël et le groupe militant Hamas. (Photo par AFP)
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  • Pour les républicains, Joe Biden n'a pas le droit d'interférer dans la manière dont Israël mène sa campagne militaire, qui a provoqué un désastre humanitaire à Gaza
  • Mais 16 démocrates se sont joints aux républicains pour adopter la proposition de loi, défiant le chef de l'Etat

WASHINGTON: La Chambre américaine des représentants, dominée par les républicains, a voté jeudi une mesure largement symbolique visant à forcer le président démocrate Joe Biden à mettre fin à sa suspension d'une livraison de bombes à Israël.

Cette suspension de la livraison d'une cargaison d'armes, composée de bombes de 2 000 livres (907 kg) et de 500 livres (226 kg), a été décidée au moment où Washington, premier soutien militaire d'Israël, s'oppose à une offensive d'ampleur des troupes israéliennes à Rafah.

La mesure votée jeudi n'a aucune chance de devenir loi. En théorie, elle empêcherait M. Biden de geler toute aide militaire à Israël approuvée par le Congrès.

"Le président et son administration doivent immédiatement faire marche arrière et se tenir aux côtés d'Israël", a déclaré Mike Johnson, chef républicain de la Chambre des représentants, dans un communiqué.


Biden s'efforce de remobiliser l'électorat afro-américain

Le président américain Joe Biden s'exprime lors du service commémoratif des agents de la paix nationaux devant le Capitole américain à Washington, DC, le 15 mai 2024. (Photo, AFP)
Le président américain Joe Biden s'exprime lors du service commémoratif des agents de la paix nationaux devant le Capitole américain à Washington, DC, le 15 mai 2024. (Photo, AFP)
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  • Vendredi, Joe Biden ira prononcer un discours au Musée national de l'histoire et de la culture afro-américaine à Washington
  • La mobilisation des Afro-Américains avait été décisive dans la victoire de Joe Biden face à Donald Trump en 2020

WASHINGTON: A coup d'événements symboliques et d'interviews, Joe Biden, qui selon certains sondages serait en perte de vitesse auprès des Afro-Américains, s'efforce cette semaine de remobiliser cet électorat décisif.

Le président américain multiplie ainsi les hommages aux grandes luttes menées pour les droits civiques aux Etats-Unis.

Jeudi, le démocrate de 81 ans, qui va affronter son prédécesseur républicain Donald Trump pour un second mandat en novembre, a reçu les familles des plaignants d'un combat judiciaire emblématique contre la ségrégation scolaire, ayant débouché sur la décision "Brown vs Board of Education" de la Cour suprême.

Dans cet arrêt de 1954, la Cour a jugé que la séparation des élèves blancs et des élèves noirs dans les écoles violait la Constitution.

Vendredi, Joe Biden ira prononcer un discours au Musée national de l'histoire et de la culture afro-américaine à Washington.

Puis il rencontrera les représentants des "Divine Nine", des "fraternités" et "sororités" (associations typiques des universités américaines) fondées par des étudiants et des étudiantes noires.

Dimanche enfin, il doit s'exprimer lors de la remise des diplômes de l'université historiquement noire de Morehouse à Atlanta (sud-est), celle où étudia Martin Luther King, le grand meneur de la lutte pour les droits civiques dans les années 1960.

La Maison Blanche a d'ailleurs annoncé jeudi avoir investi au total 16 milliards de dollars dans la centaine d'universités historiquement noires du pays depuis l'élection de Joe Biden.

"Le président et moi-même restons déterminés à utiliser tous les moyens disponibles pour soutenir les universités historiquement noires", a commenté dans un communiqué la vice-présidente Kamala Harris, elle-même ancienne étudiante de l'un de ces établissements, la Howard University.

Gaza 

Reste à voir comment le démocrate, ferme soutien d'Israël, sera reçu à Morehouse, alors que certaines cérémonies de ce genre ont été perturbées récemment par des manifestants propalestiniens.

Concernant la guerre à Gaza, "il y a une inquiétude légitime", a dit le président américain, interrogé par une radio de la communauté afro-américaine à Atlanta (Géorgie, sud-est) à propos de ces mobilisations, en ajoutant: "Les gens ont le droit de manifester, de le faire pacifiquement."

