Les armées françaises montent au front informationnel

L'Hexagone Balard regroupant les états-majors des Forces armées françaises, à Paris. (Photo, AFP)
L'Hexagone Balard regroupant les états-majors des Forces armées françaises, à Paris. (Photo, AFP)
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Publié le Jeudi 21 octobre 2021

Les armées françaises montent au front informationnel

  • Faire face à «l’arme de l'information fausse, manipulée ou subvertie», alors que des puissances comme la Chine ou la Turquie déploient des actions d'influence
  • «Veille de l'espace numérique autour des opérations militaires» et «contrer la propagande jihadiste ou les attaques qui cherchent à délégitimer les actions françaises»

PARIS : A l'heure de la multiplication des fake news et des attaques informationnelles, impossible de gagner la guerre sans pratiquer la cyber-influence et contrer celle des adversaires: un sujet si lourd d'enjeux qu'il fait désormais l'objet d'une doctrine dans les armées françaises.

"Le champ informationnel est un lieu de compétition stratégique", et "l'information fausse, manipulée ou subvertie est une arme", a déclaré mercredi la ministre des Armées, Florence Parly, en présentant cette nouvelle "doctrine militaire de lutte informatique d'influence".

La guerre de l'information, pour convaincre et contrer les influences adverses, a toujours fait partie de l'art de la guerre. Mais le numérique a démultiplié la vitesse et la viralité de la désinformation et de la manipulation déployées pour recruter, démoraliser les troupes ennemies ou perturber les opérations. Le recours à ces stratégies dites hybrides, sous le seuil du conflit ouvert, est aujourd'hui monnaie courante dans tous les conflits.

En 2020, les affrontements entre l’Arménie et l'Azerbaïdjan dans le Haut-Karabakh "se sont accompagnés d'opérations de propagande, de désinformation et de piratage en ligne", notait dans un récent rapport l'Institut français des relations internationales (Ifri).

Au Sahel, où sont déployés plus de 5000 militaires français, "on a récemment constaté une recrudescence d'attaques informationnelles pour délégitimer l'action française, minimiser nos succès voire balancer de fausses informations", fait-on valoir au ministère des Armées.

"Haut cadre" de l'opération française Barkhane arrêté à Bamako en possession d'héroïne, photo de soldats russes "arrivés" dans la capitale malienne, militaires français assis sur un tas de lingots d'or... Une rafale d'infox sur les réseaux sociaux derrière laquelle les observateurs voient la main russe, à l'heure où le Mali envisage de recourir aux service des paramilitaires de Wagner.

Il est donc impératif pour les militaires d'investir pleinement le champ immatériel pour "gagner la guerre avant la guerre", selon la formule consacrée du chef d'état-major, le général Thierry Burkhard, alors que des puissances comme la Chine, la Russie ou la Turquie, déploient des actions d'influence plus ou moins revendiquées.

La France est déjà active dans le cyber-espace, avec plus ou moins de discrétion. En décembre 2020, Facebook avait supprimé publiquement trois réseaux de "trolls" gérés depuis la Russie et la France, dont un ayant des connexions avec l'armée française, tous accusés de mener des opérations d'interférence en Centrafrique.

Selon la doctrine française, les armées s’autorisent deux types d'action: opérer une "veille de l'espace numérique autour des opérations militaires" pour détecter des attaques informationnelles adverses comme pour mesurer l'état de l'opinion publique, et "contrer la propagande jihadiste ou les attaques qui cherchent à délégitimer les actions françaises".

Les Etats-Unis sont également actifs dans ce domaine. Chaque commandement militaire américain (COCOM) dispose d'une unité de veille et d'action numérique agissant en soutien des opérations par des actions dans le champ informationnel: dénonciation des infox, perturbation de la propagande ennemie...

En France, ces tâches sont dévolues à des unités militaires spécialisées du Centre interarmées des actions sur l'environnement (CIAE), sous le contrôle par le commandement de la cyberdéfense (COMCYBER).

Les armées françaises ne s'interdisent par ailleurs pas de recourir à la "déception", à savoir induire l'adversaire en erreur.

Toutefois, "nous mettrons en oeuvre ces opérations en veillant à ce qu'elles soient en parfait accord avec nos principes et nos valeurs", a insisté Mme Parly.

"On ne fait pas de manipulation de l'information", assure-t-on au ministère. "Il y a et il y aura toujours une forme d'asymétrie entre ce qu'on fait et ce que font nos adversaires. La Russie utilise ses médias. On ne fera pas ça".

