Attentat de Khobar: l’Iran, jugé responsable, doit payer 879 millions de dollars

Photo publiée par le ministère américain de la Défense montrant des militaires américains et saoudiens enquêtant sur les dommages causés aux tours Khobar, par l'explosion d'un camion-citerne à l'extérieur de la base aérienne du roi Abdul Aziz. (AFP)
Photo publiée par le ministère américain de la Défense montrant des militaires américains et saoudiens enquêtant sur les dommages causés aux tours Khobar, par l'explosion d'un camion-citerne à l'extérieur de la base aérienne du roi Abdul Aziz. (AFP)
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Publié le Samedi 11 juillet 2020

Attentat de Khobar: l’Iran, jugé responsable, doit payer 879 millions de dollars

  • Le tribunal a statué que le gouvernement iranien avait transporté et fourni du matériel pour l’attentat
  • Les tours de Khobar en Arabie Saoudite abritaient des forces américaines lorsqu’elles ont été bombardées en 1996

DJEDDAH: Un tribunal fédéral aux États-Unis a jugé l’Iran responsable du bombardement de 1996 des tours de Khobar, en Arabie Saoudite, dans lesquelles vivaient des forces américaines, et a ordonné à Téhéran de payer 879 millions de dollars aux survivants.

Les tours de Khobar étaient un complexe de logements dans la ville de Khobar, située à l’est, près de la base aérienne Abdulaziz et du siège social de Saudi Aramco à Dhahran. Elles abritaient des militaires américains travaillant sur l’opération Southern Watch.

Un camion piégé a explosé le 25 juin 1996, près d'un immeuble de huit étages du complexe de logements, tuant 19 membres des forces aériennes américaines et un Saoudien et blessant 498 autres.

Le tribunal a statué que le gouvernement iranien avait transporté et fourni un soutien matériel au Hezbollah qui avait fait sauter le camion piégé de 2268 kilogrammes, selon un communiqué de presse du cabinet d'avocats de Chicago. Les assaillants auraient fait passer clandestinement les explosifs utilisés lors de l'attentat depuis le Liban.

Khobar

Un analyste politique saoudien et spécialiste des relations internationales a déclaré que l'imposition d'amendes monétaires était insuffisant.

« On peut comprendre des sanctions pécuniaires dans le cas de l’avion civil qu’ils ont récemment abattu « de manière accidentelle ». Mais dans le cas de ces attentats terroristes, il devrait y avoir une réponse militaire », a déclaré le Dr. Hamdan Al-Shehri à Arab News. «Une réponse qui devrait être dissuasive. Une réponse qui devrait empêcher l'Iran de commettre de tels actes de terreur. L'Iran ne devrait pas être autorisé à s'en sortir en payant simplement quelques millions de dollars. »

Le Dr. Al-Shehri a dit que cette attaque n'était pas la seule à avoir été menée par l'Iran et ses milices. «Ils sont responsables de nombreux attentats à la bombe et assassinats. Nous savons comment ils ont assassiné l'ancien Premier ministre libanais Rafic Hariri. Ils doivent encore être punis pour ce crime odieux. »

Selon lui, il n'y avait aucun doute sur l'implication directe de l'Iran dans ce bombardement. «Il est bon de savoir que le tribunal américain a confirmé ce que nous savions depuis le début et que l’Iran soit finalement tenu pour responsable », a-t-il ajouté.

Le spécialiste de Harvard et expert en affaires iraniennes, Majid Rafizadeh, a pour sa part déclaré: «Ceci est une preuve supplémentaire que l'Iran est un important sponsor du terrorisme, une force déstabilisatrice, et est engagé dans le soutien financier, politique et militaire des milices et des groupes terroristes à travers le Moyen-Orient et en Occident, dans le but d'exporter ses idéaux extrémistes par la terreur, d'étendre son influence et de réaliser ses ambitions hégémoniques. »

Le procès a été intenté en vertu de l'exception terroriste du Foreign Sovereign Immunities Act des États-Unis par les 14 aviateurs américains blessés et les 21 membres de leur famille immédiate.

La défense de ce procès réunissait la République islamique d’Iran, le Corps des gardiens de la révolution islamique iranienne, ainsi que le ministère iranien du Renseignement et de la sécurité.

« Nous continuerons à chercher à tenir le gouvernement iranien pour responsable de ces attentats terroristes pour aussi longtemps qu’il le faudra », a déclaré l’avocate en chef de MM LAW S.A.L, Adora Sauer.

Le juge de district américain Beryl A. Howell a jugé la défense responsable et a accordé aux plaignants 132 millions de dollars pour douleur et souffrance, ainsi que des intérêts préjudiciels, pour une indemnité totale de 747 millions de dollars et 132 millions de dollars pour dommages-intérêts punitifs.

