PARIS: Le parquet général a requis mardi la réclusion criminelle à perpétuité au procès en appel devant la cour d'assises spéciale de Paris du jihadiste français et "criminel d'envergure" Tyler Vilus, cadre de l'EI en Syrie, condamné à 30 ans de prison en première instance.
À la fois combattant, chef d'escouade, prosélyte en ligne, recruteur et membre de la police du groupe État islamique, selon l'accusation, ce "jihadiste intégral" de 31 ans doit répondre de crimes commis entre 2013 et 2015 en Syrie.
Durant deux ans et demi, dans le chaos de la guerre en Syrie, "Vilus a œuvré avec zèle pour un État totalitaire fondé sur le règne de la terreur", a estimé l'avocate générale Naïma Rudloff.
Homme éloquent à l'imposant gabarit et aux cheveux tressés en petites nattes, la figure du microcosme des francophones de l'EI reconnaît son appartenance à l'organisation extrémiste mais nie les exactions en Syrie qui lui sont reprochées. Il avait été interpellé à l'aéroport d'Istanbul à l'été 2015 au moment où il revenait en Europe pour commettre un attentat.
"Je vous rappelle les dernières paroles de Tyler Vilus à Abaaoud [le coordinateur du 13-Novembre] : +Quand je sors, j'agis+. Je n'ai qu'un message à la cour: surtout de ne pas le laisser sortir ou le plus tard possible", a déclaré l'avocate générale à l'adresse de la cour.
Dans un réquisitoire d'une heure et demie, elle a dépeint le jihadiste en "criminel d'envergure" narcissique et rusé, animé par une attraction irrésistible pour la violence. Tout juste converti à l'islam en 2011, Tyler Vilus est parti faire son apprentissage du jihadisme dans la Tunisie post-révolution avant de se jeter dans le conflit syrien dès l'année suivante.
«Acculé»
Lors de son interrogatoire au procès en appel, Tyler Vilus a soutenu avoir désormais pris du "recul" sur son islam rigoriste de l'époque mais s'est efforcé de minimiser son rôle au sein de l'EI. "Il ne faut pas attendre de Tyler Vilus quelque collaboration que ce soit. Quand il parle, c'est quand on lui montre des preuves, quand il est acculé", a averti l'avocate générale.
Répliquant à ses dénégations, le parquet estime qu'il a bien fait partie de l'ultraviolente "brigade des immigrés" de l'EI, qui a perpétré des massacres dans la région d'Alep au début 2014. Dans cette unité figurent notamment plusieurs des futurs protagonistes des attentats du 13 novembre 2015 à Paris: le coordinateur Abdelhamid Abaaoud, les assaillants du Bataclan Samy Amimour et Ismaël Omar Mostefaï, ou l'artificier Najim Laachraoui.
"Il y a beaucoup de gens violents et cruels autour de Tyler Vilus, vous l'avez remarqué…", a relevé la représentante de l'accusation.
Selon elle, le jeune homme a aussi effectivement pris part, en tant que membre de la police de l'EI, à l'exécution publique de deux prisonniers au printemps 2015 à Shaddadi (est de la Syrie), mise à mort diffusée dans une vidéo de propagande du groupe jihadiste. "Le but n'est pas seulement de prononcer les sentences de mort, il faut les théâtraliser pour inspirer la terreur", a vilipendé Mme Rudloff.
En première instance, Tyler Vilus avait été déclaré coupable de tous les chefs mais la cour avait choisi de ne pas prononcer la réclusion criminelle à perpétuité pour lui laisser une "lueur d'espoir". Dans son jugement, elle avait estimé qu'il avait commencé à réfléchir en prison sur son fanatisme mortifère.
La défense prononce ses plaidoiries à la mi-journée et le verdict est attendu en fin de journée.