Ethiopie: loin du front, les Tigréens visés par des arrestations arbitraires

Alula (nom d'emprunt) dans la ville d'Addis-Abeba, en Éthiopie, le 21 octobre 2021. EDUARDO SOTERAS / AFP
Alula (nom d'emprunt) dans la ville d'Addis-Abeba, en Éthiopie, le 21 octobre 2021. EDUARDO SOTERAS / AFP
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Publié le Vendredi 29 octobre 2021

Ethiopie: loin du front, les Tigréens visés par des arrestations arbitraires

  • Depuis douze mois, loin des combats, les Tigréens sont visées par une campagne d'arrestations arbitraires dans la capitale Addis Abeba et un peu partout dans le pays
  • Les arrestations ont commencé peu après le début, en novembre 2020, du conflit au Tigré, région la plus septentrionale d'Ethiopie

ADDIS ABEBA : Le jour n'était pas encore levé lorsqu'en ce jour de juillet, des policiers éthiopiens ont pénétré dans la cathédrale, à Addis Abeba. En pleine prière, ils ont emmené une douzaine de prêtres et moines d'ethnie tigréenne.

Les policiers n'ont donné aucune explication, mais les religieux ont immédiatement compris qu'ils allaient rejoindre les milliers de Tigréens accusés de soutenir le Front de libération du peuple du Tigré (TPLF) qui combat depuis un an l'armée fédérale dans le nord du pays.

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Des gens marchent devant des magasins incendiés dans la ville d'Addis-Abeba, en Éthiopie, le 21 octobre 2021. EDUARDO SOTERAS / AFP

Depuis douze mois, loin des combats, les Tigréens sont visées par une campagne d'arrestations arbitraires dans la capitale Addis Abeba et un peu partout dans le pays, ce que beaucoup d'observateurs décrivent comme l'une des faces cachées de ce conflit dévastateur.

Les responsables des forces de l'ordre affirment que ces arrestations sont légitimes et s'inscrivent dans la lutte contre le TPLF, classé organisation "terroriste" en mai.

Mais des entretiens menés par l'AFP avec des dizaines de détenus, avocats, responsables judiciaires et militants des droits humains révèlent plutôt des arrestations systématiques ciblant toute personne d'ethnie tigréenne. 

Les victimes interrogées affirment que leurs expériences s'apparentent à du profilage ethnique, avec des dossiers construits sur des motifs douteux.

Les religieux arrêtés ont été détenus plus de deux semaines par la police qui les accusait de collecter des fonds pour le TPLF, de brûler des drapeaux éthiopiens et même de préparer des attentats.

L'un des moines se souvient n'avoir pu s'empêcher de rire lorsqu'un enquêteur lui a demandé où ils cachaient leurs pistolets.

"Nous leur avons dit que nous étions des hommes de foi, pas des hommes politiques", raconte-t-il, sous couvert d'anonymat: "Je ne sais pas d'où ils tiennent leurs informations. Mais ils utilisent cela pour nous réprimer, nous les Tigréens, pour nous faire vivre dans la peur."

Complot

Les arrestations ont commencé peu après le début, en novembre 2020, du conflit au Tigré, région la plus septentrionale d'Ethiopie. Cette confrontation armée a marqué le point culminant de mois de tensions entre le Premier ministre Abiy Ahmed et le TPLF, parti ayant dirigé de fait l'Ethiopie avant l'arrivée d'Abiy en 2018.

Au départ, elles ciblaient essentiellement le personnel militaire. 

Deux semaines après le début des combats, des dizaines d'officiers tigréens ont été convoqués pour une réunion à Addis Abeba. Les médias d'Etat ont diffusé les images, présentées comme une preuve de leur soutien au gouvernement. 

Mais un peu plus tard, au moins trois de ces officiers ont été arrêtés et leurs domiciles fouillés. Ils ont été emprisonnés pour avoir prétendument comploté pour renverser Abiy Ahmed, ont affirmé à l'AFP des membres de leurs familles.

Michael, fils de l'un d'eux, était stupéfait. "Il n'aimait pas parler de politique", explique-t-il en évoquant son père, officier de niveau intermédiaire avec 30 ans de service: "Il nous grondait quand nous parlions de politique."

Depuis que des médias d'Etat ont annoncé en août qu'un tribunal militaire avait prononcé des condamnations à mort contre des officiers "traîtres", l'inquiétude de Michael grandit.