Le tribunal a également déclaré que les plaignants étaient éligibles à des paiements partiels du Fonds américain pour les victimes du terrorisme d’Etat. Ce Fonds indemnise les victimes américaines d'actes de terrorisme international, avec des fonds provenant d'amendes et de confiscations perçues contre des entreprises arrêtées illégalement pour blanchiment d'argent, pour le compte de pays et de personnes sanctionnés.

Les avocats ont également l'intention de poursuivre l'exécution des jugements par le biais de litiges destinés à saisir les actifs iraniens.

« Les répercussions physiques et psychologiques sur nos familles ont été très dures, mais ce jugement est une bonne nouvelle. Plus de 20 ans plus tard, nous voulons que le monde se souvienne du mal que l’Iran a commis aux tours de Khobar. Grâce au travail de nos avocats, nous avons l’intention de faire exactement cela », a affirmé Glenn Christie, un membre des forces aériennes aujourd’hui à la retraite, et qui a été gravement blessé lors de l'attentat.

D’après John Urquhart du cabinet d’avocats Urquhart, qui défend les victimes du bombardement, « cette explosion a énormément affecté leurs corps et leurs esprits le jour de l’attentat, et a continué à les affecter depuis, de jour comme de nuit. Ils pourront désormais vivre grâce à la balance fournie par la justice ».

Ce texte est la traduction d'un article paru sur ArabNews.com

victimes


Le ministre irakien des Affaires étrangères en visite officielle aux États-Unis

 Le ministre irakien des affaires étrangères, Fuad Hussein. (File/AFP)
Le ministre irakien des affaires étrangères, Fuad Hussein. (File/AFP)
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  • La visite s'inscrit dans le cadre de l'engagement diplomatique continu entre les deux pays dans un contexte d'évolution de la dynamique régionale
  • "Nous discuterons des moyens de renforcer la sécurité commune et la coopération dans divers domaines", a déclaré le ministre des affaires étrangères.

DUBAI : Le ministre irakien des Affaires étrangères, Fuad Hussein, s'est envolé jeudi pour les Etats-Unis afin de participer à une série de réunions bilatérales visant à renforcer les liens entre Bagdad et Washington.

Dans une déclaration partagée sur la plateforme X et rapportée par l'Agence de presse irakienne, M. Hussein a déclaré que la visite se concentrera sur le renforcement des relations irako-américaines et la coordination des efforts sur les questions régionales et internationales clés.

"Nous discuterons des moyens de renforcer la sécurité commune et la coopération dans divers domaines", a déclaré le ministre des affaires étrangères.

Cette visite s'inscrit dans le cadre d'un engagement diplomatique continu entre les deux pays, dans un contexte d'évolution de la dynamique régionale.


Gaza: 22 morts dans des bombardements israéliens, selon secouristes et hôpitaux

L'hôpital indonésien à Jabalia dit avoir reçu les corps de neuf victimes après un bombardement israélien sur un commissariat de police de cette ville du nord du territoire palestinien. (AFP)
L'hôpital indonésien à Jabalia dit avoir reçu les corps de neuf victimes après un bombardement israélien sur un commissariat de police de cette ville du nord du territoire palestinien. (AFP)
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  • L'armée israélienne a confirmé dans un communiqué avoir effectué une frappe dans la région de Jabalia, précisant qu'elle ciblait "des terroristes opérant dans un centre de commandement et de contrôle du Hamas et du Jihad islamique"
  • Une autre frappe aérienne sur une maison dans le nord de la ville de Gaza, dans le nord du territoire palestinien, a tué une famille de six personnes, un couple et ses quatre enfants, a indiqué la Défense civile à Gaza

GAZA: Au moins 22 personnes, dont six membres d'une même famille, ont été tuées dans de nouveaux bombardements israéliens sur la bande de Gaza jeudi matin, ont annoncé la Défense civile palestinienne et des sources hospitalières.

L'hôpital indonésien à Jabalia dit avoir reçu les corps de neuf victimes après un bombardement israélien sur un commissariat de police de cette ville du nord du territoire palestinien.

L'armée israélienne a confirmé dans un communiqué avoir effectué une frappe dans la région de Jabalia, précisant qu'elle ciblait "des terroristes opérant dans un centre de commandement et de contrôle du Hamas et du Jihad islamique".

Une autre frappe aérienne sur une maison dans le nord de la ville de Gaza, dans le nord du territoire palestinien, a tué une famille de six personnes, un couple et ses quatre enfants, a indiqué la Défense civile à Gaza.

Cette organisation de secouristes a aussi fait état de deux morts dans une frappe sur une tente de personnes déplacées à Khan Younès, dans le sud.

