PARIS : Y aura-t-il plus de pratiquants sur les terrains de sport d'ici aux JO de Paris-2024? L'objectif ambitieux de "faire de la France une nation sportive" est un sacré défi dans un pays où la culture de l'esprit prime souvent sur celle du corps.
En 2017, après l'obtention des JO par la France, l'objectif de trois millions de pratiquants sportifs supplémentaires est affiché. Las, la pandémie a mis le sport au placard pendant plusieurs mois. Et depuis la rentrée, clubs ou salles de sport, essaient de rattraper leurs anciens adhérents par le short.
Lundi, un comité interministériel sur les JO se tiendra en Seine-Saint-Denis sous la houlette du Premier ministre Jean Castex pour un point d'étape, en particulier sur "la qualité de l'héritage post-olympique".
Outre l'héritage en dur, quelques piscines en Seine-Saint-Denis mais aussi des batîments transformés en logements ou des améliorations urbaines, il y a "l'héritage immatériel".
"Dans notre pays, on a une vraie marge de progression pour mieux utiliser ce que le sport peut apporter en matière de santé, d'éducation, de lien social, on a ce vrai défi de réussir à trouver des voies de passage pour mettre plus de sport pour tous les Français dans toutes les générations", expliquait récemment Tony Estanguet, le boss du comité d'organisation Paris-2024, devant un parterre d'étudiants de Sciences Po.
L'idée est profiter de ces premiers JO d'été organisés en France depuis 1924 pour "faire de la France une nation sportive", comme l'a martelé il y a plusieurs mois le président de la République Emmanuel Macron.
Combattre la sédentarité
On décompte environ 34 millions de pratiquants, en additionnant à la fois les clubs (18 milllions) et les joggeurs, nageurs ou escaladeurs du dimanche. Selon l'Injep (Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire), entre 2000 et 2018, 3 millions de licences supplémentaires ont été engrangées, signe d'une démocratisation du sport. Mais des inégalités persistent dans les pratiques, chez les jeunes filles, les personnes précaires ou ayant un problème de santé.
Côté école, le ministère de l'Education et des Sports et le comité d'organisation des JO-2024 ont lancé le programme "30 minutes d'activité physique par jour" dans les écoles primaires, expérimentation qui a vocation à être généralisée et bénéficiait à la rentrée à 3 000 écoles primaires, expliquait le ministre Jean-Michel Blanquer en septembre.
L'initiative hérisse certains profs d'EPS, comme au syndicat Snep-FSU qui parle de "gigotage" et réclame de passer à quatre heures d'EPS par semaine de l'élementaire au second degré.
Argument massue en faveur de plus de sport: la sédentarité qui touche adultes et ados et ses ravages sur la santé.
«Le sport sous-exploité»
Auteur d'un rapport publié cet été sur la sédentarité, avec la macroniste Marie Tamarelle-Verhaeghe, le député Génération.s Régis Juanico, réclame que l'activité physique et sportive soit en 2022 "grande cause nationale".
Signe pour lui que le sport n'est pas toujours considéré, il estime que pendant la pandémie, les acteurs du sport ont dû "se battre à chaque étape, cela a été un calvaire".
"Quand on a eu les JO (en 2017), les pouvoirs publics auraient dû décider d'un plan d'activité physique tout au long de la vie", regrette-t-il. Il y a des décisions positives, comme le plan de 5 000 équipements sportifs de proximité récemment annoncé, mais "au fil de l'eau" selon lui, car 2024 se rapproche.
Une tribune récemment publiée dans Le Monde et signée de la chercheuse en géopolitique du sport Carole Gomez et de David Bloug, ex-directeur général de l'ONG Play International, rappelle qu'une étude de l'OMS a classé en 2019 la France au 119e rang sur 146 en matière d’activité physique des jeunes.
Pour eux, "le sport est sous-exploité en tant que solution à nos problématiques de société, notamment en matière d'éducation et de vivre-ensemble". "Faire de la France une nation sportive ne se décrète pas. Cela s'explique, d'abord, puis se prouve et se met en oeuvre quotidiennement, au niveau local, au coeur d’associations, de clubs et des districts, comme lors de discussions stratégiques au sein d'instances sportives internationales", plaident-ils.
"Il faut voir d'où l'on vient!", rétorque-t-on souvent dans les coulisses du gouvernement, persuadés que les JO-2024 permettront à terme de changer la donne et qu'il y a déjà du mieux.