«The Crown» et «Ted Lasso» rafflent la mise aux Emmy Awards

Les gagnants du prix Outstanding Comedy Series pour «Ted Lasso», posent dans la salle de presse lors de la 73e Primetime Emmy Awards à L.A. LIVE le 19 septembre 2021 à Los Angeles, Californie. (Photo, AFP)
Les gagnants du prix Outstanding Comedy Series pour «Ted Lasso», posent dans la salle de presse lors de la 73e Primetime Emmy Awards à L.A. LIVE le 19 septembre 2021 à Los Angeles, Californie. (Photo, AFP)
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Publié le Lundi 20 septembre 2021

«The Crown» et «Ted Lasso» rafflent la mise aux Emmy Awards

  • «Je n'ai pas de mots, je suis très, très reconnaissant», a lancé le créateur de «The Crown», Peter Morgan
  • Depuis son lancement en 2007, Netflix a collectionné les nominations mais n'avait jamais remporté jusqu'à présent d'Emmy Award dans les catégories les plus prestigieuses

LOS ANGELES : La plateforme Netflix a obtenu dimanche la consécration qui lui échappait depuis tant d'années: sa production "The Crown", qui retrace de manière romancée la vie de la famille royale britannique, a décroché l'Emmy Award de la "meilleure série dramatique" et raflé tous les prix d'acteurs dans sa catégorie.

Côté comédie, c'est "Ted Lasso" qui remporte le titre, avec également des Emmy Awards, équivalent des Oscars de la télévision américaine, pour trois de ses acteurs.

Netflix réussit même un doublé pour cette 73e édition grâce au "Jeu de la Dame" qui a mis échec et mat ses concurrentes en remportant le trophée de la meilleure mini-série avec ce succès planétaire.

Depuis son lancement en 2007, la plateforme de vidéo à la demande a collectionné les nominations mais n'avait jamais remporté jusqu'à présent d'Emmy Award dans les catégories les plus prestigieuses.

Les stars du petit écran s'étaient réunies dimanche à Los Angeles pour la première fois depuis le début de la pandémie sur le plateau des Emmy Awards, avec une jauge réduite à 500 invités triés sur le volet et des mesures sanitaires très strictes.

Une grande partie de l'équipe de "The Crown" n'avait pas pu faire le déplacement et suivait la remise des prix depuis Londres via une liaison satellite. "Je n'ai pas de mots, je suis très, très reconnaissant", a lancé le créateur de "The Crown", Peter Morgan.

La quatrième saison de cette série très populaire dépeint le mariage houleux entre la princesse Diana et le prince Charles, incarné par le Britannique Josh O'Connor. "Tourner +The Crown+ a représenté les deux années de ma vie les plus gratifiantes", a lancé l'acteur, sacré dans la catégorie série dramatique.

Sa compatriote Olivia Colman, qui joue la reine Elizabeth, s'est quant à elle royalement imposée en tant que meilleure actrice, face notamment à sa camarade Emma Corrin, qui tenait le rôle de la princesse Diana.

La série a également été primée pour ses seconds rôles, dont Gillian Anderson (l'agent Scully de "X-Files") pour son interprétation de Margaret Thatcher, ainsi que pour le scénario et la réalisation.

Si l'on ajoute des récompenses dans des catégories techniques déjà décernées, la production Netflix a reçu au total onze Emmy Awards, à égalité avec "Le Jeu de la Dame" et à un trophée seulement du record établi par "Game of Thrones".

«The Mandalorian» vaincu 

Après un hommage en musique au rappeur Biz Markie, mort cet été, les premières récompenses de la soirée étaient allées à la comédie "Ted Lasso" d'Apple TV+, avec des Emmys pour des seconds rôles à Hannah Waddingham et Brett Goldstein.

Jason Sudeikis, qui incarne le personnage principal, avait obtenu un coup du chapeau un peu plus tard en devenant "meilleur acteur dans une comédie" pour cette série qui met en scène un entraîneur de football américain totalement perdu lorsqu'il passe aux commandes d'une équipe de ballon rond anglaise.

"Ted Lasso" s'est finalement imposé dans cette catégorie où elle faisait office de grand favori cette année.

La production Apple TV+ a toutefois concédé les Emmy Awards du scénario et de la réalisation, arrachés par la série HBO "Hacks", avec Jean Smart en diva de Las Vegas sur le retour, élue meilleure actrice dans cette catégorie.