Toujours à Khan Younès, l'hôpital Nasser annonce avoir reçu les dépouilles de deux victimes après une frappe sur une maison familiale. L'hôpital des martyrs d'al-Aqsa dit, lui, avoir reçu trois corps après une frappe sur une tente de personnes déplacées dans le camp de Nuseirat (centre).

Rompant une trêve de près de deux mois dans la guerre déclenchée il y a plus d'un an et demi, Israël a repris le 18 mars son offensive aérienne puis terrestre dans la bande de Gaza, où au moins 1.928 Palestiniens ont été tués depuis selon le ministère de la Santé du Hamas.

Ce bilan porte à 51.305 le nombre de morts dans la bande de Gaza, selon la même source, depuis le début de l'offensive israélienne lancée en représailles à l'attaque du Hamas en Israël le 7 octobre 2023.

L'attaque sans précédent du Hamas a entraîné la mort de 1.218 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

Sur les 251 personnes enlevées le 7-Octobre, 58 sont toujours otages à Gaza dont 34 sont mortes, selon l'armée israélienne.

 


1982 – Le massacre de Sabra et Chatila

Les corps des victimes du massacre de Sabra et Shatila sont transportés par le personnel de la Croix-Rouge pour être enterrés à Beyrouth. (Getty Images)
Les corps des victimes du massacre de Sabra et Shatila sont transportés par le personnel de la Croix-Rouge pour être enterrés à Beyrouth. (Getty Images)
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  • Le massacre, qui s'est déroulé au plus fort de la guerre civile libanaise, et les raisons qui l'ont motivé mettent en lumière les dimensions régionales complexes qui ont entouré le conflit
  • Arab News a publié des images saisissantes du massacre, qualifié de crime commis «avec la connivence des envahisseurs israéliens»

LONDRES: Le massacre de Sabra et Chatila, survenu en 1982, reste l’un des épisodes les plus tragiques et emblématiques de l’histoire politique mouvementée du Liban.

Des membres d’une milice chrétienne libanaise de droite ont pénétré dans le quartier de Sabra, au sud de Beyrouth, ainsi que dans le camp de réfugiés palestiniens de Chatila, tout proche. Ils y ont massacré des centaines de personnes. Certaines estimations font état de plus de 3 000 victimes, majoritairement des civils palestiniens et des Libanais musulmans.

Au moment où les atrocités ont eu lieu, le quartier, où résidaient de nombreux dirigeants palestiniens, ainsi que le camp, étaient sous le contrôle des forces d'occupation israéliennes à la suite de leur invasion du Liban-Sud trois mois plus tôt.

Selon certaines sources, les meurtres de masse ont été commis au vu et au su des forces israéliennes, de 18 heures environ le 16 septembre à 8 heures du matin le 18 septembre. Certains ont même affirmé que les milices chrétiennes avaient reçu l'ordre des Israéliens de «chasser» les combattants de l'Organisation de libération de la Palestine de Sabra et Chatila, dans le cadre de l'avancée israélienne dans la partie ouest de Beyrouth, majoritairement musulmane. Des rapports ultérieurs ont suggéré que les Israéliens avaient reçu des rapports sur les atrocités, mais qu'ils n'avaient pris aucune mesure pour les prévenir ou les arrêter.

Le massacre, qui s'est déroulé au plus fort de la guerre civile libanaise, et les raisons qui l'ont motivé mettent en lumière les dimensions régionales complexes qui ont entouré le conflit.

Comment nous l'avons écrit

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Arab News a publié des images saisissantes du massacre, qualifié de crime commis «avec la connivence des envahisseurs israéliens», provoquant une onde de choc et des réactions d’horreur à travers le monde.

Au Liban, le sectarisme a presque toujours été un facteur central des conflits qui ont façonné les équilibres politiques et redessiné les cartes du pouvoir. Bien avant la chute de l’Empire ottoman à la fin de la Première Guerre mondiale, dont le territoire libanais faisait alors partie, la région du Mont-Liban avait déjà été le théâtre de violences confessionnelles. Ces tensions ont débuté en 1840 et ont atteint leur paroxysme en 1860, avec des massacres d'une telle ampleur qu'ils ont entraîné une intervention militaire française. L’Empire ottoman avait alors réagi avec fermeté, cherchant à contenir l’avancée française, dans un contexte de pressions diplomatiques exercées par les grandes puissances européennes.

Le bouleversement politique majeur consécutif aux massacres de 1860 fut la création, en 1861, du district autonome du Mont-Liban, gouverné par un fonctionnaire ottoman chrétien dont la nomination devait être validée par les puissances européennes.

Mais après la défaite de l’Empire ottoman à l’issue de la Première Guerre mondiale, la Conférence de paix de Paris en 1920 annexa plusieurs régions au Mont-Liban – notamment Beyrouth – et plaça le nouvel État élargi du Liban sous mandat français.

