PARIS: Dans un climat houleux, les députés ont entamé mardi soir l'examen d'un nouveau projet de loi consacré à la crise sanitaire, avec à la clef la possibilité de recourir au pass sanitaire jusqu'au 31 juillet, un délai contesté par l'ensemble des oppositions.
Au coup d'envoi des débats sur ce texte dit de "vigilance sanitaire", Olivier Véran a appelé à "ne pas nous désarmer quand bien même le virus montrerait des signes de faiblesses, rester vigilants, acteurs, actifs pour ne pas laisser la moindre prise au virus".
Le ministre de la Santé a souligné que la loi permettra "si la situation l'exige" de maintenir le pass sanitaire ou de "déclencher l'état d'urgence" jusqu'au 31 juillet, alors que la France métropolitaine vit actuellement sous un régime transitoire de sortie de l'urgence sanitaire.
"La perspective d'allègement du pass" demeure et sera "examinée à la mi-novembre", a insisté Olivier Véran.
Le ministre a aussi souligné l'importance de la troisième dose du vaccin, "fondamentale" pour les plus fragiles, plus de 65 ans et personnes malades: "A terme ce seront 22 millions de nos concitoyens qui sont appelés à recevoir ce rappel".
Les députés vont se prononcer sur la prolongation du pass sanitaire pour huit mois, soit au-delà de la présidentielle et les législatives. Plus de 380 amendements ont été déposés pour cette première lecture, jusqu'à mercredi soir.
Le LR Philippe Gosselin a défendu une motion de rejet du texte en fustigeant la "banalisation de l'état d'urgence". "Ce texte propose d'enjamber la représentation nationale parce que nous suspendons nos travaux le 28 février. Jusqu'à preuve du contraire, ce n'est pas la fin de notre mandat", a-t-il pointé.
"L'exceptionnel est devenu la norme", abonde le député Charles de Courson (Libertés et Territoires) qui rappelle que sur les six dernières années, entre les attentats et la crise sanitaire, le pays a vécu plus de trois ans sous le régime de différents états d'urgence.
Le Conseil constitutionnel devrait être saisi par les oppositions si le projet de loi n'évolue pas au fil de la navette parlementaire, prévue jusque début novembre.
"C'est le pass sanitaire à vie", a critiqué la candidate du RN à la présidentielle Marine Le Pen.
L'hiver redouté
Mardi après-midi, plusieurs centaines d'opposants se sont rassemblés à proximité du Palais Bourbon, à l'appel du militant pro-Frexit Florian Philippot et en présence de la députée Martine Wonner, égérie des covidosceptiques.
"Il n'y a pas lieu d'imposer cette dictature", critiquait comme d'autres Valérie âgée d'une cinquantaine d'années.
Dans l'hémicycle, la majorité devra garder un oeil sur ses propres troupes.
En commission des Lois, le député LREM de Paris Pacôme Rupin, opposant résolu au pass, a grippé le projet gouvernemental en faisant adopter de justesse un amendement qui prévoit de circonscrire l'utilisation du pass géographiquement.
Mais comme attendu, le groupe LREM a déposé un amendement qui prévoit de revenir à la logique nationale du pass, tout en prenant en compte plusieurs critères que les "marcheurs" tiennent à spécifier pour justifier le recours au pass: taux de vaccination, de positivité des tests de dépistage, d'incidence ou de saturation des lits de réanimation - avec des niveaux à définir.
L'exécutif s'apprête de son côté à défendre un amendement permettant aux directeurs d'établissements scolaires d'accéder au statut vaccinal des élèves. Le but est de "renforcer les campagnes" de vaccination, a fait valoir Olivier Véran à la tribune.
Le texte doit servir d'assurance tout risques pour l'exécutif qui veut à tout prix s'épargner, en pleine campagne électorale, un procès en impréparation en cas de retournement de tendance.
Ainsi, la validité du pass pour les plus de 65 ans et les plus fragiles pourrait être à terme soumise à l'injection d'une troisième dose de vaccin. "C'est une possibilité", selon le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal.
Alors que la France entre dans la saison froide, qui favorise les regroupements en intérieur et donc la circulation du virus, les spécialistes guettent les signes avant-coureurs d'un possible redémarrage de l'épidémie.
L'agence sanitaire Santé publique France relève ainsi "une baisse moins marquée des indicateurs épidémiologiques" la semaine du 4 octobre par rapport aux précédentes, même si "l'amélioration de la situation" se poursuit.