Selon plusieurs sondages récents, Joe Biden, tout en restant nettement majoritaire auprès de cet électorat, perdrait du terrain auprès des électeurs noirs, en particulier les plus jeunes, dans certains Etats décisifs.

Parmi eux la Géorgie, ou encore le Wisconsin.

Ce n'est donc pas un hasard si Joe Biden a aussi accordé un entretien, également diffusé jeudi, à une radio afro-américaine de Milwaukee, dans cet Etat de la région des Grands Lacs.

Il y vante ses actions sociales et économiques en faveur des Afro-Américains et critique son opposant républicain.

"Il n'a littéralement rien fait (pour la communauté afro-américaine" et il veut empêcher son accès au vote", a dit Joe Biden.

Sur les ondes de la radio de Géorgie, il a déclaré: "Rappelez-vous qui est Trump. Il a accusé à tort les +Cinq de Central Park+", de jeunes Afro-Américains victimes d'une erreur judiciaire retentissante, "il a donné naissance aux théories du complot" autour de la nationalité de l'ancien président Barack Obama.

La mobilisation des Afro-Américains avait été décisive dans la victoire de Joe Biden face à Donald Trump en 2020. Il avait alors remporté 92% de leurs voix, contre 8% à son adversaire républicain, selon l'institut Pew Research.


Le micro d’une étudiante coupé alors qu’elle demande à Columbia de se mobiliser pour Gaza

Saham David Ahmed Ali s’exprime lors de la cérémonie de remise des diplômes de la Mailman School of Public Health de l’université Columbia. Son micro s’est coupé à deux reprises pendant son discours. (Capture d’écran)
Saham David Ahmed Ali s’exprime lors de la cérémonie de remise des diplômes de la Mailman School of Public Health de l’université Columbia. Son micro s’est coupé à deux reprises pendant son discours. (Capture d’écran)
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  • Le microphone s’est coupé à deux reprises pendant son discours, ce qui a incité les étudiants à huer et à scander «laissez-la parler» pendant que Mme Ali marquait une courte pause
  • On ne sait pas si le problème est dû à un défaut technique ou si le microphone a été délibérément coupé

LONDRES: Un microphone a brièvement été coupé cette semaine lors d’un discours prononcé au cours de la cérémonie de remise des diplômes de l’université Columbia aux États-Unis. L’oratrice avait critiqué la position de l’université à l’égard de Gaza.

Mardi, l’étudiante Saham David Ahmed Ali a prononcé un discours devant les diplômés de la Mailman School of Public Health. Elle a appelé à une action contre Israël, critiquant le «silence sur le campus de l’université Columbia».

Le microphone s’est coupé à deux reprises pendant son discours, ce qui a incité les étudiants à huer et à scander «laissez-la parler» pendant que Mme Ali marquait une courte pause. Elle a ensuite pu continuer. On ne sait pas si le problème est dû à un défaut technique ou si le microphone a été délibérément coupé.

Saham David Ahmed Ali a déclaré que l’université devait révéler ses relations avec des entreprises «tirant profit du génocide palestinien» et qu’elle devait immédiatement s’en désengager.

Elle a également demandé à Columbia d’appeler à un cessez-le-feu immédiat à Gaza, où les civils palestiniens sont actuellement confrontés à la famine, selon l’ONU, alors qu’Israël poursuit sa campagne militaire qui a fait plus de trente-cinq mille morts, des milliers d’autres blessés et des centaines de milliers de déplacés à la suite de l’attaque menée par le Hamas contre Israël le 7 octobre.

L’université Columbia a été témoin d’importantes manifestations sur son campus depuis le 17 avril après que la présidente de l’université, Minouche Chafik, a témoigné devant le Congrès américain au sujet d’incidents présumés d’antisémitisme contre des étudiants juifs sur son campus.

Les manifestants ont ensuite occupé certaines parties du campus, notamment le Hamilton Hall de l’université. La police de New York a arrêté des centaines de personnes à la suite de ces manifestations, qui ont également déclenché des mouvements similaires dans d’autres grandes universités américaines, ainsi que des contre-manifestations d’étudiants brandissant des drapeaux israéliens et américains.

Columbia a également pris la mesure inhabituelle d’annuler sa cérémonie d’ouverture cette année à la suite des manifestations, organisant uniquement des cérémonies de remise des diplômes propres à l’université.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com