LA HAYE: Un accord de gouvernement n'a toujours pas été trouvé aux Pays-Bas 226 jours après les élections législatives, le record de 2017 ayant ainsi été battu vendredi après une année marquée par des crises politiques.
"Les gens se demandent, s'il y a un consensus sur les grands problèmes du pays, pourquoi ne se mettent-ils pas au travail ?", remarque à cet égard Claes de Vreese, un professeur de communication politique à l'Université d'Amsterdam.
Les quatre partis ayant finalement accepté, après des mois de tergiversations, de s'asseoir autour de la table des négociations forment déjà l'actuel gouvernement, démissionnaire depuis janvier à cause d'un scandale lié aux allocations familiales et qui continue de gérer les affaires courantes.
Le gouvernement n'a cependant pas été désavoué par les électeurs aux législatives en mars, remportées haut la main par le parti de centre droit VVD du Premier ministre sortant, Mark Rutte, surnommé le ministre "Téflon" pour sa capacité à sortir indemne des crises politiques.
Au pouvoir depuis 2011, M. Rutte semble se diriger vers un quatrième mandat malgré une année notamment marquée par une motion de défiance à laquelle il a de justesse survécu.
"Les quatre partis du gouvernement Rutte III négocient maintenant pour former Rutte IV", note Ruud Koole, un politologue à l'Université de Leiden (ouest).
"Il n'est cependant pas sûr qu'ils réussissent, mais la pression est forte pour rapidement former un nouveau gouvernement", estime-t-il.
«Exclusions mutuelles»
La longueur des négociations n'est pas une bonne chose pour la confiance des citoyens envers la sphère politique, déjà entamée par le scandale des allocations familiales, note Claes de Vreese.
Le VVD, le D66 (centre gauche), le CDA (chrétiens-démocrates centristes) et le parti de centre droit conservateur ChristenUnie (CU) n'ont commencé les négociations sur le fond que fin septembre.
Les pourparlers ont fait du sur place pendant des mois après les élections de mars, dont l'un des vainqueurs était les progressistes du D66.
Ce parti a longtemps refusé de former une coalition avec le ChristenUnie, jugé trop conservateur, tandis que le VVD et le CDA ne voulaient pas gouverner avec une alliance de partis de gauche GroenLinks (verts) et le PvdA (travaillistes).
"Ce jeu d'exclusions mutuelles a duré très longtemps, car l'ambiance entre les partis au parlement s'était détériorée au moment d'un étrange débat au Parlement le 1er avril", explique Ruud Koole.
Mark Rutte avait alors surmonté de justesse une motion de défiance, déposée par des partis de l'opposition qui l'accusaient d'avoir menti.
"Il fallait du temps pour panser les blessures", souligne M. Koole.
La gestion chaotique des évacuations en Afghanistan n'a pas aidé à apaiser les tensions, poussant à la démission la ministre sortante des Affaires étrangères et cheffe de file de D66, Sigrid Kaag. La ministre de la Défense Ank Bijleveld lui a emboîté le pas.
Mme Kaag a ensuite fini par lever son opposition à reformer la même coalition pour éviter de nouvelles élections, souhaitées par aucun des quatre partis.
Un nouveau gouvernement est "absolument nécessaire" pour faire face à des questions prégnantes comme la crise du logement et le changement climatique, rappelle Ruud Koole.
Même si la fumée blanche n'est pas attendue avant plusieurs jours voire des semaines, les négociations semblent avancer. Les Pays-Bas disposent toutefois d'un peu de marge avant de battre le record belge, soit 541 jours sans gouvernement en exercice.