PARIS: Depuis plus de dix ans, ses sorties controversées et provocatrices sur l'islam, les immigrés ou l'histoire de France ont valu une quinzaine de procédures judiciaires au polémiste d'extrême droite Eric Zemmour, qui comparaît mercredi pour des propos sur les mineurs isolés.
Poursuivi pour injure raciale, provocation à la haine ou contestation de crime contre l'humanité, le probable candidat à l'élection présidentielle de 2022 en est sorti plus souvent relaxé que condamné. Voici les principales décisions:
Délinquants « noirs et arabes »
C'est en 2011 qu’Éric Zemmour, alors éditorialiste au Figaro et sur RTL, fait sa première apparition remarquée dans un prétoire.
Un an plus tôt, en mars 2010, il a suscité un tollé en déclarant dans l'émission de Thierry Ardisson « Salut les terriens », que « la plupart des trafiquants sont noirs et arabes, c'est comme ça, c'est un fait ».
Des associations antiracistes portent plainte, le débat fait rage.
Au nom de la « défense de la liberté d'opinion » ou de la lutte contre le « politiquement correct », le journaliste est soutenu par des députés de droite, un magistrat célèbre, Philippe Bilger, et l'ancien ministre socialiste Jean-Pierre Chevènement.
En février 2011, le tribunal correctionnel de Paris le reconnaît coupable de provocation à la haine raciale, lui inflige 1 000 euros d'amende mais le relaxe des poursuites pour diffamation.
Éric Zemmour ne fait pas appel, sa condamnation est définitive.
« Envahisseurs »
En juin 2016, la cour d'appel de Paris relaxe l'éditorialiste pour provocation à la haine et diffamation raciales.
En cause, une chronique de 2014 sur RTL où il dénonce « les bandes de Tchétchènes, de Roms, de Kosovars, de Maghrébins, d'Africains qui dévalisent, violentent ou dépouillent. »
Le tribunal l'avait déjà relaxé en septembre 2015 au motif que les communautés visées ne l'étaient pas dans leur ensemble.
L'interview italienne
En octobre 2014, il affirme au quotidien italien Corriere della Sera que les musulmans « vivent entre eux, dans les banlieues. Les Français ont été obligés de s'en aller ».
Un an après, le tribunal correctionnel le condamne à 3.000 euros d'amende, peine confirmée en appel en novembre 2016.
Mais la Cour de cassation ordonne pour un motif de forme un troisième procès devant la cour d'appel qui, en novembre 2018, le relaxe car « il n'est pas prouvé qu’Éric Zemmour (...) savait que ce journal était publié en France ».
Cette sortie lui coûte toutefois sa place dans l'émission « Ça se dispute » sur la chaîne iTELE (aujourd'hui CNews).
« Invasion »
La France vit « depuis trente ans une invasion » de la part de l'islam, elle est le théâtre d'un « djihad » qui vise à l'« islamiser », professe-t-il en 2016 dans « C à vous » sur France 5.
Le tribunal lui inflige en juin 2017 5 000 euros d'amende pour des propos « stigmatisant (...) en des termes particulièrement violents et péremptoires » les musulmans.
La cour d'appel confirme en mai 2018 sa culpabilité pour provocation à la haine religieuse mais réduit son amende à 3 000 euros.
Son pourvoi en cassation est rejeté, la peine est définitive. Il saisit toutefois en 2019 la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH), qui n'a pas encore examiné sa requête.
Pétain et les Juifs
En décembre 2020, Eric Zemmour comparaît pour « contestation de crime contre l'humanité ».
Face au philosophe Bernard-Henri Lévy, il a affirmé en 2019 sur CNews que le maréchal Pétain avait « sauvé » les Juifs français. A la barre, il récidive: « je tiens à répéter ce que j'ai dit: les chiffres parlent d'eux-mêmes: en France, 40% des Juifs étrangers qui ont été exterminés et 90% des Juifs français qui ont survécu ».
En février 2021, le tribunal le relaxe car ses propos ont été prononcés « à brûle-pourpoint lors d'un débat sur la guerre en Syrie ».
Les parties civiles ont fait appel.
Les « colonisateurs »
Le 8 septembre 2021, la cour d'appel de Paris relaxe Eric Zemmour pour avoir fustigé les immigrés « colonisateurs » lors d'une réunion organisée en 2019 par des proches de l'ex-députée du Front national (devenu RN) Marion Maréchal.
En première instance, il est condamné à 10 000 euros d'amende pour « exhortation, tantôt implicite tantôt explicite, à la discrimination et à la haine à l'égard de la communauté musulmane et à sa religion ».
Les juges d'appel estiment à l'inverse qu'« aucun des propos poursuivis ne visent l'ensemble des Africains, des immigrés ou des musulmans mais uniquement des fractions de ces groupes ».
Le parquet général et les parties civiles s'étaient pourvus en cassation.