Son père, toujours détenu dans un camp militaire à l'ouest d'Addis Abeba, peut recevoir des visites trois fois par semaine.

Il fait partie des mieux lotis. Des milliers d'autres ont été ou sont toujours détenus au secret.

Un porte-parole militaire n'a pas répondu aux sollicitations de l'AFP.

Commerces fermés

Alors que la guerre se prolongeait, les détentions ont continué. Elles se sont multipliées fin juin après que le TPLF a reconquis la majeure partie du Tigré.

Trois nuits après la reprise de la capitale régionale Mekele, des policiers ont frappé à la porte d'Alula, un militant tigréen qui dénonçait les massacres et viols collectifs sur internet.

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Alula (nom d'emprunt) dans la ville d'Addis-Abeba, en Éthiopie, le 21 octobre 2021. EDUARDO SOTERAS / AFP

Détenu pendant une nuit dans un commissariat d'Addis Abeba, il a ensuite été conduit dans un camp militaire à 200 kilomètres à l'est. 

Pendant les sept semaines suivantes, Alula a vécu d'un morceau de pain et de deux tasses d'eau par jour, comme les plus de 1.000 prisonniers du camp.

Parmi eux se trouvaient des journalistes et des hommes politiques ayant évoqué les horreurs du conflit qui a fait des milliers de morts et poussé, selon l'ONU, des centaines de milliers de personnes au bord de la famine. 

Alula a été libéré mais il ne se sent plus en sécurité pour parler de la guerre. "Si je le fais, je serai à nouveau arrêté, peut-être tué", explique-t-il.

Des milliers d'entreprises "soutenant le TPLF" ont également été fermées, comme s'en est félicité un responsable du ministère du Commerce en septembre.

Sur un seul pâté de maisons d'Addis Abeba, sept bars et deux hôtels ont été fermés en juillet, officiellement en raison de la "pollution sonore".

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Un jeune vendeur de rue marche devant des magasins fermés, prétendument en raison de l'origine de leurs propriétaires, dans la ville d'Addis-Abeba, en Éthiopie, le 21 octobre 2021. EDUARDO SOTERAS / AFP

"C'est un mensonge", assure le propriétaire d'un des bars: "En gros, ils imaginent que les Tigréens célébraient l'avancée du TPLF".

Selon lui, ces fermetures prouvent que les autorités ciblent tous les Tigréens, pas seulement les soutiens actifs du TPLF.

Ethiopie: les dates marquantes du conflit au Tigré

Voici les dates marquantes de l'intervention de l'armée éthiopienne, lancée il y a un an, dans la région dissidente du Tigré, un conflit qui s'est propagé à d'autres régions, alimentant les craintes d'une famine de grande ampleur.

Intervention militaire

Le 4 novembre 2020, le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed, prix Nobel de la paix 2019, lance une opération militaire contre les autorités du Tigré, issues du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF) qu'il accuse d'avoir orchestré des attaques sur deux bases de l'armée fédérale.

L'Union africaine et l'ONU appellent à cesser les hostilités.

Le 13, l'ONU demande une enquête sur de possibles "crimes de guerre", puis s'alarme d'une "crise humanitaire à grande échelle" à la frontière avec le Soudan.

Des informations indiquent la présence de troupes venues de l'Erythrée voisine, ennemie jurée du TPLF.

Le 28, M. Abiy annonce que l'armée fédérale contrôle la capitale régionale Mekele et déclare l'opération militaire "terminée".

Exactions, désastre humanitaire

Malgré la victoire proclamée, les combats se poursuivent, entravant l'acheminement de l'aide humanitaire. Les récits d'exactions se multiplient.

Le 26 février 2021, Amnesty International accuse des soldats érythréens d'avoir tué "des centaines de civils" en novembre à Aksoum (nord du Tigré). Un massacre ultérieurement confirmé par la Commission éthiopienne des droits de l'Homme, organisme indépendant rattaché au gouvernement.

Le 10 mars, Washington dénonce des "actes de nettoyage ethnique" dans le Tigré occidental, contrôlé par les forces de la région voisine de l'Amhara appuyant l'armée éthiopienne.

Pendant des mois, Addis Abeba et Asmara nient toute présence militaire érythréenne au Tigré, finalement reconnue par Abiy Ahmed le 23 mars. Il annonce ensuite le retrait des troupes érythréennes. 