Côté mini-séries, la victoire a échappé à Anya Taylor-Joy pour "Le Jeu de la dame", battue par la star Kate Winslet en policière désabusée pour "Mare of Easttown" (HBO).

"Je tiens à saluer mes collègues nominées car cette décennie doit être celle des femmes qui se serrent les coudes", a lancé Kate Winslet, remerciant les auteurs du show pour avoir créé "une mère d'âge mur, imparfaite et pleine de défauts... Très honnêtement, on se sent toutes reconnues", a-t-elle ajouté.

Julianne Nicholson et Evan Peters ont eux aussi été primés pour cette série HBO dans la catégorie des seconds rôles.

Outsider de la soirée Disney+, plateforme de streaming lancée voici deux ans par le numéro un mondial du divertissement, n'a pas réussi à faire de l'ombre à Netflix avec dans son catalogue les personnages à succès de l'univers de Star Wars et des super-héros Marvel.

Coqueluche du public américain à son arrivée sur les écrans, le "bébé Yoda" avait pourtant permis à la série "The Mandalorian" de faire jeu égal avec "The Crown" en tête des nominations (24 chacun).

Disney+ avait aussi un atout de poids dans la catégorie des mini-séries avec le très inventif "WandaVision", qui a emballé la critique mais n'a pas fait le poids face à "Mare of Easttown".

Emmy Awards: les vainqueurs dans les principales catégories

Voici la liste des vainqueurs dans les principales catégories pour la 73e édition des Emmys, remis dimanche soir à Los Angeles.

Netflix a triomphé en remportant son premier trophée dans une catégorie phare avec "The Crown" (meilleure série dramatique) et "Le Jeu de la dame" (meilleure mini-série). Au total, les deux productions ont obtenu onze Emmy Awards.

Côté comédie, c'est "Ted Lasso" qui s'est imposé pour Apple TV+, avec sept Emmy Awards.

 

Meilleure série dramatique

"The Crown" (Netflix)

Meilleure comédie

"Ted Lasso" (Apple TV+)

Meilleure mini-série

"Le jeu de la dame" (Netflix)

Meilleur acteur dans une série dramatique

Josh O'Connor, "The Crown" (Netflix)

Meilleure actrice dans une série dramatique

Olivia Colman, "The Crown" (Netflix)

Meilleur acteur dans une série, comédie

Jason Sudeikis, "Ted Lasso" (Apple TV+)

Meilleure actrice dans une série, comédie

Jean Smart, "Hacks" (HBO)

Meilleur acteur dans une mini-série ou téléfilm

Ewan McGregor, "Halston" (Netflix)

Meilleure actrice dans une mini-série ou téléfilm

Kate Winslet, "Mare of Easttown" (HBO)

Meilleur second rôle masculin dans une série dramatique

Tobias Menzies, "The Crown" (Netflix)

Meilleur second rôle féminin dans une série dramatique

Gillian Anderson, "The Crown" (Netflix)

Meilleur second rôle masculin dans une série, comédie

Brett Goldstein, "Ted Lasso" (Apple TV+)

Meilleur second rôle féminin dans une série, comédie

Hannah Waddingham, "Ted Lasso" (Apple TV+)

Emissions et séries avec le plus de récompenses

"The Crown" (Netflix) - 11

"Le Jeu de la dame" (Netflix) - 11

"Saturday Night Live" (NBC) - 8

"Ted Lasso" (Apple TV+) - 7

"The Mandalorian" (Disney+) - 7 


Céline Dion se confie sur sa maladie dans un rare entretien

La chanteuse canadienne Céline Dion remet le prix de l'album de l'année sur scène lors de la 66e cérémonie annuelle des Grammy Awards à la Crypto.com Arena de Los Angeles le 4 février 2024 (Photo, AFP).
La chanteuse canadienne Céline Dion remet le prix de l'album de l'année sur scène lors de la 66e cérémonie annuelle des Grammy Awards à la Crypto.com Arena de Los Angeles le 4 février 2024 (Photo, AFP).
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  • Interrogée sur sa capacité à remonter sur scène, Céline Dion a expliqué ne pas être en mesure de répondre à cette question
  • L'artiste aux plus de 250 millions d'albums vendus a aussi commenté, dans une interview vidéo, de nombreux moments marquants de ses 40 ans de carrière

MONTRÉAL: La chanteuse canadienne Céline Dion, toujours souffrante, s'est confiée sur sa maladie en accordant son premier entretien depuis l'annonce de son diagnostic, au magazine Vogue France dont elle fait la couverture qui sort mercredi.

