GLASGOW: Préserver les forêts et réduire les rejets de méthane: les dirigeants mondiaux sont venus au secours du climat mardi à la COP26 avec deux accords majeurs ambitionnant de contenir les très nocifs gaz à effet de serre.
Avec en ligne de mire un réchauffement de la planète limité à +1,5°C, les dirigeants de la planète sont sous pression pour en faire davantage contre le dérèglement climatique, lors de la conférence climatique de l'ONU prévue sur deux semaines à Glasgow (Ecosse).
Plus de 80 d'entre eux, dont les pays de l'Union européenne et les Etats-Unis, se sont ainsi engagés mardi à réduire drastiquement les émissions de méthane d'au moins 30% d'ici 2030 par rapport aux niveaux de 2020, s'est félicitée la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.
"Le méthane est l'un des gaz que nous pouvons réduire le plus vite. Ce faisant, cela permettra de ralentir immédiatement le changement climatique", a-t-elle déclaré, soulignant que ce gaz est responsable d'"environ 30%" du réchauffement de la planète depuis la révolution industrielle.
"C'est un des plus puissants gaz à effet de serre", a renchéri le président américain Joe Biden, assurant que les signataires de cet engagement représentaient 70% du PIB mondial.
Moins connu que le tristement célèbre CO2, le méthane (CH4) est le deuxième gaz à effet de serre lié à l'activité humaine, principalement l'élevage, les combustibles fossiles et les déchets. Surtout, son effet de réchauffement est bien supérieur que celui du dioxyde de carbone, jusqu'à plus de 80 fois.
Les Etats-Unis et l'UE avaient annoncé mi-septembre travailler ensemble sur ce projet d'accord, rejoints depuis par des dizaines d'autres pays dont le Canada, la Corée du Sud, le Vietnam, la Colombie ou l'Argentine.
Émettre moins, mais aussi éliminer plus. Poumons de la planète avec les océans, les forêts jouent à ce titre un rôle essentiel dans la lutte contre le changement climatique en absorbant une partie importante des milliards de tonnes de gaz à effets de serre libérés chaque année dans l'atmosphère par les activités humaines.
C'est pourquoi les dirigeants de plus de cent pays abritant 85% des forêts mondiales, dont le Brésil, très critiqué pour sa politique environnementale, ont promis mardi d'enrayer leur dégradation et de restaurer ces "cathédrales de la nature".
Le gouvernement Biden annonce son plan de réduction des émissions de méthane
Le gouvernement de Joe Biden a dévoilé mardi une série de réglementations visant à "nettement" réduire les émissions de méthane de l'industrie pétrolière et gazière aux Etats-Unis, avec pour objectif de montrer l'exemple en pleine COP26.
Cette annonce intervient au moment où le président américain se trouve à Glasgow pour la conférence mondiale sur le climat.
Les nouvelles réglementations proposées "réduiraient de 41 millions de tonnes les émissions de méthane de 2023 à 2035", a annoncé dans un communiqué l'Agence américaine de protection de l'environnement, l'EPA.
Cela représente l'équivalent de "920 millions de tonnes" de CO2, a précisé l'agence, soit "davantage que la quantité de dioxyde de carbone émise par tous les passagers américains de véhicules et d'avions commerciaux en 2019."
Fait notable: ce plan s'applique également aux installations déjà existantes, et non pas seulement à celles qui seront construites à l'avenir.
Concrètement, des limites d'émissions devront être fixées pour "des centaines de milliers de sources existantes" à travers le pays, et les objectifs de réduction des émissions pour les nouvelles sources pétrolières et gazières seront "actualisées et étendues", selon le communiqué.
Ces réglementations seront d'abord soumises à une période de débat public obligatoire. L'EPA prévoit de publier le texte final "avant la fin 2022".
"Alors que les dirigeants mondiaux se réunissent en ce moment charnière à Glasgow pour la COP26, il est désormais très clair que l'Amérique est de retour et guide par l'exemple en s'attaquant à la crise climatique avec des objectifs courageux", a déclaré le chef de l'EPA, Michael Regan, cité dans le communiqué.
L'annonce de l'administration Biden a été saluée par des associations de défense de l'environnement.
"Réduire rapidement les émissions de méthane résultera en un progrès significatif à court terme pour le climat", a déclaré dans un communiqué Julie McNamara, responsable pour le climat et l'énergie de l'Union des scientifiques préoccupés. "L'action d'aujourd'hui est une avancée importante en direction de ce progrès nécessaire."
27 terrains de foot par minute
L'initiative bénéficiera d'un financement public et privé de 19,2 milliards de dollars (16,5 milliards d'euros) sur plusieurs années.
"On ne peut faire face à la perte dévastatrice d'habitats et d'espèces sans lutter contre le changement climatique, et on ne peut faire face au changement climatique sans protéger notre environnement naturel et respecter les droits des peuples autochtones", a déclaré le Premier ministre britannique Boris Johnson.
Les forêts reculent actuellement au "rythme alarmant" de 27 terrains de football chaque minute, selon la présidence britannique de la COP26. Et d'après l'ONG Global Forest Watch, la déforestation dans le monde a accéléré ces dernières années.
Le nouvel engagement contre la déforestation fait écho à la Déclaration de New York sur les forêts de 2014, quand de nombreux pays, entreprises et peuples autochtones s'étaient engagés à diviser par deux la déforestation en 2020 et d'y mettre fin en 2030.
Mais pour des ONG comme Greenpeace, l'objectif de 2030 mis en exergue mardi reste beaucoup trop lointain et donne le feu vert à "une décennie supplémentaire de déforestation".
Global Witness a dit craindre de voir se répéter "les échecs de précédents engagements" similaires, en raison d'un financement insuffisant et d'un suivi incertain de la parole donnée.
Le Brésil a annoncé lundi des objectifs plus ambitieux pour réduire les émissions de CO2 - 50% de moins d'ici 2030 au lieu de 43%, et la neutralité carbone en 2050 - et de lutte contre la déforestation.
Mais depuis le début du mandat du président d'extrême droite Jair Bolsonaro en 2019, l'Amazonie brésilienne a perdu 10 000 km2 de forêt par an, contre 6.500 km2 annuels lors de la précédente décennie.
En faveur des forêts, 28 pays représentant trois quarts du commerce mondial de matières premières susceptibles de menacer les forêts, comme l'huile de palme et le cacao, se sont aussi engagés à plus d'équité et de transparence.