Le 26, les Etats-Unis exhortent l'Ethiopie à réagir face à l'aggravation du "désastre humanitaire" et appellent les troupes érythréennes à se retirer "de manière vérifiable".

En mai, Washington prend des sanctions contre des responsables érythréens et éthiopiens. Le président Joe Biden condamne des violations "inacceptables" des droits humains.

Elections, contre-offensive rebelle

Le 21 juin, l'Ethiopie organise des élections législatives et régionales, qui ne se tiennent pas dans certaines circonscriptions, notamment au Tigré. Le parti d'Abiy Ahmed remporte une majorité écrasante.

Le 28 juin, les rebelles pro-TPLF entrent dans Mekele, dix jours après avoir lancé une contre-offensive. Elles assurent que la lutte va "s'intensifier" jusqu'au départ des "ennemis" de la région, malgré un cessez-le-feu décrété par le gouvernement éthiopien.

Le 3 juillet, un haut responsable de l'ONU déclare que plus de 400.000 personnes ont "franchi le seuil de la famine" au Tigré.

Le conflit se propage aux régions voisines du Tigré, de l'Afar et de l'Amhara. 

Le 5 août, les rebelles prennent le contrôle de la ville amhara de Lalibela, classée par l'Unesco au patrimoine mondial.

Mobilisation générale

Le 10 août, Abiy Ahmed appelle la population à rejoindre les forces armées.

Le 9 septembre, le gouvernement affirme que les rebelles ont été "mis en déroute" dans la région de l'Afar.

Le 30 septembre, le gouvernement annonce l'expulsion de sept responsables d'agences onusiennes accusés d'"ingérence". 

Le 4 octobre, Abiy Ahmed est investi pour un nouveau mandat de cinq ans. 

Le 7, les forces gouvernementales et leurs alliés engagent des offensives aériennes et terrestres contre les rebelles dans la région de l'Amhara.

Le 18, l'aviation éthiopienne mène des frappes sur Mekele, une première depuis novembre, tuant trois enfants et blessant plusieurs autres personnes, selon l'ONU. 

D'autres frappes ont lieu les jours suivants au Tigré, tuant plusieurs civils.

Méfiance

L'ampleur exacte de cette répression est impossible à déterminer, estime Fisseha Tekle, chercheur pour Amnesty International.

Il affirme que l'ONG a "reçu plusieurs témoignages" faisant état d'un millier de personnes détenues dans un seul camp dans des conditions "sordides".

De nombreuses personnes arrêtées sont toujours portées disparues. "Des familles ont parcouru des centaines de kilomètres à la recherche de proches. D'autres ont fait le tour des commissariats d'Addis", souligne-t-il.

Ces arrestations ont été critiquée par certains dirigeants.

Fin septembre, Abraha Desta, haut responsable de l'administration intérimaire installée au Tigré après l'éviction du TPLF, a estimé sur Facebook que les autorités avaient créé un environnement où parler le tigrinya, la langue tigréenne, "est considéré comme un crime".

Le lendemain, il a été arrêté, accusé de violation de la législation sur les armes à feu et de provocation.

D'autres responsables ont exprimé leur mécontentement en privé.

Lors d'un séminaire en septembre, le procureur général Gedion Timothewos a ainsi réprimandé des membres de la direction du recouvrement des avoirs pour leur zèle dans la poursuite d'entrepreneurs tigréens, selon plusieurs participants.

Il les a accusés d'"abus de pouvoir" et les a appelés à arrêter le "profilage ethnique". 

Désormais ministre de la Justice, M. Gedion n'a pas répondu aux sollicitations de l'AFP. 

Même si ces arrestations cessaient, leurs victimes pensent qu'elles ont déjà gravement délité le tissu social éthiopien, notamment à Addis Abeba où les Tigréens vivaient autrefois librement.

"Il est évident que tout le monde se méfie (...) Personne ne sait ce qui se passera demain", explique un avocat tigréen, qui représente 90 Tigréens détenus: "Moi-même, je ne suis pas confiant. A tout moment, ils peuvent m'arrêter."