Diagnostiquée à l'automne 2022 d'une pathologie neurologique rare, le syndrome de la personne raide (SPR), la mégastar québécoise de 56 ans a indiqué suivre cinq jours par semaine une "thérapie athlétique, physique et vocale" durant lesquels elle travaille à la fois le corps et la voix.

"Ça va bien, mais c'est beaucoup de travail. C'est un jour à la fois", a confié la chanteuse dans un long entretien.

"Je n'ai pas combattu la maladie, elle est toujours en moi et pour toujours. On va trouver, je l'espère bien, un miracle, un moyen de la guérir avec les recherches scientifiques, mais je dois apprendre à vivre avec", a déclaré la star.

Interrogée sur sa capacité à remonter sur scène, Céline Dion a expliqué ne pas être en mesure de répondre à cette question.

"Je ne sais pas... Mon corps me le dira", a-t-elle dit dans cet entretien qui s'accompagne de plusieurs photographies de la star habillée pour l'occasion par de grands créateurs français.

L'artiste aux plus de 250 millions d'albums vendus a aussi commenté, dans une interview vidéo, de nombreux moments marquants de ses 40 ans de carrière où on l'entend chanter à plusieurs reprises quelques secondes.

Apparition brève 

Céline Dion a fait une brève apparition surprise début février à la cérémonie des Grammy Awards à Los Angeles, aux Etats-Unis, pour remettre la récompense la plus prestigieuse de la soirée, l'album de l'année, à Taylor Swift.

La star québécoise n'est plus montée sur scène depuis un concert à Newark (États-Unis) en mars 2020. Sa tournée Courage World Tour avait alors été interrompue par la pandémie de Covid-19. Et depuis 2021, elle souffre des manifestations du SPR.

Touchant environ une personne sur un million, ce syndrome entraîne des douleurs aiguës et des difficultés à se mouvoir, empêchant les activités physiquement contraignantes.

Fin janvier, Amazon Prime Video a annoncé la sortie prochaine d'un documentaire sur la chanteuse, "I Am: Céline Dion", dans lequel elle veut "sensibiliser" sur sa maladie.


En Autriche, vente du siècle pour un tableau mystère de Klimt

Un visiteur prend en photo le tableau redécouvert d'une jeune femme « Portrait de Miss Lieser » du peintre autrichien Gustav Klimt, exposé à la maison de vente aux enchères im Kinsky à Vienne, en Autriche (Photo, AFP).
Un visiteur prend en photo le tableau redécouvert d'une jeune femme « Portrait de Miss Lieser » du peintre autrichien Gustav Klimt, exposé à la maison de vente aux enchères im Kinsky à Vienne, en Autriche (Photo, AFP).
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  • Qui est cette jeune Viennoise issue de la haute bourgeoisie fortunée
  • La seule photo du tableau connue à ce jour, probablement prise en 1925 dans le cadre d'une exposition, laisserait entendre qu'il appartenait à Lilly Lieser cette année-là

VIENNE: C'est la vente du siècle en Autriche : le "Portrait de Mademoiselle Lieser" de Gustav Klimt, estimé entre 30 et 50 millions d'euros, est mis aux enchères mercredi à Vienne, malgré les zones d'ombre entourant sa provenance.

L'événement est historique à plus d'un titre, "aucune œuvre comparable" n'ayant jamais été proposée dans le pays natal de l'artiste, selon Claudia Mörth-Gasser, responsable de la section d'art moderne de la maison "im Kinsky".

"Personne ne s'attendait à ce qu'un tableau de cette importance, qui avait disparu depuis cent ans, refasse surface", dit-elle, alors que le précédent record autrichien s'élève à "seulement" 7 millions d'euros pour une peinture flamande vendue en 2010.

Le prix pourrait monter très haut, au vu de la cote actuelle de Klimt dont une toile a été adjugée en juin 2023 à Londres 86 millions d'euros, du jamais vu en Europe.

Ce portrait ressuscité et non signé fait donc sensation. D'autant qu'il est très bien conservé et n'a jamais quitté l'Autriche.

