Procès du 13 Novembre, la parole aux «oubliés» du Stade de France

Ce croquis d'audience réalisé le 28 septembre 2021 montre un rescapé des attentats de Paris du 13 novembre 2015 alors qu'il témoignait lors du procès qui se déroulait dans une salle d'audience provisoire installée au Palais de Justice de Paris. (Photo, AFP)
Ce croquis d'audience réalisé le 28 septembre 2021 montre un rescapé des attentats de Paris du 13 novembre 2015 alors qu'il témoignait lors du procès qui se déroulait dans une salle d'audience provisoire installée au Palais de Justice de Paris. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 29 septembre 2021

Procès du 13 Novembre, la parole aux «oubliés» du Stade de France

  • Quelque 2200 personnes se sont constituées parties civiles à ce procès, qui juge, depuis le 8 septembre et pour environ neuf mois, vingt accusés
  • «Il faut que les victimes indirectes soient prises en compte», implore Pierre, retraité de la gendarmerie, qui demande comme ses ex-collègues que son nom ne soit pas divulgué

PARIS : "On se sent vraiment les oubliés": au procès des attentats du 13-Novembre, des victimes du Stade de France ont témoigné mardi de leur traumatisme persistant depuis l'explosion des "kamikazes" jihadistes et de leur sentiment d'avoir été "abandonnés". 

Droite à la barre, Sophie Dias, 39 ans, lit très émue les feuillets posés sur le pupitre: elle est "la fille de Manuel Dias, la seule victime décédée au Stade de France" le 13 novembre 2015, tué "par la ceinture explosive d'un kamikaze".

Chauffeur d'autocar portugais de 63 ans, Manuel Dias venait de déposer au stade des supporteurs venus de Reims pour assister au match France-Allemagne. Tué sur le coup par la déflagration, son décès ne sera confirmé à ses proches que le lendemain "vers midi". 

Face à la cour d'assises spéciale de Paris, elle rend hommage à ce "papa poule comme il en existe peu". Et évoque longuement son "parcours du combattant" pour faire reconnaître sa perte, sa "solitude" face au "manque d'empathie constant" des institutions. 

"On a besoin de se justifier de notre statut de victimes malgré nous, continuellement", déplore la trentenaire, cheveux longs sur une veste noire. En témoignant, elle dit vouloir "œuvrer pour qu'on n'oublie pas le Stade de France".

Le soir du 13-Novembre, le commando jihadiste piloté par le groupe Etat islamique (EI) a tué un total de 130 personnes: 1 devant le stade, 39 sur les terrasses parisiennes et 90 au Bataclan.    

«Peur de tout»

"On est les grands oubliés des attentats. +Ah bon il y a eu quelque chose là-bas ?+ Les gens ne savent pas et ils s'en fichent", abonde à sa suite Marylin, qui ne souhaite pas donner son patronyme. 

Ce vendredi soir-là, elle était à une vingtaine de mètres du premier "kamikaze" qui s'est fait exploser autour du Stade de France. Elle est brûlée au "2e et 3e degré sur les jambes".

"Blessée léger" des attentats, elle a gardé l'écrou qui lui a été retiré de la joue droite - elle l'a apporté à l'audience - et une "peur de tout", raconte-t-elle d'une voix douce, les yeux baissés sur ses mains enlacées, s'excusant d'avoir dit "tout dans le désordre".  

Mohamed, qui travaillait comme agent de sécurité à l'entrée du stade, a lui été touché par la deuxième explosion. "Tout mon flanc gauche a été détruit", commence-t-il à raconter au micro. 

Quelques minutes après, il s'en éloigne, submergé par l'émotion. Il quitte la salle d'audience d'un pas rapide, suivi par son avocate. 

"Désolé", lance-t-il au président Jean-Louis Périès quand il revient à la barre un peu plus tard, reprenant le fil de son récit d'un débit rapide, souriant quand le magistrat le prie de ralentir.

Il y a six ans, Walid était passé en courant derrière le deuxième kamikaze "pour arriver à l'heure" au match. Il est venu témoigner d'Egypte pour raconter ses "huit jours dans le coma", les multiples opérations subies - "j'ai perdu le compte" -.

«Une honte»

Son passeport avait été retrouvé à côté du corps d'un des jihadistes. "Les autorités ont eu un doute sur le fait que je sois une victime." Des accusés dans le box auxquels il ne jette pas un regard, il n'a que "la langue arabe en commun", lâche-t-il, "ils sont une honte".  

En début d'après-midi, la cour a ouvert cinq semaines d'audition de quelque 350 parties civiles avec celles de six gendarmes de la Garde républicaine, chargés d'assurer, à cheval, la sécurité autour du stade. 