Des pourparlers sont attendus entre Téhéran et Washington, sur fond de menaces américaines

Cette combinaison d'images créée le 09 avril 2025 montre l'envoyé américain au Moyen-Orient Steve Witkoff après une réunion avec des responsables russes au palais de Diriyah, à Riyad, en Arabie saoudite, le 18 février 2025 (G) ; et le ministre iranien des Affaires étrangères Abbas Araghchi s'adressant à l'AFP lors d'une interview au consulat iranien de Jeddah le 7 mars 2025. (Photo par EVELYN HOCKSTEIN et Amer HILABI / diverses sources / AFP)
Cette combinaison d'images créée le 09 avril 2025 montre l'envoyé américain au Moyen-Orient Steve Witkoff après une réunion avec des responsables russes au palais de Diriyah, à Riyad, en Arabie saoudite, le 18 février 2025 (G) ; et le ministre iranien des Affaires étrangères Abbas Araghchi s'adressant à l'AFP lors d'une interview au consulat iranien de Jeddah le 7 mars 2025. (Photo par EVELYN HOCKSTEIN et Amer HILABI / diverses sources / AFP)
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MASCATE, OMAN : Les États-Unis et l'Iran entament samedi à Mascate des discussions aux enjeux considérables sur le dossier du nucléaire iranien, après des menaces d'une opération militaire américaine en cas d'échec.

L'émissaire américain pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, et le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, doivent conduire ces discussions à huis clos à Mascate.

Il s'agira des premières négociations de ce niveau entre les deux pays ennemis depuis que les États-Unis se sont retirés en 2018 de l'accord conclu en 2015 entre l'Iran et les grandes puissances pour encadrer son programme nucléaire, en échange d'une levée des sanctions.

Leur durée et leur format restent incertains : la Maison Blanche affirme qu'il s'agira de négociations directes « dans une même pièce », tandis que l'Iran parle de discussions par l'intermédiaire des Omanais. 

Selon la télévision d'État iranienne, M. Araghchi s'est entretenu avec des responsables omanais à son arrivée à Mascate. Il est notamment accompagné de ses vice-ministres chargés des affaires politiques et juridiques.

Le président américain Donald Trump a adopté une politique de « pression maximale » à l'égard de l'Iran et imposé de nouvelles sanctions visant son programme nucléaire et son secteur pétrolier.

Il a créé la surprise en annonçant lundi la tenue de ces discussions, après des semaines de guerre des mots entre les deux pays, qui n'ont plus de relations diplomatiques depuis 45 ans. 

M. Witkoff, qui était en visite vendredi en Russie, a déclaré au Wall Street Journal que la « ligne rouge » pour Washington était « la militarisation de la capacité nucléaire » de l'Iran.

« Notre position commence par le démantèlement de votre programme. C'est notre position aujourd'hui. Cela ne veut pas dire qu'à la marge nous n'allons pas trouver d'autres moyens pour tenter de parvenir à un compromis », a-t-il dit en parlant du message qu'il livrerait aux Iraniens.

Mercredi, le président américain, qui ne cesse de menacer d'attaquer l'Iran, a encore fait monter la pression en déclarant qu'une intervention militaire contre ce pays était « tout à fait » possible en cas d'absence d'accord.

« S'il faut recourir à la force, nous le ferons. Israël y sera bien évidemment très impliqué, il en sera le chef de file », a averti M. Trump, un allié du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu qui agite régulièrement le spectre d'une attaque contre le programme nucléaire iranien, perçu comme une menace pour son pays. 

Après le retrait des États-Unis de l'accord de 2015 et le rétablissement de sanctions américaines à son encontre, la République islamique d'Iran s'est démarquée du texte.

Elle a accru son niveau d'enrichissement de l'uranium jusqu'à 60 %, soit bien au-delà de la limite de 3,67 % imposée par l'accord, et se rapproche du seuil de 90 % nécessaire à la fabrication d'une bombe atomique.

Selon Ali Vaez, du groupe de réflexion International Crisis Group, le premier point à l'agenda, « et l'un des plus importants », sera de définir le champ des discussions.

Selon lui, l'Iran pourrait « s'engager à prendre des mesures pour limiter son programme nucléaire » en échange d'un allègement des sanctions, « mais pas le démanteler entièrement ».

Pour Karim Bitar, enseignant à Sciences Po Paris, « les négociations ne se concentreront pas exclusivement (...) sur le programme nucléaire. L'accord devra inclure l'arrêt du soutien de l'Iran à ses alliés régionaux ».

Les conflits à Gaza et au Liban ont attisé les tensions entre l'Iran et Israël, qui ont mené des attaques militaires réciproques pour la première fois depuis des années de guerre par procuration.

Selon M. Bitar, « la seule et unique priorité est la survie du régime, et, idéalement, l'obtention d'un peu d'oxygène, c'est-à-dire un allègement des sanctions, afin de relancer l'économie, car le régime est devenu assez impopulaire ».