Depuis qu'il a été dévoilé en janvier, on s'est bousculé pour l'admirer lors d'expositions précédant la vente en Suisse, en Allemagne, en Grande-Bretagne, à Hong Kong.

Et bien sûr à domicile dans un magnifique palais baroque au cœur de la capitale, entouré d'esquisses du maître et d'autres œuvres de contemporains comme Egon Schiele, figurant également à la vente qui doit débuter à 17H00 (15H00 GMT).

Helene, Annie ou Margarethe? 

La toile entamée en 1917 et restée inachevée représente une jeune femme brune aux traits précis, ornée d'une grande cape richement décorée de fleurs sur un fond rouge vif.

Le peintre est mort l'année suivante et un mystère, débattu avec fougue dans la presse spécialisée, entoure toujours l'identité du modèle.

Qui est cette jeune Viennoise issue de la haute bourgeoisie fortunée, qui s'est rendue neuf fois à l'atelier du génie adulé de son temps?

Une seule chose est sûre: elle est issue de la famille Lieser, grande dynastie industrielle juive, mécène de l'avant-garde artistique.

Mais est-ce l'une des deux filles prénommées Helene et Annie de Henriette (Lilly) Lieser, richissime divorcée pionnière dans l'émancipation des femmes?

Ou celle de son beau-frère Adolf, Margarethe, comme le clame un premier catalogue complet des œuvres de Klimt, réalisé dans les années 1960?

La seule photo du tableau connue à ce jour, probablement prise en 1925 dans le cadre d'une exposition, laisserait entendre qu'il appartenait à Lilly Lieser cette année-là.

Commerçant nazi 

Selon le quotidien Der Standard, qui se base sur des correspondances archivées dans un musée autrichien, elle aurait pu le confier à un membre de son personnel avant de mourir en déportation fin 1943.

Le tableau réapparaîtrait ensuite chez un commerçant nazi avant que sa fille, puis des parents éloignés en héritent à leur tour.

Mais pour la maison Kinsky, spécialisée dans les procédures de restitution, c'est une "hypothèse parmi d'autres".

Après-guerre, la toile n'a jamais été réclamée au contraire d'autres biens, par l'une des trois descendantes des Lieser qui avaient toutes survécu.

Tenue à la confidentialité, Claudia Mörth-Gasser explique à l'AFP que son employeur a été contacté il y a deux ans pour un avis juridique par ses propriétaires, qui tiennent à rester anonymes.

Im Kinsky en a informé les actuels ayants droit des deux branches Lieser, qui vivent notamment aux Etats-Unis. Certains ont fait le déplacement pour voir la toile, avant de signer un contrat avec les propriétaires, levant ainsi un obstacle à la vente du tableau.

Rien n'a filtré sur les termes de cet accord à l'amiable et des experts émettent des critiques sur une procédure jugée trop rapide, en dépit des incertitudes sur le destin d'une œuvre à la valeur immense.

"Sa provenance n'ayant pu être entièrement clarifiée jusqu'à présent", il aurait fallu prendre le temps d'un examen plus approfondi, estime ainsi dans l'hebdomadaire Profil Monika Mayer, responsable des archives au musée du Belvédère, qui abrite le fameux "Baiser" de Klimt.

D'ailleurs la toile n'a pas été présentée aux Etats-Unis, de peur qu'elle y soit confisquée par la justice en cas de litige, comme c'est la règle pour les œuvres soupçonnées d'être des spoliations.


A Paris, une adaptation théâtrale commémore le génocide rwandais

Un devoir "d'alerte": l'artiste rwandais Dorcy Rugamba et la troupe du Théâtre de la Ville commémorent à Paris le génocide des Tutsi d'il y a 30 ans au Rwanda en présentant les fruits d'un travail commun, mené à Kigali, de réadaptation d'une pièce du dramaturge français Vercors. (AFP).
Un devoir "d'alerte": l'artiste rwandais Dorcy Rugamba et la troupe du Théâtre de la Ville commémorent à Paris le génocide des Tutsi d'il y a 30 ans au Rwanda en présentant les fruits d'un travail commun, mené à Kigali, de réadaptation d'une pièce du dramaturge français Vercors. (AFP).
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  • Pendant plusieurs semaines dans la capitale rwandaise en 2023, les comédiens ont travaillé en ateliers sur "Zoo, ou l'Assassin philanthrope", une fiction écrite en 1963 par Vercors, l'auteur du "Silence de la mer"
  • Ce dernier, en inventant une nouvelle espèce, le "tropi", tente de définir la "limite zoologique entre l’homme et l’animal", selon ses termes

PARIS: Un devoir "d'alerte": l'artiste rwandais Dorcy Rugamba et la troupe du Théâtre de la Ville commémorent à Paris le génocide des Tutsi d'il y a 30 ans au Rwanda en présentant les fruits d'un travail commun, mené à Kigali, de réadaptation d'une pièce du dramaturge français Vercors.