"Aguerris aux situations de troubles", ils ont tour à tour confié le "choc" d'avoir vu des kamikazes se faire exploser - les premiers attentats-suicides jamais perpétrés en France - et évoqué leurs difficultés à faire eux aussi reconnaître leur statut de victime. 

"Il faut que les victimes indirectes soient prises en compte", implore Pierre, retraité de la gendarmerie, qui demande comme ses ex-collègues que son nom ne soit pas divulgué. Toujours "traumatisé", il "garde en (lui) l'explosion, le bruit, et l'odeur".

"Il y a un avant le 13, et un après le 13", insiste-t-il.  

Quelque 2 200 personnes se sont constituées parties civiles à ce procès, qui juge, depuis le 8 septembre et pour environ neuf mois, vingt accusés, dont le seul membre encore en vie des commandos Salah Abdeslam. 

L'audience reprend mercredi.


Le Liban réforme le secret bancaire, une mesure clé pour ses bailleurs

Cette photo prise le 20 mai 2020 montre une vue de l'entrée fortifiée de la Banque du Liban, la banque centrale du Liban, dans la capitale Beyrouth. (AFP)
Cette photo prise le 20 mai 2020 montre une vue de l'entrée fortifiée de la Banque du Liban, la banque centrale du Liban, dans la capitale Beyrouth. (AFP)
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  • Le Liban a accordé jeudi, par un vote au Parlement, un accès plus large des organismes de contrôle aux informations bancaires, une réforme clé réclamée dans ce pays
  • Le gouvernement a indiqué que la loi s'appliquerait de manière rétroactive sur 10 ans

BEYROUTH: Le Liban a accordé jeudi, par un vote au Parlement, un accès plus large des organismes de contrôle aux informations bancaires, une réforme clé réclamée dans ce pays, plongé dans une grave crise économique, par les bailleurs internationaux, dont le FMI.

Le gouvernement a indiqué que la loi s'appliquerait de manière rétroactive sur 10 ans, couvrant donc le début de la crise économique lorsque les banquiers ont été accusés d'aider des personnalités à transférer des fonds importants à l'étranger.

Le Premier ministre libanais, Nawaf Salam, a salué une "étape indispensable vers la réforme financière" que son gouvernement a promis de réaliser et un "pilier essentiel d'un plan de reconstruction".

Cette mesure, a-t-il ajouté, est "fondamentale pour restaurer les droits des déposants et la confiance des citoyens et de la communauté internationale". Il a mis en avant que l'opacité financière, prévalant de longue date au Liban, n'était plus aussi attractive pour les investisseurs qu'elle avait pu l'être.

"Il ne faut pas croire qu'avec cette loi, n'importe qui va entrer dans une banque et demander des détails sur un compte", a tempéré le ministre des Finances, Yassine Jaber, en déplacement à Washington avec son collègue de l'Economie, Amer Bisat, et le nouveau gouverneur de la Banque centrale, Karim Souaid.

Ces responsables doivent se rendre à la Banque mondiale et au Fonds monétaire international (FMI).

Le Liban a longtemps été une plaque-tournante financière régionale, dont la législation stricte sur le secret bancaire était perçue comme un atout, jusqu'à la profonde crise économique et financière qui a éclaté en 2019 et terni sa réputation.

Depuis, les autorités sont sous pression, interne et internationale, pour réformer une législation accusée d'avoir permis une fuite de capitaux au déclenchement de la crise, alors que les simples déposants étaient privés de leur épargne et que la valeur de la monnaie locale plongeait.

- Loi rétroactive sur dix ans -

Selon le groupe de défense des droits libanais Legal Agenda, les changements votés jeudi autorisent "les organes de contrôle et de régulation bancaire (...) à demander l'accès à toutes les informations sans raison particulière".

Ces organismes pourront avoir accès à des informations comme le nom des clients et les détails de leurs dépôts, et enquêter sur d'éventuelles activités suspectes, selon Legal Agenda.

La communauté internationale exige depuis longtemps d'importantes réformes pour débloquer des milliards de dollars et aider à la relance de l'économie libanaise, dont les maux sont imputés à la mauvaise gestion et à la corruption.

La récente guerre entre Israël et le mouvement libanais pro-iranien Hezbollah a aggravé la situation et le pays, à court d'argent, a besoin de fonds pour la reconstruction.

M. Salam a souligné que la réforme "ouvrait une page nouvelle" dans la lutte contre l'évasion fiscale, la corruption et le blanchiment.

Le ministre des Finances a relevé que la Banque centrale aura "plus de marge de manoeuvre" pour accéder à certains comptes.