D'autre part, les actions d'influence des armées seront circonscrites aux théâtres d'opérations extérieures: elles ne seront pas exercées sur le territoire national, a précisé Florence Parly.

Les ingérences numériques étrangères en France relèvent de la compétence de l'agence Viginum, qui a récemment entamé ses travaux, alors que les tentatives de manipulation des opinions sur les réseaux sociaux se sont multipliées dans les campagnes électorales occidentales ces dernières années.


Le Liban réforme le secret bancaire, une mesure clé pour ses bailleurs

Cette photo prise le 20 mai 2020 montre une vue de l'entrée fortifiée de la Banque du Liban, la banque centrale du Liban, dans la capitale Beyrouth. (AFP)
Cette photo prise le 20 mai 2020 montre une vue de l'entrée fortifiée de la Banque du Liban, la banque centrale du Liban, dans la capitale Beyrouth. (AFP)
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  • Le Liban a accordé jeudi, par un vote au Parlement, un accès plus large des organismes de contrôle aux informations bancaires, une réforme clé réclamée dans ce pays
  • Le gouvernement a indiqué que la loi s'appliquerait de manière rétroactive sur 10 ans

BEYROUTH: Le Liban a accordé jeudi, par un vote au Parlement, un accès plus large des organismes de contrôle aux informations bancaires, une réforme clé réclamée dans ce pays, plongé dans une grave crise économique, par les bailleurs internationaux, dont le FMI.

Le gouvernement a indiqué que la loi s'appliquerait de manière rétroactive sur 10 ans, couvrant donc le début de la crise économique lorsque les banquiers ont été accusés d'aider des personnalités à transférer des fonds importants à l'étranger.

Le Premier ministre libanais, Nawaf Salam, a salué une "étape indispensable vers la réforme financière" que son gouvernement a promis de réaliser et un "pilier essentiel d'un plan de reconstruction".

Cette mesure, a-t-il ajouté, est "fondamentale pour restaurer les droits des déposants et la confiance des citoyens et de la communauté internationale". Il a mis en avant que l'opacité financière, prévalant de longue date au Liban, n'était plus aussi attractive pour les investisseurs qu'elle avait pu l'être.

"Il ne faut pas croire qu'avec cette loi, n'importe qui va entrer dans une banque et demander des détails sur un compte", a tempéré le ministre des Finances, Yassine Jaber, en déplacement à Washington avec son collègue de l'Economie, Amer Bisat, et le nouveau gouverneur de la Banque centrale, Karim Souaid.

Ces responsables doivent se rendre à la Banque mondiale et au Fonds monétaire international (FMI).

Le Liban a longtemps été une plaque-tournante financière régionale, dont la législation stricte sur le secret bancaire était perçue comme un atout, jusqu'à la profonde crise économique et financière qui a éclaté en 2019 et terni sa réputation.

Depuis, les autorités sont sous pression, interne et internationale, pour réformer une législation accusée d'avoir permis une fuite de capitaux au déclenchement de la crise, alors que les simples déposants étaient privés de leur épargne et que la valeur de la monnaie locale plongeait.

- Loi rétroactive sur dix ans -

Selon le groupe de défense des droits libanais Legal Agenda, les changements votés jeudi autorisent "les organes de contrôle et de régulation bancaire (...) à demander l'accès à toutes les informations sans raison particulière".

Ces organismes pourront avoir accès à des informations comme le nom des clients et les détails de leurs dépôts, et enquêter sur d'éventuelles activités suspectes, selon Legal Agenda.

La communauté internationale exige depuis longtemps d'importantes réformes pour débloquer des milliards de dollars et aider à la relance de l'économie libanaise, dont les maux sont imputés à la mauvaise gestion et à la corruption.

La récente guerre entre Israël et le mouvement libanais pro-iranien Hezbollah a aggravé la situation et le pays, à court d'argent, a besoin de fonds pour la reconstruction.

M. Salam a souligné que la réforme "ouvrait une page nouvelle" dans la lutte contre l'évasion fiscale, la corruption et le blanchiment.

Le ministre des Finances a relevé que la Banque centrale aura "plus de marge de manoeuvre" pour accéder à certains comptes.

Selon Alain Aoun, membre de la commission des finances du Parlement, une première réforme en 2022 avait été jugée insuffisante par le FMI. Les organismes de contrôle pourront désormais demander "l'information qu'ils veulent", a-t-il dit à l'AFP.