L'émissaire américain Witkoff est en Russie, selon le Kremlin

Steve Witkoff, l'émissaire du président américain Donald Trump, est arrivé en Russie, a affirmé vendredi le porte-parole du Kremlin, en plein rapprochement russo-américain et tractations diplomatiques pour mettre fin au conflit en Ukraine. (AFP)
Steve Witkoff, l'émissaire du président américain Donald Trump, est arrivé en Russie, a affirmé vendredi le porte-parole du Kremlin, en plein rapprochement russo-américain et tractations diplomatiques pour mettre fin au conflit en Ukraine. (AFP)
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  • Steve Witkoff, l'émissaire du président américain Donald Trump, est arrivé en Russie, a affirmé vendredi le porte-parole du Kremlin, en plein rapprochement russo-américain et tractations diplomatiques pour mettre fin au conflit en Ukraine
  • "Oui, je confirme, il est en effet arrivé en Russie", a déclaré Dmitri Peskov, cité par l'agence russe Ria Novosti qui le questionnait sur des informations de presse faisant état de la venue du responsable américain

MOSCOU: Steve Witkoff, l'émissaire du président américain Donald Trump, est arrivé en Russie, a affirmé vendredi le porte-parole du Kremlin, en plein rapprochement russo-américain et tractations diplomatiques pour mettre fin au conflit en Ukraine.

"Oui, je confirme, il est en effet arrivé en Russie", a déclaré Dmitri Peskov, cité par l'agence russe Ria Novosti qui le questionnait sur des informations de presse faisant état de la venue du responsable américain.

Interrogé sur la possibilité d'une rencontre avec le président russe Vladimir Poutine, M. Peskov a répondu: "si c'est le cas, nous le dirons".

La raison de la visite de Steve Witkoff n'a pas été communiquée.

Cet ami proche de Donald Trump a été impliqué dans des discussions autour du conflit en Ukraine, mais il est aussi l'émissaire du président au Moyen-Orient.

Il est attendu samedi au sultanat d'Oman pour des pourparlers inédits avec l'Iran, pays proche de Moscou mais avec lequel Washington n'a plus de relations diplomatiques depuis 45 ans.

Ces discussions visent à négocier un nouvel accord sur le nucléaire iranien.

Les Occidentaux, Etats-Unis en tête, soupçonnent depuis des décennies l'Iran de vouloir se doter de l'arme nucléaire. Téhéran rejette ces accusations.

La Russie est un proche partenaire de l'Iran, et le Kremlin s'était dit en avril favorable à des négociations directes entre Washington et Téhéran.

Trump "furieux" 

La visite de Steve Witkoff intervient également au lendemain d'un échange de prisonniers entre Washington et Moscou et d'un round de discussions sur le fonctionnement de leurs missions diplomatiques, pour la deuxième fois depuis le retour à la Maison Blanche de Donald Trump en janvier.

Le président américain veut se rapprocher de la Russie, dont les Occidentaux se tiennent à l'écart depuis le début de l'attaque russe contre l'Ukraine en 2022.

Donald Trump cherche à mettre fin au plus vite à ce conflit qui a déjà fait des dizaines de milliers de morts.

Cette détermination fait craindre à Kiev d'être contraint par son puissant allié à accepter d'âpres concessions. D'autant que le tempétueux Donald Trump envoie des signaux contradictoires.

Il a multiplié les piques à l'encontre du président ukrainien Volodymyr Zelensky, et critiqué l'aide que son pays a apportée à Kiev.

Mais Donald Trump a aussi menacé la Russie de nouvelles sanctions si elle ne consentait pas à la paix.

Il a dit fin mars à la chaîne NBC être "très énervé" et "furieux" contre Vladimir Poutine, après que ce dernier eut évoqué l'idée d'une "administration transitoire" en Ukraine, impliquant le départ du pouvoir de Volodymyr Zelensky.

Pas de cessez-le-feu 

Steve Witkoff a lui fait l'éloge de Vladimir Poutine. Il avait estimé dans une interview, le mois dernier, que le président russe n'était pas "un mauvais type".

L'émissaire américain l'a déjà rencontré à deux reprises. En mars, il s'était rendu en Russie pour discuter d'une proposition américaine d'un cessez-le-feu inconditionnel en Ukraine.