Selon Alain Aoun, membre de la commission des finances du Parlement, une première réforme en 2022 avait été jugée insuffisante par le FMI. Les organismes de contrôle pourront désormais demander "l'information qu'ils veulent", a-t-il dit à l'AFP.

En avril 2022, le Liban et le FMI avaient conclu un accord sous conditions pour un prêt sur 46 mois de trois milliards de dollars, mais les réformes alors exigées n'ont pour la plupart pas été entreprises.

En février, le FMI s'est dit ouvert à un nouvel accord, et le nouveau gouvernement libanais a promis d'autres réformes. Il doit prochainement soumettre au Parlement un projet de loi pour restructurer le secteur bancaire.

Mercredi, le gouvernement a aussi signé un accord de 250 millions de dollars avec la Banque mondiale pour relancer son secteur électrique en déshérence, qui prive régulièrement les Libanais de courant.


Un influenceur franco-iranien jugé en juillet pour apologie du terrorisme

La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels. (AFP)
La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels. (AFP)
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  • La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels
  • Se présentant comme journaliste indépendant sur TikTok, où il est suivi par 330.000 abonnés, le mis en cause, qui s'est fait connaître avec une association d'aide aux plus démunis, y partage de nombreux contenus sur l'actualité du Moyen-Orient

BOBIGNY: Un influenceur franco-iranien sera jugé début juillet devant le tribunal de Bobigny (Seine-Saint-Denis) pour apologie du terrorisme, ont indiqué jeudi à l'AFP le parquet et ses avocats.

Shahin Hazamy, 29 ans, s'est vu "délivrer une convocation à une audience du 3 juillet pour apologie du terrorisme par un moyen de communication en ligne en public", a déclaré le parquet, confirmant son arrestation mardi révélée par le magazine Le Point.

La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels.

Se présentant comme journaliste indépendant sur TikTok, où il est suivi par 330.000 abonnés, le mis en cause, qui s'est fait connaître avec une association d'aide aux plus démunis, y partage de nombreux contenus sur l'actualité du Moyen-Orient.

"En s'en prenant à un journaliste la justice envoie un très mauvais signal à la liberté de la presse. Notre client Shahin Hazamy a subi un traitement inadmissible, avec une perquisition devant ses enfants en bas âge alors que les faits reprochés ont bientôt deux ans", ont déclaré à l'AFP ses avocats Nabil Boudi et Antoine Pastor.

Ces poursuites font suite à l'arrestation fin février d'une autre Iranienne en France, Mahdieh Esfandiari, actuellement écrouée pour apologie du terrorisme dans le cadre d'une information judiciaire confiée au Pôle national de lutte contre la haine en ligne (PNLH).

Annonçant cette nouvelle arrestation en France d'un de ses ressortissants, la télévision d'Etat iranienne a fustigé mercredi une "violation flagrante de la liberté d'expression dans un pays qui prétend être une démocratie".


Macron appelle à intégrer Mayotte dans la Commission de l'océan Indien

Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores. (AFP)
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  • "Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo
  • Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale

ANTANANARIVO: Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores.

"Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo.

La COI réunit les États insulaires (Madagascar, Comores, Maurice, Seychelles et La Réunion pour la France) dans le sud-ouest de l'océan Indien.

Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale.

"L'implication de nos populations, l'intégration de toutes nos îles dans les efforts de la COI pour la prospérité et la sécurité, dans la pluralité de ses dimensions maritime, alimentaire et pour la santé sont dans l'intérêt de nos peuples et de la région", a insisté M. Macron.

Il a suggéré toutefois d'"avancer de manière pragmatique vers cet objectif", sans réclamer l'intégration pleine et entière immédiate de l'archipel.

"La France est le premier bailleur de la COI", a-t-il aussi souligné, en précisant que l'Agence française du développement (AFD) gérait un "portefeuille de 125 millions d'euros de projets" de l'organisation.

"La COI est un modèle de coopération (...) Aucune de nos îles ne peut relever seule le défi", a-t-il ajouté, évoquant un "océan Indien profondément bousculé" par les défis planétaires actuels.

"Ensemble, en conjuguant nos atouts (..) nous pouvons tracer une voie nouvelle singulière", a-t-il assuré.

L'Union des Comores s'oppose à l'intégration de Mayotte dans la COI car elle conteste la souveraineté de la France sur Mayotte, restée française lorsque l'archipel des Comores est devenu indépendant en 1975.

Mayotte, tout comme les îles Éparses, autre territoire français hérité de la colonisation et revendiqué par Madagascar, sont au cœur du canal du Mozambique, voie majeure de transport maritime qui renferme d'importantes réserves en hydrocarbures.