Dans ce Grand Liban, la population chrétienne, auparavant majoritaire dans la région montagneuse du Mont-Liban, vit son poids démographique réduit par l’intégration de grandes villes et districts à majorité sunnite et chiite. Néanmoins, les chrétiens comptaient sur le soutien du mandat français pour préserver leur domination politique. Une illusion qui s’estompa rapidement, surtout après l’indépendance du Liban en 1943.

À cette date, selon de nombreuses estimations, les musulmans – sunnites, chiites et druzes – formaient déjà une majorité démographique. Parallèlement, l’émergence du nationalisme arabe, alimenté par la Nakba palestinienne de 1948, radicalisa la scène politique régionale. L’afflux de réfugiés palestiniens au Liban, comme en Jordanie, accentua les tensions et contribua à fragiliser davantage l’équilibre confessionnel libanais.

Le processus de radicalisation a été encore accéléré par la défaite arabe lors de la guerre israélo-arabe de juin 1967, qui a donné naissance, ainsi qu'une énorme crédibilité, au mouvement de résistance palestinien (les «fedayins»).

À l'automne 1970, à la suite de batailles entre les fedayins et l'armée jordanienne, les mouvements de résistance palestiniens ont transféré leur quartier général d'Amman à Beyrouth.

Les musulmans libanais, les nationalistes arabes et les dirigeants de gauche se rangent aux côtés des Palestiniens et font cause commune avec eux. De l'autre côté, l'élite politique chrétienne et les masses chrétiennes au Liban craignaient que cette alliance naissante ne constitue une menace mortelle pour leur position dominante dans le pays et, par conséquent, pour son régime, son identité et sa souveraineté.

J'ai vécu cette époque et je m'en souviens très bien. En 1973, l'armée libanaise, dirigée par les chrétiens, a tenté de contenir le pouvoir des fedayins dans les camps de réfugiés, mais le tollé soulevé par la gauche musulmane contre les actions de l'armée a ouvert la voie à une guerre civile imminente. Très vite, les milices chrétiennes ont été ouvertement armées et entraînées par des officiers de l'armée, tandis que les milices gauchistes et arabisantes ont également obtenu des armes et un entraînement par l'intermédiaire des Palestiniens et de certains régimes arabes.

La guerre a éclaté en 1975 et s'est poursuivie, en plusieurs phases, jusqu'en 1990. L'invasion israélienne de juin 1982 avait pour but d'achever l'infrastructure militaire et politique palestinienne et d'établir un régime «ami» à Beyrouth. Israël a tenté d'y parvenir en utilisant sa puissance militaire pour forcer les mouvements de résistance palestiniens à quitter le Liban, puis en confiant la présidence libanaise à Bachir Gemayel, chef des Forces libanaises, la milice chrétienne la plus puissante, en août 1982.

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Des familles pleurent les victimes du massacre dans le quartier de Sabra à Beyrouth et dans le camp de réfugiés adjacent de Chatila, où vivent des milliers de réfugiés palestiniens. (Images Getty) 

Cependant, Gemayel a été assassiné le 14 septembre 1982, avant même d'avoir pu prêter serment. Son assassinat, dans une explosion massive à Beyrouth, a choqué les chrétiens et rendu furieuses leurs milices, qui ont riposté en attaquant Sabra et Chatila deux jours plus tard.

À cette époque, le monde arabe est affaibli et profondément divisé à la suite de la reconnaissance d'Israël par l'Égypte dans les accords de Camp David de 1979, qui a entraîné la suspension de l'adhésion du pays à la Ligue arabe.

Les Israéliens ont donc pu participer au massacre de Sabra et Chatila sans craindre d'importantes représailles de la part des Arabes. En fait, c'est le tollé général suscité par ce massacre qui a conduit à la création d'une commission d'enquête présidée par Sean MacBride, assistant du secrétaire général des Nations unies et président de l'Assemblée générale des Nations unies à l'époque.

Le rapport de la commission, publié en 1983, concluait qu'Israël, en tant que puissance occupante, portait la responsabilité des violences et que le massacre constituait une forme de génocide.

La réaction de choc au massacre a été forte même en Israël, où les autorités ont créé leur propre commission Kahan pour enquêter sur l'incident. Son rapport, également publié en 1983, conclut que, bien que consciente de l'existence d'un massacre, l'armée israélienne n'a pris aucune mesure sérieuse pour y mettre un terme.

La commission a déclaré qu'Israël était indirectement responsable «d'avoir ignoré le danger d'effusion de sang et de vengeance» et que le ministre de la Défense, Ariel Sharon, en portait personnellement la responsabilité, ce qui l'a contraint à démissionner.

Eyad Abu Shakra est le rédacteur en chef d'Asharq Al-Awsat.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com