Mais Vladimir Poutine n'avait pas été convaincu, et cette proposition de trêve de 30 jours, acceptée par l'Ukraine, ne s'est pas concrétisée.

Donald Trump a seulement réussi à obtenir de son homologue russe un moratoire des frappes sur les infrastructures énergétiques, que l'Ukraine comme la Russie s'accusent depuis de violer.

Washington avait aussi annoncé fin mars une trêve limitée en mer Noire, aux contours flous.

Lundi, le Kremlin, accusé par Kiev et des capitales occidentales de faire traîner les discussions, avait estimé que de nombreuses questions restaient à régler en vue de conclure un accord de cessez-le-feu global avec l'Ukraine.

Le directeur du Service de renseignement extérieur russe (SVR), Sergueï Narychkine, a, lui, affirmé vendredi que les discussions entre Moscou et Washington allaient se poursuivre concernant "différentes thématiques", notamment celle de potentiels échanges de prisonniers.


Droits de douane: des démocrates soupçonnent Trump de possible délit d'initié

Donald Trump a signé son post sur Truth des lettres "DJT", qui représentent à la fois ses initiales et l’abréviation en bourse de son entreprise de médias, Trump Media & Technology Group. L'action de la société a clôturé la journée avec une hausse de 21,67%. (AFP)
Donald Trump a signé son post sur Truth des lettres "DJT", qui représentent à la fois ses initiales et l’abréviation en bourse de son entreprise de médias, Trump Media & Technology Group. L'action de la société a clôturé la journée avec une hausse de 21,67%. (AFP)
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  • Après avoir déclenché une guerre commerciale mondiale et ébranlé les marchés, le président américain a écrit mercredi sur TruthSocial, quelques minutes après l'ouverture de Wall Street, "C'EST LE MOMENT D'ACHETER"
  • Quelques heures plus tard, il annonçait une suspension pour 90 jours des droits de douane supplémentaires à l'encontre de dizaines de pays, à l'exception de la Chine, provoquant un rebond boursier historique

WASHINGTON: Donald Trump a-t-il commis un délit d'initié ? Plusieurs élus démocrates ont émis des soupçons, estimant que le président américain avait peut-être, en encourageant à acheter des actions juste avant son revirement spectaculaire sur les droits de douane, illégalement manipulé les marchés.

"Les proches de Donald Trump profitent-ils illégalement de ces énormes fluctuations du marché boursier par le biais de délits d'initiés ?", a interrogé le sénateur démocrate de Californie Adam Schiff sur son compte X mercredi.  "Le Congrès doit savoir", a-t-il ajouté, appelant à une enquête parlementaire.

"Le président des États-Unis participe littéralement à la plus grande manipulation de marché au monde", ont affirmé de leur côté les élus démocrates de la commission des services financiers de la Chambre des représentants, également sur X.

Après avoir déclenché une guerre commerciale mondiale et ébranlé les marchés, le président américain a écrit mercredi sur TruthSocial, quelques minutes après l'ouverture de Wall Street, "C'EST LE MOMENT D'ACHETER".

Quelques heures plus tard, il annonçait une suspension pour 90 jours des droits de douane supplémentaires à l'encontre de dizaines de pays, à l'exception de la Chine, provoquant un rebond boursier historique.

Après plusieurs jours d'effondrement, l'indice Dow Jones a fini mercredi en hausse de 7,87%, sa plus forte progression depuis 2008, et l'indice Nasdaq de 12,16%, du jamais-vu depuis 2001.

Un spécialiste en éthique a lui aussi estimé qu'il y avait matière à enquête.

"Les présidents ne sont pas des conseillers en investissement", a écrit sur X Richard Painter, professeur en droit et ancien avocat chargé de l'éthique à la Maison Blanche sous George W. Bush. "Ce scénario pourrait exposer le président à des accusations de manipulation du marché", a-t-il déclaré sur la chaîne NBC.

La Maison Blanche a assuré que Donald Trump ne voulait que "rassurer".

"Il est de la responsabilité du président des États-Unis de rassurer les marchés et les Américains sur leur sécurité économique face à l'alarmisme permanent des médias", a déclaré au Washington Post Kush Desai, porte-parole de la Maison Blanche.

Donald Trump a signé son post sur Truth des lettres "DJT", qui représentent à la fois ses initiales et l’abréviation en bourse de son entreprise de médias, Trump Media & Technology Group. L'action de la société a clôturé la journée avec une hausse de 21,67%.