En avril 2022, le Liban et le FMI avaient conclu un accord sous conditions pour un prêt sur 46 mois de trois milliards de dollars, mais les réformes alors exigées n'ont pour la plupart pas été entreprises.

En février, le FMI s'est dit ouvert à un nouvel accord, et le nouveau gouvernement libanais a promis d'autres réformes. Il doit prochainement soumettre au Parlement un projet de loi pour restructurer le secteur bancaire.

Mercredi, le gouvernement a aussi signé un accord de 250 millions de dollars avec la Banque mondiale pour relancer son secteur électrique en déshérence, qui prive régulièrement les Libanais de courant.


Un influenceur franco-iranien jugé en juillet pour apologie du terrorisme

La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels. (AFP)
La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels. (AFP)
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  • La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels
  • Se présentant comme journaliste indépendant sur TikTok, où il est suivi par 330.000 abonnés, le mis en cause, qui s'est fait connaître avec une association d'aide aux plus démunis, y partage de nombreux contenus sur l'actualité du Moyen-Orient

BOBIGNY: Un influenceur franco-iranien sera jugé début juillet devant le tribunal de Bobigny (Seine-Saint-Denis) pour apologie du terrorisme, ont indiqué jeudi à l'AFP le parquet et ses avocats.

Shahin Hazamy, 29 ans, s'est vu "délivrer une convocation à une audience du 3 juillet pour apologie du terrorisme par un moyen de communication en ligne en public", a déclaré le parquet, confirmant son arrestation mardi révélée par le magazine Le Point.

La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels.

Se présentant comme journaliste indépendant sur TikTok, où il est suivi par 330.000 abonnés, le mis en cause, qui s'est fait connaître avec une association d'aide aux plus démunis, y partage de nombreux contenus sur l'actualité du Moyen-Orient.

"En s'en prenant à un journaliste la justice envoie un très mauvais signal à la liberté de la presse. Notre client Shahin Hazamy a subi un traitement inadmissible, avec une perquisition devant ses enfants en bas âge alors que les faits reprochés ont bientôt deux ans", ont déclaré à l'AFP ses avocats Nabil Boudi et Antoine Pastor.

Ces poursuites font suite à l'arrestation fin février d'une autre Iranienne en France, Mahdieh Esfandiari, actuellement écrouée pour apologie du terrorisme dans le cadre d'une information judiciaire confiée au Pôle national de lutte contre la haine en ligne (PNLH).

Annonçant cette nouvelle arrestation en France d'un de ses ressortissants, la télévision d'Etat iranienne a fustigé mercredi une "violation flagrante de la liberté d'expression dans un pays qui prétend être une démocratie".


Macron appelle à intégrer Mayotte dans la Commission de l'océan Indien

Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores. (AFP)
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  • "Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo
  • Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale

ANTANANARIVO: Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores.

"Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo.

La COI réunit les États insulaires (Madagascar, Comores, Maurice, Seychelles et La Réunion pour la France) dans le sud-ouest de l'océan Indien.

Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale.

"L'implication de nos populations, l'intégration de toutes nos îles dans les efforts de la COI pour la prospérité et la sécurité, dans la pluralité de ses dimensions maritime, alimentaire et pour la santé sont dans l'intérêt de nos peuples et de la région", a insisté M. Macron.

Il a suggéré toutefois d'"avancer de manière pragmatique vers cet objectif", sans réclamer l'intégration pleine et entière immédiate de l'archipel.

"La France est le premier bailleur de la COI", a-t-il aussi souligné, en précisant que l'Agence française du développement (AFD) gérait un "portefeuille de 125 millions d'euros de projets" de l'organisation.

"La COI est un modèle de coopération (...) Aucune de nos îles ne peut relever seule le défi", a-t-il ajouté, évoquant un "océan Indien profondément bousculé" par les défis planétaires actuels.

"Ensemble, en conjuguant nos atouts (..) nous pouvons tracer une voie nouvelle singulière", a-t-il assuré.

L'Union des Comores s'oppose à l'intégration de Mayotte dans la COI car elle conteste la souveraineté de la France sur Mayotte, restée française lorsque l'archipel des Comores est devenu indépendant en 1975.

Mayotte, tout comme les îles Éparses, autre territoire français hérité de la colonisation et revendiqué par Madagascar, sont au cœur du canal du Mozambique, voie majeure de transport maritime qui renferme d'importantes réserves en hydrocarbures.