Pendant plusieurs semaines dans la capitale rwandaise en 2023, les comédiens ont travaillé en ateliers sur "Zoo, ou l'Assassin philanthrope", une fiction écrite en 1963 par Vercors, l'auteur du "Silence de la mer" (1902-1991) qui s'inspire des atrocités commises lors de la Deuxième guerre mondiale.

Ce dernier, en inventant une nouvelle espèce, le "tropi", tente de définir la "limite zoologique entre l’homme et l’animal", selon ses termes. S'engage alors une bataille d'experts, entre scientifiques, philosophes et théologiens, intérêts économiques et questions éthiques.

"Notre souhait était de voir comment mettre cette pièce en résonance avec la question du génocide", déclare à l'AFP Dorcy Rugamba, 54 ans qui campe, dans cette adaptation un personnage inventé et au texte ajouté, celui d'une vigie représentant la mémoire de l'humanité.

Le 7 avril 1994, au premier jour du génocide contre la minorité tutsie au Rwanda orchestré par le régime extrémiste hutu au pouvoir (plus de 800.000 morts entre avril et juillet), ses parents et six de ses frères et sœurs sont massacrés dans leur maison à Kigali. Lui, alors étudiant, ne doit sa survie qu'au fait de s'être trouvé à Butare, la deuxième ville du pays.

Selon lui, ce génocide "n’a pas d’autre matrice que l’intériorisation par les indigènes eux-mêmes des morphotypes élaborés par les ethnologues, anthropologues et naturalistes allemands puis belges pour classer en trois catégories la population rwandaise".

Dans ses travaux précédents, l'artiste qui est aussi dramaturge, a abordé le sujet sous d'autres angles: celui de "la justice, au lendemain d'un tel crime", celui du "travail de deuil " ("Rwanda 94", 1999), celui de "la chronologie et de la généalogie" du génocide ("Bloody niggers!", 2007).

« Gigantisme de l'événement »

Le travail autour de Vercors se veut, lui, un point de départ pour pousser la réflexion sur "tous les crimes contre l'humanité". Avec ce devoir de donner un "savoir", pour "permettre aux populations d'être en alerte".

Après les ateliers à Kigali, il a paru "évident" à Emmanuel Demarcy-Mota, directeur du Théâtre de la Ville, "d'inviter et de donner la parole aux artistes rwandais" (deux autres interviennent dans la pièce), confie celui qui a revu sa mise en scène pour l'occasion (la pièce avait été montée en 2021 et 2022 dans d'autres cadres).

"Leur questionnement rejoint notre préoccupation, à savoir 'vers quoi allons-nous ?', depuis les drames passés du XXe siècle, vers d'autres drames qu'on a connus et qui perdurent", ajoute-t-il.

Le 5 mai, la pièce sera filmée et retransmise en direct à Kigali. Avant d'être jouée en novembre "si tout se passe bien", espère Dorcy Rugamba, responsable d'un centre d'art dans la capitale rwandaise.

Ce même jour, il fera aussi une lecture musicale de "Hewa Rwanda. Lettre aux absents" (paru en mars, éd. JC Lattès), un livre qui n'est "pas du tout fait pour raconter des horreurs". "Je ne suis pas le griot des tueurs", prévient-il.

Ce qui est en jeu, selon lui, c'est "le risque que les victimes disparaissent devant le gigantisme de l'événement et ne deviennent que des données numériques". Il s'agit donc de "réhabiliter leur existence"; "dire à mes enfants qui était leur grand-père, qui était leur grand-mère, quelle foi avaient-ils dans la vie ? Quelle est l'éducation qu'ils m'ont donnée ?", énumère l'artiste.

Et dans l'autre sens, "parler aux défunts, leur donner des nouvelles de ceux qui sont là, leur dire 'vous avez une descendance, nous allons bien'".