LONDRES: Richard Ratcliffe, époux d’une femme irano-britannique détenue en Iran depuis 2016, entame sa treizième journée de grève de la faim.
M. Ratcliffe dort dans une tente devant le bureau des Affaires étrangères à Londres depuis près de deux semaines, afin de pousser le gouvernement britannique à déployer davantage d’efforts pour faire revenir sa femme, Nazanin Zaghari-Ratcliffe, en Grande-Bretagne. Vendredi, il a déclaré au Guardian qu’il tentait de faire comprendre au 10 Downing Sreet qu’il ne s’agissait pas d’un coup monté, mais plutôt d’un «coup de semonce».
Il a affirmé qu’il poursuivrait sa grève jusqu’à ce que le gouvernement reconnaisse que les ministres doivent agir rapidement pour faire sortir sa femme de prison. Mme Zaghari-Ratcliffe, âgée de 43 ans et mère d’une fille, est emprisonnée depuis plus de cinq ans et a passé la plupart de ces années dans la célèbre prison iranienne d’Evin. Elle est accusée par Téhéran d’avoir comploté pour renverser le régime, ce qu’elle a démenti.
Son mari a expliqué au Guardian qu’il était difficile de décider s’il devait poursuivre sa grève de la faim en raison des températures proches de zéro. Il a confié qu’il avait froid, qu’il dormait beaucoup et qu’il avait du mal à supporter le manque de nourriture.
Le frère de Mme Zaghari-Ratcliffe s’occupe de la fille du couple, Gabriella, âgée de 7 ans, au domicile familial. En juin 2019, Ratcliffe avait déjà effectué une grève de la faim d’une durée de quinze jours devant l’ambassade d’Iran. Cette durée correspond au seuil estimé pour un rétablissement complet ultérieur. Il avait alors été rejoint par 100 sympathisants, donnant lieu à «une ambiance presque carnavalesque». Le gréviste n’est actuellement accompagné que par des amis et deux membres de sa famille. Pourtant, il est déterminé à poursuivre sa lutte.
«Cette fois-ci, c’est plus viscéral. C’est plus restreint, plus sombre, plus pointu. Je dis des choses que je n’aurais pas exprimées il y a deux ans», a affirmé M. Ratcliffe au Guardian. Il s’est dit particulièrement irrité par le fait que le vice-président iranien soit «accueilli à bras ouverts» par les ministres lors du sommet de la COP26 à Glasgow. «J’ai promis au bureau des Affaires étrangères (...) que je trouverais un moyen de leur mettre des bâtons dans les roues. Le gouvernement prétend que le monde peut continuer comme si de rien n’était.»
M. Ratcliffe a également constaté une «véritable dérive» dans l’attitude du Premier ministre britannique, Boris Johnson, à l’égard du sort de sa femme pendant son mandat. «La politique consiste à gérer l’attente, à attendre que l’Iran fasse ce qu’il faut et trouve une solution diplomatique», a-t-il précisé. «Il n’y a pas de stratégie pour ramener Naz à la maison, et je l’ai dit très franchement à la ministre des Affaires étrangères, Liz Truss, la semaine dernière. C’est pourquoi je campe dans la rue, car après cinq ans et demi, c’est vraiment évident».
M. Ratcliffe a expliqué que la solution à la détention de sa femme était claire: le gouvernement doit payer une vielle dette qui date de l’Iran pré-révolutionnaire. D’une valeur estimée à 400 millions de livres sterling (467 millions d’euros), elle remonte à un contrat de vente d'armes pour lequel Londres avait reçu une avance, mais qui n'a jamais pu être honoré en raison de la révolution islamique de 1979. Les familles d’autres citoyens britanniques détenus en Iran se sont également ralliées à M. Ratcliffe. La famille d’Anoosheh Ashoori, qui purge actuellement une peine de dix ans de prison après avoir été accusée d’espionnage pour Israël, s’est jointe à la manifestation à plusieurs reprises.
«L’union fait la force», a lancé la fille d’Anoosheh, Elika Ashoori. «Pour ceux d’entre nous qui peuvent s’exprimer, il est très important que nous fassions pression sur le gouvernement. Sinon, l’Iran continuera à détenir des otages et d’autres familles seront affectées», a-t-elle assuré.
Un porte-parole du bureau des Affaires étrangères a également réagi. «La décision de l’Iran de poursuivre ces accusations sans fondement contre Nazanin Zaghari-Ratcliffe est une continuation effroyable de l’épreuve cruelle qu’elle subit. Au lieu de menacer de renvoyer Nazanin en prison, l’Iran doit la libérer définitivement afin qu’elle puisse rentrer chez elle. Nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour l’aider à retrouver sa fille et sa famille, et nous continuerons à faire pression sur l’Iran.»
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com